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Travailler pour conserver à la langue française sa pureté et ses grâces naturelles, c'est concourir plus qu'on ne pense au grand œuvre de la civilisation européenne. Les attraits invincibles de notre langue précèdent et accompagnent toujours les triomphes de nos armées, et les destinées de cet idiome se lient à celles de ce vaste empire.

Je demande la mention honorable au procèsverbal et le dépôt à la bibliothèque.

M. le Chevalier Brancadori. Messieurs, combien de fois n'a-t-on pas reconnun que sans le concours fortuit des occasion, il est bien des hommes extraordinaires que l'on n'aurait point vu figurer sur la scène du monde; bien des prodiges honorables pour l'humanité qui ne se seraient point opérés; bien des découvertes utiles qui n'auraient point été faites, et d'importants travaux qui n'auraient jamais été entrepris.

Le livre de M. le docteur Barzelloti, dont j'ai l'honneur de vous faire hommage, Messieurs, me semble fournir une nouvelle preuve de cette vérité.

Il est certain qu'il doit le jour à une occasion toute particulière. L'intérêt le plus général de l'humanité le recommande. Les talents et les connaissances de l'auteur paraissent garantir le mérite de son travail. De pareils titres sont suffisants pour me rassurer lorsque je viens, au nom de l'auteur, vous prier d'agréer cet acte de respect.

J'aurai l'honneur de vous entretenir un instant de l'objet et de l'esprit de l'ouvrage. Pendant l'autonine de 1804, une maladie contagieuse attaqua les habitants de la ville de Livourne, en Toscane. L'observance rigoureuse des anciens règlements, au moyen desquels on avait toujours réussi à arrêter la propagation de semblables maladies, produisit encore les mêmes effets. En très-peu de temps l'infection disparut jamais il n'y eut un si petit nombre de victimes.

Mais la craint qui s'était emparée des esprits dans les provinces environnantes fit aux Toscans un nial bien plus réel. On les regarda tous comme des pestiférés: les pays mème éloignés du siége momentané de la maladie furent déclarés suspects; tout commerce avec eux fut interdit: par suite de mesures adoptées par les Etats limitrophes, la Toscane parut isolée du reste du monde.

Nous ne disconviendrons pas qu'il n'y ait des moments où des dispositions aussi rigoureuses ne sont rien moins que superflues. Cependant les excès sont toujours des excès; et s'il existe un moyen de rassurer ceux qui habitent un cercle éloigné d'un centre de contagion, sans nuire à ceux qui, étant très-sains eux-mêmes, s'en trouvent malheureusement placés plus près, ce moyen doit être embrasse. Il s'agit donc de le reconnaître. M. Barzelloti, pénétré des inconvénients très graves que des mesures outrées de police ont causés à sa patrie en cette circonstance, à consacré ses veilles à la recherche délicate des moyens capables de prévenir de tels inconvénients.

Son ouvrage est intitulé: Police de santé, pour éviter et détruire les maladies contagieuses, con

server la vie, la santé et les intérêts des peuples et des nations.

L'auteur pense que, pour parvenir d'une manière constante et sûre à préserver des maladies contagieuses, même les plus meurtrières (telles que la peste et la fièvre jaune), les lieux éloignés du foyer de ces maladies, et pour y réussir sans compromettre ni la tranquillité publique, ni les intérêts particuliers, il serait essentiel qu'on s'occupât de la rédaction d'un code sanitaire universel. Les lois, dit-il, et les règlements qu'on publie au moment où la menace du mal éclate, portent ordinairement le caractère d'une crainte démesurée. Le calme de la raison n'y préside point, et l'inquiétude, qui donne du corps aux ombres, fait trop souvent adopter des moyens de rigueur non nécessaires et très-nuisibles au repos des citoyens, à l'exercice de leur commerce, à l'entretien de leurs rapports. L'ouvrage dont je vous parle, Messieurs, est composé dans le dessein de présenter les bases d'une législation sanitaire universelle.

Garantir les hommes du danger des maladies contagieuses est, sans contredit, le premier des soins de tout gouvernement éclairé car il faut assurer leur existence avant que de penser à la leur rendre heureuse.

Mettre l'exécution de ce devoir d'accord avec le respect qui est dû à la liberté des relations sociales; trouver le point où les deux principes peuvent se concilier, c'est ce que notre auteur a regardé comme possible et susceptible de démonstration.

Son ouvrage est basé sur les connaissances les plus étendues de jurisprudence et de médecine théoriques et pratiques. Les premiers corps savants, c'est-à-dire les instituts de France et d'Italie, auquels il est dédié, l'ont favorablement reçu. Les académies et les journaux de médecine des deux nations en ont rendu le compte le plus avantageux.

C'est de l'une des contrées les plus éloignées du centre de l'empire que cet ouvrage sollicite l'honneur de vous être présenté.

Accoutumés à encourager les personnes qui cultivent les sciences, les lettres et les arts, j'espère, Messieurs, que vous accueillerez favorablement l'offrande de mon compatriote, qui vous prie, par mon organe, d'ordonner que son ouvrage aura place dans votre bibliothèque, et que mention de l'hommage sera faite au procès-verbal.

M. Pardessus, député de Loir-et-Cher. Messieurs et chers collègues, M. Demiau-Crouzilhac, ancien avocat au parlement de Toulouse, l'un des petits-fils de Furgole, vous prie d'agréer un exemplaire de son ouvrage intitulé: Eléments du droit et de la pratique.

La multiplicité des écrits qui paraissent sur les nouvelles lois n'effraye point les auteurs; elle ne doit point aussi être une cause de défiance pour ceux qui ont besoin de s'instruire. Un jurisconsulte éloquent semble avoir voulu encourager les uns et rassurer les autres en disant : « Que si l'on peat pardonner l'intempérance de commenter, de discuter, d'écrire, c'est en jurisprudence (1) ». Cette réflexion semble plus particulièrement applicable à la procédure, trop souvent tournée en ridicule par ceux qui n'en ont jamais envisagé ni compris le but et la marche.

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La législation la plus parfaite ne serait qu'une vaine théorie s'il n'existait pas des moyens d'obtenir par force ce qu'un adversaire ignorant, en

(1) M. Portalis. Disc. prélim. sur le projet de Code.

têté ou de mauvaise foi, s'obstine à refuser. Cependant, comme il est contraire à une bonne organisation sociale qu'un citoyen puisse se faire justice à lui-même, il faut qu'il la demande à ceux que le prince a investi du pouvoir de la rendre en son nom. Mais le magistrat ne peut condamner celui qu'il n'a pas entendu, ou qui, du moins, n'a pas été mis à même de se faire entendre.

Si cette idée simple a nécessité plus de deux mille articles de lois, il ne faut s'en prendre qu'à la malice humaine. Le législateur a dû prévoir tout ce que les détours de la chicane pourraient suggérer; et plus ces détours pouvaient être nombreux, plus les formes ont dù ètre mu!tipliées et les précautions en quelque sorte minutieuses. Il n'est pas nécessaire sans doute qu'un procès offre tous les incidents que le Code a prévus; mais puisque ces incidents pouvaient se présenter, il a fallu empêcher que la mauvaise foi ne profitât du silence de la loi pour étouffer la vérité.

L'auteur de l'ouvrage dont j'offre un exemplaire au Corps législatif, descend d'un jurisconsulte célèbre par de nombreux et d'utiles travaux; son zèle pour la jurisprudence prouve qu'il n'a point dégénéré. L'expérience, qui seule peut montrer qu'il a atteint le but d'utilité qu'il s'est proposé, attribuera aussi à son travail le degré de considération qu'il mérite.

Il ne fera point oublier, sans doute, un traité plus étendu sur toutes les parties de la procédure, dont l'auteur (1) avait acquis une juste célébrité avant la réformation de nos lois, et qui, depuis cette vaste entreprise, a été juge digne de préparer le Code de procédure et le plus capable de l'enseigner. Il existe entre l'un et l'autre la même différence qu'entre la méthode analytique et celle de la synthèse. Mais M. Demiau-Crouzillac aunonce lui-même que son plan a été moins vaste; dans un travail, moulé, en quelque sorte, sur les formes de la loi, et qui ne s'écarte point de l'ordre adopté dans le texte, il n'a voulu que guider les commençants et soulager la mémoire de ceux qui auront appris.

L'honneur que vous lui ferez d'accepter son hommage, sera sa première récompense.

Les propositions de MM. Modeste Paroletti, Brancadori et Pardessus sont adoptées.

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi concernant les hospices, présenté le 16 de ce mois par les comtes de Ségur, Begouen et le baron de Gérando, conseillers d'Etat.

Les orateurs du gouvernement chargés de soutenir la discussion sont introduits.

M. le Président. M. Herwyn a la parole.

M. Herwyn, au nom de la commission législative d'administration intérieure. Messieurs, vous avez envoyé à votre commission de l'intérieur un projet de loi tendant à autoriser les hospices et bureaux de bienfaisance de plusieurs communes, les uns à faire des acquisitions et des aliénations. les autres des concessions et des échanges.

MM. les orateurs du conseil d'Etat ont développé avec autant de précision que de clarté le bien qui doit en résulter pour ces établissements de clia

rité.

C'est ainsi, Messieurs, que les paroles consolantes et pleines de bonté de l'EMPEREUR se réalisent constamment : «Que SA MAJESTÉ ne peut être heureuse sans le bonheur des Français. » La sollicitude paternelle de notre auguste souverain s'é

(2) M. Pigeau, professeur de Code de procédure civile à la faculte de droit de Paris.

tend sur toutes les parties de l'administration de son vaste empire, et embrasse toutes les classes deses peuples.

Votre commission de l'intérieur, Messieurs, a mûrement examiné ce projet de loi qui comprend six titres et quatre-vingt-seize articles. Elle a reconnu que toutes les pièces à l'appui de ces demandes sont conformes aux lois et arrêtés; que toutes les autorités locales ont concouru au même but, au bien-être qui doit en résulter pour leurs administrés, et que si les établissements de bienfaisance gagnent en général dans ces transactions, comme cela est à désirer, l'intérêt des citoyens qui traitent avec eux a été pris aussi en considération, et qu'enfin la solidité de ces arrangements repose sur la stricte observation des formes conservatrices qui les ont préparés.

Votre commission de l'intérieur, Messieurs, vous propose de convertir en loi ce projet. La discussion est fermée.

Le Corps législatif délibère sur le projet, et le convertit en loi par 268 voix contre trois. On procède à un nouveau scrutin pour terminer le renouvellement du bureau.

M. Casenave est élu vice-président.

MM. Duhamel, Calvet-Madaillaa et Kersmaker sont désignés pour les fonctions de secrétaires. En conséquence, M. le président proclame MM. Lajard (de l'Hérault), Vigneron, Galleani-Dagliano, Casenave, vice-présidents,

Et MM. Salvage, Duhamel, Calvet-Madaillan, Kersmaker, secrétaires du Corps législatif.

Ou donne communication d'une lettre de S. Exc. le ministre secrétaire d'Etat, conçue en ces termes : Saint-Cloud, le 19 juillet 1811.

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PRÉSIDENCE DE S. EXC. LE COMTE DE MONTESQUIOU-FEZENSAC.

Séance du 24 juillet 1811.

MM. Salvage, Duhamel, de Calvet-Madaillan et de Kersmaker, nouveaux secrétaires, prennent place au bureau.

Le procès-verbal de la séance d'hier est adopté. M. le Président. Plusieurs membres demandent à présenter des hommages.

M. Sproni Messieurs, les efforts réunis des savants pour l'établissement d'un nouveau système métrique vous sont depuis longtemps connus. Vous n'ignorez pas les avantages qui résulteront de l'adoption universelle de ce système né et perfectionné en France. J'ai l'honneur de vous annoncer qu'il vient d'être établi à Rome, par les soins de la commission nommée à cet effet, en vous présentant le tableau des opérations qui en ont assuré le succès.

Nous devons cet ouvrage au zèle et aux talents de M. Scarpellini, votre collègue, professeur de chimie et secrétaire de la commission (1). Il est précédé par un rapport général qu'il a lui-même

(1) Stabilimento del nuovo sistema metrico.

présenté à l'Académie des sciences, qui lui doit en quelque sorte son établissement.

Dans ce rapport, après l'exposition générale des principes et des fondements du nouveau système métrique, et des grandes opérations exécutées par la commission française, on y expose toutes les expériences instituées pour établir le rapport entre les unités élémentaires nouvellement adoptées et celles qui ont été en vigueur jusqu'à présent dans les Etats romains.

Vous serez frappés, Messieurs, des expériences répétées par M. Scarpellini, avec la plus scrupuleuse exactitude, par le moyen d'une balance qu'il a imaginée, dont il a donné la description, et qui a remporté un des prix annuels décernés par le Capitole.

Vous y verrez, Messieurs, les résultats de ces expériences, ainsi que la nomenclature des nouvelles mesures, et leurs rapports avec les anciennes de la France et de Rome. Vous y trouverez aussi quatre tableaux comparatifs de toutes les mesures romaines avec les anciennes usitées en France et celles adoptées par le nouveau système.

Enfin, pour rendre cet ouvrage d'une utilité plus générale, on y trouve de nombreuses tables de réduction des mesures anciennes et nouvelles, des poids et monnaies, enrichies d'observations et d'exemples.

Je crois que cet ouvrage, qui renferme tous les travaux de la commission romaine, mérite d'être accueilli favorablement. Je vous prie, par conséquent, Messieurs, au nom de son auteur, d'en agréer l'hommage, d'en ordonner la mention au procès-verbal et le dépôt dans votre bibliothèque.

M. lechevalier Silvestre de Sacy. Messieurs, c'est une vérité reconnue aujourd'hui de tous les bons esprits, que l'étude comparée des langues est véritablement l'étude de l'esprit humain, de ses diverses facultés, de ses diverses opérations. En prenant pour guide, dans cette partie si intéressante et si difficile de la métaphysique, le langage, ce tableau vivant et animé où l'intelligence humaine se réfléchit, pour ainsi dire, et se peint elle-même, comme l'auteur de l'univers s'est peint dans les œuvres de sa toute-puissance, on ne risque plus de s'égarer en suivant des illusions et des fantômes créés par l'esprit de système et les caprices de l'imagination. C'est principalement la grammaire générale, fondement de toute véritable logique, qu'on a considérée jusqu'ici, sous ce point de vue philosophique, comme l'instrument d'une bonne analyse de nos facultés intellectuelles. On ne saurait cependant refuser le même avantage à l'étude comparée des dictionnaires, de ces répertoires où sont déposés tous les matériaux qui, mis en œuvre par une main habile, agissent aussi puissamment et plus immédiatement sur le coeur de l'homme que les ressorts de l'harmonie ou la magie des arts d'imitation. C'est là qu'on peut étudier par quelle sorte d'assimilation, l'homme, placé sous des climats opposés, pourvu d'organes diversement modifiés, parlant des idiomes entre lesquels on aperçoit à peine quelque point de contact, a cependant le plus souvent appliqué aux mêmes objets intellectuels, aux mêmes opérations de l'esprit, les mots destinés d'abord à exprimer les mêmes objets matériels, les mêmes opérations des sens. Et si, dans certains cas, on remarque uue diversité dans le procédé, si l'objet intellectuel a été assimilé à des objets sensibles de natures diverses, on reconnait en cela la fécondité de l'esprit humain, qui, saisissant entre les objets une multitude de rapports, s'est déterminé ici pour l'un de

ces rapports, là pour un autre. Ainsi, l'action de l'esprit qui reçoit une connaissance qui lui est transmise, soit par les sens, soit par le discours, sera exprimée diversement par l'idée du cercle qui comprend, de l'œil qui reçoit une impression à travers un milieu, du toucher qui est affecté d'une sensation, de la main qui atteint et saisit un objet.

Ces tableaux, déposés dans le langage de tous les peuples, et dont nous recevons sans cesse l'impression sans y faire attention, les nations qui, au lieu de l'écriture proprement dite, transmettent leurs pensées par des caractères hieroglyphiques, ou, pour mieux dire, qui, à la peinture des yeux, substituent celle des idées; ces nations, dis-je, ont l'avantage de les mettre sous les yeux. Toutes les expressions du langage qui ne présentent aux autres hommes que le sens figuré indépendamment de la figure qui leur sert de base, sont pour ces nations autant de tableaux où le sens figuré est tranmis à l'esprit avec la figure. La pensée se communique à l'intelligence par le sens le plus propre à lui conserver toute sa vie et ses couleurs; elle produit une impression plus vraie, plus vive, plus durable; enfin il est pour ces nations une éloquence de l'écriture distincte de l'éloquence du langage, les mots de la langue parlée pouvant être d'un style très-simple, tandis que les caractères qui les expriment offriront une peinture aussi riche qu'énergique.

Get avantage, Messieurs, appartient aujourd'hui exclusivement aux nations les plus orientales de l'Asie; et n'envisagerait-on l'étude de la langue et de l'écriture chinoises que sous ce point de vue, elle offrirait un intérêt digne de fixer l'attention du philosophe. C'est principalement cette considération qui m'a engagé à vous offrir, au nom de M. Abel Rémusat, un Essai sur la langue et la littérature chinoises. En applaudissant à ce premier fruit d'une étude aussi pénible qu'elle est rare aujourd'hui parmi nous, en accueillant avec bonté l'hommage que je vous offre, vous ajouterez, Messieurs, un puissant encouragement à celui que l'auteur a déjà reçu du petit nombre d'hommes en Europe qui ont acquis le droit d'avoir une opinion en cette matière; vous contribuerez en même temps à multiplier en France les amateurs d'un genre de littérature pour lequel cet empire a plus fait jusqu'ici que tous les autres Etats de l'Europe, qui a illustré les noms des Gambil, des Fourmont, des de Guigne, des Amyot, et que S. M. L'EMPEREUR, à qui n'échappe rien de ce qui est utile, a daigné favoriser en ordonnant la publication d'un Dictionnaire chinois.

Le Corps législatif agrée les hommages de MM. le chevalier Silvestre de Sacy et Sproni.

L'ordre du jour appelle la discussion du deuxième projet de loi d'intérêt local, présenté le 17 par MM. les conseillers d'Etat comte Regnaud de SaintJean-d'Angély, Dubois et Begouen.

La parole est à la commission législative d'administration intérieure.

M. Gendebien, au nom de cette commission. Messieurs, votre commission d'administration intérieure m'a chargé de vous proposer de revêtir de votre assentiment le deuxième projet de loi relatif à des acquisitions, aliénations, échanges et impositions concernant un grand nombre de communes rurales.

Il serait superflu de développer des motifs pour concilier, à ce projet, la faveur de vos suffrages. Il suffira de dire qu'il est semblable en tout au premier projet qui a été discuté et que vous avez adopté presque à l'unanimité.

CORPS LÉGISLATIF.

PRÉSIDENCE DE S. EXC. LE COMTE DE MONTESQUIOU-FEZENSAC.

En lisant le projet qui vous est soumis en ce moment, vous pouvez avoir remarqué, Messieurs, que son titre cinquième présente une somme de 112,731 francs à imposer sur soixante-dix communes, pour des objets d'un intérêt purement local et communal, notamment pour des constructions et réparations d'églises et presbytères, de temples, de maisons d'écoles de clôtures de cimetières; aussi pour des restaurations de ponts, de fontaines et d'abreuvoirs. Ces derniers objets sont de peu d'importance et en petit nombre.

Un collègue nous a fait à cet égard une observation que nous avons cru pouvoir vous présenter.

Les impositions que le projet propose d'accorder aux communes auront lieu sur les contributions foncière, mobilière et personnelle au centime le franc.

La contribution foncière seule est beaucoup plus considérable dans les communes rurales que les deux autres réunies. Il résulte de là que les propriétaires étrangers, qui possèdent ordinairement la majeure partie du territoire de la commune, supportent une forte portion d'une dépense à laquelle il semblerait qu'ils ne doivent pas contribuer.

Déjà vous avez prévenu, Messieurs, la réponse que l'on peut faire à cette objection s'il s'agissait principalement d'augmenter le revenu d'une commune par des achats de rentes constituées, ou de propriétés territoriales, l'équité ne permettrait pas d'appeler les étrangers à contribuer par des centimes ajoutés à leurs contributions foncières; mais lorsqu'il est question des écoles, du culte, des sépultures, d'un pont, d'une fontaine publique, ou d'autres objets semblables, nécessaires à l'existence, à la commodité et à la prospérité d'une commune, il est juste que toutes les propriétés indistinctement soient imposées pour faire face à la dépense; la raison en est sensible: c'est, en effet, à l'établissement des communes rurales qu'on est redevable du défrichement et de la mise en culture des campagnes d'alentour, et la valeur réelle, ainsi que le produit de ces biens, sont toujours subordonnés à l'état de prospérité ou de décadence des communes.

Le culte, si généreusement favorisé par les dispositions du titre cinquième du projet, loin d'être étranger à cette prospérité, y influe, au contraire, d'une manière directe. La religion chrétienne est, tout à la fois, la source et la garantie des bonnes mœurs, et de ces vertus domestiques qui multiplient les familles, y font régner l'ordre, la paix et l'aisance. La religion, à bien prendre les choses, est la première et presque la seule magistrature qui agit immédiatement sur la classe laborieuse et la tient dans le devoir.

L'instruction influe aussi efficacement sur la conduite des habitants des campagnes. Elle les rend plus dociles à la voix de la raison, et plus fidèles observateurs de toutes les lois protectrices des propriétés.

Au surplus, Messieurs, vous avez toujours rendu hommage à ce principe d'administration intérieure, qu'il suffit, dans la répartition de l'impôt, d'approcher, autant qu'il est possible, de l'équité et de l'égalité proportionnelle.

Nous avons l'honneur de vous proposer, Messieurs, de sanctionner le deuxième projet d'intérêt local et communal.

Le Corps législatif ferme la discussion et délibère sur le projet, qui est converti en loi par 268 voix contre 6.

La séance est levée.

Séance du 25 juillet 18|1.

Le procès-verbal de la séance d'hier est adopté. M. le Président. Messieurs, la députation que yous aviez chargée de porter au roi de Rome les hommages du Corps législatif, s'est rendue ce matin à Saint-Cloud; aucun de nous n'a pu voir sans un vif intérêt cet enfant auguste sur lequel reposent tant de destinées, et dont l'àge inspire les sentiments les plus tendres. Nous lui avons, Messieurs, porté tous les vôtres, en y mélant les Voeux que l'amour de nos enfants peut nous inspirer. Madame la gouvernante les à reçus et nous en a remerciés au nom du jeune prince, en regrettant sans doute de ne pouvoir joindre ses sentiments personnels à ceux qu'elle exprimait au Corps législatif.

Après cette communication, accueillie avec intérêt, on introduit MM. les conseillers d'Etat comtes Ségur, Corvetto, Neri-Corsini et de la Malle.

L'ordre du jour appelle la discussion du troisième projet de loi d'intérêt local présenté dans la séance du 18.

M. Gendebien, au nom de la commission législative d'administration intérieure. Messieurs, vous avez sanctionné hier le deuxième projet d'intérêt local et communal; votre commission d'administration intérieure vous propose d'adopter également le troisième projet, qui contient des dispositions de la même nature et du même intérêt.

Le titre III de ce projet renferme deux cent une concessions à rente de portions de biens communaux. Vous ne pouvez qu'accueillir favorablement, Messieurs, ces actes d'une administration sage et prévoyante qui, sans rien précipiter, livre successivement à la propriété individuelle et à la culture les terrainsvagues et incultes des com

munes.

Par là, ces vains et stériles pâturages auxquels les habitants des campagnes sont attachés par habitude et par préjugé, disparaitront imperceptiblement. Le revenu des communes rurales s'accroîtra de la masse de toutes ces rentes réunies. L'agriculture s'améliorera. Le bétail, qui fait les labours et procure les engrais, croitra en nombre et en qualité, et ces améliorations diverses contribueront à la richesse et à la prospérité de l'Etat. La discussion est fermée.

Le Corps législatif délibère sur le projet, qui est converti en loi par 331 voix contre 3.

M. le comte de Ségur. Messieurs, S. M. L'EM PEREUR ET RO nous a chargés de vous apporter le décret qui termine cette session.

Nous vous avons présenté cette année pea de projets de lois. Après la confection du Code Napoléon, des Code de procédure, de commerce el du Code criminel, lorsque tout est organisé dans l'empire, il est naturel que le travail de l'administration augmente et que celui de la législation diminue.

La même activité qui, en si peu d'années, fit renaître la France, fonda le plus puissant et le plus vaste empire, releva les autels, ressuscita la justice, dota les communes, r'ouvrit les hospices, perça la France de routes et de canaux, applanit les montagnes, organisa l'instruction pu blique, et donna aux Français ces sages lois que les autres peuples s'empressent à l'envi d'adopter; la même activité, dis-je, doit à présent donner le mouvement à toutes ces créations, faire marcher

tous ces établissements, perfectionner l'édifice social dont les bases sont posées.

Toutes les sources de richesse et de prospérité sont ouvertes: la création est finie; la vie com

mence.

Ainsi, le petit nombre de lois qu'on vous offre aujourd'hui, prouve combien celles qui existent sont sages et déjà suffisantes; mais si cette session, Messieurs, n'a pas été marquée par l'adoption de lois importantes, elle n'en sera pas moins une époque mémorable pour vous.

Avant de l'ouvrir, l'EMPEREUR a voulu que vous fussiez réunis près de son trône; il a voulu être environné par vous, lorsqu'il est venu dans le temple rendre grâces à l'Eternel de la naissance de cet enfant-roi, qui a rempli nos vœux et réalisé nos espérances.

Vous avez été témoins de cette pompeuse cérémonie la sainteté du lieu, la majesté du trône, la réunion des princes, des grands, des premiers corps de l'empire, des députés des villes; l'offrande d'un enfant faite à Dieu, par la gloire et la vertu réunis; l'émotion des assistants; et ces acclamations d'un peuple immense qui se sont répétées le même jour sur toute la surface de ce vaste empire; ce noble et touchant tableau est trop gravé dans votre souvenir, pour que j'entreprenne de vous le retracer.

Si je voulais parler de ce sentiment universel qui excitait l'allégresse publique, je ne ferais que répéter vos propres paroles; j'exprimerais, comme tous les Français, la joie que nous cause une naissance qui garantit la solidité de nos destinées, la durée de notre gloire, et qui fait le bonheur de notre auguste souverain et de son épouse chérie.

Au milieu des fêtes qu'on donnait pour célébrer ce grand événement, l'EMPEREUR est venu dans cette enceinte; il vous a développé les motifs de haute politique qui l'ont déterminé à reculer nos frontières et à réunir de nouvelles provinces à l'empire.

SA MAJESTÉ Vous a peint notre situation florissante, la fidélité de ses alliés, la gloire de ses armées, l'état prospère de ses finances.

Enfin, en vous annonçant qu'elle avait ordonné à son ministre de mettre sous vos yeux les comptes de 1809 et de 1810, SA MAJESTÉ vous a dit que bien qu'elle ait été obligée de mettre à la disposition de ses ministres un crédit extraordinaire de 100 millions, elle ne demandait aucune imposition nouvelle.

C'est ainsi que, depuis plusieurs années de guerre, de conquêtes et de créations, notre souverain termine ses discours; tandis que le gouvernement, qui veut lutter contre lui, demande chaque annéé au peuple anglais de nouveaux emprunts, de nouveaux impôts et de nouveaux sacrifices.

Peu de jours après cette mémorable séance, votre députation est venue déposer au pied du trône l'hommage de votre dévouement, de votre amour; et par l'organe d'un président qui jouit de la bienveillance de notre monarque et de votre confiance méritée, vous avez fait entendre l'expression noble et simple des principes qui vous dirigent et des sentiments qui vous animent : dans cette audience, vous avez recueilli de nouveaux témoignages de l'affection paternelle de SA MAJESTÉ.

Les formes solennelles de l'ouverture de vos sessions étant remplies, vous avez entendu le ministre de l'intérieur qui vous a fait, dans le plus grand détail, l'exposé de la situation de l'empire.

Seize départements ont été réunis à la France et ont produit un accroissement en population de cinq millions, et de 100 millions en revenu. Les

communications ouvertes entre l'Escaut et la Baltique, entre le nord et le midi de l'Italie, rendront nos approvisionnements maritimes indépendants des escadres de nos ennemis.

Le ministre vous a parlé des progrès de l'Université; de l'organisation des cours impériales, qui va rendre à la justice sa force et sa dignité; de la mise en activité des dépôts de mendicité dans trente-deux départements; de la création de grands séminaires; del'acquisition ou de la réparation d'une multitude d'églises et de presbyières; des succès de l'industrie, qui nous dédom mage, par les découvertes du génie, des privations que la guerre entraîne.

Il vous a fait connaître ces travaux immenses entrepris pour construire des ponts, creuser des canaux, dessécher des marais, opposer des digues aux flots, agrandir les établissements publics, embellir nos cités. Ces travaux ont coûté près de 300 millions; ils égalent ainsi en deux années les efforts qu'on faisait autrefois en un siècle.

Vous n'avez pas vu sans surprise, sur tous les points de nos côtes et de nos frontières, ces fortilications qu'élève ou répare la prudence au milieu des triomphes.

L'activité qui règne dans tous les ports, les ouvrages entrepris à Anvers, à Flessingue, à Cherbourg, à Terneuse, à Ostende, ces armements qui préparent pour l'avenir des succès à notre marine et de nouvelles destinées à l'Océan, et l'état prospère du trésor public, lorsqu'il doit pourvoir tant de dépenses: tel est le tableau qui vous a été tracé.

Heureux le règne où le récit des faits tient licu d'éloges!

Après la présentation qui vous a été faite, Messieurs, de deux projets pour créer de nouvelles sous-préfectures, et d'un grand nombre de transactions qui intéressent les communes et les hospices, vous avez adopté le projet de loi sur les finances.

La satisfaction que vous a fait éprouver son examen est trop récente pour que je croie devoir vous en rappeler les détails.

L'orateur de votre commission des finances a dit, sur cette importante loi, tout ce qu'on pouvait ajouter aux motifs développés par les orateurs du conseil d'Etat.

Il a fait sentir les avantages de l'ordre établi, d'après lequel cinq ou six mois suffisent pour vérifier et arrêter les comptes de tant de diverses régies.

Il a remarqué l'amélioration qui s'est faite dans la marche du recouvrement des contributions; la modicité des frais de poursuites ne lui a pas échappé.

Il a parcouru avec une égale sagacité les différentes causes de l'accroissement des revenus de l'Etat, qui s'élèvent aujourd'hui à 954 millions, et les motifs des augmentations de dépenses dé divers départements.

Nous avons acquis trois cents lieues de côtes et dix mille matelots de semblables acquisitions commandent un surcroît de dépenses, mais elles en donnent en même temps les moyens.

L'économie apportée dans plusieurs branches d'administration, l'augmentation du produit des douanes, les mesures prises relativement au tabac, qui, sans peser sur le peuple, feront jouir l'Etat du bénéfice que faisaient exclusivement quelques compagnies, et fourniront les moyens de parvenir à diminuer l'impôt foncier : tout donne une pleine certitude de voir constamment nos ressources supérieures à nos charges.

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