Page images
PDF
EPUB

dication de la contenance, mais non à raison de tant la mesure, il est évident que les parties n'ont pas attaché d'importance à la parfaite exactitude de la déclaration de contenauce. Dans ce cas, et par argument de l'article 1619, nous déciderons qu'il n'y aura lieu à augmentation ou diminution de fermage que si la différence entre la contenance déclarée et la contenance réelle produit, eu égard au prix total, une différence de valeur égale au moins au vingtième de ce prix. Observons que le calcul du vingtième ne se fait plus ici d'après la mesure de la contenance en plus ou en moins, mais d'après la valeur locative de cet excédent ou déficit de contenance, comparée au prix total du fermage. Ici encore, en cas d'excédent d'un vingtième ou plus, le fermier pourra obtenir la résiliation; mais il ne pourra l'obtenir en cas de déficit, quel qu'il soit, qu'en prouvant que le fonds est devenu impropre à l'usage auquel il le destinait.

De même que dans la vente (art. 1622), l'action en augmentation ou diminution de prix, ou en résiliation du contrat, doit être, sous peine de déchéance, intentéc dans l'année, à partir du jour de ce contrat. Naturellement, toutes les fois que le fermier use de la faculté de faire résilier le bail, il peut exiger la restitution des frais, et même, en cas de faute ou de négligence du bailleur, réclamer des dommages-intérêts.

Toutes ces règles peuvent être modifiées par la convention aussi, pour éviter toutes difficultés, les bailleurs afferment ordinairement sans garantie de contenance. Et la clause que l'on rencontre le plus souvent est celle-ci : « Sans que le bailleur soit tenu de fournir exactement la contenance sus-indiquée, la différence

en plus ou en moins, quand même elle excèderait le vingtième, devant faire le profit ou la perte du pre

neur ».

Le bailleur doit en outre faire la délivrance à l'époque fixée par la convention, ou, à défaut, par l'usage des lieux. Lorsque à l'époque convenue, le bailleur s'est trouvé empêché de faire la délivrance par suite d'événements de force majeure ou de cas fortuits, tels que guerre, invasion, inondation, le preneur peut obtenir la résiliation du contrat ; mais il faut qu'il prouve qu'à l'époque où l'obstacle à la délivrance a disparu, il ne peut plus être utilement mis en jouissance de la ferme. Si c'est simplement par son fait ou par sa faute que le bailleur n'exécute pas son obligation, le fermier, après une sommation de délivrer restée infructueuse, aura le choix ou de se faire mettre en possession par autorité de justice ou de faire résoudre le contrat; et dans les deux cas il pourra demander des dommages-intérêts (arg. art. 1610, 1611).

Ces dommages-intérêts comprendront la perte qui résulte directement pour le fermier de l'inexécution du contrat et en outre le gain qu'il aurait pu faire si la convention avait été fidèlement exécutée. Ainsi le fermier, obligé de quitter l'ancienne ferme et ne pouvant s'installer dans celle qu'on lui a promise, est obligé de louer des bâtiments pour loger sa famille et son attirail, de vendre ses bestiaux à vil prix, parce qu'il n'a pas, pour les nourrir, les fourrages sur lesquels il comptait: autant de pertes dont il sera tenu compte à ce fermier dans le calcul des dommages-intérêts qui comprendront en outre le gain que lui aurait vraisemblablement procuré l'exploitation (art. 1149,

1150) (1). Enfin, s'il y avait eu dol de la part du bailleur, les dommages-intérêts comprendraient même les pertes et les gains extraordinaires qu'on ne pouvait prévoir au moment du contrat, à la condition que tout le préjudice soit une suite immédiate et directe de l'inexécution de la convention (art. 1151).

Comme dernière conséquence de son obligation de délivrer, le bailleur doit lever tous les obstacles que des tiers opposeraient, même par de simples voies de fait, à l'entrée en jouissance du fermier : l'article 1725, que nous étudierons plus bas, ne s'applique, en effet, qu'aux voies de fait qui pourraient être exercées postérieurement à l'entrée en jouissance. C'est le bailleur, notamment, qui doit forcer le fermier sortant à céder la place à son successeur (2). On voit que l'obligation de délivrer est plus étendue en matière de bail qu'en matière de vente,

1. Lyon, 30 juillet 1881, Dalloz, 82, 2, 232. 2. Cass. 16 mars 1853. Sirey, 53, 1, 361.

CHAPITRE II

OBLIGATION D'entretenir.

La deuxième obligation du bailleur est celle d'entretenir, pendant toute la durée du bail, le fonds en état de servir à l'usage pour lequel il a été affermé (art. 1719, 2°).

Cette seconde obligation n'est pas de l'essence du contrat, elle est seulement de sa nature, et les parties peuvent la modifier ou même la supprimer par la convention.

L'obligation d'entretenir entraîne pour le bailleur celle de faire exécuter sur le fonds les réparations qui pourraient devenir nécessaires au cours du bail. Mais, tandis qu'en vertu de l'obligation de délivrer, le bailleur doit remettre le fonds en bon état de réparations de toute espèce (art. 1720, 1er al.), l'obligation d'entretenir ne met à sa charge que les réparations, autres que les locatives, dont le besoin se fera sentir pendant la jouissance du fermier (art. 1720, 2° al.). Les réparations locatives sont considérées, pendant la durée du bail, comme une charge de la jouissance et sont à la charge du fermier. Il faut donc distinguer entre les réparations locatives et celles qui n'ont pas ce caractère. Les réparations locatives sont déterminées par l'usage des lieux, et l'article 1754 en donne des exemples pour les bâtiments son

énumération n'a d'ailleurs rien de limitatif. Du reste, les parties prennent souvent, dans les baux, le soin d'indiquer les réparations dont le caractère pourrait être douteux, mais qu'elles entendent considérer comme locatives et mettre à la charge du fermier.

Les réparations qui ne sont pas locatives sont à la charge du bailleur. On pourrait, en s'appuyant sur les articles 605 et 606, les diviser en grosses réparations et en réparations de gros entretien ; mais cette distinction n'a aucun intérêt dans le cas qui nous occupe. Dans quelle mesure le bailleur est-il tenu de faire les réparations, dans quelle mesure sont-elles nécessaires au point de vue du fermier? On peut dire avec Pothier (Louage, no 106) que le bailleur doit faire aux bâtiments toutes les réparations nécessaires pour tenir le fermier clos et couvert, et pour que ses bestiaux et ses grains soient en sûreté. Il faut ajouter les réparations aux digues et aqueducs destinés à garantir les terres de l'inondation. Le bailleur doit encore faire procéder à ses frais à tous les travaux ordonnés sur le fonds par l'autorité dans un intérêt de sécurité générale (1).

Si, pendant la durée du bail, des réparations à la charge du bailleur deviennent nécessaires, le fermier peut, en présence du refus du bailleur, obtenir de justice, soit une décision contraignant celui-ci à les exécuter immédiatement, soit l'autorisation d'y faire procéder par des ouvriers de son choix et d'en retenir le prix lors du paiement de son fermage.

Nous venons de voir que le fermier a le droit d'exiger ces réparations. Mais il peut se faire qu'il redoute la

1. Trib. de la Seine, 30 avril 1884 - La Loi du 2 mai 1884.

« PreviousContinue »