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titut peut être fait à terme. Cette solution n'a jamais été contestée, l'opération étant avantageuse au débiteur. A l'inverse, l'obligation principale étant à terme, on fait un constitut pur et simple ? Nous verrons que, dans ce cas, on accordait au débiteur un délai de dix jours. Cela posé, si l'échéance de l'obligation principale arrive avant la fin du délai de dix jours, il est évident qu'il n'y a pas durior causa. Mais si cette échéance doit arriver après le délai de dix jours, le constitut crée au débiteur une situation moins favorable, il y a durior causa; de même, d'une manière générale, si le terme du constitut est plus rapproché que celui de la première obligation. Nous voyons cependant les textes décider que, dans ces circonstances, le constitut sera valable; mais la question parait avoir fait doute. Nous avons vu dans la loi 3 § 2 (page 49), que Labéon avait tranché affirmativement la question. La loi 4 est encore plus précise: sed et si citeriore die constituat, similiter tenetur. « Sion fait un constitut pour un terme plus rapproché, on est tenu également. » Cette décision s'applique au constitutum debiti alieni aussi bien qu'au constitutum debiti propri. En matière de fidejussio, au contraire, la promesse de payer citeriore die constituerait une durior causa quirendrait la fidėjussion nulle pour le tout.

Labéon paraît avoir été amené à la solution qu'il donne par des considérations d'utilité pratique. On a essayé de donner de cette exception à la règle qui prohibe la durior causa une explication juridique, fondée sur la tendance qu'on avait à assimiler le constitut à un paiement. Puisqu'il était permis de payer avant le terme, quand celui-ci n'avait pas été établi dans l'intérêt du créancier, on devait être porté à décider que le cons

titut pouvait être fait pour un terme plus rapproché, puisque, en somme, ce n'est qu'une promesse de payer

avant le terme.

Quant à la condition, elle ne peut guère former une durior causa dans le constitut. Il est évident d'abord que, l'obligation première étant pure et simple, on peut faire un constitut sous condition. C'est ce que dit la loi 19, § 1 : « Si celui qui doit purement et simplement fait un constitut sous condition, Pomponius dit qu'on « pourra exercer utilement l'action contre lui. » Nous avons vu, en étudiant la cause du constitut, que si, à l'inverse, l'obligation primitive étant sous condition, on fait un constitut pur et simple, on avait fini par admettre que la validité du pacte serait subordonnée à l'arrivée de la condition.

Supposons maintenant que la modalité insérée soit l'alternativité. L'obligation primitive porte sur deux objets au choix; le constitut aussi. Le choix appartenait soit au créancier, soit au débiteur, et dans le constitut, on l'a déféré à l'autre partie. Si le choix, qui appartenait d'abord au créancier, a été donné par le pacte au débiteur, il est évident qu'il n'y aura pas durior causa, mais bien plutôt levior causa; le constitut est parfaitement valable. Si, au contraire, le choix, qui dans la première obligation appartenait au débiteur, est déféré dans le constitut au créancier, il semble bien qu'il y ait durior causa pour le débiteur ainsi privé de sa faculté d'option. La question n'est pas tranchée par les textes, mais je crois que le constitut sera cependant valable. Le débiteur peut exercer quand il veut sa faculté d'option: en faisant le pacte de constitut, il a renoncé à cette option ou plutôt il l'a exercée

d'avance, ce qui lui est parfaitement permis. Et en somme, quel que soit l'objet qu'il paie à la suite du constitut, le débiteur ne pourra pas soutenir qu'il avait constitué plus que pecuniam debitam, puisque chacun des deux objets était dû en vertu de l'obligation primitive.

Quant aux autres modalités, comme par exemple l'indication d'un lieu, elles ne formeront jamais une durior causa. La faculté de changer le lieu du paiement était précisément une des causes qui rendaient le constitut très utile, de même que la possibilité d'avancer le terme. Nous avons même vu que le mot constituereéveillait l'idée de l'indication d'un lieu. La loi 16 § 1 suppose cette indication d'un lieu : « On peut par cons<«<titut promettre de payer à un moment et à un en« droit déterminés; et on peut réclamer le paiement, <« non seulement au lieu fixé par le constitut, mais en<«< core, à l'imitation d'une action arbitraire, on peut le « le réclamer en tous lieux. » L'action arbitraire à laquelle notre texte fait allusion est sans doute l'action. de eo quod certo loco, dans laquelle le juge devait tenir compte de l'intérêt que l'une ou l'autre partie pouvait avoir à ce que le paiement fût fait dans le lieu fixé par le contrat.

Dans ces conditions, il est évident que l'indication d'un lieu ne pouvait empirer la situation du constituant et que, par conséquent, elle ne formait pas une causa durior.

CHAPITRE IV

DES MODALITÉS DONT LE CONSTITUT EST SUSCEPTIBLE

Nous venons d'étudier les modalités du constitut dans leurs rapports avec l'objet de l'obligation primitive. Nous allons maintenant, faisant abstraction de cet objet, nous demander de quelles modalités on peut affecter le constitut considéré en luimême.

D'après la définition même du constitut, ce pacte comporte un terme. M. Révillout nous apprend qu'à Babylone, on trouve presque toujours le constitut à terme fixe, et bien rarement le constitut sans terme. Du reste, une des principales utilités pratiques du constitut était de permettre de changer l'échéance d'une dette, soit en l'avançant, soit en la reculant, et chez tous les peuples qui le pratiquaient, le constitut devait comporter un terme. Il est même probable que chez les Romains le terme dut être à l'origine de l'essence même du constitut. Cette exigence résulte implicitement du mot constituit qui figure dans l'édit et qui éveille l'idée d'un jour fixé pour le paiement. Si le préteur n'a pas, dans son édit, autrement insisté sur cette condition, c'est qu'il ne concevait guère qu'on pût faire un constitut sans terme, ayant toujours rencontré cette modalité dans le constitut que pratiquaient les autres nations.

C'est aussi ce qui explique que le jurisconsulte Paul, dans la loi 21 § 1, hésite à regarder comme valable un constitut fait sans terme et que finalement il soit obligé d'introduire dans le pacte une sorte de terme d'usage pour satisfaire à l'esprit de l'édit : « Si tu fais «< un constitut sans fixer un jour pour le paiement, on

peut à la rigueur soutenir que tu n'es pas obligé par « un tel pacte, bien que les termes de l'édit soient <«très larges: mais le créancier pourrait agir contre << toi dès le premier jour, si tu ne payais pas aussitôt << après le constitut. Cependant, il est préférable d'at«tendre pendant un léger délai, pas moins de dix << jours, avant d'exiger le paiement. »>

On peut se demander comment les parties pouvaient ainsi oublier un des éléments les plus importants du pacte. C'est que, dans le negotium qu'elles se proposaient de faire, la fixation d'un terme n'avait sans doute qu'une importance tout à fait secondaire. Ce sera le cas, par exemple, dans un constitutum debiti proprii portant sur une dette naturelle: l'essentiel pour Je créancier sera de se ménager une action qui lui faisait défaut jusqu'alors; le terme importera peu. De même, dans un constitutum debiti alieni, le créancier se préoccupera surtout de se procurer un débiteur plus solvable que le premier on ne parlera plus du terme qui, dans l'esprit des parties, sera évidemment le même que celui de l'obligation primitive.

En résumé, non seulement le constitut peut contenir la fixation d'un terme, mais cette modalité se trouvera toujours dans le pacte, soit explicitement, soit implicitement, d'après l'usage indiqué par Paul.

La condition n'est pas, comme le terme, de l'essence

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