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ment. Enfin, si l'on pouvait dire avec l'arrêt que l'article 1057, par dérogation à l'article 781, no 2, autorise cette incarcération un jour férié, il faudrait dire aussi qu'il l'autorise dans son premier paragraphe avant le lever et après le coucher du soleil, contrairement à l'article 781, no 2; or, la doctrine et la jurisprudence sont d'accord pour repousser ce dernier système.

Le demandeur invoquait à l'appui du premier moyen l'opinion de de Belleyme, Ordonnances sur requêtes et référés, l. 2, p. 525 et suiv., no 404; Devilleneuve et Massé, Dict. de droit commercial, vo Emprisonnement, no 84; Dalloz, Nouv. Rép., vo Contrainte par corps, no 814; Coin-Delisle, no 36; Troplong, Contrainte par corps, no 15, où il cite Peckius; Pardessus, no 1514; Demiau Crouzilhac, p. 477; Goujet et Merger, no 52; Thomine - Desmazure, t. 3, no 906, et un arrêt de Paris du 9 mars 1853 (Journ. du Palais, 1835, 1, 296).

Réponse. Les défendeurs répondaient L'article 781 n'est pas inutile; il constitue la règle pour les cas ordinaires, l'art. 1037 est l'exception pour les cas d'urgence avec la permission du juge; et lorsqu'il y a matière à cette exception, l'article 1037, placé sous la rubrique Dispositions générales, contient lui-même un principe général applicable à toutes les exécutions, et par conséquent à la contrainte par corps, qui est aussi une voie d'exécution, comme l'alteste la rubrique du titre V, De l'exécution des jugements, et comme le rappelle Dalloz, Nouv. Rép., no 55, en ces termes : << La « contrainte par corps, il importe de ne pas « l'oublier, n'est pas une peine, mais une « voie d'exécution. » Le principe d'ailleurs n'est pas nouveau, l'ordonnance de 1667, titre XXXIV, article 11, disposait que la contrainte serait exécutée avec les formalités des ajournements, c'est-à-dire, d'après Jousse, qu'elle ne pouvait avoir lieu les dimanches et jours de fête. Toutefois, le même auteur nous apprend qu'il y avait exception à cette règle dans certains cas et avec la permission du juge. On objecte que les heures indiquées par l'article 1037 pour les actes d'exécution ne sont pas celles que l'on doit suivre comme indication du lever et du coucher du soleil, et qu'il est constant en jurisprudence qu'une arrestation faite dans les limites de ces heures, mais avant le lever ou après le coucher du soleil, serait nulle en présence des termes absolus de l'art. 781, no 1. Mais d'abord cette question divise la doctrine (voy. Chauveau sur Carré, arti

PASIC., 1854. — 1re PARTIE.

cle 781, quest. 2655, et les auteurs qu'il cite). Ensuite il n'y a aucune analogie entre les deux cas; les termes des articles 781, no 1, et 1037, étant différents, l'on conçoit que la préférence doive être accordée à la loi spéciale, qui défend d'arrêter avant le lever ou après le coucher du soleil, tandis qu'il en est tout autrement en ce qui concerne l'incarcération un jour férié ; les termes et les motifs des articles 781, no 2, et 1037 sont identiques quant au principe; seulement l'article 1037 ajoute une excep. tion toute rationnelle pour le cas où il y aurait péril en la demeure. Et quant à l'objection tirée de la prétendue inutilité de l'article 781, elle est sans portée, comme le fait remarquer Chauveau; le n° 2 dudit article est certainement moins inutile que l'article 63, par exemple, et l'article 828, qui, sans même renvoyer à l'article 1037, et tout en défendant la remise d'un exploit ou la saisie-exécution un jour de fête légale, permettent au juge d'autoriser l'un et l'autre lorsqu'il le croira convenable.

Les défendeurs citaient à l'appui de leur thèse Chauveau sur Carré, article 781, quest. 2639, qui contient un traité complet sur la matière.

Deuxième moyen:

Violation de l'article 472 du code de procédure civile, et fausse application de l'article 794 du même code, en ce que l'arrêt n'a pas décidé que le président du tribunal de première instance était incompétent pour permettre l'exécution de la contrainte par corps un jour férié.

C'est par suite d'évocation, disait-on, et par disposition nouvelle, en réformant un jugement du tribunal de commerce, que la cour d'appel de Bruxelles, par arrêt du 29 janvier 1853, a prononcé la condamnation par corps; ainsi d'après l'article 472 du code de procédure civile, c'est à la cour d'appel exclusivement qu'appartient l'exécution de son arrêt et tout ce qui y est relatif (voyez Bioche et Goujet, Dict. général de procéd., vo Appel, no 340), la preuve en est dans l'article 554, qui ne permet au tribunal du lieu de statuer sur les difficultés relatives à l'exécution d'un jugement que provisoirement et en cas d'urgence, sauf à renvoyer la connaissance du fond au tribunal d'exécution. Donc si un président pouvait avoir à statuer sur la permission d'exécuter la contrainte un jour férié, ce devrait être le président de la cour d'appel. L'article 794 qu'invoque l'arrêt attaqué (du 21 mai 1853) est inapplicable à un double titre : 1o il ne s'agit pas d'une simple formalité d'exécu

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tion dont, aux termes dudit article 794, le juge d'exécution ne doit pas connaître, il s'agit d'un moyen du fond, c'est-à-dire de la question de savoir si la liberté pourra être enlevée à un citoyen dans un temps où

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Déclarer recevable l'appel de l'ordonnance de référé (du 17 avril 1853), et rejeter ce même appel par la considération qu'il s'agit d'une ordonnance basée sur un appointement souverain et à l'abri de tout recours

rejeter et admettre la fin de non-recevoir contre l'appel, puisqu'un recours qui n'accorde pas le droit à la partie appelante de présenter ses moyens, ni à la cour de les apprécier, est par le fait frappé d'inutilité et dénué d'objet, dénué de toute portée. L'arrêt dénoncé a commis une erreur de fait et une erreur de droit: 1o une erreur de fait qui peut être appréciée par la cour de cassation, parce qu'elle est attestée par les actes, en ce que le président n'avait pas basé son ordonnance de référé sur l'existence de son appointement du 18 mars, mais sur l'existence du péril en la demeure; 2o une erreur de droit; la cour n'avait pas à s'occuper de l'appointement du 18 mars dont il n'y avait pas ni ne pouvait y avoir appel, mais uniquement de l'ordonnance de référé du 17 avril, et par conséquent des motifs d'urgence et de péril en la demeure que l'ordonnance énonce.

Au lieu de statuer sur le mérite de l'appel de l'ordonnance de référé, la cour a décidé qu'elle n'avait rien à juger; elle a ainsi, en violant les dispositions ci-dessus indiquées, ravi le droit d'appel au demandeur avec les effets qui y sont attachés.

elle lui est légalement garantie; 2o il ne│(celui du 18 mars 1853), c'est tout à la fois s'agit pas d'une demande en nullité d'emprisonnement, matière que l'article 742 in fine a eu soin d'excepter de l'attribution de juridiction à la cour d'appel, il s'agit de l'illégalité d'une permission donnée par le président du tribunal de première instance dont la compétence est contestée. Enfin l'article 1037 lui-même laisse la connaissance de l'exécution au juge, c'est-à-dire à qui de droit, mais non pas au président du tribunal, comme le font les articles 72, 819, 822 et une foule d'autres du code de procédure. Réponse. Le demandeur confond la forme et le fond. Sans doute, aux termes de l'article 472, le juge d'appel est chargé de l'exécution, c'est-à-dire de l'interprétation de son arrêt en cas d'infirmation d'un jugement de première instance; mais dans. le cas actuel sa mission était terminée, il avait définitivement statué sur le fond de l'affaire en déclarant le montant de la condamnation recouvrable par la voie de la contrainte par corps. Quant à l'exercice de cette contrainte, venait l'application de l'article 794. Ce qui tient au fond, par exemple, à des moyens qui seraient tirés du payement de la dette avant l'emprisonnement, de la novation, de la prescription, de la cession, etc., (voy. Chauveau sur Carré, no 2710) appartient au tribunal d'exécution; mais ce qui tient aux formalités appartient au tribunal du lieu où le débiteur est détenu; or, rien ne tient plus à la forme que la permission accordée par le juge de faire l'arrestation un jour férié ; l'article 794 porte : « A défaut des formalités ci-dessus prescrites...,» et parmi ces formalités la loi, article 781, range la défense d'arrêter les jours de fête légale; le demandeur se plaint de son arrestation faite contrairement à cette défense, il est donc vrai de dire que le débat ne porte que sur l'inobservation de cette formalité. Troisième moyen : · Violation des articles 443, 809 du code de procédure civile et 14 de la loi du 25 mars 1841, en ce que l'arrêt dénoncé a réellement refusé le recours en appel contre une ordonnance de référé, en la déclarant inattaquable comme étant basée sur un acte de juridiction gracieuse contre lequel la loi n'admet aucun

recours.

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Ce moyen était ainsi résumé :

Réponse. L'ordonnance de référé contient deux dispositions bien distinctes :

1o Celle relative à l'application de l'article 1037 pour l'exercice de la contrainte par corps; quant à cette première disposition, l'arrêt attaqué admet l'appel en termes clairs et précis, tellement qu'il forme l'objet du premier moyen de cassation;

2o Celle concernant l'appréciation des motifs d'urgence; quant à cette seconde disposition, l'arrêt, il est vrai, considère dans ses motifs qu'elle appartient à la juridiction gracieuse du président dont il n'y a pas d'appel, mais néanmoins, dans son dispositif, il reçoit l'appel de l'ordonnance et le met à néant.

C'est donc une erreur, de la part du demandeur, de prétendre que l'arrêt aurait violé les textes qui consacrent le droit d'appel. Tout au plus pourrait-il reprocher à l'arrêt, ou bien un défaut de motifs, mais à cet égard le pourvoi ne signale aucune loi comme étant violée, ou bien une erreur ou

insuffisance dans les motifs, ce qui ne peut application de l'article 1037 du code de propas vicier l'arrèt.

Au surplus, et subsidiairement, l'on peut soutenir que l'ordonnance de référé, en ce qui concerne l'appréciation des motifs d'urgence donnant ouverture à l'application de l'article 1037, n'est réellement pas sujette à l'appel; sous ce rapport l'ordonnance n'est que la confirmation de l'appointement sur requête du 18 mars; or, l'appréciation des faits d'urgence et de ceux exposés dans la requête est du domaine exclusif du président; semblables décisions émanent de sa juridiction gracieuse et volontaire, elles sont sans recours, à la différence des décisions et ordonnances qui ont un caractère de juridiction contentieuse; cette doctrine est professée par Chauveau sur Carré, article 72, no 578; Chauveau, Revue des rev., t. 2, p. 341; Poncet, des Jugements, nos 159. 161; Dalloz, Nouv. Rép., t. 4, v° Appel civil, etc., et admise par la jurisprudence, voy. Brux., 22 juillet 1846 (Belg. jud., t. 4, p. 1726); Cologne, 8 février 1844 (id., t. 2, p. 1122); Liége, 13 mai 1848 (id., 1851, p. 1505); Riom, 25 janvier 1844 (S., 1844, 2, 446).

ARRÊT.

LA COUR; Sur le premier moyen, tiré de la violation de la disposition et du no 2 de l'article 781 du code de procédure civile et de la fausse application, et par suite violation de l'article 1057 du même code, en ce que l'arrêt dénoncé a admis que le président du tribunal civil de première instance avait pu légalement autoriser l'arrestation du demandeur un jour de fête légale:

Attendu que l'emprisonnement en matière civile est une voie d'exécution, réglée nommément par le code de procédure au titre XV du livre V, intitulé de l'Exécution des jugements;

Que, d'après la disposition finale de l'article 1037, le juge peut, lorsqu'il y a péril en la demeure, autoriser toute exécution, comme toute signification, un jour de fête légale ;

Que cette disposition finale constitue, pour le cas d'urgence qu'elle prévoit, une dérogation au principe général énoncé dans l'article 781, no 2; que tel était au surplus l'état de la jurisprudence antérieure au code, et que rien n'autorise à croire que le législateur du code ait entendu s'en écarter; d'où suit que l'arrêt dénoncé a fait une juste

cédure civile, et n'a violé ni cet article ni l'article 781 du même code.

Sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l'article 472 du code de procédure civile et fausse application de l'article 794 du même code, en ce que l'arrêt dénoncé n'a pas décidé que le président du tribunal de première instance était incompétent pour permettre l'exécution de la contrainte par corps un jour férié :

Attendu que la compétence spéciale attribuée au juge par l'article 1037 in fine n'est limitée par aucune exception, et existe par conséquent aussi bien lorsque l'exécution appartient à la cour d'appel, en cas d'infirmation et d'évocation (article 472 du code de procédure civile) que lorsqu'elle appartient au tribunal qui a rendu le jugement; que les mêmes raisons d'urgence, dans l'une comme dans l'autre hypothèse, exigent que le créancier puisse recourir au juge local désigné à cet effet par l'art. 1037; que par le mot juge dudit article il faut entendre le président du tribunal de première instance, ce qui résulte, tant du rapprochement de l'article 63 du code de procédure civile que de la combinaison des articles 826 et 828 du même code;

Attendu que ces considérations suffisent pour justifier sur ce point la décision de l'arrêt dénoncé; d'où il résulte que le deuxième moyen n'est pas fondé.

Sur le troisième moyen, tiré de la violation des articles 443, 809 du code de procédure civile et 14 de la loi du 25 mars 1841, en ce que l'arrêt dénoncé a réellement réfusé le recours en appel contre une ordonnance de référé, en la déclarant inaltaquable comme étant basée sur un acte de juridiction gracieuse contre lequel la loi n'ad

met aucun recours:

Attendu que l'arrêt dénoncé a déclaré expressément recevoir l'appel de l'ordonnance de référé du 17 avril 1855;

Attendu que c'est à tort que le demandeur soutient que la cour n'a pas reçu l'appel par cela seul qu'elle n'a pas examiné s'il y avait ou non, dans l'espèce, péril dans la demeure; que la cour a réellement statué au fond en décidant sur ce point, non pas que l'ordonnance de référé du 17 avril 1853, mais que l'appointement sur requête rendu le 18 mars précédent par le président du tribunal de première instance, en vertu de sa juridiction gracieuse, n'admettait aucun recours; qu'ainsi le troisième moyen n'est pas non plus fondé ;

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L'ordre des jésuites, légalement supprimé en Belgique, n'y a jamais été rétabli comme personne civile; il est donc incapable de recevoir, comme tel, par donation ou par testament. (Code civil, art. 902, 911 et 967.) La liberté d'association, garantie par l'article 20 de la constitution, ne donne pas la capacité civile à toutes les sociétés qui se forment en Belgique; les corporations ne peuvent exercer collectivement les droits attachés à la personnification civile qu'en vertu de l'autorisation légale.

Il y a décision en fait dans l'arrêt qui, à l'aide de présomptions graves, précises et concordantes, déclare qu'un legs a été fait en réalité à la société de Jésus sous le nom de personnes interposées, et non pas à une société formée entre un certain nombre de · jésuites dans un but spécialet déterminé (1). (Code civil, art. 1341, 1555, 969 et 970.)

(FRANKEVILLE ET BOONE, C. LE BUREAU DE BIENFAISANCE de nivelles.)

Par testament olographe, en date du 4 septembre 1840, de Sébille d'Emprez, prêtre et ancien missionnaire, institua pour son légataire universel le bureau de bienfaisance de Nivelles.

Par le même acte il léguait le château de Grambais, avec quatre bonniers de terre,

(1) Sur l'admissibilité des présomptions en cette matière, voir Furgole, Test., ch. 6, section 3, no 26; arrêts de cassation de France des 15 août 1810 (S., 1811, 1, 31); 27 avril 1830 (S., 1850, 1, 186, note 3; id., t. 20, 2, 25; 23, 2, 78).

Sur l'incapacité civile des corporations religieuses, voir Perezius, ad Cod., lib. VI, ti

aux abbės Van Lille et Frankeville et au révérend père Boone.

L'abbé Van Lille mourut avant le testateur.

Ce dernier décéda le 9 février 1851.

Les pères Frankeville et Boone obtinrent d'abord la mise en possession de l'exécuteur testamentaire, mais leur qualité ayant été méconnue par le légataire universel, ils assignèrent celui-ci, par exploit du 5 octobre 1852, aux fins de voir maintenir leur mise en possession ou tout au moins de s'entendre condamner à faire la délivrance du château de Grambais.

Devant le tribunal de Bruxelles le bureau de bienfaisance de Nivelles fit articuler différents faits tendant à prouver que les demandeurs étaient personnes interposées, que le véritable légataire était la société de Jésus, personne incertaine et incapable, et il concluait en conséquence à la nullité du legs et à la non-recevabilité de la demande.

Le 21 mars 1853, le tribunal déclara nul et de nul effet le legs du château de Grambais et dit pour droit que ledit château appartient à l'hospice de Nivelles.

Le 15 avril suivant, Frankeville et Boone interjetèrent appel de cette sentence.

La cause se présentait devant la cour dans les mêmes termes que devant les premiers juges.

Le 8 août 1855 fut rendu l'arrêt dont la teneur suit:

་་

« Attendu que si les membres d'un ordre religieux sont, comme tout autre sujet belge, capables de recueillir des donations ou des legs, il n'en est plus de même lorsqu'il est prouvé qu'ils ne sont que des donataires ou légataires fictifs, c'est-à-dire des personnes interposées, et qu'en réalité la libéralité a été faite en faveur d'un être moral non reconnu comme personne civile; qu'en effet, cet être moral, tout en pouvant exister en vertu du droit d'association, ne jouit pas des droits civils, et ne peut dès lors recueillir à titre de donation ou de testament, puisque cette capacité est bien évidemment l'exercice d'un droit civil;

tre XLVIII; Furgole, t. 1er, p. 333, éd. in-8°, et p. 557, nos 72 et 73; arrêts de Grenoble des 13 janvier 1841 (S.. 1841, 2, 87); Douai, 29 mars 1826 (S., 1827, 1, 47); cour de cass. de France, 8 août 1826 (S., 1827, 1, 47 ); 17 novembre 1852 (Dall. périod., 1855, 1, 126, et D. p., 1852, 2, 288).

«Attendu que la validité de ces dons ou legs dépend donc absolument des circonstances, et que l'interposition de personnes constituant une fraude à la loi, la preuve peut en être faite par des présomptions graves, précises et concordantes;

« Attendu que le testament dont il s'agit, de même que celui fait le 8 août 1840, sont conçus l'un et l'autre dans une même pensée religieuse; qu'on y voit que le testateur y fait une quantité d'œuvres pies, et laisse par contre assez peu de chose à sa famille; qu'il a même cru devoir motiver ces dispositions en disant que, comme prêtre et ministre de la religion, il pouvait à son avantage employer les biens qu'il possédait, ajoutant dans un autre endroit de son premier testament que si quelque parent voulait faire casser ses dispositions, il l'excluait expressément de tout legs et le déclarait profanateur sacrilege de sa dernière volonté ;

« Attendu qu'en présence de ces deux testaments, contenant tous deux des legs bien modiques pour des parents aussi proches, tels qu'un frère et des petits-neveux, il est impossible d'admettre que le testateur ait voulu faire un legs assez considérable aux appelants par affection pour eux et dans le but d'augmenter leur patrimoine; que cela est d'autant moins croyable que dans le testament du 8 août 1840, qui n'est antérieur que d'environ quatre semaines à celui dont il s'agit, l'un des appelants, de même que l'abbé Van Lille, leur colégataire prédécédé, ne se trouvaient pas même nommés; que, d'autre part, le testateur, comme prêtre, devait savoir que les appelants, appartenant à la compagnie de Jésus, avaient fait vœu de pauvreté; que cette circonstance, sans constituer dans leur chef une incapacité civile, était cependant pour eux une obligation du for intérieur, et devait, au point de vue du lestateur et de l'esprit religieux qui domine son testament, être un motif pour ne pas les enrichir personnellement, alors surtout que rien n'indique que les appelants fussent le moins du monde dans une position de gène de nature à pouvoir les dispenser de l'observation du vœu de pauvreté;

« Attendu que si, d'après toutes les circonstances établies au procès, les appelants ne sont que des légataires fictifs, c'est-à-dire des personnes interposées, le legs devra être déclaré valable ou caduc, selon la capacité ou l'incapacité de celui au profit de qui l'interposition de personnes a réellement eu lieu;

«Attendu qu'on voit par le testament du

8 août 1840 que le château de Grambais, objet du legs dont il s'agit, servait déjà alors depuis dix ans de lieu de promenade à des membres de la société de Jésus; qu'il résulte aussi des éléments du procès que les jésuites établis à Nivelles occupaient encore ce château au moment du décès, et que postérieurement ils ont continué à en avoir la jouissance, au point mème de percevoir les fermages des biens loués qui en dépendent; que si, d'autre part, on fait encore attention à la nature de la charge attachée au legs, et consistant dans la célébration à perpétuité de deux messes hebdomadaires, on est forcé de conclure que, d'après les circonstances révélées au procès, c'est bien évidemment la compagnie ou société de Jésus que le testateur a voulu favoriser, et que, ne pouvant lui léguer directement, il a naturellement eu recours aux appelants, dont l'obéissance passive comme jésuites lui garantissait le mieux, et au moyen d'une institution conjointe, la fidèle exécution de ses intentions;

<< Attendu qu'il n'est pas vrai de dire que le legs dont il s'agit ne pourrait pas arriver directement à la société de Jésus par l'interposition des appelants, puisque dès aujourd'hui elle en a déjà la jouissance, et qu'au moyen d'une vente, il lui est très-facile d'en recueillir la valeur en argent dès qu'elle jugera que le moment opportun est arrivé;

Attendu qu'on ne peut admettre que le testateur a eu en vue, non la compagnie de Jésus, mais plutôt certaine société formée entre six jésuites, par acte passé à Namur, le 19 décembre 1831, devant le notaire Anciaux ;

"

Qu'on voit, en effet, que dans la copie du premier testament produite par la partie intimée, non méconnue par les appelants et écrite de la main du testateur, celui-ci s'est lui-même servi du mot compagnie, en disant « Afin que ce bien de campagne « serve à la compagnie, comme il sert de« puis dix ans, de lieu de promenade; »

་་

Qu'au surplus la société formée par l'acte précité serait également, comme société, incapable de recueillir le legs, nonseulement parce qu'elle n'est pas une personne civile, mais de plus parce que, aux termes de l'article 1er des conditions stipulées audit acte, elle n'a été créée que dans le seul but d'exploiter, au profit commun, une certaine quantité de biens meubles ou immeubles à acquérir au moyen d'une somme de 3,895 fr. 23 cent. (1,800 fl. des Pays-Bas), montant de l'apport des associés; <«< Attendu qu'il suit de tout ce qui précède

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