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au Vendredy 1er Juin, ne me laissoit pas l'espérance de m'en dédommager. Je partis en effet au jour marqué, sans avoir satisfait ma curiosité sur cet article. Ce fut un regret de plus que j'emportai de Clermont, car j'avoue que tout ce qui appartient à Monseigneur me paroissoit intéressant; mais j'avois tant d'autres plaisirs plus réels à y regretter, que celui-cy ne m'est revenu que par réflexion. Malgré la curiosité que j'avois de voir Lyon, et l'impatience naturelle d'un jeune homme pour courir et changer de lieu, il m'en a coûté pour m'arracher d'un pays où j'étois comblé de bontés et de plaisirs ; mais je n'avois pas de tems à perdre, voulant arriver à Paris le 12, d'autant plus qu'on voyageait alors lentement, parce que l'arrivée de Madame La Dauphine avoit fait enlever plus de moitié des chevaux de toutes les postes du pays. On en avoit dégarni absolument la route de Clermont à Lyon, en sorte que je fus obligé d'aller prendre la grande Route de Moulins à cette ville, en remontant, sur celle d'Auvergne à Paris, l'espace de 13 lieues, jusqu'à St-Pourçain, d'où une communication de 3 lieues, qu'on ne fait qu'en 3 heures, parce qu'elle est très difficile pour les voitures, va rejoindre la route de Lyon à Varennes. Mais avant de parler de cette route, il ne faut pas quitter tout à fait l'Auvergne, sans dire un mot de l'administration de cette Province.

Je commence par l'Agriculture, parce que c'est la base de tout. Elle paroit excellente dans la Limagne. On désireroit seulement engager les paysans, à renoncer au profit des Noyers qu'ils plantent au milieu de leurs terres, et dont le produit ne les dédommage certainement pas, du tort qu'ils font aux grains. On dit qu'ils commencent à sentir cette vérité. Quant aux impositions, quoiqu'elles soient assez fortes et le pays pauvre, le recouvrement en est cependant assez facile, même dans les montagnes, au moyen des garnisons. Les Montagnards d'Auvergne sont plus doux que ceux du Velay, qu'on n'a pu encore dompter, et qui ne payent rien; ils battent la maréchaussée et toutes les troupes qu'on y envoye. L'établissement de la Gabelle est impraticable dans ce pays, à cause de la nécessité du sel pour les bestiaux. Ce qui est le plus à charge à la province sont les Douanes, qui gênent le commerce des vins. Elle voudroit bien en obtenir la suppression, ou au moins quelque adoucissement; mais je crains bien que les vexations auxquelles ces douanes donnent lieu, ne soient un mal presque nécessaire dans la séparation du pays d'Aydes, et de celui de Liberté. »

Comte Wladimir d'ORMESSON

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« Voulez-vous maintenant me permettre de dire, toujours, en toute franchise, ce que je pense du système contemporain, le système commémoratif, c'est-à-dire dénommer les rues d'après des faits d'histoire générale, sans aucun rapport avec l'histoire de la rue, transformer les plaques indicatrices en dédicaces de souvenir?

« J'en pense beaucoup de mal et je dis que c'est en réalité un moyen très médiocre, très maladroit, de célébrer nos gloires. J'aimerais mieux autre chose, de plus opérant, de moins imprudent.

« 1o D'abord, certaines de ces gloires du présent ne sont pas sanctionnées pour toujours. Nous risquons d'avoir, sur les plaques, des noms qui ne sont plus ceux de grands hommes, qui ont cessé de plaire. Nous avons failli avoir une rue LloydGeorge. Procéderons-nous donc à des lavages périodiques, à des effaçages de noms passés à l'état de médiocrités ?

« 20 Le public se rend très malaisément compte, à propos des noms de rues, qu'ils servent à glorifier tel personnage célèbre. Il fait très difficilement le passage du nom de la rue au personnage commémoré. Le nom de la rue, pour lui, c'est un nom jeté rapidement sur une enveloppe de lettre, donné clairement mais vite à un cocher, c'est une rubrique de renseignements, et pas autre chose. En faire le prétexte d'une leçon d'histoire, d'une pensée de reconnaissance, c'est trop demander au public. J'habite rue Guynemer ; c'est le nom d'un héros célèbre entre nous, digne entre tous de notre gratitude. Eh bien ! j'ai souvent remarqué ceci : quantité de gens, qui connaissent et qui ont connu Guynemer, ne se doutent pas, en se servant du nom de cette rue, qu'il est celui du fameux aviateur. A combien peu de riverains de la rue Soufflot vous apprendrez qu'il s'agit là de l'architecte du Panthéon. Moi-même, si curieux d'histoire que je sois, je ne peux pas m'habituer, en lisant les noms de rues, à faire l'effort nécessaire pour me rappeler l'œuvre des titulaires de ces noms, Cujas ou Champollion. Et si je le fais par devoir d'historien, immanquablement je perds mon chemin, et l'effort que j'ai fait pour comprendre le nom de la rue n'a servi qu'à me faire manquer ma route.

(A suivre).

CAMILLE JULLIAN.
R. C.

Pour le Comité de publication :

Le Secrétaire de l'Académie, Maurice BASSE.

Clermont-Ferrand, Imprimerie Générale.

Le Gerant: J.-B. GENEIX

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ACADÉMIE DES SCIENCES, BELLES-LETTRES ET ARTS

DE CLERMONT-FERRAND

BULLETIN DE L'AUVERGNE

PROCES-VERBAL

Séance du 1er Juillet 1926

La séance est ouverte à 2 h. 1/4 sous la présidence du général Linder, vice-président.

Le secrétaire-adjoint donne lecture du procès-verbal de la dernière séance, qui est adopté.

Sur la proposition du secrétaire, qui fait remarquer que, par suite du décès de M. G. Féry-d'Esclands, les formalités en cours pour la régularisation du legs Fernand Mège pourraient éprouver quelques difficultés, l'Académie décide de remplacer immédiatement le président défunt. En conséquence, le général Linder est nommé par un vote unanime Président de l'Académie des Sciences, Lettres et Arts de Clermont et investi de tous les pouvoirs que comporte ce titre.

Le Président passe en revue les ouvrages et périodiques reçus pendant le mois écoulé.

Il signale le décès récent de notre collègue M. Pagès-Allary, victime d'un accident d'automobile. Le Dr Charvilhat représentait notre compagnie à ses obsèques.

Il a reçu de Mme G. Féry-d'Esclands, de M. Juge-Chapsal et de M. Maurice Chalus, des remerciements pour les condoléances de l'Académie à l'occasion de leurs deuils respectifs.

Remerciements de M. le Dr Marcombes, maire de Clermont, pour l'envoi qui lui a été fait d'un exemplaire de l'ouvrage posthume du chanoine J.-B. Fouilhoux.

M. le chanoine Crégut présente un numéro d'une revue, provenant de l'île de Christmas, océan Pacifique, accompagné d'une proposition du P. Emmanuel Rougier, directeur de cette revue, pour l'échange de publication. Cette proposition est adoptée.

2. Série. Août 1926.

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