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(Voy., à la fin de l'Annuaire, à l'article Variétés, un historique complet de la question, au point de vue religieux et philosophique, suivi d'un examen de toutes les brochures publiées par les deux partis, et du rapport au Roi de M. Villemain, sur l'état de l'instruction secondaire. Quelques-unes des pièces du procès ont été données in extenso aux documents historiques, France, partie non officielle.)

Il ne nous reste plus à consigner que quelques événements heureux ou malheureux, mais sans rapport direct avec la politique générale. Nous avons raconté, dans un autre chapitre (voy. Colonies), le sinistre affreux qui frappa la Guadeloupe vers le commencement de l'année. Déjà la pitié publique avait apporté un remède, encore insuffisant peut-être, aux misères horribles causées par ce désastre, quand une double fête de l'industrie vint rassurer les esprits par des promesses fécondes d'un plus heureux avenir. Les deux premiers chemins de fer d'une importance réelle que possède la France furent ouverts à la fois (2 et 3 mai) à la circulation publique (Voy., pour les détails des inaugurations, la petite Chronique, et, pour l'appréciation des travaux et des résultats, la Chronique des travaux publics).

La fin de l'année vit se terminer les préparatifs d'une ambassade commerciale en Chine. Bien que les éléments d'échange entre les deux pays n'aient qu'une importance secondaire, cependant il est juste de dire que la France ne devait pas rester en arrière, au moment où toutes les nations s'apprêtaient à exploiter, dans la mesure de leurs intérêts et de leur puissance, les débouchés nouveaux qu'a créés le traité de commerce entre la Chine et la Grande-Bretagne.

On put regretter, toutefois, que les premiers rapports entre la France et ce monde nouveau fussent inaugurés par un début fàcheux. Une discussion déplorable s'éleva (juillet) entre M. le comte de Ratti-Menton, consul

général de France en Chine, et M. Dubois de Jancigny, parti en 1841 avec une mission extraordinaire. M. de RattiMenton eut le double tort de provoquer le débat et de le rendre public. Sept mois avant l'arrivée, à Macao, du consul général, un journal, l'Aurora Macaense, avait compris, par erreur, M. de Jancigny dans la liste des personnes attachées au consulat de France. M. de Jancigny, qui était alors occupé à jeter les bases d'un traité commercial avec les autorités chinoises, et qui était, d'ailleurs, parfaitement étranger à l'assertion erronée du journal de Macao, fit offrir à M. de Ratti-Menton de le renseigner sur les personnes et sur les choses. M. de Ratti-Menton ne répondit à cette offre qu'en accusant, dans le journal de Macao, M. de Jancigny d'usurpation de titres, en le menaçant des articles 258 et 259 du Code pénal, et en faisant une distinction intempestive entre les agents sérieux et non sérieux. M. de Jancigny, de son côté, crut devoir menacer le consul gé. néral d'un procès en diffamation. Le gouvernement mit fin, par le rappel des deux agents, à cette malheureuse affaire, qui fournissait une preuve nouvelle du danger des missions spéciales et des attributions de pouvoirs ma définies.

Si maintenant nous cherchons, après l'avoir jugée par des faits, à juger la situation par des chiffres, nous verrons que l'état des impôts et revenus indirects constatait une augmentation réelle dans la fortune publique et dans le mouvement du commerce (Voy. les tableaux statistiques officiels). Si l'on n'était pas encore arrivé à l'équilibre si désirable du budget, au moins, et M. le ministre des finances l'avait hautement déclaré, on pouvait s'attendre à réaliser cet équilibre après le règlement définitif de l'exercice 1844. Les crédits supplémentaires, même les crédits extraordinaires tendaient à disparaître du budget, puisque les prévisions avaient été calculées au maximum des dépenses et au minimum des recettes. Enfin, si rien d'im

prévu ne venait s'opposer à la réalisation de ces espérances, la France aurait bientôt soldé son arriéré et aurait accompli avec une admirable confiance un vaste ensemble de travaux productifs.

Ann. hist. pour 1813.

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CHAPITRE VI.

COLONIES. Esclavage. question. la gomme.

I. Colonies transatlantiques. Loi sur les sucres.
Commission chargée de l'étudier. Rapport fait sur la
Désastres de la Guadeloupe. - Sénégal. · Commerce de

-

Expédition contre les habitants de Fouta. Etablissements de comptoirs. - Occupation de Nosse-Bay et de Mayotte. Occupation des îles Marquises. Établissement du protectorat français sur les îles de la Société.

II. Algérie. État du pays.

-

Nouvelle incursion d'Abd-el-Kader. — Défaite de l'Émir. Prise de la Smala. Mort de Sidi-Embarek. — Découragement des alliés de l'Émir. - Développement de la colonisation civile et de la colonisation militaire. Nouveau tarif des douanes.

COLONIES TRANSATLANTIQUES.

- Au moment où s'ouvre

l'année, les questions qui intéressent le plus directement la fortune des colons n'ont point encore été résolues. La question des sucres continue de suivre une marche laborieuse, incertaine. Si, d'une part, la solution favorable aux colonies a pour elle toutes les considérations qui se peuvent tirer du système colonial et les raisons d'intérêt maritime, d'autre part, elle a contre elle l'activité d'une industrie étendue et des raisons d'intérêt agricole d'une grande influence. Ces deux intérêts sont en lutte ouverte et se disputent la préférence; et le gouvernement, mu par l'esprit de conciliation et de transaction, essaie de ménager l'un sans frapper l'autre, resigné à s'en remettre pour le reste aux événements. A une époque avancée de la session, une loi fut votée en ce sens par les chambres, sanctionnée par le roi (voy. page 142); et les colonies, qui avaient espéré plus de faveur, retentirent des plaintes causées par ce desappointement politique.

Quant à la question de l'esclavage, elle a fait un pas cette année la commission chargée de l'étudier a présenté son rapport et posé des conclusions qui sont regardées par quelques uns comme la ruine des colonies. Elle commence par proposer qu'à dater du 1er janvier 1853, l'esclavage cesse d'exister dans les colonies françaises; elle justifie ce délai de dix ans par la nécessité de faire l'apprentissage des noirs et de les préparer à la liberté, ce qui devra avoir lieu sans péril pour le maintien de leur condition actuelle, sauf diverses modifications compatibles avec l'état d'esclavage. En outre, et comme moyen de transition, la commission pense qu'il faudra instituer, du 1 janvier 1853 au 1er janvier 1858, un régime de liberté mitigée, dans lequel les noirs affranchis seront tenus de justifier d'engagements de travail contractés au prix d'un salaire dont le maximum et le minimum seront déterminés par l'autorité. Mais la même justice qui demande l'abolition de l'esclavage demande aussi que les colons frappés par cette mesure reçoivent uné indemnité qui les sauve de la ruine. La commission propose, à cet effet, de faire inscrire immédiatement au grand livre de la dette publique une rente de 6 millions de francs 4 p. 010, au nom de la caisse des dépôts et consignations, rente dont le capital et les intérêts accumulés jusqu'au 1er janvier 1853 seront alors distribués entre les propriétaires d'esclaves. Telle est l'essence du projet de la majorité de la commission. Toutefois, la minorité qui l'a vivement combattu présente aussi le sien, qui consisterait à affranchir immédiatement tous les enfants esclaves nés dans les colonies depuis le 1er janvier 1838, et successivement tous ceux qui naîtront à l'avenir; à faire élever ces enfants d'après un système d'éducation dans lequel l'intervention des propriélaires serait combinée avec celle de l'aministration; à introduire, dans l'état des individus laissés en esclavage, les diverses améliorations compatibles avec cette condition; à déclarer l'esclavage aboli dans vingt ans, sauf indemnité à

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