dissoudre les Chambres. Ils ne prenaient pas garde qu'un décret de l'assemblée pour prévenir l'usage du droit de dissolution, serait tout simplement une violation audacieuse de la Constitution. Quant à la majorité, croyant de bonne foi que ce serait une occupation patriotique et saine que de travailler à remanier nos lois, elle songeait à nommer une commission chargée de reviser et de fondre ensemble toutes les constitutions impériales. Juin 1845. Adieux de Napoléon à ses ministres et à sa famille. Napoléon, après s'être séparé des membres des deux Chambres dans cette même soirée du dimanche, acheva ses apprêts, adressa ses adieux à ses ministres, donna au maréchal Davout, nommé commandant en chef de Paris, ses dernières instructions pour la défense de la capitale, fit à Carnot, dont la sincérité l'avait touché, un adieu cordial, froid mais sans apparence d'humeur à M. Fouché, et passa les derniers instants avec sa famille et ses amis les plus intimes. En sentant l'heure des combats approcher, il était ranimé, car il retrouvait sous ses pieds le terrain où il avait toujours marché en maître. Il serra tendrement dans ses bras sa fille adoptive, la reine Hortense, et il dit à madame Bertrand, en lui donnant la main avant de monter en voiture Il faut espérer, madame Bertrand, que nous n'aurons pas bientôt à regretter l'île d'Elbe. Hélas, le moment approchait où il aurait tout à regretter, tout, même les plus mauvais jours! Il partit le lundi 12 juin, à trois heures et demie du pour l'armée matin. Telle fut jusqu'à la période des événements militaires, laquelle fut si courte, comme on le verra Son départ le 12 juin au matin. Juin 4845. bientôt, telle fut l'époque sombre et fatale dite des Cent Jours, époque qui après avoir débuté par un triomphe extraordinaire, se changea tout à coup en difficultés, en amertumes, en sombres pressentiments! L'explication de ce contraste est facile à donner de Porto-Ferrajo à Paris, du 26 février au 20 mars, Napoléon fut en présence des fautes des Bourbons, et alors tout fut succès éblouissant pour lui, de Porto-Ferrajo à Cannes, de Cannes à Grenoble, de Grenoble à Lyon, de Lyon à Paris! Il semblait que la fortune elle-même, revenue à son favori, s'empressât de le seconder en mettant à sa disposition tantôt les vents dont sa flottille avait besoin, tantôt les hommes sur lesquels son ascendant devait être irrésistible. Mais à peine entré à Paris, il ne se trouva plus en présence des fautes des Bourbons, mais en présence des siennes, de celles qu'il avait accumulées pendant son premier règne, et alors tout son génie, tout son repentir même semblèrent impuissants! Le traité de Paris qu'il avait si obstinément refusé en 1814 jusqu'à lui préférer la perte du tròne, il l'accepta sans hésiter, et demanda la paix à l'Europe avec une humilité qui du reste convenait à sa gloire. —Non, répondit l'Europe, vous offrez la paix, mais sans la vouloir sincèrement. Et elle repoussa le suppliant même jusqu'à fermer la frontière à ses courriers! - Napoléon s'adressa ensuite à la France, et lui offrit sincèrement la liberté, car si son caractère répugnait aux entraves, son génie comprenait qu'il n'était plus possible de gouverner sans la nation, et surtout qu'il ne lui restait qu'un parti, celui de la liberté. La France ne dit pas non comme l'Europe, mais elle parut douter, et pour la convaincre, Napoléon se vit obligé de convoquer immédiatement les Chambres, les Chambres pleines de partis agités, acharnés, implacables, lesquels pour tout appui contre l'Europe n'avaient à lui offrir que leurs divisions. Repoussé par l'Europe, accueilli par les doutes de la France dans un moment où il aurait eu besoin de tout son appui, Napoléon, après vingt jours de joie, tomba dans une sombre tristesse, qu'il ne secouait dans certains moments qu'en travaillant à tirer des débris de notre état militaire l'armée héroïque et malheureuse de Waterloo! Ainsi triomphant des fautes des Bourbons, succombant sous les siennes, il donna au monde après tant de spectacles si grandement instructifs, un dernier spectacle, plus profondément moral et plus profondément tragique que les précédents, le génie, vainement, quoique sincèrement repentant! Et, disons-le, au milieu de ces vicissitudes, de ces vingt jours de courte joie, de ces cent jours de tristesse mortelle, il y eut un acteur de ces grandes scènes qui n'eut pas un jour de contentement, pas un seul, ce fut la France! la France victime infortunée des fautes des Bourbons comme de celles de Napoléon, victime pour les avoir laissé commettre, ce qui fut à elle sa faute et sa punition! Triste siècle que le nôtre, du moins pour ceux qui en ont vu la première moitié! Fasse le Ciel que la génération qui nous suit, et qui est appelée à en remplir la seconde moitié, voie des jours meilleurs! Mais qu'elle veuille Juin 4845. Juin 4845. bien nous en croire, c'est en profitant des leçons dont ce demi-siècle abonde, et que cette histoire s'attache à mettre en lumière, qu'elle pourra obtenir ces jours meilleurs, et surtout les mériter! FIN DU LIVRE CINQUANTE-NEUVIÈME ET DU TOME DIX-NEUVIÈME. TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS LE TOME DIX-NEUVIÈME. - LIVRE CINQUANTE-SEPTIÈME. L'ILE D'ELBE. - - Séjour de lord Castlereagh à Paris. Il obtient de Louis XVIII la - - |