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montre ce qu'il était. C'est qu'en effet il est plus difficile alors de se contrefaire. Voyez comment cette parole se vérifie dans le chrétien relâché et tiède: comment se montre-t-il dans sa dernière maladie? Comme il était depuis longtemps avant la maladie, exigeant, immortifié, prompt à se plaindre, à s'impatienter; tout entier aux soins du corps, très-peu occupé des intérêts de son âme, de son éternité. Hélas! malgré les avis qu'il reçoit, et contre l'évidence, il s'aveugle sur les dangers de son état. Parlez-lui du bonheur de mourir en bon chrétien, des mérites qu'on peut acquérir pour le ciel en faisant de grand cœur le sacrifice de sa vie; offrezvous à lui pour réciter à haute voix quelques prières, ou pour lui lire un chapitre de l'Imitation à son choix... il n'a pas de choix à faire il semble à peine vous écouter!.. Parlez-lui au contraire des nouvelles du jour, ou de quelque médicament vanté par les hommes de l'art, aussitôt l'attention et la parole lui reviennent! Du reste on ne remarque pas qu'il s'entretienne avec Dieu et les Saints par de pieux élans de cœur, ni qu'il songe à demander le secours des prières de ses amis. Ceux qui veillent le malade ou qui l'approchent pendant le jour sont péniblement affectés de le voir dans ces dispositions. Ils disent en euxmêmes Je n'aimerais pas d'être ainsi dans ma dernière maladie. Que de mérites il perd pour l'éternité! (1)

(1) On suppose ici que l'état du malade est tel qu'il ne lui ôte nullement la liberté d'esprit, et que son insensibilité spirituelle est l'effet non de la maladie mais de la tiédeur; sans quoi on aurait grandement tort de s'en scandaliser ainsi que des cris plaintifs ou des signes d'impatience arrachés par la violence des souffrances.

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APPLICATIONS. Vous aussi, vous dites: Je ne voudrais pas être ainsi, et vous avez bien raison; mais, pour n'être pas ainsi alors, il faut être autrement tandis que vous êtes en santé. Voulez-vous savoir comment vous serez alors, voyez comment vous êtes habituellement; şi vos manières d'être et de faire ressemblent à celles du malade que nous avons ici sous les yeux, soyez assuré que vous ne serez pas dans de meilleures conditions. Oh! pendant qu'il en est temps encore, voyez en quoi vous lui ressemblez, en quoi vous devez réformer votre conduite, et mettez la main à l'œuvre sans retard.

AFFECTIONS. Demandez la grâce de vous connaître et de vous amender.

RÉSOLUTIONS. Dans mes doutes ou perplexités je me demanderai ce que je voudrais avoir fait à l'heure de ma mort.

II. POINT.

APPROCHES DE LA MORT DU CHRÉTIEN FERVENT.

CONSIDÉRATIONS. En lui aussi se vérifie le mot : La maladie ne change pas l'homme, mais elle montre ce qu'il était; toutefois elle le montre ici sous un aspect bien différent loin de perdre à être constamment sous les yeux, le chrétien fervent gagne dans l'estime de ceux qui l'approchent à mesure qu'il est observé de plus près. Que voit-on en lui? Ce qu'il était réellement, mais ce que son humilité savait cacher en partie : un chrétien solidement vertueux, mort aux vanités du monde et à lui-même ; préoccupé par dessus tout des intérêts de son âme... Dès que son mal devient sérieux, il demande avec instances qu'on lui fasse connaître ce que le médecin pense de son

état; et, si on lui dit que probablement il touche au terme de sa vie, il en fait aussitôt de grand cœur le sacrifice à Dieu. Il est le premier à demander les sacrements des mourants. Durant tout le cours de sa maladie, il est constamment pour tous un objet d'édification patient, résigné, reconnaissant envers ceux qui lui rendent service; il semble n'être préoccupé que d'une seule pensée, de mettre à profit, pour son avancement spirituel, le peu de vie qui lui reste. Aussi remarque-t-on qu'il s'unit fréquemment à Dieu par de pieuses affections, et qu'il met tout son bonheur à en entendre parler. S'il se plaint d'une chose, c'est de ne plus pouvoir réciter certaines prières de son manuel ou lire quelques passages de l'Imitation; mais il se dédommage de cette privation en demandant qu'on lui en fasse la lecture et en priant son confesseur de venir fréquemment le visiter et l'entretenir de sujets pieux. Durant ces lectures et ces entretiens, son âme semble avoir déjà comme un avant-goût du bon heur qui lui est préparé dans le ciel !

APPLICATIONS. Ce tableau vous sourit. Vous désirez de le voir un jour retracé en vous; vivez en fervent serviteur de Dieu et votre désir se réalisera. Telle vie, telle mort. Toutefois, pour n'être pas surpris par les défaillances de la nature, mettez dès à présent par écrit les affections ou prières jaculatoires que vous aimeriez qu'on vous suggérât au moment suprême, et indiquez les passages de l'Imitation ou d'autres livres de piété, que vous croyez être les plus propres à vous soutenir et encourager durant le cours de votre maladie. Tout au moins, soyez attentif à ne jamais vivre dans un état dans lequel vous

ne voudriez pas que la mort vous surprît, et faites à Dieu, tous les soirs, la recommandation de votre âme. COLLOQUE. Avec saint Joseph ou saint François Xavier, l'un et l'autre patrons de la bonne mort.

JÉSUS DINE CHEZ UN PHARISIEN.

IL LUI REPROCHE DE BORNER SES SOINS AUX OBSERVANCES EXTÉRIEURES ET DE NÉGLIGER SON INTÉRIEUR.

1. Prél. Voir Jésus à table, inspirant le respect aux nombreux convives par la dignité de son maintien et de toute sa personne.

II. Prél. Demander la grâce de réunir en soi les qualités de l'homme intérieur et de l'homme extérieur.

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1. POINT. JÉSUS REPROCHE AU PHARISIEN DE NE SOIGNER QUE L'EXTÉRIEUR.

CONSIDÉRATIONS. Il arriva un jour, dit saint Luc, que Jésus fut invité à dîner chez un Pharisien. Il entra et se mit à table. Alors le Pharisien, raisonnant en lui-même, se demanda pourquoi Jésus ne s'était point lavé les mains avant le repas. Le Seigneur qui connaissait ces pensées lui dit: Vous autres Pharisiens, vous nettoyez le dehors de la coupe... mais ce qui est au dedans de vous est plein de rapines et d'iniquité (Ch. 11). Dans ce langage figuré, où l'homme est comparé à un vase, Jésus ne dit pas qu'il ne faille aucunement soigner l'extérieur ou ce qui dans l'homme paraît aux yeux du monde; mais il veut qu'avant tout on soigne l'intérieur, ou la pureté de l'âme, qui fait tout le mérite de l'homme aux yeux de Dieu.

APPLICATIONS. Si donc nous voulons être à l'abri de tout reproche, nous devons principalement travailler å former en nous l'homme intérieur, viser aux vertus solides, mais sans perdre de vue la formation de l'homme extérieur. Croire que la profession ouverte qu'on fait de piété peut dispenser des règles de l'urbanité et de la bienséance, ou même des attentions délicates commandées par le rang qu'on occupe dans la société, ce serait une grave erreur; ce serait rendre la piété méprisable aux yeux du monde. Gardez-vous-en soigneusement.

AFFECTIONS. Ardents désirs d'atteindre à la perfection chrétienne et devant Dieu, et devant les hommes.

RÉSOLUTIONS. Penser souvent à ces paroles de l'Apôtre: Nous tâchons de faire le bien non-seulement devant Dieu, mais aussi devant les hommes (Aux Cor. 2. 8).

II. POINT. LE CHRÉTIEN SOIGNEUX DE SON INTÉRIEUR. CONSIDÉRATIONS. Il est surtout trois choses qui font l'homme, le chrétien intérieur, l'homme digne des regards et des complaisances de Dieu : 1o La pureté d'âme ou l'absence des souillures du péché, non-seulement du péché mortel, mais autant que possible aussi du péché véniel. Plus cette pureté d'âme est grande, plus Dieu se plaît å se faire connaître et à se communiquer à nous. 2o L'union avec Dieu par l'esprit de prière, par l'usage familier des oraisons jaculatoires; de manière que nous soyons, d'après l'expression de l'Apôtre, des hommes de Dieu; Perfectus sit homo Dei (A Tim. 2. 3), vivant de Dieu et en Dieu; voyant Dieu en tout et toutes choses en Dieu. 3o La droiture d'intention, par laquelle nous

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