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CHAPITRE TROISIÈME.

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Rapport confidentiel de M. de Polignac au roi sur la situation de la France. Rapport sur la situation financière de la Restauration, publié par M. de Chabrol. — Dissolution de la Chambre des députés. Retraite de MM. de Chabrol et Courvoisier:-Entrée de MM. de Peyronnet, Chantelauze et Capelle au ministère. - Incendies dans le nord-ouest de la France.

L'EFFET de ce contact de quelques jours entre le gouvernement et les Chambres, fut de faire sortir le cabinet de son inaction politique, et de donner un nouveau cours aux théories de coups-d'état et de pouvoir constituant, dont la prédication avait marqué les premières phases de son avénement. Il fit désavouer avec éclat ces doctrines, dont le développement contrariait les idées modérées qui dominaient encore dans le conseil. Tout porte à croire à la parfaite sincérité de ces désaveux. L'idée de suspendre, par ordonnance, les garanties consacrées par la Charte, n'avait, à cette époque, acquis aucune consistance réelle; elle n'avait été encore agitée que comme une résolution extrême, dont il ne fau

drait user que lorsque toutes les ressources constitutionnelles auraient été épuisées. Les événements mêmes de juillet ont doté, à cet égard, l'histoire d'un document essentiel (1) qui, en faisant connaître le véritable esprit des ordonnances de 1830, sera, aux yeux de l'équitable postérité, la meilleure apologie des derniers ministres de Charles X. Nous voulons parler du Rapport confidentiel présenté par M. de Polignac au roi, peu de jours après la prorogation des Chambres, sur la situation intérieure et extérieure de la France. Ce Rapport, qui paraît avoir été sollicité par Charles X lui-même mais qui ne fut point soumis au conseil, offre l'expression

(1) Ce document se compose du Rapport proprement dit, dont nous offrons l'analyse dans le texte ci-dessus, et d'une Note écrite de la main de M. de Polignac, Note évidemment antérieure au Rapport, et qui contient l'indication des points principaux sur lesquels il devait porter. En tête de cette Note, on lit ce qui suit, toujours de la main du prince de Polignac : « Ces institutions sont gravées dans les cœurs de tous les Français amis de l'ordre et de la paix publique, et de toutes les personnes dévouées à la monarchie, quelque soit (sic) leur rang et leur position sociale; elles ne sont pas envisagées comme un pacte humiliant fait entre la couronne et la Révolution, mais comme l'expression d'un besoin senti d'une part par le souverain, et de l'autre par la France. Aucun pouvoir ne pourrait arracher ce sentiment de conviction du cœur des Français; il y a déjà jeté des ra

secrète et par conséquent sincère des sentimens et des vues politiques du chef de ce cabinet, si généralement impopulaire.

Le président du conseil ne dissimule point l'agitation qui, au milieu des circonstances les plus prospères, se propage dans les esprits, mais il regarde l'immense majorité de la nation comme absolument étrangère à cette agitation. Cette idée est développée dans un esprit parfaitement constitu

cines tellement profondes que si, par force majeure, un événement quelconque imposait l'obligation de dévier de nos institutions actuelles, cette déviation ne serait (ici le ministre rectifie), cette déviation momentanée ne pourrait être accueillie favorablement que si elle contribuait à assurer les bases de notre système actuel de gouvernement............. (ici le ministre corrige encore), à assurer plus immuablement encore les bases sur lesquelles est fondé le système actuel de notre gouvernement. »

La Note fut saisie au ministère des affaires étrangères pendant les événements de juillet, et le Rapport fut trouvé au Château des Tuileries, lors de son occupation par le peuple. Il est probable que sans ces événements, l'un et l'autre seraient demeurés éternellement ignorés du public. Il nous en coûte d'ajouter que le Rapport du 14 avril a été indignement tronqué par M. Rozet, dans la publication qu'il en a faite à la suite de sa Chronique de 1830, ouvrage si plein d'ailleurs de mérite et d'intérêt. (Voyez aux Documents justificatifs, pièce E, le texte complet de ce Rapport.)

tionnel. A Paris, de même que dans tout le royaume, dit-il, les masses s'occupent uniquement de leurs intérêts matériels; et comme tous les intérêts trouvent une garantie complète dans les institutions octroyées par la couronne, on en jouit en paix. Le renversement de l'ordre de choses établi par la Restauration, consolidé par le gouvernement royal, bouleverserait toutes les existences. Nos lois offrent une carrière dans laquelle l'activité française peut s'exercer sans danger et même avec profit pour la chose publique. Les Français éprouvent d'un côté un vif attachement pour l'égalité devant la loi, de l'autre, une soif véritable de distinction. Nos institutions concilient d'une manière très habile ce double sentiment et lui donnent une satisfaction complète. Les hommes les plus influents par leur rang ou leur fortune attachent un juste prix à la participation que leur qualité de pair ou de député leur donne à l'autorité législative; les propriétaires d'un ordre inférieur trouvent dans l'exercice de moindres prérogatives un contentement d'autant plus vif qu'il ne leur est point interdit d'aspirer à une plus haute existence. La sécurité assurée à la vie privée, la protection offerte à toutes les industries, remplissent les voeux du peuple. En un mot, ce n'est que dans nos institutions actuelles que l'on trouve le bien, ce n'est que d'elles

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