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« L'HISTOIRE Contemporaine, a dit un écrivain moderne, est née sous des gouvernements libres dont elle a perpétué la gloire après qu'ils ont

disparu (1). L'ouvrage qu'on offre au public

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(1) M. LaCRETELLE, Histoire de France depuis la Restauration, tome 1.

A

n'est pas seulement un hommage rendu à la liberté des institutions politiques qui nous régissent: il est encore un consciencieux appel à cette impartialité des opinions, qui, à l'époque de discussion franche où nous vivons, avance rapidement le règne de l'histoire.

En choisissant comme épreuve à ces dispositions la catastrophe la plus mémorable des temps actuels, l'auteur n'a cédé à aucune considération de parti il n'a eu d'autre vue que d'éclairer par une recherche austère de la vérité, cette justice de l'histoire, des événements dont les sources, les caractères et les circonstances ne se sont guère manifestés jusqu'à ce jour que sous l'empreinte

plus ou moins infidèle des préoccupations qui ont assisté à leur enfantement.

Parmi les accusations qu'on a coutume de produire contre l'histoire contemporaine, il en est une surtout tellement accréditée, qu'il y aurait une sorte de présomption à espérer de l'en faire absoudre. On lui reproche de présenter généralement sous un jour faux ou incomplet des événements obscurcis par les déceptions de l'intérêt personnel ou les réticences de l'esprit de parti on lui impute surtout d'exprimer sur des faits mal connus des opinions nécessairement dépourvues de ce calme d'observation, de cette maturité de jugement qui semblent ne devoir appartenir qu'à la lente et salutaire action du temps.

Ces reproches, trop autorisés par un grand nombre d'histoires contemporaines, sont loin sans

doute d'être entièrement dénués de justesse et de

fondement. Mais, pour y attacher une importance absolue, il faudrait qu'il fût bien établi que, par un privilége inhérent à sa nature, l'histoire que nous appellerons séculaire en est nécessairement exempte, et qu'elle réalise toutes ces conditions d'exactitude et d'impartialité.

Or, il n'en est point ainsi. L'histoire des événements éloignés ne pouvant se composer qu'à l'aide de révélations empruntées aux versions contemporaines, se charge nécessairement des infidélités et des imperfections dont elles abondent. Il lui faut hériter de leurs dissimulations officieuses et de leurs complaisances intéressées, exalter à leur exemple des qualités imaginaires, négliger ou calomnier des vertus réelles, et per

pétuer dans la postérité la plus reculée les honteux monuments de l'ingratitude humaine. Mais c'est peu. A quelques siècles des hommes et des temps, quel esprit de critique assez exercé, quel discernement assez sûr inspirera toujours l'historien dans l'élection des faits, dans l'appréciation des caractères? Aux passions des mémorialistes contemporains, inévitablement réfléchies dans ses ouvrages, n'aura-t-il pas à joindre le tribut de ses propres incertitudes? Quelle apparence que la vérité sorte constamment pure et inaltérable de ce choc de préventions et d'obscurités ? Le moyen, qu'au milieu de tant d'efforts déchaînés pour en altérer l'éclat, le burin de l'observateur la transmette toujours intacte aux générations futures, d'autant plus disposées à le croire sur parole

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