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usum continentiæ non invenit, neque castitatem antè promisit compellatur à sua uxore separari. Il prescrivit donc aux évêques de ne plus ordonner des sous-diacres sans leur faire promettre la continence, et de ne point donner le diaconat aux anciens sous-diacres sans les avoir éprouvés longtemps. En conséquence, les sous-diacres promirent à leur ordination d'être chastes, et la loi du célibat leur devint commune. (C. 1, 5, dist. 18; c. 2, de Cleric. conjug.)

Quant aux autres clercs, le mariage ne leur a jamais été défendu, quoique l'Église ait toujours désiré que tous ceux qui sont employés aux fonctions ecclésiastiques fussent dans un état pur et exempt de toute incontinence. Mais comme l'état du mariage aliène nécessairement le cœur de tout autre objet pour l'attacher à sa famille, le pape Alexandre III déclara le mariage incompatible, sinon avec les ordres mineurs, du moins avec les bénéfices, dont les revenus ne sont pas faits pour élever des enfants dans le siècle. Ce pape rendit sa constitution à ce sujet dans un temps où l'abus du célibat était presque général parmi les ecclésiastiques, ce qui en rendait l'exécution non seulement difficile, mais dangereuse. En voici la preuve dans ses propres termes : De clericis inferiorum ordinum, qui in conjugio constituti, diu ecclesiastica beneficia, ex concessione prædecessorum nostrorum habuerunt, à quibus sine magno discrimine ac effusione sanguinis non possunt privari; id duximus respondendum, provideas attentiùs ne deinceps clericus conjugatus, ad ecclesiastica beneficia, vel sacros ordines, vel administrationes ecclesiasticas admittatur.

Le pape Innocent III confirma ce décret, et en donna pour raison que les fonds des bénéfices se dissipaient entre les mains de ceux qui ont famille, præsertim cùm rerum ecclesiasticarum substantia per tales soleat deperire. (Decret., liv. III, c. 2, 3, 5; de Cleric. conjug., c. 1, 3.)

Ce même pape, après avoir décidé qu'on ne peut contraindre un clerc marié de porter la tonsure, décide aussi que ce clerc marié ne peut jouir du privilége clérical in rebus suis. (Cap. 7, 9 et 10, de Cleric, conjugal.) Boniface VIII, conformément à la constitution du pape Innocent III, fit à ce sujet une distinction que le concile de Trente a confirmée: Si clericus conjugatus ferat habitum et tonsuram clericali privilegio gaudet, alias non. (Rub. in c. 1. de Cleric. conjug. in 6.) Le même concile dit ailleurs que s'il ne se trouve pas sur le lieu des clercs dans le célibat pour faire les fonctions des quatre ordres mineurs, on en pourra mettre en leur place des mariés, qui soient de bonne vie, capables de rendre service, pourvu qu'ils ne soient point bigames, et qu'ils aient la tonsure et portent l'habit clérical dans l'église.

Sur ces dispositions du concile de Trente, le père Thomassin (1) observe que l'Église a rétabli les priviléges des cleres mariés dès

(1) Discipline de l'Eglise, part. 1v, ltr. 1, hip. 4 et 5,

que l'abus du célibat n'a plus été si grand, et qu'il n'a plus fallu le punir par une incompatibilité absolue entre les bénéfices et l'état du mariage. Cet abus, au reste, ne tendait à rien moins autrefois qu'à rendre le mariage permis aux prêtres mêmes; ceux de Suède se vantaient, continue le même auteur, d'avoir obtenu du SaintSiége la permission de se marier. Innocent III, consulté par un archevêque de ce royaume, ne voulut rien résoudre sans avoir vu ce prétendu privilége; il fallut que le concile de Schening, en 1248, enjoignit aux prêtres de quitter leurs femmes. En Angleterre, le désordre était encore plus grand; le concile de Vinchester, tenu sous Lanfranc, laissa les prètres mariés avec leurs femmes; il leur défendit seulement de se marier à l'avenir. On peut prendre une idée de ces désordres, ainsi que des lois rigoureuses que l'Église y a toujours opposées, dans l'ouvrage de Thomassin que nous venons de citer. (Voyez cONCILE, AGAPÈTES.) Nous nous bornerons à dire ici sur cette matière que le célibat a toujours été regardé dans l'Église latine comme essentiel à l'état des ecclésiastiques constitués dans les ordres sacrés, ainsi que nous l'avons déjà remarqué. (Distinct. 27, caus. 27, q 1; totum tit. extr. Qui cleric. vel. voventes matrim. contrahunt.) Le concile de Trente rejeta les propositions qui tendaient à enfreindre un usage si ancien et si édifiant, can. 9. Le canon suivant porte: « Si quelqu'un dit que l'état du mariage doit être préféré à l'état de virginité ou du célibat, et que ce n'est pas quelque chose de meilleur et de plus heureux de demeurer dans la virginité ou dans le célibat, que de se marier, qu'il soit anathème. >> Les ordres sacrés forment done incontestablement un empêchement dirimant de mariage. (Voyez EMPÊCHEMENT.)

Les anciens canons ordonnaient la déposition des cleres qui se mariaient dans les ordres; plusieurs conciles, comme le huitième de Tolède, imposaient de plus la prison au clerc et à sa femme (1). Par le canon Decernimus, 28, dist. 2, ils sont seulement privés de l'office et du bénéfice. Enfin Alexandre III les oblige dans sa décrétale, Si qui cleric., de Cleric. conjug., de renvoyer leurs femmes, les soumet à la pénitence et ordonne contre eux la suspense et l'excommunication: Si qui clericorum infrà subdiaconatum acceperint urores, ipsos ad relinquenda beneficia et retinendas uxores districtione ecclesiastica compellatis; sed si in subdiaconatu et aliis superioribus ordinibus uxores accepisse noscuntur, eos uxores dimittere et pænitentiam agere de commisso, per suspensionis et excommunicationis sententiam compellere procuretis. Le même pape décida. que le clerc ainsi puni pouvait rentrer dans l'exercice de ses fonctions, si après avoir fait sa pénitence l'évêque le lui permettait. (Cap. 4, eod.)

Un bénéficier qui se marie perd donc ses bénéfices, et le collateur peut les conférer à d'autres. (C. Diversis, de Cleric. conjug.)

(1) Thomassin, Discipli e de l'Église, part. IV, liv. 1, chup. 28, n. 4.

(.

Un concile de Londres, tenu l'an 1237, canon 15, déclare les bénéfices des clercs mariés vacants de droit : Si repertum fuerit clericos contraxisse matrimonium, ab ecclesiasticis beneficiis, quibus eos ipso jure decernimus fore privatos, removeantur omninò. Cette vacance de droit n'est pas bien expressément ordonnée par les décrétales, mais elle n'est plus contestée depuis le décret du concile de Trente.

Il arrive quelquefois que le pape dispense un clerc qui n'est encore que sous-diacre, de ses engagements, pour pouvoir contracter mariage, mais il faut pour cela que la dispense allègue qu'il a été forcé de recevoir les ordres, ou que son mariage intéresse la tranquillité d'un État, comme ceux des princes. (Voyez vŒU, § IV.)

Reste à dire un mot de la discipline de l'Église grecque touchant le célibat des clercs. Le canon 5 des apôtres défend aux prêtres et aux diacres de se séparer de leurs femmes: Episcopus, presbyter aut diaconus uxorem suam prætextu religionis non abjicito, si abjicit, segregatur à communione; si perseverat, deponatur. Sur cette autorité, les grecs ont toujours cru que si le mariage n'est pas permis aux prêtres après leur ordination, il ne leur est pas défendu d'user de celui qu'ils ont contracté avant. Cependant, depuis que le concile de Nicée, can. 3, s'était déclaré contre l'avis de Paphnuce, cet illustre solitaire, qui, après avoir passé près de quatre-vingts ans dans le célibat, opinait pour le mariage des clercs; depuis, disons-nous, que ce saint concile avait défendu aux clercs et aux prêtres jusqu'à l'usage des femmes sous-introduites ou sœurs adoptives (voyez AGAPÈTES), les Grecs n'étaient pas bien décidés sur cette matière; ce ne fut que dans leur fameux concile in Trullo, appelé par les Latins le septième concile général (voyez CONSTANTINOPLE), qu'ils firent à cet égard un canon dont ils ne se sont plus écartés. Ce canon, qui est le douzième, permet le mariage avant l'ordination des prêtres, des diacres et des sous-diacres; mais après l'ordination il ne le permet qu'aux chantres et aux lecteurs. Quant aux évêques, on peut les élever à l'épiscopat, dans l'état du mariage, mais dès lors ils sont obligés de se séparer de leurs femmes, qui se retirent dans un couvent, ou sont élevées selon leur mérite au rang de diaconesses. Cette dernière disposition touchant les évêques est contraire au canon cité des apôtres: Balsamon en donne pour raison que les évêques du concile n'ont pas eu dessein de détruire le canon apostolique, mais seulement de porter la police de l'Église et la pureté des ministres de l'autel à un plus haut degré de perfection que n'avaient pu faire les apôtres, lesquels avaient été obligés, en formant l'Église, d'user de beaucoup de condescendance.

Le père Thomassin (1) dit que le concile in Trullo se porta à un grand excès, quand il invectiva contre la nécessité que l'Église latine impose aux prêtres et aux diacres de s'abstenir de la compagnie

(1) Discipline de l'Église, part. II, liv. 1, ch. 28, n. 13; part. III, liv. 1, ch. 27.

des femmes qu'ils avaient épousées avant leur ordination. Mais c'est l'ordinaire, continue-t-il, les faibles ont beaucoup de peine à souffrir la vertu des forts, et les forts ne font jamais mieux paraître la grandeur de leur âme qu'en souffrant et épargnant la faiblesse des autres; l'Église souffrait avec patience et avec charité l'incontinence des Grecs, et les Grecs ne pouvaient souffrir l'exacte pureté des Latins.

« Le célibat des ecclésiastiques, dit avec juste raison Bergier (1), procure à l'Église et à la religion chrétienne un avantage très réel, qui est d'avoir des ministres uniquement livrés aux fonctions saintes de leur état et aux devoirs de charité, des ministres aussi libres que les apôtres, toujours prêts à porter comme eux la lumière de l'Évangile aux extrémités du monde. Les hommes engagés dans l'état du mariage ne se consacrent point à servir les malades, à secourir les pauvres, à élever et à instruire les enfants, etc. Il en est de même des femmes; cette gloire est réservée aux célibataires de l'Église catholique. »

Quant au privilége clérical accordé aux clercs mariés, par le pape Boniface VIII et le concile de Trente, on ne le connaît pas en France. Un clerc ne saurait jouir dans ce royaume des priviléges des ecclésiastiques dans l'état du mariage.

Les ordres sacrés forment parmi nous, comme par toute l'Église latine, un empêchement dirimant de mariage, même civil. Sous ce dernier rapport, les jugements des tribunaux n'ont pas toujours été unanimes, plusieurs arrêtés, que nous croyons inutile de rapporter ici, ont favorisé le mariage des prêtres. Mais actuellement la jurisprudence paraît irrévocablement fixée en sens contraire. Voici les principales décisions intervenues sur ce point. On les trouve in extenso dans notre Cours de droit civil ecclésiastique.

Une lettre ministérielle, du 12 janvier 1806, établit une prohibition générale au mariage des prêtres; une seconde lettre, du 30 janvier 1807, restreint la prohibition aux prêtres qui ont toujours continué ou qui ont repris les fonctions de leur ministère.

Arrêt de la cour royale de Paris, du 18 mai 1818, qui prononce, sur la demande des parents collatéraux, la nullité d'un mariage contracté par un prêtre, bien que ce prêtre n'eût pas continué, ni repris ses fonctions depuis le concordat.

Jugement du tribunal de Saint-Girons (Ariége), du 30 mai 1829, défendant de procéder au mariage d'un prêtre.

Dans l'affaire Dumonteil, jugement du tribunal de Paris, du 10 juin 1828, et arrêt de la cour royale de Paris, du 27 décembre 1828. Enfin, depuis la Charte de 1830, qui ne reconnaît plus de religion de l'État, il a de nouveau été jugé sur une nouvelle instance introduite par le prêtre Dumonteil, par la cour royale de Paris, le 14 janvier 1832, et par la cour de cassation, le 21 février 1833, qu'aujour

(1) Dictionnaire de théologie, art, CÉLIBAT.

d'hui, comme autrefois, tout individu promu aux ordres sacrés, ne pouvait, même en y renonçant, être admis à contracter mariage; que les officiers de l'état civil devaient refuser des mariages semblables; que ni le Code civil, ni la Charte nouvelle n'avaient apporté à cet égard aucune modification au droit préexistant. (Voyez EMPĖCHEMENT.) Il en est de même depuis la Constitution de 1852 qui, comme les autres constitutions de 1814,de 1830 et de 1848, garantit protection au culte catholique. En effet, n'est-il pas bien évident que cette protection ne serait qu'une amère dérision si l'autorité civile, malgré les lois formelles et fondamentales de l'Eglise catholique en matière de discipline, permettait le mariage aux prêtres, même à ceux qui auraient abandonné leurs fonctions? Le clergé français est incontestablement admirable par ses vertus. Mais qui ne sait que dans ce corps si vénérable à tous égards, il ne se trouve quelques membres faibles et lâches qui oublient les engagements sacrés qu'ils ont contractés avec connaissance de cause au pied des saints autels, non seulement en présence de Dieu qu'ils ont pris pour leur unique partage, mais encore de la société tout entière, et notamment de la société catholique avec laquelle ils se sont liés par des vœux solennels et irrévocables? Quelle influence funeste ne pourraient-ils pas exercer sur des cœurs jeunes et inexpérimentés, si la loi civile promettait sa sanction à des unions coupables, illégitimes et sacriléges! Évidemment la juste susceptibilité de beaucoup de familles catholiques, à qui la loi promet aussi protection, en serait justement alarmée. La Cour de cassation et la Constituante ont donc convenablement interprété la loi, conforme en cela à l'opinion publique, en déclarant que, d'après le concordat, les anciens canons qui prescrivent le célibat à tous ceux qui sont engagés dans les ordres sacrés sont encore en vigueur parmi nous, et qu'ils continuent d'être un empêchement dirimant au mariage.

A ces raisons de convenance puisées dans la loi civile, et aux canons que nous avons cités en faveur du célibat ecclésiastique, nous ajouterons ces solennelles paroles que Grégoire XVI adressait aux évèques dans son encyclique du 15 août 1832, et par lesquelles il flétrit les tentatives honteuses faites contre le célibat ecclésiastique.

« Nous voulons ici, dit ce Pontife, de glorieuse mémoire, exciter votre zèle pour la religion contre cette ligue honteuse à l'égard du célibat ecclésiastique, ligue que vous savez s'agiter et s'étendre de plus en plus; quelques ecclésiastiques même joignant pour cela leurs efforts à ceux des philosophes corrompus de notre siècle, oubliant leur caractère et leurs devoirs, et se laissant entraîner par l'appât des voluptés jusqu'à ce point de licence qu'ils ont osé en quelques lieux adresser aux princes des prières publiques réitérées pour anéantir cette sainte discipline. Mais il nous est pénible de vous entretenir longtemps de ces honteuses tentatives, et nous nous confions plutôt sur votre religion pour vous charger de conserver, de venger, de défendre de toutes vos forces, suivant les règles des ca

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