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Messieurs les sots, je veux, en bon chrétier,
Vous siffler tous; car c'est pour votre bien.
VOLTAIRE.

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AU BUREAU DES LETTRES NORMANDES, rue Saint-

Hyacinthe-Saint-Michel, n° 27.

Et chez FOULON et comp., rue des Francs-Bourgeois-Saint-

Michel, no 3.

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LETTRES NORMANDES.

Messieurs les sots, je veux, en bon chrétien
́Vous siffler tous; car c'est pour votre bien.
VOLTAIRE.

SOMMAIRE.

Du ministère dont la France est menacée. -Spectacles. Des Missions de Brest. Les Torpilles

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Mosaïque politique et littéraire.

LETTRE PREMIÈRE.

Paris, le 18 novembre 1819.

Du Ministère dont la France est menacée.

J'ai long-temps traité de fable la nouvelle du chan

ΔΙ

gement de ministres, et de l'érection d'un ministère ultra-royaliste. Il est un degré d'aveuglement que l'on ne doit pas supposer, il est des absurdités si palpables, que l'on craint d'être absurde soi-même si l'on ajoute foi à leur existence. Je ne croyais pas qu'il fût permis de penser que le ministère actuel, quelque inexpérimenté, quelque ignorant même qu'il soit, portât cependant la folie jusqu'à se faire l'instrument

d'une révolution qui serait ridicule, si elle n'était pas funeste. Que les ultrà-royalistes se croient les plus forts, les plus nombreux, les plus éclairés, ils ont leurs raisons pour rester dans cette opinion; mais qu'un ministre qui leur a fait une guerre opiniâtre et mortelle pendant quatre ans, dont un des titres est la loi des élections, loi qui frappe de mort le parti royaliste; qu'un homme d'état, qui l'année dernière redevint populaire un moment malgré tant de torts, de palinodies, seulement pour avoir résisté aux aristocrates, qu'un ministre abhorré des ultrà qui cherchent à tirer parti de ses services, comme on emploie ceux des hommes de police, et méditent de l'abandonner, alors même qu'ils le caressent, et le déshonorent, se tourne vers ses implacables ennemis, qu'il leur offre le pouvoir, lui qui connaît si bien leur inutilité, leur aveuglement, leur néant, c'est ce que je ne comprendrai jamais, c'est ce qui m'a forcé long-temps à ranger la nouvelle du changement de ministres parmi ces mille et un bruits qui se répandent chaque jour, ou peut-être parmi les mensonges semés à dessein pour faire baisser les fonds, et favoriser l'agiotage.

Il a fallu cependant sortir de cette incrédulité. La nouvelle s'est soutenue, elle s'est confirmée; et quoique l'on essaie aujourd'hui de la démentir faiblement, il paraît que nous sommes encore menacés de la voir se réaliser. Le Courrier lui-même est attéré; les doctrinaires sentent déjà l'effet naturel des persécutions. Leur nombre grossit. Ils étaient six; les voilà huit dans ce moment. On croit que leur nombre pourra bien aller jusqu'à douze. Le Journal de Paris

n'imite pas son collégue. Il suit la fortune de M. Decazes; mais s'il a déserté avec armes et bagages le camp des ci-devant ministériels, le Journal des Débats, par un revirement naturel, est devenu l'apologiste du grand ministre. On va jusqu'à prétendre que la Quotidienne a consenti à recevoir parmi ses rédacteurs un délégué du ministère de l'intérieur. Si le Conservateur vivait encore, son rédacteur, M. le vicomte de Châteaubriand, consacrerait sa brillante éloquence à faire le panégyrique de M. Decazes. Il se contenterait, pour satisfaire sa conscience, d'oublier quelques traits de la vie politique de son héros. On prétend qu'un faiseur de caricatures doit en publier une d'un genre nouveau, et qui paraîtra sans doute assez piquante. Elle représentera l'auteur d'Atala, tenant à la main l'histoire de M. Decazes, et arrachant quelques pages. Ainsi jadis Clio traitait le grand Condé.

On attribue à deux causes le changement présumé du système de gouvernement. La première serait la nomination de M. Grégoire; la seconde serait l'expulsion des missionnaires de Brest. Alors même que la nomination de M. Grégoire serait contraire à l'intérêt bien entendu de la liberté, était-ce là un motif bien valable pour changer le système. Quelle est donc l'influence d'un homme sur une grande assemblée? et si l'on pouvait craindre d'ailleurs un retour vers 1793, serait-ce un bon moyen pour nous en éloigner que de nous ramener vers 1815? Être persécuté par les jacobins ou par les ultra-royalistes, quelle est la différence? Être exilé par les Bouville et les Labourdonnaye, ou par les Marat et les Robespierre, cela ne revient-il pas au même ? et

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