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posé de la même manière; on peut bien former un second poIyèdre symétrique au premier et qui lui soit égal dans toutes ses parties constituantes, mais les faces y seroient disposées dans un ordre inverse autour de chaque angle solide, et ces deux solides ne pourroient être superposés. Ainsi ce cas ne fait aucune exception à la proposition générale.

C'est sans doute un problême plus que déterminé, que celui de construire un polyèdre avec des faces données et assemblées suivant un ordre donné; mais l'analyse ne s'applique pas avec succès à ce genre de problême, il n'y a pas précisément de caractère analytique qui distingue un polyèdre convexe d'un polyèdre qui a des angles rentrans. D'ailleurs l'analyse d'où l'on devroit conclure qu'un seul polyèdre satisfait à la question, ne manque-> roit pas d'être extrêmement compliquée. Il faut donc savoir en pareil cas se tracer une route particulière pour parvenir à la solution; ce n'est que par une profonde méditation du sujet et par des réductions à l'absurde qu'on peut espérer de réussir dans ces sortes de recherches qui, pour la difficulté et pour le genre de méthodes, ont quelque analogie avec celles qui s'offrent à chaque pas dans la théorie des nombres.

En donnant une idée de la difficulté de la question que nous avions proposée à M. Cauchy, nous mettons la classe à portée d'apprécier le mérite de la solution qu'il en a donnée dans le mémoire dont nous avons à rendre compte.

Ce mémoire est divisé en deux parties : la première contient huit théorêmes sur les polygones convexes rectilignes ou sphériques. La seconde en contient cinq sur les angles solides et les polyèdres convexes. Mais ce dernier est l'objet principal du Mémoire, et les autres ne doivent être considérés des lemmes nécessaires à la démonstration de celui-ci.

que comme

Dans la première partie, l'auteur considère les variations qui peuvent avoir lieu dans les angles d'un polygone convexe, rectiligne ou sphérique, dont les côtés demeurent constans. Si le polygone n'avoit que trois côtés, il ne pourroit y avoir aucune variation dans les angles. Ainsi on suppose constamment que le polygone a au moins quatre côtés ; alors on voit que sans cesser d'être convexe, il peut, en conservant les mêmes côtés, prendre une infinité de formes différentes. J'avois donné deux propositions sur cet objet dans la première édition de ma Géométrie; M. Cauchy a porté jusqu'à huit le nombre de ces propositions, et les a démontrées d'une manière qui lui est propre.

Dans la seconde partie, l'auteur applique d'abord aux angles solides les résultats qu'il avoit trouvés pour les polygones sphé

riques. Les deux théorêmes qu'il donne à cet effet peuvent être compris dans l'énoncé suivant:

« Si les angles plans qui composent un angle solide convexe à » plus de trois faces, demeurent constans et qu'on fasse varier » d'une manière quelconque les inclinaisons mutuelles de ces » plans, ou, pour abréger, les inclinaisons sur les arêtes, si » on met ensuite sur chaque arête le signe + ou le signe —, se» lon que l'inclinaison sur cette arête augmente ou diminue, et » qu'on ne mette aucun signe aux arêtes sur lesquelles l'incli»naison ne varieroit pas, je dis qu'on trouvera au moins quatre » variations de signe en faisant le tour de l'angle solide. »

De là M. Cauchy passe aux théorêmes II 12 et 13, sur les polyèdres convexes. Le théorême 11 n'est autre chose que le théorême d'Euler connu par la notation S + H = A + 2. Le théorême 12 est une extension fort remarquable du théorême d'Euler au cas où les faces au lieu d'être planes, seroient considérées simplement comme des espaces terminés par plusieurs droites non situées dans le même plan. En effet, si chacun de ces espaces compte pour une face, si en même temps les angles solides continuent d'être convexes, il n'y a aucun changement à faire à la démonstration du théorême d'Euler, telle que je l'ai donnée dans ma Géométrie, et on parvient toujours à l'équation S+HA+2.

Pour venir enfin à la démonstration du théorême 13, qui est l'objet principal de ce Mémoire, l'auteur suppose d'abord qu'on fasse varier à-la-fois les inclinaisons sur toutes les arêtes. Cette supposition ne pourroit avoir lieu à l'égard des angles solides triples qui sont invariables; mais dans tout polyèdre donné on peut supprimer les angles solides triples, et le théorême ne sera à démontrer que pour les polyèdres dont tous les angles solides sont composés de quatre angles plans ou plus.

Supposant donc avec l'auteur que les inclinaisons sur les arêtes varient toutes à-la-fois, cherchons combien il y a de variations de signe d'une arête à la suivante. Il y a deux manières de compter ces variations; l'une en les considérant successivement sur les divers angles solides, l'autre en les considérant sur les diverses faces. On est d'ailleurs assuré que le nombre total, estimé d'une manière ou de l'autre, sera toujours le même; car deux arêtes consécutives qui appartiennent à l'un des angles solides, appartiennent en même temps à l'une des faces, et vice

verså.

Cela posé, puisqu'en vertu du théorême rapporté ci-dessus on doit compter au moins quatre variations autour de chaque

angle solide, le nombre cherché N devra au moins être égal à 4S, de sorte qu'on aura N 4 S. C'est la première limite

de N.

En second lieu, si on examine les successions de signes placés sur les côtés de chacune des faces et qu'on estime les variations au plus grand nombre possible, on trouve que dans un triangle le nombre des variations ne peut être plus grand que 2; que dans un quadrilatère et dans un pentagone il ne peut surpasser 4; que dans un hexagone et dans un heptagone il ne peut surpasser 6, et ainsi de suite. Donc, si la surface du polyèdre est composée de triangles, de b quadrilatères, de c pentagones, etc., le nombre total des variations ne pourra être plus grand que 2 a + 4 b + 4c+6d+6e + etc.

-

a

Mais il est facile de voir, au moyen de l'équation S+H=2, que la quantité précédente est moindre, ou tout au plus égale à 4S-8. Donc on auroit à-la-fois N> 4 Set N <4 S − 8; résultat absurde, et nous conclurons qu'il est impossible que les inclinaisons sur les arêtes varient toutes à-la-fois dans le polyèdre donné.

Supposons maintenant que les inclinaisons sur quelques-unes des arêtes demeurent constantes, tandis que les autres varient; si on supprime toutes les arêtes où l'inclinaison ne varie pas, on supprimera en même temps des parties de la surface du polyedre proposé, qui ne seront sujettes à aucune variation, et on aura un polyèdre nouveau, dont toutes les faces ne seront point planes, mais qui tombera dans le cas du théorême 12, et qui, par conséquent, satisfera encore à l'équation:

S+ H = A + 2, entendant par H le nombre total des faces, soit planes, soit terminées par une suite de droites non situées dans un même plan.

Ayant ainsi réduit le polyèdre proposé à un autre dans lequel les inclinaisons sur les arêtes varient toutes à-la-fois, on retombe dans le premier cas, et on conclut de même que la figure du polyèdre est invariable.

1l est donc démontré que deux polyèdres convexes sont égaux et peuvent être superposés, lorsqu'ils sont compris sous un même nombre de polygones égaux chacun à chacun, et disposés de la même manière dans les deux solides.

Nous voulions ne donner qu'une idée de la démonstration de M. Cauchy, et nous avons rapporté cette démonstration presque toute entière. Nous avons ainsi fourni une preuve plus évidente de la sagacité avec laquelle ce jeune géomètre est parvenu à vaincre une difficulté qui avoit arrêté des maîtres de l'art, et

qu'il étoit important de résoudre pour le perfectionnement de la théorie des solides. Nous pensons, en conséquence, que ce Mémoire mérite d'être approuvé par la classe et imprimé dans le Recueil des Savans étrangers.

Signé BIOT, CARNOT, LE GENDRE, rapporteur.

La classe approuve le rapport et en adopte les conclusions.

S. II.

ANNONCES D'OUVRAGE S.

Rapport du Conseil de Perfectionnement de l'Ecole Impériale Polytechnique, session de 1811 à 1812.

Journal de l'Ecole Polytechnique, publié par le Conseil d'Iustruction de cet établissement, 7°. et 8°. cahiers; 1 vol. in-4°. Ce cahier contient les leçons de mathématiques données à l'ancienne Ecole Normale, par MM. LAGRANGE et LAPLACE, et un Mémoire sur le contact des sphères, par FERMAT, trad. du latin par M. HACHETTE.

Traité de Mécanique, par M. POISSON, 2 vol. in-8°.

Sommaires des Leçons du Cours de Mécanique de M. PRONY; 1 vol. in-4°.

Supplément de la Géométrie descriptive de MONGE, par M. HACHETTE, 1 vol. in-4°.

Uranographie, ou Traité Elémentaire d'Astronomie, par M. FRANGOUR; 1 vol. in-8°.

Sidérotechnie, ou l'Art d'extraire la fonte, le fer, l'acier, des minerais qui les contiennent, par M. HASSENFRATZ, 4 vol. in-4°., et 80 planches.

Mémoire sur les Tribus arabes des déserts de l'Egypte, Mémoire sur les branches du Nil, par M. DUBOIS AIMÉ, ancien élève de l'Ecole Polytechnique, directeur des douanes à Livourne.

Dictionnaire historique de Musique, par M. CHORON, ancien élève de l'Ecole Polytechnique; 2 vol. in-8°.

M. GAULTIER, Professeur de Géométrie descriptive au Conservatoire des Arts, a présenté à l'Institut un Mémoire fort inte ressant sur les contacts des sphères. On en rendra compte dans le prochain cahier.

S. III.
PERSONNEL.

M. Durivau, chef de bataillon du Génie, a été nommé, par décret impérial du 17 avril 1812, directeur des Etudes de Î'Ecole Polytechnique. M. le baron de Vernon, qui occupoit cette place, a été admis à la retraite.

M. Poisson a été nommé par Sa Majesté, Examinateur de l'Artillerie, le 18 avril 1812, et Membre de l'Institut, le 23 mars même année.

M. Etienne-Louis Malus, major au corps impérial du Génie, Membre de la Légion d'Honneur, de l'Institut impérial de France, nommé provisoirement Directeur des Etudes de l'Ecole Polytechnique, est décédé le 23 février 1812, âgé de 37 ans. Les Elèves présens à ses funérailles ont entendu avec émotion et attendrissement les éloges prononcés sur sa tombe par

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