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quérir merci au roi, et à lui donner caution de sa <«< bonne conduite. » (Voyez le travail des commissaires joint à l'arrêt du 29 mai 1764, dans la liasse cotée comité secret du 29 au 30 mai 1764.)

Quelle objection pourrait-on tirer d'un arrêt ainsi apprécié par les successeurs des mêmes juges qui l'ont rendu ?

Le duc de Rohan se mit à la tête des religionnaires, il assiégea plusieurs villes, s'empara des deniers royaux, etc. Le roi Louis XIII rendit, le 14 octobre 1627, une déclaration portant pouvoir au parlement de Toulouse de juger ce duc.

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Cette déclaration porte : « Nonobstant tous priviléges, même celui de la pairie, dont il est déchu et « s'est rendu indigne, attendu l'énormité du crime << notoire de rébellion, et attentat par lui téméraire«<ment avoué contre notre autorité et le repos de notre royaume. »>

Le parlement de Toulouse se crut par-là autorisé à faire le procès au duc, parce qu'il ne le considéra plus comme pair de France.

Mais, à cette occasion, les mêmes commissaires dont j'ai déjà cité le rapport, ont fait à ces lettres une réponse si juste et si lumineuse que nous n'aurons rien à y ajouter ; la voici : « Ces lettres patentes

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qui déclarent le pair accusé déchu de la pairie par « le fait même, ne présentent qu'une pétition de principe. Elles supposent un premier jugement qui n'existe pas, puisque le délit n'a point été léga«<lement constaté; ce qui rend nulle de plein droit << l'instruction subséquente, qui, ne pouvant être

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régulière qu'autant qu'elle serait la suite d'une dégradation légitimement prononcée, est sans «< fondement lorsque le pair n'a pas été privé de la pairie par un jugement émané du tribunal qui peut « seul connaître de son honneur et de son état. »

Monsieur, frère de Louis XIII, s'étant retiré en Lorraine, il y fut suivi par les ducs de Bellegarde et d'Elbeuf. Le roi donna, le 30 mars 1631, une déclaration par laquelle ces deux ducs sont déclarés criminels de lèse-majesté, et renvoyés pour être jugés au parlement de Dijon.

Le duc de Bellegarde refusa de reconnaître ce parlement. Le 25 avril, il écrivit aux juges : « La qualité que je possède de duc et pair de France, « me dispense de reconnaître d'autres juges que l'au<< guste parlement de Paris. >>

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On lui fit son procès par contumace à Dijon.

Mais peu de temps après il obtint des lettres d'a

bolition. Le parlement de Paris les entérina le 7 janvier 1633, mais en même temps la cour dit que » le « roi serait supplié de maintenir en temps et lieu, << sa cour de parlement en ses priviléges, pour ce qui est des ducs et pairs, et autres officiers y ayant

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<< séance. >>

Cela n'empêcha pas le duc d'Elbeuf d'être condamné par le parlement de Dijon, le 24 janvier 1643; mais il invoqua le privilége des pairs devant le parlement de Paris, conclut à la nullité des poursuites et de la condamnation; et, le 17 juillet 1643, il obtint un arrêt par lequel « dit a été sans s'arrêter aux<< dites procédures extraordinaires, information, dé

<«< faut de contumace, condamnation et exécution, «< comme nulles, et lesquelles la cour a cassées et « annulées comme faites au préjudice des priviléges « des ducs et pairs de France, que ladite cour a

déchargé ledit duc d'Elbeuf de l'accusation contre <«<lui portée, sauf à lui à se pourvoir pour ses dépens, dommages-intérêts, contre qui et ainsi qu'il verra

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« être. »

Par tous ces arrêts on voit clairement que le droit des pairs est sorti victorieux des attaques qu'on voulait lui porter.

Le duc de Montmorency, gouverneur du Languedoc, s'était joint aux amis de Monsieur, frère de Louis XIII; il avait engagé dans ce parti les États de la province, et avait projeté des liaisons avec l'étranger. Il fut fait prisonnier dans une action contre les troupes du roi, déclaré criminel de lèse-majesté par des lettres patentes du 23 juillet 1632, enregistrées au parlement de Toulouse; et condamné par ce parlement le 30 octobre 1632, à avoir la tête tranchée; ce qui fut exécuté le même jour.

La déclaration adressée au parlement de Toulouse, pour juger ce duc, porte, comme celle du duc de Rohan (suprà p. 12), nonobstant le privilége de pairie dont nous l'avons déclaré indigne et déchu.

Le duc protesta en ces termes : » Messieurs, dit-il, quoique vous ne soyez pas mes juges na« turels, en mà qualité de duc et pair de France; << néanmoins, puisque le roi veut que je vous ré« ponde, je le ferai, »>

Et dans l'arrêt du 24 novembre 1643, par lequel

le parlement de Paris enregistra les nouvelles lettres par lesquelles le roi faisait don de la terre de Montmorency à madame la princesse de Condé, la cour dit « qu'elle avait procédé à la vérification desdites <«<lettres, sans approbation du jugement donné à << Toulouse le 30 jour d'octobre 1632, contre le « feu sieur de Montmorency, lequel, en qualité de « duc et pair, ne devait être jugé qu'au parlement

« de Paris. >>

N'est-ce pas dire clairement que sa condamnation était illégale, et par conséquent injuste?

Le même règne de Louis XIII nous offre encore une circonstance où le ministre de ce prince voulut faire plier la règle sous le poids de l'arbitraire.

Le duc de La Valette, fils du duc d'Épernon, fut soupçonné d'avoir occasioné la levée du siége de Fontarabie, par l'armée du roi que conmandait le prince de Condé. Richelieu voulut lui faire faire son procès au conseil privé; ce qui fut exécuté en 1639. Le premier président, tous les présidens et le doyen du parlement furent mandés, ainsi ainsi que les gens du roi,

à Saint-Germain.

Dans ce conseil où étaient le Roi, quelques ducs, les conseillers d'état et les membres ci-dessus désignés du parlement, le duc de La Valette fut décrété et condamné par contumace à avoir la tête tranchée.

On voit dans les Mémoires de M. TALON (t. 1er p. 256 et suiv.) que le premier président et plusieurs des magistrats (MM. PINON, NESMond, Séguier, de BELLIEVRE), appelés pour assister à ce assister à ce procès dans le conseil, réclamèrent le droit du parlement et de la

pairie, ce qui leur attira, même des discours trèsdurs......

Mais en 1643, le duc de La Valette présenta requête au parlement pour purger la contumace, et par arrêt du 26 juin, les défaut, contumace et jugement contre le duc de La Valette furent mis au néant, et, sans s'arrêter à tout ce qui avait été fait devant le conseil, il fut ordonné qu'il serait informé en la cour à la requête du procureur du roi.

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L'arrêt définitif rendu le 31 juillet a déchargé le duc de l'accusation contre lui intentée.

En examinant de bonne foi les circonstances de cette affaire, on n'en tirera sans doute aucune conséquence contre le droit des pairs. Loin de là, en voyant un acte passager de la puissance absolue anéanti par un retour à la règle, on se convaincra que cette règle n'est devenue que plus certaine par la contradiction même qu'elle a éprouvée.

Voyons d'ailleurs le jugement qu'en a porté l'histoire. « Le 7 septembre 1638, dit le président Hé<< nault, M. le prince lève le siége de Fontarabie. Le «< cardinal de Richelieu, qui n'aimait pas le duc de La « Valette, s'en prit à lui, et lui donna des commis« saires qui le condamnèrent à avoir la tête tranchée << en effigie.

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Il ne faut donc voir dans la nomination de ces commissaires qu'une violation de principes, née de la haine que Richelieu portait à l'acccusé.

Le même historien remarque encore qu'en 1540, si l'amiral de Brion fut condamné, ce fut « par des

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