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Une nouvelle dette. Exemple: Je m'étais engagé à vous payer 10,000 fr., nous convenons ensuite qu'au lieu de cette somme, je vous livrerai trois chevaux, dont je suis propriétaire; en conséquence vous me déchargez de ma première obligation, qui est éteinte.

Un nouveau débiteur. Je vous dois 6,000 fr., je vous présente mon frère comme débiteur à ma place, vous consentez à l'accepter, et vous me déchargez de mon obligation. Elle se trouve donc entièrement détruite, et une nouvelle est contractée par mon frère envers

vous.

Un nouveau créancier. Vous me devez 5,000 fr., je vous offre de vous décharger entièrement de cette dette, si vous voulez en contracter une pareille envers mon frère; vous consentez à cet arrangement, la dette que vous aviez envers moi est éteinte, celle que vous contractez envers mon frère lui est substituée. Il faut bien se garder de confondre cette novation avec la subrogation, qui aurait lieu si j'avais mis mon frère à ma place, conformément à l'art. 1250. Dans ce cas, ma créance sur vous n'aurait pas été éteinte, elle aurait seulement passé sur la tête de mon frère, avec tous les droits qui y sont attachés. (MODELES d'actes de novation, form. No 15.)

1272. La novation ne peut s'opérer qu'entre personnes capables de contracter.

Capables de contracter. Parce que, au moyen de la novation, les parties, non-seulement éteignent leurs premières obligations, mais encore en contractent de nouvelles.

1273. La novation ne se présume point; il faut que la volonté de l'opérer résulte clairement de l'acte.

= Ne se présume point. La renonciation aux droits que donnait la première obligation ne doit pas dépendre d'une présomption toujours plus ou moins incertaine. QUESTION. Les juges peuvent-ils, nonobstant ces mots de notre article, la novation né se présume point, la faire résulter de présomptions graves, précises et concordantes? La cour de cassation a embrassé l'affirmative:« Attendu, en droit, 1o que l'art. 1273 C. civ., lorsqu'il pose le principe général que la novation ne se présume pas, ne fait que tracer au juge du fait une règle à suivre dans l'appréciation des faits et des conventions qui sont intervenus entre les parties, mais ne lui ôte pas le pouvoir d'apprécier ces faits et conventions; 20 que le même article, lorsqu'il déclare qu'il faut que la volonté d'opérer la novation résulte clairement de l'acte, a eu précisément pour objet d'écarter le système des dernières lois romaines, qui n'adinettaient l'extinction d'un premier titre par un deuxième que lorsque celui-ci portait expressément qu'il éteignait le premier, et d'adopter le sytème contraire, qui était suivi dans les pays de coutume; qu'en ramenant ainsi la question à la volonté des parties dans un deuxième acte, et aux effets de ce deuxième acte, quant au premier, il s'ensuit nécessairement que cet article, au titre des Obligations conventionnelles, se réfère aux règles générales établies par les art. 1315, 1341, 1547 et 1353, au même titre relativement aux modes de preuves de l'extinction des obligations, et, par conséquent, aux présomptions graves, précises et concordantes accompagnées d'un commencement de preuve par écrit, à l'aide desquelles le juge peut reconnaître le fait que le deuxième titre a produit, d'après la volonté des parties, l'extinction du premier; attendu, en fait, que pour déclarer que le titre du 10 juin 1815, n'avait été souscrit par Wagon au profit de Mahaudeau,

que pour le substituer au titre du 1er janvier 1830, entre les mêmes parties, et pour éteindre celui-ci, l'arrêt attaqué s'est borné à reconnaître que ce fait résultait tant des nombreux commencements de preuve par écrit qu'il relate, que des présomptions graves, précises et corcordantes qu'il énumère et qualifie; qu'ainsi cet arrêt n'a ni faussement appliqué les art. 1347 et 1353 du C. civ., ni violé l'art. 1273; rejette, etc. » (Arrêt du 14 mars 1834.)

Résulte clairement de l'acte. Il suit de là qu'on n'exige pas que la uovation soit déclarée dans l'acte en termes formels; il suffit qu'elle en résulte clairement, que l'intention des parties de l'opérer soit évidente: en effet, la nature des actes passés entre le créancier et le débiteur peut être telle, qu'elle prouve sans aucun doute une novation; mais il ne faudrait pas la voir dans un acte par lequel le débiteur et le créancier modifieraient seulement la première dette, sans l'éteindre : par exemple, en convenant d'une hypothèque ou d'une caution, ou en prolongeant le terme stipulé par la première dette, ou en donnant des effets de commerce en payement d'une obligation notariée. (Cass., 28 juillet 1823, et 11 fév. 1826.) Voy, encore Bordeaux, 23 mars 1832.-QUESTION. L'appréciation des faits constitutifs de la novation échappe-t-elle à la censure de la cour suprême ? Cette cour semble avoir consacré la négative dans l'arrêt du 11 fév. 1826, que nous venons d'indiquer, puisqu'elle y discute les différents actes d'où la cour royale avait induit la novation, et juge que ces actes ne renfermaient pas les caractères de ce moyen d'extinction des obligations. Cependant par plusieurs décisions postérieures, elle á formellement embrassé l'opinion contraire : « Attendu, porte un de ces arrêts, que l'arrêt attaqué, en déclarant que le contrat de 1809 constituait une novation, et en appuyant cette décision sur les diverses clauses de ce contrat, et sur les documents produits devant la cour d'Angers, est basé sur une appréciation de faits et sur la recherche de la commune intention des parties, ce qui était dans les attributions exclusives des juges du fait, et ne peut tomber sous la censure de la cour de cassation, rejette, etc. »( Arrêt du 19 juin 1832.)

1274. La novation par substitution d'un nouveau débiteur peut s'opérer sans le concours du premier débiteur.

=Sans le concours. Ainsi une personne qui est mue par un sentiment d'affection pour le débiteur, un père, par exemple, qui veut libérer son fils des poursuites d'un créancier, peut s'obliger envers ce dernier à la place de son fils, et opérer une novation, sans que son fils intervienne dans l'acte. Cela suit de ce que la novation équivaut à un payement pour le débiteur qui se trouve entièrement libéré or toute personne peut payer la dette d'un tiers, sans que ce tiers intervienne dans l'acte (article 1236) Liberat me is qui quod debeo promittit, etiam si nollem.

1275. La délégation par laquelle un débiteur donne au créancier un autre débiteur qui s'oblige envers le créancier, n'opère point de novation, si le créancier n'a expressément déclaré qu'il entendait décharger son débiteur qui a fait la délégation.

= La délégation. C'est la convention par laquelle le débiteur présente un tiers qui est ordinairement son débiteur, à son créancier pour acquitter la dette à sa place. Si le créancier décharge le débiteur, alors celui-ci se trouve entièrement libéré, et la tierce personne devient seule obligée il y a novation. Mais s'il ne le décharge pas, la première obligation n'est pas éteinte, il n'y a donc pas de novation, mais seulement un cautionnement. On remarque que, dans le cas de la délégation,

:

la novation ne peut s'opérer qu'avec le concours de trois personnes: 10 le débiteur, qui présente le tiers; 2o ce tiers, qui consent à s'obliger à sa place; 30 le créancier qui consent à recevoir son obligation et à éteindre la première. (MODÈLE de délégation, form. No 16.)

1276. Le créancier qui a déchargé le débiteur par qui a été faite la délégation, n'a point de recours contre ce débiteur, si le délégué devient insolvable, à moins que l'acte n'en contienne une réserve expresse, ou que le délégué ne fût déjà en faillite ouverte, ou tombé en déconfiture au moment de la délégation.

N'a point de recours. Parce qu'il a consenti à libérer entièrement son débiteur, et à ne plus considérer comme obligé envers lui le tiers délégué par le débiteur.

En faillite ouverte. Il y a faillite ouverte lorsqu'un débiteur a cessé de remplir ses engagements, et en a fait la déclaration au greffe du tribunal de commerce. (Art. 440, C. de comm.) Cette expression s'applique particulièrement aux négociants.

En déconfiture. Il y a déconfiture lorsqu'un débiteur ne possède pas assez de biens pour payer toutes ses dettes. Dans ces deux cas, le créancier qui a consenti à la novation ne l'a fait évidement que par erreur, dans l'ignorance où il était de la ruine de celui qu'il acceptait comme débiteur.

1277. La simple indication faite par le débiteur, d'une personne qui doit payer à sa place, n'opère point novation. Il en est de même de la simple indication faite par le créancier, d'une personne qui doit recevoir pour lui.

Dans le cas de cet article, ce n'est qu'un simple mandat que le débiteur donne à un tiers pour payer à sa place, ou que le créancier donne à une tierce personne pour recevoir à sa place.

1278. Les priviléges et hypothèques de l'ancienne créance ne passent point à celle qui lui est substituée, à moins que le créancier ne les ait expressément réservés.

Ne passent point. La créance s'éteignant, tous les accessoires qui la garantissaient doivent s'éteindre aussi. Je vous devais 4,000 fr.; vous aviez pour assurer cette créance une hypothèque sur ma maison. Nous convenons qu'au lieu des 4,000 francs, je vous donnerai ma bibliothèque: la première dette s'éteint, et avec elle l'hypothèque qui y était attachée.

1279. Lorsque la novation s'opère par la substitution d'un nouveau débiteur, les priviléges et hypothèques primitifs de la créance ne peuvent point passer sur les biens du nouveau débiteur.

Ne peuvent point passer. Ainsi, lorsque le créancier accepte un nouveau débiteur à la place du premier qu'il décharge, il ne peut transporter sur les biens du nouveau débiteur les hypothèques qui pesaient sur les biens du premier. La première dette est éteinte avec ses hypothèques ; la deuxième commence du moment de la novation, et ne peut pas avoir des hypothèques antérieures à son existence. Le créancier n'aura donc de garanties sur les biens du nouveau débiteur que celles qu'il stipulera dans le contrat.

(1) Cet article ne concerne que les conventions unilatérales. Mais la remise d'un titre constatant une convention bila

1280. Lorsque la novation s'opère entre le créancier et l'un des débiteurs solidaires, les priviléges et hypothèques de l'ancienne créance ne peuvent être réservés que sur les biens de celui qui contracte la nouvelle dette.

L'un des débiteurs solidaires. Je vous dois 3,000 fr. solidairement avec deux autres personnes ; votre créance est assurée par des hypothèques sur les biens de chacun de nous. Je vous offre de vous livrer à moi seul dix tonneaux de vin, si vous voulez substituer cette dette à la dette solidaire; vous y consentez; la créance solidaire s'éteint, et avec elle les hypothèques qui la garantissaient; vous pourrez bien, pour garantir les dix tonneaux de vin que je dois vous livrer, réserver par le contrat les hypothèques qui pesaient sur mes biens, mais non celles qui pesaient sur les biens de mes codébiteurs solidaires, parce qu'ils se trouvent libérés, et que ni vous ni moi ne pouvons disposer des biens qui leur appartiennent.

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= Sont libérés. Dans l'exemple ci-dessus, le créancier qui a consenti à la novation m'a déchargé de la dette solidaire comme si je la lui avais payée totalement, tous mes codébiteurs solidaires se sont trouvés libérés, et je pourrai les poursuivre pour qu'ils me remboursent la part qu'ils devaient payer dans la dette solidaire.

Libère les cautions. Parce que la dette que des tiers avaient cautionnée étant éteinte, ces tiers sont libérés, et ne peuvent être obligés de cautionner la nouvelle dette à laquelle ils n'ont point consenti.

Si le créancier a exigé. Si le créancier exige l'accession des débiteurs solidaires ou celle des cautions, pour opérer la novation, et qu'ils y consentent, ils contractent par ce consentement l'obligation de rester débiteurs solidaires ou cautions de la nouvelle dette; s'ils n'y consentent pas, la novation n'a pas lieu, puisque le créancier n'a consenti à l'opérer que sous la condition suspensive que les cautions ou les codébiteurs y adhéreraient.

SECTION 111. De la Remise de la Dette.

La remise de la dette est la renonciation que le créancier fait à ses droits, et le consentement qu'il donne à ce que la dette soit éteinte. Il suit de là que, pour qu'un créancier puisse remettre une dette, il faut qu'il ait la libre disposition de ses droits; car cette remise est une véritable aliénation titre gratuit. La remise est expresse ou tacite; expresse, et dans ce cas on la nomme aussi conventionnelle, lorsqu'elle est formellement déclarée dans un acte passé entre le débiteur et le créancier; tacite, lorsqu'elle résulte d'un fait qui suppose nécessairement dans le créancier l'intention d'éteindre sa dette.

1282. La remise volontaire du titre original sans signature privée par le créancier au débiteur, fait preuve de la libération (1).

térale, n'a pas l'effet d'opérer la révocation de cette convention, (Liége, 13 déc. 1814.)

=Volontaire. Si cette remise n'a eu lieu que par violence, ou par dol, elle ne doit pas servir à libérer le débiteur. Mais c'est au créancier, s'il invoque ces faits, à les prouver, parce que la violence et le dol ne se présument pas. La cour suprême a consacré ces principes : « Attendu, en droit, que ce n'est qu'au fait de la remise volontaire du billet que les art. 1282 et 1350 du C. civ. attachent la présomption légale de libération, et non au fait de la simple possession matérielle; attendu, en fait, que l'arrêt attaqué ne constate nullement que ce soit par l'effet d'une remise volontaire que le billet dont il s'agit s'est trouvé entre les mains de Leclerc-Losier; qu'au contraire, les faits constatés par l'arrêt, et notamment les poursuites exercées à l'échéance par les tiers porteurs, l'appel en garantie faite sur-le-champ par Guingamp et compagnie contre Leclerc-Losier, les demandes réitérées formées par lesdits de Guingamp et compagnie contre ledit Leclerc-Losier, sont tous en opposition avec la prétendue remise volontaire, et établissent que la seule question soumise à la cour royale était celle de savoir si ledit billet avait été payé par Leclerc-Losier; que l'arrêt attaqué déclare expressément que des faits de la cause et des explications données par les parties entendues en personne à l'audience, il résulte que ce billet n'a pas été acquitté par LeclercLosier; qu'ainsi cet arrêt, suffisamment motivé, n'a violé ni l'art. 7 de la loi du 20 avril 1810, ni les articles 1282, 1283 et 1350 du C. civ., rejette, etc. » (Arrêt du 10 avril 1833.)

-

Fait preuve. Parce que le créancier ne peut s'être dessaisi de la seule pièce qui constate l'existence de ses droits, que dans l'intention d'y renoncer. Il ne pourrait pas même être reçu à établir qu'en la donnant, il n'avait pas cette intention. QUESTION. La remise de l'original à un tiers pour le débiteur peut-elle opérer la libération? La cour de cassation a consacré l'affirmative: Attendu que d'après l'art. 1282 et suivants du C. civ., la remise de la dette n'est assujettie à aucune formalité; qu'elle peut donc être simple ou conditionnelle, directe ou par intermédiaire, qu'en jugeant en conséquence que la quittance remise par Hyacinthe Ardent, créancier, à Duclos, pour la délivrer, en cas d'accident, à son frère, son débiteur, était valable, l'arrêt s'est conformé à la lettre et à l'esprit desdits articles, rejette, etc. (Arrêt du 2 avril 1823.)

1283. La remise volontaire de la grosse du titre fait présumer la remise de la dette ou le payement, sans préjudice de la preuve contraire.

=De la grosse. On nomme ainsi, parce qu'elle est écrite en plus gros caractères, la copie de l'acte fait en forme exécutoire (art. 820), et délivrée par le notaire au créancier, pour qu'il poursuive l'exécution de ses droits. La loi présume que le créancier qui donne au débiteur le titre qui doit servir à lui faire payer sa dette, a l'intention de la lui remettre. Cependant il peut n'avoir donné la grosse que parce que la minute restant chez le notaire, il a compté sur un titre certain pour prouver l'existence de ses droits. C'est pour ce motif que la loi l'admet ici à prouver que son intention n'était pas de remettre la dette.

1284. La remise du titre original sous signature privée, ou de la grosse du titre, à l'un des débiteurs solidaires, a le même effet au profit de ses codébiteurs.

=Au profit de ses codébiteurs. Parce que le créancier, en se dessaisissant du titre qui prouve les droits

(1) Cet article est également applicable aux lettres de change. (Brux., 22 avril 1815.)

(2) Celui qui est poursuivi par l'un des membres d'une

qu'il a contre eux tous, ne peut avoir eu que l'intention de leur remettre à tous leur dette.

1285. La remise ou décharge conventionnelle au profit de l'un des codébiteurs solidaires, libère tous les autres, à moins que le créancier n'ait expressément réservé ses droits contre ces derniers. Dans ce dernier cas, il ne peut plus répéter la dette que déduction faite de la part de celui auquel il a fait remise (1).

Libère tous les autres. Parce que l'obligation d'un débiteur solidaire étant de payer toute la dette, le créancier qui lui a fait remise de cette obligation a éteint sa créance en entier, et par conséquent a libéré les autres débiteurs, à moins qu'il n'ait déclaré qu'il ne remettait pas au débiteur solidaire toute son obligation, mais seulement sa part dans la dette, et qu'il se réservait ses droits contre les autres.

De la part.-QUESTION. Quelle part? La part virile ou la part réelle ? Exemple : J'ai emprunté de vous une somme de 30,000 fr., solidairement avec mon frère; mais sur cette somme, 20,000 fr. out été employés à mon profit, en sorte que ma part réelle dans la dette est des deux tiers (art. 1216); ma part virile est la moitié. Si vous me faites remise de ma part, faut-il entendre que vous me remettez les deux tiers ou la moitié de la dette? Il paraît convenable de rechercher votre intention: si des circonstances prouvent que vous connaissiez que ma part réelle était des deux tiers, et que votre intention a été de me remettre cette part, il faudra la suivre. Mais à défaut de ces circonstances, il est plus naturel de croire que vous avez voulu me remettre ma part virile, celle que je paraissais devoir.

1286. La remise de la chose donnée en nantissement ne suffit point pour faire présumer la remise de la dette.

Ne suffit point. Parce que la remise que je vous ai faite du gage de ma créance prouve seulement la volonté que j'ai eue de me fier à vous pour l'acquittement de vos obligations, et non l'intention de vous remettre votre dette.

1287. La remise ou décharge conventionnelle accordée au débiteur principal libère les cautions; Celle accordée à la caution ne libère pas le débiteur principal; Celle accordée à l'une des cautions ne libère pas les autres (2).

= Libère les cautions. La dette pour laquelle elles étaient obligées étant éteinte, leur obligation ne peut plus subsister. L'accessoire ne peut exister sans le principal. (MODÈLE d'acte de remise de la dette, form. No 17.)

Ne libère pas le débiteur. Parce que le créancier peut fort bien avoir renoncé à ses droits sur les cautions, sans renoncer à ses droits sur le débiteur. Le principal peut exister sans l'accessoire.

Les autres. Parce que c'est une faveur particulière à cette caution: rien ne prouve que le créancier ait eu l'intention de l'étendre aux autres.

1288. Ce que le créancier a reçu d'une caution pour la décharge de son cautionnement, doit être imputé sur la dette, et tourner à la décharge du débiteur principal et des autres cautions.

société, en payement de ce qu'il lui doit personnellement, ne peut pas former réconventionnellement une demande fondée sur ce qu'il est créancier de la société.(Liége, 20 octobre 1825.)

=Pour la décharge de son cautionnement. Exemple: Un individu vous doit 4,000 francs; je suis sa caution; j'offre de vous payer tout de suite 1,000 francs si vous consentez à me décharger de mon cautionnement, vous y consentez. De ce moment, vous ne pourrez plus demander que 3,000 francs à votre débiteur, parce que vous êtes obligé d'imputer sur la dette ce que vous avez reçu de moi.

SECTION IV. De la Compensation.

La compensation est un payement réciproque et fictif, qui s'opère entre deux personnes débitrices l'une envers l'autre. Elle est fondée sur l'utilité commune des parties; chacune d'elles est intéressée à compenser plutôt qu'à donner ce qu'elle doit, et poursuivre ensuite le payement de ce qui lui est dù. Ces poursuites, que les parties pourraient diriger mutuellement l'une contre l'autre, sont évitées par la compensation.

1289. Lorsque deux personnes se trouvent débitrices l'une envers l'autre, il s'opère entre elles une compensation qui éteint les deux dettes de la manière et dans les cas ci-après exprimés.

1290. La compensation s'opère de plein droit par la seule force de la loi, même à l'insu des débiteurs; les deux dettes s'éteignent réciproquement, à l'instant où elles se trouvent exister à la fois, jusqu'à concurrence de leurs quotités respectives.

= Jusqu'à concurrence. Je vous dois une somme de 6,000 francs ; postérieurement vous devenez mon débiteur de 4,000 francs; de ce moment la compensation a lieu de plein droit, même à notre insu: votre dette est entièrement éteinte; la mienne est réduite à 2,000 fr., et vous ne pouvez plus me poursuivre que pour cette

somme.

1291. La compensation n'a lieu qu'entre deux dettes qui ont également pour objet une somme d'argent, ou une certaine quantité de choses fongibles de la même espèce, et qui sont également liquides et exigibles. - Les prestations en grains ou denrées, non contestées, et dont le prix est réglé par les mercuriales, peuvent se compenser avec des sommes liquides et exigibles.

Une somme d'argent. Comme dans l'exemple que nous avons donné à l'article précédent.

De choses fongibles. Ce sont les choses qui peuvent se remplacer parfaitement par d'autres choses de même nature, qualité et bonté, ainsi que nous l'avons expliqué au titre de la distinction des biens, chapitre des meubles. Comme si je vous dois deux tonneaux de vin, et que postérieurement vous héritiez d'un individu qui m'a légué trois tonneaux de vin; la compensation s'opère de plein droit; vous restez mon débiteur d'un tonneau de vin. Mais si les choses fongibles sont dues comme corps certains et déterminés; si, par exemple, je vous dois cent mesures de blé que j'ai dans mon grenier, et que vous deveniez mon débiteur de cinquante mesures de blé, je ne pourrai prétendre qu'il y a compensation, parce que je dois vous livrer le blé qui est chez moi et qui est déterminé; ce qui n'aurait pas lieu si je vous opposais la compensation.

Liquides. C'est-à-dire qu'il soit bien constant qu'il est dû et combien il est dû: An et quantum debeatur. Si

(1) Le mot chose doit s'entendre aussi bien des choses fongibles que non fongibles et l'on peut regarder les sommes adjugées à titre de dommages-intérêts à celui qui a été victime

donc une dette est contestée, ou si elle consiste, par exemple, en dommages et intérêts qui ne sont pas encore fixés, on ne peut la compenser avec une dette certaine et dont la quotité est déterminée.

Exigibles. Si une dette est à terme ou sous condition, on ne peut prétendre la compenser avec une dette qu'on peut exiger sur-le-champ; l'égalité serait blessée.

Les mercuriales. Ce sont des registres qui servent à constater le cours des denrées dans les divers marchés, et à fixer leur prix. Le Code admet ici la compensation entre des dettes qui ne sont pas de même nature si, par exemple, je vous dois 500 francs, et que vous deveniez mon débiteur de dix mesures de blé, les mercuriales constatant que le prix courant du blé est de 20 fr., je pourrai vous opposer la compensation, et ne vous payer que 100 francs. Lorsque les deux créances ne réunissent pas toutes les qualités voulues par cet article, la compensation ne peut s'opérer de plein droit. Mais si l'une des créances réunit ces qualités, celui à qui elle est due peut, dans quelques cas, opposer la compensation, s'il le juge à propos: on dit alors que la compensation est facultative. Exemple: Vous me devez 6,000 francs qui sont échus, je vous en dois 4,000 payables dans six mois; je pourrai vous offrir la compensation et ne vous demander que 2,000 francs : la compensation aura eu lieu du moment où vous aurez consenti à l'offre que j'en aurai faite.

1292. Le terme de grâce n'est point un ob stacle à la compensation.

Le terme de grâce. Vous me deviez 6,000 francs; le tribunal, en considération de votre position malheureuse, vous a accordé six mois pour me payer. Dans l'intervalle, j'hérite d'une personne qui vous a légué 4,000 fr.; vous ne pourrez pas m'assigner en délivrance de ce legs, et je vous opposerai la compensation : le tribunal ne vous avait accordé un délai que parce qu'il vous était impossible de me payer lors de l'échéance; cette impossibilité cesse par la compensation; le délai doit donc expirer. Il ne subsistera plus que pour les 2,000 francs dont vous restez mon débiteur.

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D'un dépôt. Car le dépositaire doit toujours conserver et rendre fidèlement les objets déposés. Il ne doit pas d'ailleurs profiter d'un service d'amitié qu'il a rendu, pour se faire payer une créance. QUESTION. Le prix des ventes d'effets publics effectuées par un agent de change, est-il considéré dans ses mains comme un dépôt qui ne peut entrer en compensation ? La cour de Paris a consacré l'affirmative: «Attendu que la créance de 160,000 francs dont le payement est réclamé par Aguado, est liquidée et exigible, et se rattache à des opérations de vente réelle dont Lallier a reçu le prix ; que, par sa nature, cette créance doit être considérée d'un délit d'usure, comme étant une chose dont il a été dépouillé injustement. (Brux., 19 fév. 1829.)

comme un dépôt que Lallier était chargé, par sa profession, de conserver et remettre au demandeur, et que, dès lors, aux termes de l'art. 1295 du C. civ., l'espèce de créance que Lallier réclame ne peut être opposée en compensation; que des prétentions respectives des parties il résulte, en définitive, qu'il peut y avoir compte à faire sur leurs opérations de liquidation; mais que, en droit comme en équité, les comptes ne sont pas de nature à être admis en compensation avec la créance de 160,000 fr. dont le quantum et l'origine ne sont pas contestés. » (Arrêt du 7 mai 1852.)

Prêt à usage. Même motif. Les objets prêtés pour qu'on puisse s'en servir, ne sont que des objets certains et déterminés (art. 1875), qui, par cette raison, ne peuvent être susceptibles de compensation. Mais le Code a prévu le cas où la chose étant périe par la faute de l'emprunteur, celui-ci doit en rendre la valeur en argent. (Art. 1281.) Il ne pourrait, pour cette dette, opposer une compensation.

Déclarés insaisissables. La loi s'opposant à ce qu'une pension alimentaire qui m'est due puisse être saisie par des tiers (art. 581 du C. de pr.), et employée à payer mes dettes, devait s'opposer aussi à ce que celui qui me la doit pût me la retenir sous prétexte que je suis son débiteur; car ce serait une espèce de saisie qu'il ferait à l'aide de la compensation.

-

1294. La caution peut opposer la compensation de ce que le créancier doit au débiteur principal; Mais le débiteur principal ne peut opposer la compensation de ce que le créancier doit à la caution. Le débiteur solidaire ne peut pareillement opposer la compensation de ce que le créancier doit à son codébiteur.

Doil au débiteur principal. Parce que la caution ne peut être obligée à plus que le débiteur principal, et ne doit payer dans la dette que ce que le débiteur ne paye pas lui-même.

Doit à la caution. Parce que le débiteur principal est obligé pour lui-même, et ne peut disposer d'une créance qui appartient à sa caution.

Doit à son codébiteur. Parce que le débiteur solidaire poursuivi pour le total est poursuivi pour une somme qu'il doit lui-même, et ne peut opposer les exceptions qui sont personnelles à ses codébiteurs (article 1208), comme une créance qui appartient à l'un d'eux.

1295. Le débiteur qui a accepté purement et simplement la cession qu'un créancier a faile de ses droits à un tiers, ne peut plus opposer au cessionnaire la compensation qu'il eût pu, avant l'acceptation, opposer au cédant. -A l'égard de la cession qui n'a point été acceptée par le débiteur, mais qui lui a été signifiée, elle n'empêche que la compensation des créances postérieures à cette notification.

=Accepté purement et simplement. Je vous devais une somme de 6,000 francs, vous devenez ensuite mon débiteur de 2,000 francs, la compensation s'opère de plein droit. Mais postérieurement vous cédez à Paul les droits que vous avez sur moi pour une dette de 6,000 fr. Je consens à cette cession purement et simplement, c'està-dire sans parler de la compensation qui a eu lieu; je ne pourrai plus l'opposer à Paul, parce que je suis censé y avoir renoncé, et je ne dois pas avoir nui par mon silence à Paul, qui a cru acquérir sur moi une dette de 6,000 fr.

Postérieures à cette notification. Parce que la

créance, depuis cette notification, a passé sur la tête de celui auquel on l'a cédée; mais jusque-là elle résidait sur la tête de mon premier créancier; et je ne puis être dépouillé, par un acte où je ne suis pas intervenu, des avantages de la compensation qui a eu lieu de plein droit, et à laquelle je n'ai renoncé ni expressément ni tacitement.

1296. Lorsque les deux dettes ne sont pas payables au même lieu, on n'en peut opposer la compensation qu'en faisant raison des frais de la remise.

Des frais de la remise. Si je dois vous livrer à Paris cent mesures de blé, et que vous me demandiez la délivrance, je pourrai vous opposer en compensation cent mesures de blé que vous êtes obligé de me livrer à Bordeaux. Cependant comme c'est réellement vous forcer à recevoir votre payement ailleurs qu'au lieu convenu, il est juste que je vous tienne compte des frais qu'entraînerait le transport du blé de Bordeaux à Paris.

1297. Lorsqu'il y a plusieurs dettes compensables dues par la même personne, on suit pour la compensation, les règles établies pour l'imputation par l'article 1256.

Cela résulte de ce que, la compensation étant un payement (art. 1289), on doit y suivre les règles relatives au payement.

1298. La compensation n'a pas lieu au préjudice des droits acquis à un tiers. Ainsi celui qui, étant débiteur, est devenu créancier depuis la saisie-arrét faite par un tiers entre ses mains, ne peut, au préjudice du saisissant, opposer la compensation.

Depuis la saisie-arrêt. Parce que, du moment de cette saisie, le débiteur, n'ayant pu payer valablement à son créancier (1242), ne peut prétendre que la compensation, qui n'est qu'un payement fictif, a eu lieu. — Quant aux créances qu'il a acquises avant la saisie-arrêt, il pent les opposer; car la compensation a eu lieu de plein droit, et la saisie-arrêt ne peut l'avoir détruite. On n'a pu saisir que ce que le débiteur devait encore à son créancier.

1299. Celui qui a payé une dette qui était, de droit, éteinte par la compensation, ne peut plus, en exerçant la créance dont il n'a point opposé la compensation, se prévaloir, au préjudice des tiers, des priviléges ou hypothèques qui y étaient attachés, à moins qu'il n'ait eu une juste cause d'ignorer la créance qui devait compenser sa dette.

Se prévaloir, au préjudice des tiers. Paul était débiteur envers moi d'une somme de 4,000 francs, et envers vous de 8,000 francs. Ma créance était assurée par une hypothèque qui vous primait. Postérieurement, Paul est devenu mon créancier de 6,000 fr.; ma créance envers lui s'est éteinte de plein droit par la compensation, et mon hypothèque a cessé de vous primer. Mais, par négligence, je n'ai pas opposé à Paul cette compensation, je lui ai payé ma dette de 6,000 francs; quand je voudrai lui demander les 4,000 fr. dont il est mon débiteur, je ne pourrai pas exercer à votre préjudice mon hypothèque ce serait vous enlever des droits que vous avez acquis de plein droit par la compensation. D'ignorer la créance. Par exemple, si ma créance

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