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pothèque légale est attribuée, sont,

ment compris.» ( Arrêt du 17 mai 1825.) Quant aux fruits, ils sont compris dans l'affectation, tant qu'ils sont sur pied; mais le débiteur conservant la jouissance de sa chose, peut les récolter et les vendre. Il en est différemment des futaies, qui font partie de la propriété, et qui ne sont pas in fructu. QUESTION. Les servitudes - étant des biens immobiliers (art. 526), sont-elles susceptibles d'hypothèque? Oui, conjointement avec le fonds auquel elles sont dues, mais non isolément, car elles n'offrent plus alors aucune garantie; d'ailleurs l'article, en parlant spécialement de l'usufruit, montre assez que c'est le seul de ces sortes d'immeubles susceptible d'hypothèque.

L'usufruit. Mais c'est le droit en lui-même qui est hy. pothéqué, et le créancier obtient par l'hypothèque seulement la faculté de faire vendre le droit d'usufruit, et non de saisir les fruits, qui, détachés de la terre, sont meubles. QUESTION. L'emphyteose, c'est-à-dire le droit à la jouissance d'un immeuble pendant un laps de temps considérable (99 ans) est-il susceptible d'hypothèque? La cour suprême a adopté l'affirmative: «Attendu que le Code civil n'a ni changé, ni modifié les règles concernant l'emphytéose; que ce contrat a toujours été considéré comme ayant un caractère particufier, et qu'il n'a jamais été confondu avec le droit de louage; que, suivant la législation encore existante, le preneur a le droit, pendant toute la durée de l'emphytéose, d'exercer l'action in rem contre ceux qui le troublent dans sa possession, et contre le bailleur luimême ; qu'un tel droit est immobilier, et que l'emphytéote a la faculté de disposer de tout ce qu'il possède à ce titre, par vente, échange ou donation, et par affectation hypothécaire, à la charge des droits du bailleur ; que, dans l'espèce, le bailleur et le preneur ont reconnu eux-mêmes par l'acte de cession que l'emphyteose était susceptible d'hypothèque ; qu'en effet, l'acte porte, article 23, que tout ce que comprend l'emphytéose, et tout ce que l'emphyteote établira, demeurera de plein droit affecté, obligé et hypothéqué par privilége à la sûreté de la redevance ; que de tous ces motifs, il résulte que l'arrêt attaqué, loin d'avoir violé l'art. 2118 du Code civil, et aucun autre du même Code, a fait une juste application des lois de la matière; rejette, etc.» (Arr. du 19 juill. 1832.) 2119. Les meubles n'ont pas de suite par hypothèque.

N'ont pas de suite. C'est-à-dire que les meubles une fois sortis des mains du propriétaire, les créanciers ne peuvent les poursuivre; mais il ne faudrait pas conclure de là qu'ils peuvent d'ailleurs être hypothéqués dans les mains du débiteur; car les immeubles sont seuls susceptibles d'hypothèque, aux termes de l'article précédent seulement les meubles peuvent être donnés en gage, et il en résulte un privilége. (Art. 2102, 20.)

2120. Il n'est rien innové par le présent Code aux dispositions des lois maritimes concernant les navires et bâtiments de mer.

Les navires. Ainsi, quoique meubles (art. 190 du C. de comm.), l'intérêt du commerce a voulu qu'ils fussent susceptibles de l'hypothèque des créanciers du vendeur. (Art. 196 du C. de comm.)

section première. Des Hypothèques légales. 2121. Les droits et créances auxquels l'hy

(1) La femme a une hypothèque légale à raison de ses reprises et conventions matrimoniales, non-seulement sur les biens propres du mari, mais aussi sur les conquêts de communauté. (Brux, 26 juill. 1817, 30 juin 1819, et 26 fév. 1822.)

L'hypothèque légale de la femme existe du jour du mariage, lors même que les reprises matrimoniales sont subordonnées à une condition ou à un cas éventuel. (Brux., 26 juill, 1817.)

|

Ceux

des femmes mariées, sur les biens de leur
mari (1);
Ceux des mineurs et interdits, sur
les biens de leur tuteur (2); Ceux de l'État,
des communes et des établissements publics,
sur les biens des receveurs et administrateurs
comptables.

L'hypothèque légale. Toutes les hypothèques sont
légales, en ce sens que c'est la loi qui règle les conditions
de leur existence mais on appelle particulièrement lé-
gales celles qui résultent, sans aucune stipulation ni con-
damnation judiciaire, de la loi, et par sa seule force. Il
ne faut pas, au reste, les confondre avec les priviléges;
ceux-ci résultent de la qualité de la créance (art. 2095);
les autres, quelle que soit la qualité des créances, ré-
sultent de la qualité des personnes ; c'est-à-dire de ce
que les créanciers auxquels elles appartiennent sont mi-
neurs, interdits, femmes mariées, l'État, etc.

Des femmes mariées. Soumises, quant à leurs biens et à leurs actions, à la puissance maritale, il était juste que les femmes trouvassent de plein droit, dans les biens de leur mari, la garantie de leurs droits laissés à sa disposition. - QUESTION. La femme peut-elle, pendant le mariage, se faire colloquer sur le prix des biens de son mari, vendus à la requête de ses créanciers, pour le prix de son bien dotal aliéné par son mari? La cour de Montpellier a consacré la négative Attendu que le mariage de Marguerite Bestien et Pierre Caucat a été contracté antérieurement au Code civ.; qu'ainsi, c'est par les principes du droit romain qui régissait les parties que leur contestation doit être jugée; attendu que, d'après ces principes, comme d'après le Code civ., la vente de l'immeuble dotal est nulle, soit qu'elle ait été faite par le mari ou par la femme, ou par le concours de tous les deux dans l'acte; attendu que la séparation de biens obtenue par la femme ne fait pas cesser l'inaliénabilité du fonds dotal; qu'il suit de là que la femme, après avoir obtenu cette séparation, ne peut ni vendre ce fonds, ni ratifier la vente qu'en avait faite son mari; attendu que ce serait une véritable ratification de cette vente, si, tandis que le fonds vendu est encore existant, la femme abandonnant l'action en revendication que lui donne la loi, pouvait se faire colloquer dans la distribution des biens du mari pour le prix de ce fonds; que si la loi du Code, de Jure dotium, attribue à la fois à la femme pour la reprise de ses biens dotaux, une action réelle et une action hypothécaire, cette loi dispose dans le cas de la dissolution du mariage, parce qu'en effet, à cette époque, elle est libre de les aliéner; attendu que le mariage de Marguerite Bestieu n'est point dissous; que la pièce de terre dont il s'agit fait partie des biens dotaux; que la vente qu'en a faite son mari est doublement nulle, soit comme aliénation du fonds dotal, soit comme vente du fonds d'autrui, car la femme n'y a point concouru; attendu qu'il ne dépend point d'elle d'en recouvrer la possession, puisque aucun acte personnel, 'ni aucune prescription. ne peuvent lui être opposés; attendu que, dans cet état de choses, demeurée propriétaire du fonds vendu, elle ne saurait être créancière de la vente, et que c'est contrairement aux principes que le tribunal de première instance l'a colloquée sur le prix dans la distribution des biens de son mari, au préjudice des créanciers de celui-ci. (Arrêt du 7 janv. 1831.) Voyez aussi l'art. 1560 et nos explications.

Elle s'étend aux gains de survie. (Bruxelles, 4 octobre 1823)
(2) Voy. dans ce sens, arrêts de Liége, 28 mars 1823; Brux,
22 mai 1819.

L'hypothèque légale des mineurs s'étend aux biens acquis
par leurs tuteurs après la majorité, mais avant la reddition
du compte de tutelle. (Bruxelles, 4 février 1819 et 20 avril
1826.)

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-

De leur tuteur. Les tuteurs pouvant, par une mauvaise administration, compromettre les biens de leurs pupilles et interdits, il était juste encore que leurs biens fussent de plein droit grevés d'hypothèque ; mais cette disposition ne s'étend pas aux subrogés tuteurs (art. 420), aux curateurs des mineurs émancipés (art. 482), aux conseils judiciaires des prodigues (art. 513); car tous ces individus n'administrent pas, ils surveillent seulement l'administration, ou assistent les mineurs émancipés et les prodigues dans les actes d'aliénation (Art. 515.) Si toutefois les subrogés tuteurs administraient, comme lorsque les mineurs ont des intérêts opposés avec ceux de leurs tuteurs, peut-être leurs biens devraient-ils être frappés de l'hypothèque légale, car la raison qui les en dispensait n'existerait plus. Quant aux coluteurs, remplissant absolument les mêmes fonctions que les tuteurs, ils contractent aussi les mêmes obligations: c'est ce qui résulte d'ailleurs de l'art. 397. L'hy- pothèque légale ne frappe pas les biens du père administrateur, pendant le mariage, des biens de ses enfants mineurs. Voy. sur ce point l'arrêt cité sous l'art. 589 et indiqué sous l'art. 2155. QUESTION. Cette hypothèque légale s'étend-elle dans le cas de l'art. 395, à la gestion antérieure au mariage? La jurisprudence a consacré l'affirmative, parce que l'art. 595 dispose en termes généraux qu'à défaut par la mère tutrice qui convole à de secondes noces, de convoquer le conseil de famille pour lui faire décider si la tutelle doit lui être conservée, elle doit perdre la tutelle de plein droit, et que le mari devient solidairement responsable avec elle de toutes les suites de la tutelle indûment conservée; que dès lors il n'est pas permis de distinguer, quant à cette responsabilité solidaire, entre la gestion antérieure et la gestion postérieure au mariage; qu'à la vérité cette distinction a été faite dans l'art. 396. pour le cas où le conseil de famille, dûment convoqué, a jugé à propos de conserver la tutelle à la mère, et lui a donné, par suite, le second mari pour cotuteur, mais que la différence de rédaction et d'esprit des deux textes est précisément ce qui justifie que la restriction créée par l'art. 396 n'est pas applicable au cas prévu par l'article précédent; que l'hypothèque légale attachée aux droits des mineurs ne saurait être, sans inconséquence, restreinte à la gestion postérieure au mariage, puisque la responsabilité solidaire les embrasse l'une et l'autre; que telle était la disposition formelle de la loi romaine et de l'ancien adage, qui épouse la veuve épouse la tutelle; que sans cette hypothèque légale, le second mari pourrait anéantir les droits du mineur par des obligations hypothécaires sur ses propres biens, tandis que le défaut d'accomplissement des formalités légales le rend justement suspect de s'être approprié les fruits des dilapidations de son épouse. (Nimes, 30 nov. 1851.) Il n'y a aucun doute non plus que l'hypothèque légale frappe sur les biens du tuteur officieux, puisqu'aux termes de l'art. 365, il exerce toutes les fonctions d'un tuteur. Enfin, il faut remarquer que l'hypothèque légale des mineurs se prescrit par dix ans, puisque l'action à laquelle elle est attachée se prescrit par ce laps de temps. (Art. 475.)

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Établissements publics. Tels que les établissements de charité.

Comptables. On appelle ainsi celui qui manie les deniers publics ou ceux du roi tels sont les payeurs, les receveurs, les percepteurs; ainsi, ceux qui ne font que surveiller l'administration d'autrui, tels que des inspecteurs, des vérificateurs, ne sont pas des comptables dont les biens soient frappés de l'hypothèque légale. Il faut ajouter à ces hypothèques légales celle de l'art. 2113

(1) Pour que l'hypothèque judiciaire résulte d'un jugement, il faut que ce soit un jugement qui prononce une condamnation, ou statue sur l'existence d'un droit, qu'il juge ou préjuge que l'un est créancier et l'autre débiteur.

L'inscription prise en vertu d'un jugement du tribunal de commerce, rendu par défaut et non exécuté dans les six

et celle des légataires sur tous les immeubles du défunt, aux termes de l'art. 1017: ces deux hypothèques doivent être inscrites.

2122. Le créancier qui a une hypothèque légale peut exercer son droit sur tous les immeubles appartenant à son débiteur, et sur ceux qui pourront lui appartenir dans la suite, sous les modifications qui seront ci-après exprimées.

= Appartenir dans la suite. Ainsi l'hypothèque légale frappe les biens présents et à venir; mais cette disposition souffre exception à l'égard des femmes de négociants qui tombent en faillite, lesquelles ne peuvent exercer leur hypothèque légale que sur les biens présents de leur mari (Art. 551, 552, 553 du C. de comm.)

SECTION II. Des Hypothèques judiciaires.

2123. L'hypothèque judiciaire résulte des jugements, soit contradictoires, soit par défaut, définitifs ou provisoires, en faveur de celui qui les a obtenus (1). Elle résulte aussi des reconnaissances ou vérifications, faites en jugement, des signatures apposées à un acte obligatoire sous seing privé. Elle peut s'exercer sur les immeubles actuels du débiteur et sur ceux qu'il pourra acquérir, sauf aussi les modifications qui seront ci-après exprimées. Les décisions arbitrales n'emportent hypothèque qu'autant qu'elles sont revêtues de l'ordonnance judiciaire d'exécution. L'hypothèque ne peut pareillement résulter de jugements rendus en pays étranger, qu'autant qu'ils ont été déclarés executoires par un tribunal français; sans préjudice des dispositions contraires qui peuvent être dans les lois politiques ou dans les traités.

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L'hypothèque judiciaire. Elle a pour but d'assurer l'exécution des jugements: les ordres de la justice ne doivent pas être facilement méconnus. Trois avis du conseil d'État des 16 thermidor an xu, 20 octobre 1811 et 24 mars 1812, ont décidé que les arrêtés des préfets sont exécutoires sur les biens des comptables des communes et des établissements publics dont ils fixent les débats, sans l'intervention des tribunaux, et que les condamnations et les contraintes données par les administrateurs publics et par la direction des douanes, dans les bornes de leur compétence, emportent hypothèque de la même manière et aux mêmes conditions que les actes judiciaires. QUESTION. La régie de l'enregis- trement peut-elle décerner des contraintes emportant hypothèque? La cour de cassation a adopté la négative Attendu que la régie ne cite aucune loi qui attache le droit d'hypothèque aux contraintes décernées par ses receveurs; que l'avis du conseil d'Etat du 16 thermidor an xi ne s'applique qu'aux contraintes que les administrations ont droit de décerner en qualité de juges, et sans que ces actes puissent être l'objet d'aucun litige devant les tribunaux; que l'avis du conseil d'État du 29 oct. 1811 ne dispose qu'en faveur de la régie des douanes, et pour les cas où l'art. 13, tit. XIII de la loi du 22 août 1791, lui donne d'ailleurs hypothèque sur les biens des redevables; d'où il suit que la régie de l'en

mois, est radicalement nulle, et la présomption peut être opposée par un tiers détenteur comme par la partie condamnée. (Liége, 16 juin 1824.) Idem d'une inscription prise en vertu d'un jugement par défaut rendu sur assignation viciée de nullité. (Liege, 4 déc. 1816.)

registrement ne peut exciper d'aucun de ces avis; rejeite, etc.» (Arrêt du 28 janv. 1828.)

Contradictoires. Ceux rendus, les deux parties ayant exposé respectivement leurs raisons; par défaut, l'une des parties n'ayant pas exposé ses moyens (art. 149 du C. de proc.); définitifs, qui terminent la contestation; provisoires, qui prononcent condamnation, sauf à la changer en définitive (art. 451, C. de proc.); par exemple, un jugement qui ordonne le payement d'une pension alimentaire, sauf à juger plus tard si l'action est fondée. Quant aux jugements préparatoires, ils n'emportent pas hypothèque, parce qu'ils ne jugent rien, et mettent seulement les affaires en état d'être jugées, comme ceux qui ordonnent une enquête (ibid.), à moins que ces jugements ne renferment le germe d'une condamnation, lors même qu'elle serait conditionnelle ou indéterminée, sauf, en prenant inscription, à déclarer une valeur estimative. (Art. 2132). (Colmar, 26 juin 1832.)—QUEST. Peul- on prendre inscription du jour des jugements, ou seulement du jour de leur signification? D'abord la loi attache l'hypothèque aux jugements sans exiger qu'ils soient signifies; ensuite, il ne pourrait être nécessaire d'attendre la signification qu'autant que l'inscription serait un acte d'exécution or c'est seulement un acte conservatoire et de prudence. (Arg. de l'art. 499, C. de comm.) - QUESTION. L'inscription peut-elle valablement être prise, bien que le jugement n'ait été ni expédié ni enregistré, et que par suite aucune représentation du titre n'ait été faite au conservateur? La cour de cassation a adopté l'affirmative : « Attendu que la représentation au conservateur, du titre original, ou d'une expédition authentique du titre original de la créance, n'a été exigée par la loi que dans l'intérêt de ce fonctionnaire; que la loi n'ayant prescrit aucune formalité pour constater le fait de cette représentation, on ne peut la considérer comme substantielle, et que, dès lors, l'omission de cette représentation ne peut emporter la nullité de l'inscription ; attendu, d'ailleurs, que la loi fait résulter l'hypothèque judiciaire, en faveur de celui qui l'a obtenue, de la prononciation d'un jugement; que l'inscription prise en exécution de ce jugement est une mesure conservatoire du droit qu'il confère, et non un acte d'exécution dudit jugement; d'où il suit que l'hypothèque judiciaire peut être inscrite aussitôt que le jugement qui la donne a été rendu, et avant que ce jugement ait été expédié et enregistré; rejette, etc.» (Arrêt du 19 juin 1833.) QUESTION. Le créancier qui obtient un jugement de condamnation acquiert-il hypothèque judiciaire même sur les biens qui n'étaient pas hypothéqués originairement à sa créance par la convention? La cour de cassation a consacré l'affirmative : « Vu les art 2004, 2123, 2124 et 2166 du C. civ.; attendu que le créancier qui obtient contre son débiteur un jugement de condamnation acquiert sur les biens de ce débiteur un droit d'hypothèque judiciaire, en vertu duquel il peut prendre inscription sur tous ses biens pour la sûreté de sa créance, sans exception, soit qu'ils fussent ou non originairement affectés à l'hypothèque conventionnelle résultant du titre primitif de la créance; casse, etc. »> (Arrêt du 13 décembre 1824.)

Des reconnaissances, etc. Ainsi, vous m'avez fait un billet de 1,000 fr.; je vous assigne pour que vous ayez à reconnaître votre signature: le jugement qui interviendra emportera hypothèque. QUESTION. Si la demande en vérification a été formée avant l'échéance de la dette, le jugement emportera-t-il hypothèque à l'instant même? Oui; mais, aux termes d'une loi du 3 sept. 1807, le créancier ne pourra prendre inscription qu'à défaut de payement après l'échéance et l'exigibilité, s'il n'y a stipulation contraire; et comme l'hypothèque judiciaire n'existe qu'autant qu'elle est inscrite (art. 2134), il s'ensuit que le débiteur n'éprouve ancun préjudice, par suite du jugement; s'il en était

autrement, la loi aurait consacré une injustice, puisqu'une personne qui n'aurait pas voulu consentir une hypothèque ordinaire verrait ses biens frappés d'une hypothèque générale, par une simple assignation en reconnaissance d'écriture avant l'échéance et l'exigibilité de la dette.

El sur ceux qu'il pourra acquérir. — QUESTION. Cette hypothèque judiciaire sur les biens à venir ne pourrait-elle se conserver, comme dans le cas de l'art. 2150, que par des inscriptions successives, à mesure des acquisitions, ou bien une seule inscription suffira-t-elle ? La cour de Lyon a adopté cette dernière opinion: «Attendu que l'exclusion ou prohibition d'hypothèque sur des biens à venir, telle qu'elle est exprimée en l'art 2129, se rapporte uniquement aux hypothèques conventionnelles, qui ne sont jamais que spéciales, au lieu de pouvoir être générales, et lesquelles ne sont valables, suivant le même article, qu'autant que, dans l'acte constitutif d'icelles, on a déclaré la nature et la situation des biens sur lesquels le débiteur consentait l'hypothèque de la créance; attendu, néanmoins, qu'en matière d'hypothèques conventionnelles, l'article 2150 veut, si les biens présents et libres du débiteur sont insuffisants pour sûreté de la créance, qu'il puisse, en exprimant cette insuffisance, consentir que chacun des biens qu'il acquerra par la suite y demeure affecté, à mesure des acquisitions, d'où il suit fort clairement, qu'en ce cas, l'hypothèque conventionnelle qu'a ainsi consentie le débiteur, n'ayant, ne pouvant avoir d'exis tence, et ne pouvant être exercée sur ses biens à venir qu'à mesure des acquisitions qu'il fait à titre gratuit ou onéreux, c'est-à-dire séparément et successivement sur chacun des biens dont il devient propriétaire, c'est alors seulement que l'exercice de l'hypothèque éventuelle, qui a été consentie au profit du créancier, se trouve ouverte en sa faveur, et qu'il a besoin, pour l'exercer, de pren dre, à mesure qu'il arrive de nouveaux biens à son débiteur, des inscriptions successives sur chacun d'iceux; attendu qu'il en est tout autrement à l'égard des hypothèques judiciaires ou légales, lesquelles, dès l'instant qu'existe le jugement ou l'acte d'où elles dérivent, pen. vent aussitôt, suivant les art. 2122 et 2123 précités, être exercées efficacement sur tous les biens à venir du débiteur, comme sur ses biens présents; en sorte qu'il suffit au créancier à qui une hypothèque judiciaire se trouve acquise, de prendre inscription à raison d'icelle, pour qu'elle ait aussitôt son effet, non-seulement sur tous les biens que possède actuellement le débiteur dans l'arrondissement où l'inscription a été prise, mais aussi sur tous ceux qu'il y pourra acquérir pendant que l'inscription aura conservé son efficacité, et sans qu'il ait besoin de prendre, sur chacun de ceux-ci, aucune inscription nouvelle et particulière, à mesure d'acquisition; attendu que cette pleine efficacité qu'a sur tous les biens à venir d'un débiteur, comme sur ses biens présents, l'inscription d'une hypothèque judiciaire, étant ainsi absolument incontestable, il ne s'agit plus que d'appliquer l'art. 2134 du C. civ., où il est dit qu'entre les créanciers l'hypothè que, soit légale, soit judiciaire, soit conventionnelle, n'a de rang que du jour de l'inscription, sauf uéanmoins l'exception concernant celles des hypothèques légales qui existent indépendamment de toute inscription, et qui sont désignées dans l'article suivant; d'où il suit, de la manière la plus immédiate, qu'entre l'intimé et l'appelant ayant des hypothèques judiciaires, qui furent prises à des dates différentes, et qui affectèrent les biens à venir du même débiteur, biens qui, lui étant advenus postérieurement, sont ceux dont le prix est maintenant à distribuer, c'est bien, sans difficulté, l'intimé dont l'hypothèque fut la première inscrite qui doit être préféré. (Arrêt du 18 fév. 1829.) Voir, à l'appui de cette doc trine, nos observations sur les art. 2130 et 2148, et particulièrement l'arrêt de cass., du 3 août 1819, cité sous ledit

art. 2148.

De l'ordonnance judiciaire d'exécution. Cette ordonnance, qui doit émaner du président du tribunal ou de celui de la cour (art. 1020 du C. de pr.), est nécessaire, parce que les décisions arbitrales, rendues par de simples particuliers, ne sont point par elles-mêmes exécutoires.

Rendus en pays étranger. Ces jugements n'emportent pas hypothèque, parce que des juges étrangers n'ayant aucune juridiction au delà du royaume étranger, ils ne peuvent donner autorité, hors de ce royaume, à leurs actes. QUESTION. Faut-il, pour qu'ils aient effet, que ces jugements soient rendus exécutoires par une ordonnance d'exécution sans examen, ou faut-il en France un nouveau jugement rendu en parfaite connaissance de cause? Cette dernière opinion parait surtout avoir prévalu, 1o parce que les juges étrangers n'ont absolument aucune autorité en France, et que leur décision est comme émanée non de juges, mais de simples particuliers, sans aucun caractère public; 20 parce qu'un tribunal ne doit jamais prendre une décision sans délibération et sans examen de l'affaire, lors même qu'il statue par défaut. (Art. 146 et 150, C. de pr.) (Cass., 19 avril 1819; cité sous l'art. 546 du C. de pr.) Voyez cet article et nos explications.

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La capacité d'aliéner. Comme l'hypothèque donne au créancier le droit de faire vendre l'immeuble à défaut de payement, on la considère comme une espèce d'aliénation; de là il suit que les mineurs, les interdits, les prodigues, ne peuvent hypothéquer; les administrateurs ne le peuvent également; mais la femme mariée, capable d'aliéner ses biens personnels. peut aussi les hypothéquer du consentement de son mari. (Art. 217, 1438.) Le mineur émancipé n'ayant pas la capacité d'aliéner (art. 484), ne peut hypothéquer; mais l'hypothèque qu'il aurait consentie ne serait pas nulle de droit, il y aurait seulement lieu à rescision s'il y avait lésion. (Art. 1505.)

2125. Ceux qui n'ont sur l'immeuble qu'un droit suspendu par une condition, ou résoluble dans certains cas, ou sujet à rescision, ne peuvent consentir qu'une hypothèque soumise aux mêmes conditions ou à la même rescision.

Ou résoluble. C'est l'application du principe, nemo plus juris in alium transferre potest quàm ipse habet. Ainsi, n'ayant pas d'enfants, je fais une donation; le donataire consent hypothèque sur les biens donnés : un enfant me survient, la donation est résolue, et par suite l'hypothèque que le donataire avait consentie; car il n'avait sur l'immeuble donné qu'un droit résoluble. (Art. 963.)

2126. Les biens des mineurs, des interdits, et ceux des absents, tant que la possession n'en est déférée que provisoirement, ne peuvent être hypothéqués que pour les causes et dans les formes établies par la loi, ou en vertu de juge

ments.

Et dans les formes. C'est-à-dire avec l'autorisation du conseil de famille, et pour un avantage évident ou une nécessité absolue. (Art. 457.) Les biens des absents ne peuvent être hypothéqués par les envoyés en possession provisoire, qui ne sont que de simples dépositaires (art. 125); si ce n'est peut-être en cas de nécessité abso

lue, et en suivant les formes prescrites pour les mineurs ; mais, après l'envoi définitif, les envoyés pouvant aliéner (art. 132), ils ont droit, à plus forte raison, d'hypothéquer.

Ou en vertu de jugements. Ainsi, il faut bien le remarquer, les biens des mineurs, des interdits, des absents, sont susceptibles d'hypothèques légales et judiciaires, s'ils ne le sont pas d'hypothèques conventionnelles; car un mineur peut être marié, il peut être tuteur de ses enfants; un absent peut aussi être tuteur et marié, et ils peuvent être assignés en justice et subir des condamnations emportant hypothèque.

2127. L'hypothèque conventionnelle ne peut être consentie que par acte passé en forme authentique devant deux notaires, ou devant un notaire et deux témoins.

En forme authentique. Tout acte authentique emportait autrefois une hypothèque générale sur tous les biens du débiteur. L'usage qui avait introduit l'acte authentique devait être maintenu par le législateur moderne pour plusieurs motifs: 10 l'hypothèque qui porte atteinte au crédit des particuliers, et nuit à la circulation des biens, ne pouvait être permise que par la puissance publique, et conséquemment son existence devait porter l'empreinte de cette puissance, au moyen du concours des officiers publics; 20 on devait rendre plus difficile un acte dont les effets sont plus désastreux, et prévenir, par l'intervention des officiers publics, des surprises qui eussent été d'autant plus faciles, que les biens affectés à l'hypothèque restant dans les mains des débiteurs, ceuxci se flattent toujours d'éviter l'expropriation; 30 enfin les créanciers pouvant poursuivre la vente des biens hypothéqués, au moyen du titre qui renferme l'hypothèque, ce titre devait toujours être authentique, afin d'être exécutoire. (Art. 2213.) — QUESTION. Des marchés administratifs, quoique passés sans l'intervention des notaires, emportent-ils hypothèque? La cour suprême a consacré l'affirmative: « Vu l'art. 14 de la loi du 28 oct. 1790, les art. 1 et 3 de la loi du 4 mars 1795, et les art. 2127, 2132 et 2148 du C. civ.; attendu que, de la combinaison des lois ci-dessus citées, il résulte, que le ministère des notaires n'est point nécessaire pour les marchés passés avec l'administration, et que les actes administratifs contenant les stipulations relatives auxdits marchés, emportent hypothèque. D (Arrêt du 12 janv. 1835, et Paris, 29 mars 1830.) Les actes des juges de paix, quoique officiers publics, ne pourraient pas emporter hypothèque, car ils n'ont que force d'écriture privée. (Art. 54, C. de proc.) QUESTION. Le mandat pour consentir hypothèque peut-il être sous seing privé? La cour de cassation a embrassé l'affirmative: «Attendu que le mandat à l'effet de consentir une hypothèque et l'acte constitutif de cette hypothèque sont deux choses tout à fait distinctes; en ce qui concerne le mandat, attendu que le Code établit comme règle générale que tout mandat, quel qu'en soit l'objet, peut être donné par acte sous signature privée, et que, s'occupant dans une disposition ultérieure, du mandat à l'effet de consentir hypothèque, il ne déroge point à la règle qu'il vient d'établir: il dit, et rien de plus, que ce mandat doit être exprès; et que, dans l'espèce, le mandat donné par le sieur Prosper-Philippe Daigremont au sieur Alexis Dauphin, est exprès; en ce qui concerne l'acte constitutif de l'hypothèque, attendu que cet acte est authentique et consenti par un mandataire spécialement autorisé à grever d'hypothèque les biens de son mandant; rejette, etc. » (Arrêt du 27 mai 1819.) — QUESTION. Si un acte sous seing privé était déposé chez un notaire, avec les formalités requises, le consentement à l'hypothèque qu'il renfermerait serait-il valable? La cour suprême a consacré l'affirmative: «Attendu que, par l'acte sous seing privé du 18 sept. 1807, il avait été donné, par l'ac

quéreur, hypothèque spéciale sur tous les biens désignés, en l'acte, et que, par autre acte de la même année, tous les cohéritiers se sont volontairement mis à la place de leur père, ont ratifié l'acte de vente par lui souscrit, et requis qu'il fût mis au nombre des minutes des actes publics; rejette, etc. » (Arrêts des 15 fév. 1852, et 11 juill. 1815.) (Mais Voyez contr., fortement motivé, Paris, 16 juin 1832.)

2128. Les contrats passés en pays étranger ne peuvent donner d'hypothèque sur les biens de France, s'il n'y a des dispositions contraires à ce principe dans les lois politiques ou dans les traités.

Ne peuvent donner d'hypothèque. Parce que l'autorité des officiers publics d'un pays étranger ne peut s'étendre sur un pays non soumis au prince qui leur a donné leur caractère d'hommes publics; mais les traités pourraient modifier ce principe: toutefois, il ne suffirait pas qu'un pays, par ses lois, accordât aux Français le droit d'obtenir hypothèque sur les biens composant son territoire, pour que les habitants de ce pays eussent le même droit en France. Il ne saurait être permis à un souverain, en accordant aux Français tels ou tels droits, d'attribuer en France les mêmes droits à ses sujets: cette réciprocité qu'un prince établirait ainsi à volonté pourrait être souvent fort onéreuse pour l'un des pays.

2129. Il n'y a d'hypothèque conventionnelle valable que celle qui, soit dans le titre authentique constitutif de la créance, soit dans un acte authentique postérieur, déclare spécialement la nature et la situation de chacun des immeubles actuellement appartenant au débiteur, sur lesquels il consent l'hypothèque de la créance. Chacun de tous ses biens présents peut être nominativement soumis à l'hypothèque. - Les biens à venir ne peuvent pas être hypothéqués.

= Spécialement. Ainsi que nous venons de le remarquer, tout acte authentique passé devant notaire emportait autrefois hypothèque générale sur tous les biens du débiteur. encore que les parties n'en fussent pas convenues. Il résultait de là qu'une dette quelconque affectant l'universalité des biens d'un débiteur, il lui devenait trèsdifficile de faire aucun acte d'aliénation, et que son crédit se trouvait en quelque sorte anéanti. C'est pour obvier à tous ces inconvénients, que la loi a posé comme l'une des bases du système hypothécaire actuel, la spé. cialité, au moyen de laquelle tous les biens du débiteur qui ne sont pas nominativement soumis à l'hypothèque restent libres dans les mains du débiteur, et peuvent être ou hypothéqués ou aliénés par lui. Observez, du reste, que la spécialité n'existe que pour l'hypothèque conventionnelle. Sur la nécessité de la spécialité, voir cass., 20 fév. 1810, qui annule une stipulation d'hypothèque par laquelle le débiteur déclarait bypothéquer tous les biens situés dans la commune de Saint-Quentin.

La nature. Si c'est une maison ou une pièce de terre. Les biens à venir. Ils ne peuvent pas être hypothéqués, parce qu'ils ne sont pas susceptibles de spécialité ; il est impossible de déclarer à l'avance leur nature et leur situation.

2130. Néanmoins, si les biens présents et libres du débiteur sont insuffisants pour la sûreté de la créance, il peut, en exprimant cette insuffisance, consentir que chacun des biens qu'il acquerra par la suite, y demeure affecté à mesure des acquisitions.

Sont insuffisants. — QUESTION. Celui qui n'a aucun bien présent peut-il consentir hypothèque sur ́ chacun de ses biens à venir? La négative semble résulter du mot insuffisants, qui suppose l'existence de biens présents, et la cour de Riom a en effet consacré cette opinion. (Árrêt du 25 nov. 1830.) Mais Besançon a établi en ces termes l'opinion contraire : « Considérant que l'art. 2130 porte que si les biens présents et libres du débiteur sont insuffisants pour la sûreté de la créance, il peut, en exprimant cette insuffisance, consentir que chacun des biens qu'il acquerra par la suite y demeure affecté, à mesure des acquisitions; que cette exception à l'art. 2129, qui défend d'hypothéquer les biens à venir ne doit pas être restreinte au cas où le débiteur possède et hypothèque, au moment de l'obligation, des biens présents qui sont insuffisants; mais qu'elle doit avoir lieu, et à bien plus forte raison, dans le cas où le débiteur n'a, à cette époque, aucun immeuble à offrir pour sûreté à son créancier, parce qu'alors il est évident qu'il y a insuffisance entière et absolue; que le législateur. en modifiant la défense d'hypothéquer les biens à venir, ayant voulu venir au secours du débiteur dont les facultés présentes sont trop faibles pour se procurer du crédit et des ressources, n'a certainement pas entendu refuser cette faveur à celui qui, n'ayant aucune fortune présente, se trouve dans une position d'autant plus favorable qu'elle est malheureuse; qu'il résulte de là que la veuve Marquet a consenti valablement à ce que chacun des biens qu'elle acquerrait par la suite demeurât affecté à la créance de l'avoué Désavaux, quoique à l'époque de l'obligation elle ne possédât aucun immeuble; que ce dernier a eu conséquemment le droit de prendre inscription, et que les premiers juges ont eu raison d'admettre sa créance. » (Arrêt du 29 août 1811.) — Il faut remarquer, au reste, que les biens à venir ne sont frappés d'hypothèque qu'à mesure de leur acquisition, sans stipulation nouvelle, et du jour seulement où le créancier a pris inscription sur chacun de ces biens. (Lyon, 18 fév. 1829.) Mais il en est différemment à l'égard des hypothèques judiciaires : une seule inscription prise au bureau d'un arrondissement s'étend à toutes les acquisitions qui sont faites successivement dans cet arrondissement. (Voir l'arrêt de cass., du 3 août 1819, cité sous l'article 2148.)

En exprimant cette insuffisance. Ainsi la preuve de cette insuffisance résulte de la seule déclaration; il n'y a aucune vérification à faire. La loi a voulu permettre d'étendre par là, autant que possible, le crédit de cent qui, ayant des espérances, n'ont encore que peu de biens présents.

2131. Pareillement, en cas que l'immeuble ou les immeubles présents, assujettis à l'hypothèque, eussent péri, ou éprouvé des dégradations, de manière qu'ils fussent devenus insuffisants pour la sûreté du créancier, celui-ci pourra ou poursuivre dès à présent son remboursements, ou obtenir un supplément d'hypothèque.

=Devenus insuffisants. Cet article paraît d'abord en contradiction avec l'art. 1188, qui dit que le débiteur est privé du bénéfice du terme lors seulement que c'est par son fait qu'il a diminué les sûretés; mais il faut es tendre l'article actuel en ce sens, que si les sûretés s trouvent diminuées sans le fait du débiteur, il ne sera privé du bénéfice du terme qu'autant qu'il n'offrira pas un supplément d'hypothèque, supplément que le créan cier ne peut refuser pour exiger le payement de sa créance avant l'échange, tandis qu'il le pourrait si c'était parle fait du débiteur que cette diminution eût eu lieu.

2132. L'hypothèque conventionnelle n'est

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