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mentale, à moins qu'elles ne soient placées dans un local entièrement séparé.

Ces établissemens devront être, à cet effet, spécialement autorisés par le gouver

exemple, il y a des cas où le préfet croit devoir s'éclairer par une commission de trois médecins ; d'antres cas, dans lesquels on peut prier un prêtre, le curé de la paroisse, je suppose, d'assister le inédecin et d'examiner si tous les soins sont bien administrés. »

Un paragraphe disait expressément que les diverses personnes indiquées dans l'article, seraient admises lorsqu'elles se présenteraient pour remplir leur mission. Il a été supprimé comme inutile. 11 est bien évident, en effet, que la loi qui veut la fin, 'veut les moyens.

On avait proposé de comprendre le premier président de la Cour royale et le procureur-général dans la nomenclature; cette proposition n'a pas été accueillie, et cependant on a dit dans la discussion que ces magistrats avaient le droit de s'introduire, lorsqu'ils le jugeraient convenable, dans les établissemens d'aliénés.

Il faut bien s'entendre à cet égard et faire disparaître l'espèce de contradiction qu'on pourrait trouver entre ce qui a été dit, à peu près unanimement, sur la nature des droits du procureur général et du premier président, et le refus de les comprendre dans la liste des fonctionnaires chargés de la surveillance des établissemens créés par la présente loi. Les procureurs généraux, les premiers présiden, les juges d'instruction et les juges de paix peuvent et même doivent se transporter sur-le-champ dans le lieu, où un individu est détenu arbitrairement et le faire mettre en liberté. (Cod. inst., art. 616.)

Mais il y a une grande différence entre la démarche obligatoire pour ces magistrats, à qui un fait de détention illégale est révélé, et les visites qui, sans qu'aucun événement les ait provoquées, doivent être faites, par pure précaution, par les fonctionnaires que désigne le présent article, dans les établissemens consacrés aux aliénés.

M. Dubouchage a fait remarquer qu'il ne fallait pas perdre de vue qu'il ne s'agit pas seulement de la liberté individuelle d'un aliéné séquestré ; mais encore, et principalement des abus qui pourraient s'introduire dans un établissement; or, disait-il, s'il en est ainsi, quels renseignemens les délégués pourront-ils prendre dans l'intérieur de la maison, auprès des personnes qui y sont placées? Ils n'en prendront pas, ou ils n'en prendront que de fautifs, puisqu'ils auront été donnés par des personnes intéressées à maintenir les abus qu'on voudrait réprimer. Il faudra donc que l'autorité prenne aussi des renseignemens au dehors, et c'est ce qui n'est pas dans votre loi. Il proposait, en conséquence, un amendement conçu en ces termes : Ils (les délégués) pourront faire une enquête sur les abus qui leur auront été signalés, et appeler des témoins. Ceux qui négligeraient ou refuseraient leur témoignage seraient passibles d'une amende de 100 à 300 fr. •

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nement, et seront soumis, en ce qui concerne les aliénés, à toutes les obligations prescrites par la présente loi (1).

6. Des réglemens d'administration pu

elles une sorte de droit d'enquête. Quant à l'enquête extérieure, elle est de droit, puisque les fonctionnaires chargés des inspections doivent prendre tous les renseignemens propres à les éclairer. Ces fonctionnaires appartenant, soit à l'ordre admi nistratif, scit à l'ordre judiciaire, auront, chacun dans leur sphère, le droit de faire connaître les abus, et même de les réprimer directement. La commission n'a donc pas cru nécessaire de l'exprimer. Quant à l'amende que prononce le statut anglais contre les personnes qui se refuseraient à comparaître dans une enquête, nous n'avons pas cru devoir vous proposer une disposition analogue dans la loi. Le plus souvent, l'enquête sera ordonnée par le procureur du roi. Or, quand elle est faite par l'autorité judiciaire, le Code pénal contient des peines contre les témoins défaillans. Ces peines qui s'appliquent à une prescription générale, seront aussi appliquées, s'il y a lieu, au cas spécial.

M. le vicomte Dubouchage: « Il est bien reconnn qu'à l'aide de ces mots on a entendu que l'administration et l'autorité judiciaire auront toujours le droit de faire une enquête à l'extérieur. Dès-lors je retire mon amendement, et mon but est atteint par les explications que j'ai provoquées. »

M. le ministre de l'intérieur a cru devoir ajouter: «Les personnes admises dans les établissemens d'aliénés ont deux catégories d'observations à faire : 1° les observations générales portant sur le régime de la maison, sur ce régime qui aura été introduit par des réglemens d'administration publique. Eh bien, dans ce cas, le rapport sera fait à l'autorité administrative, qui a dans ses mains tout pouvoir pour réformer les abus. Il y a ensuite une autre espèce d'examen à faire celui qui a rapport aux personnes. Pour celui-là, supposez qu'une plainte, qu'un soupçon arrive à l'esprit du visiteur, à qui va-t-il s'adresser? aux autorités compétentes, qui ont tous les moyens de faire une enquête tout aussi solennelle, tout aussi complète que l'enquête prévue par le statut anglais. (Approbation.)

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Ainsi, s'il y a abus administratif, l'administration locale est là; s'il y a une enquête judiciaire à faire, elle rentre dans le domaine des tribunaux. Nous croyons donc que l'article proposé par le gouvernement, et auquel la commission a bien voulu donner son suffrage, remplit parfaitement le but qu'on s'est proposé. (Assentiment.)

(1 Le projet de 1838 contenait un principe ab. solu dans son deuxième paragraphe. Il portait : « Aucun établissement privé, consacré au traitement a d'autres maladies ne pourra recevoir les personnes atteintes d'aliénation mentale. »

Cette disposition, qui n'était pas dans le projet primitif, fut introduite sur la demande unanime des médecins qui attestaient qu'on ne pouvait arriver d'une manière efficace à la guérison des maladies mentales dans les établissemens où étaient reçus d'autres malades.

A la Chambre des Pairs on soutint que l'article aurait pour résultat d'enlever aux familles toute leur liberté et de ne pas laisser même au malade le choix de la mai on où il voudrait être traité. A la suite d'une longue discussion, la rédaction qui se trouve aujourd'hui dans la loi fut proposée par

blique détermineront les conditions auxquelles seront accordées les autorisations

la commission et adoptée malgré une vive opposition de la plupart des membres qui avaient combattn l'article et qui demandaient qu'il fût rejeté.

Il n'est, du reste, pas aussi restrictif du principe absola posé dans la rédaction qu'il remplace, que la suppression de celle-ci pourrait le faire croire. Il est certain que la Chambre n'a, pour ainsi dire, fait autre chose que substituer à l'article son commentaire. C'est ce qui résulte parfaitement de la discussion qui a précédé ou suivi son adoption. Ainsi le ministre de l'intérieur disait : « Cet article se recommande à toute l'attention de la Chambre; car si l'on adoptait la proposition qui a été faite de le supprimer, la loi deviendrait en quelque sorte illusoire. Dans cet article se trouve en effet toute l'efficacité de la loi.

Le but du gouvernement en présentant cet article a été très bien défini dans la rédaction de la commission qui vient d'être présentée tout à l'heure. Ainsi la commission et le gouvernement ont été fidèles à eux-mêmes, et ils n'ont fait autre chose que rédiger plus clairement leur pensée. » Et en effet, en présentant la nouvelle rédaction de la commission et du gouvernement, M. le marquis Barthélemy, rapporteur, avait déjà dit : «.............. Il ne s'ensuivra pas sans doute qu'une maison de santé qui recevra d'autres malades ne pourra point être autorisée à avoir aussi des aliénés. Evidemment, si la séparation est complète entre les deux classes de malades, si la maison réunit les conditions essentielles, si son directeur est agréé, s'il se soumet à toutes les obligations prescrites par Ja loi, il est évident qu'une pareille maison devra obtenir la faculté de recevoir des insensés. Mais il aura en ce cas deux établissemens distincts, quoiqu'appartenant au même individu l'un qui ne sera soumis, comme maison de santé ordinaire, qu'à la surveillance du commissaire de police; l'autre qui devra être incessamment ouvert au ministère public, au juge de paix et aux nombreux magistrats auxquels nons avons hier confié la mission de le visiter. Cela était ainsi entendu dans la commission, et la Chambre l'a compris de même; cependant nous avons pu observer qu'un grand nombre de ses membres aurait désiré une rédaction qui exprimât plus clairement la pensée de la commission que ne peut le faire l'article du projet, qu'elle n'avait pas cru devoir modifier. La commission s'étant assemblée, a recherché une rédaction qui pût satisfaire, non pas l'unanimité de la Chambre, mais concilier l'opinion de tous ceux qui ne veulent point que les insensés puissent être confondus avec les autres malades. »

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nom

Dans le cours de la discussion, M. Barthélemy répondait ainsi à une interpellation de M. le baron Mounier : L'amendement que j'ai présenté au commencement de la séance, au de la commission, est plus explicite que celui du gouvernement, au fond il ne conmais tient pas autre chose qu'une juste et rigoureuse interprétation de l'article du gouvernement. Que dit en effet cet article? « Aucun établissement privé, consacré au traitement d'autres maladies ne pourra recevoir les personnes atteintes d'a«liénation mentale. » Il est évident que si, à côté de cet établissement, il se forme un établissement autorisé par le gouvernement pour traiter

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énoncées en l'article précédent, les cas où elles pourront être retirées, et les obliga

l'aliénation mentale, il y aura un deuxième établissement placé sous la même direction. »

Néanmoins la loi n'exige pas deux bâtimens distincts pour chaque établissement. En effet la première rédaction de l'amendement de la commis sion portait dans un local entièrement distinct et séparé. M. le baron Mounier a dit : « On doit traiter les aliénés séparément, et, par conséquent, il n'y a pas d'inconvénient à ce qu'on leur assigne des quartiers dans des maisons où se trouvent d'autres malades, pourvu qu'ils ne communiquent pas avec eux. Je demande donc qu'on se serve du mot sẻparé, qui peut s'entendre de quartiers d'un même bâtiment tandis que si or mettait le mot distinct, on pourrait venir dire un jour qu'on exige deux bâtimens. »

M. le ministre de l'intérieur et M. le rapporteur ont déclaré adhérer à l'amendement, qui a été adopté par la Chambre.

Le paragraphe 3 a donné lieu à une discussion de laquelle est ressortie la solution de quelques difficultés d'exécution.

Ces difficultés ont été soulevées et signalées par M. le comte Portalis.

Il a dit que la disposition de l'amendement qui obligeait la maison dans laquelle se trouvera un malade accidentellement atteint ou menacé d'aliénation mentale, de se faire donner une autorisation préalable, lui semblait détruire l'amendement lui-même ; qu'il était évident que toutes les maisons de santé de France seraient sous le coup de cette obligation, car on ne pouvait prévoir d'avance celles dont les secours pourraient être demandés, lorsqu'une famille habitant dans leur voisinage se verrait dans la dure nécessité de faire séquestrer un de ses membres, et de le soumettre au traitement nécessaire pour le rétablissement de sa raison.

se

« On ne peut pas considérer comme des aliénés, dans le sens de la loi, a continué l'orateur, toutes le peronnes atteintes d'une affection qui altere l'usage ou l'exercice de leurs facultés intellectuelles. Il y a des transports au cerveau, des accès de délire, des hystéries qui troublent la raison et obscurcissent l'intelligence. Dans tous les cas, on ne peut considérer les individus dont la maladie manifeste par ces déplorables symptômes comme des aliénés proprement dits; et une des causes d'erreur et de dissension entre les orateurs si habiles et d'ailleurs si unis d'intention, qui ont pris part à cette discussion, vient de la confusion des idées qu'entraîne l'imperfection du langage. Sur le sens du mot aliéné, l'autorité de l'Académie est d'accord avec l'autorité du Code. Le Code ne regarde comme aliénés les que personnes qui sont dans un état habituel de démence, de fureur ou d'imbécilité.

« Faudra-t-il, lorsqu'un accident fâcheux aura alleint un malheureux, que sa famille le classe elle-même sur-le-champ au nombre de ces malheureux privés de raison, et se détermine à le faire entrer immédiatement dans une maison dédiée à la folie? L'intérêt des familles ne sera-t-il pas cruellement froissé, s'il fallait, aussitôt qu'une indisposition de ce genre aura affecté un de ses

membres, qu'on le transporte dans un hospice consacré aux seuls insensés? »

L'orateur a présenté d'autres considérations tirées de ce que l'éloignement des maisons spéciales ne permettra pas toujours aux familles de faire trailer leurs malades dans leur voisinage; qu'il nécessitera même des dépenses qui souvent excéderont leurs ressources. Il a résumé son opinion en déclarant que la loi pouvait atteindre son but, sans blesser les convenances des familles, et en leur ménageant la faculté de déposer un de leurs membres atteint d'une maladie mentale dans un lieu destiné aux maladies ordinaires; et qu'il suffirait pour cela que cette maison fût assujettie à la surveillance établie par la loi sur les maisons spé, ciales consacrées au traitement des aliénés, et que le malade ne pût y être reçu qu'apres l'accomplis sement de toutes les formalités prescrites par la loi; qu'il ne voudrait pas qu'on obligeât ces maisons à demander d'avance une autorisation; car le directeur ne pouvait prévoir qu'il s'y présentera des aliénés. Si l'on veut que l'ainendement ait quelque portée, quelque utilité, qu'il remplisse le but qu'on s'est proposé, il faudrait que toutes les maisons de santé se prémunissent de l'autorisation.▸ Il a proposé la rédaction suivante :

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Les établissemens privés consacrés au traitement d'autres maladies ne pourront recevoir les « personnes atteintes d'aliénation mentale, à « moins qu'elles ne soient placées dans un local entièrement distinct et séparé.

« Ces établissemens seront, en ce cas et de plein droit, soumis à toutes les mesures de surveillance prescrites, et les chefs ou directeurs de ces élablissemens seront tenus de se conformer à toutes les dispositions contenues dans la section 1" du titre 2, pour l'admission des malades. »

M. Pelet a ajouté: M. Portalis a fait remarquer combien il serait difficile, dans l'exécution, de soumettre toutes les maisons de santé qui peuvent se trouver dans le cas de recevoir momentanément une personne dont la raison cominence à se troubler, de les soumettre à se faire autoriser comme maisons d'aliénés.

En effet, je ferai remarquer combien ce mot aliénés, qui se présente à chaque instant, est vague et incertain. Faudra-t-il, toutes les fois qu'une personne malade d'une fièvre cérébrale sera présentée dans une maison de santé, faudra-t-il que le propriétaire se fasse donner l'assurance que sa raison est bien saine, afin que son admission ne puisse le compromettre vis-à-vis de l'autorité et lui faire encourir les pénalités qui terminent la loi? Je prie la Chambre de remarquer que le dernier article condamne à un emprisonnement de cinq jours à un an, et à une amende de 50 fr. à 3,000 fr., les personnes qui violeraient les prescriptions de la loi. Or, voulez vous, quand on présentera un' malade dans une maison de santé, que le directeur fasse établir une enquête pour constater qu'il n'est pas atteint d'aliénation mentale, maladie qui le compromettrait vis-à-vis du gouvernement?

Quel est le but de la loi? C'est de garantir la liberté individuelle, et de mettre le pays à l'abri des malheurs qni pourraient résulter de ce grand nombre d'aliénés qui vaguaient dans les campagnes. Eh bien! il me semble qu'elle va au-delà de son but, en forçant les familles à mettre ces personnes dans les maisons d'aliénés, ou en mettant à leur admission dans des maisons de santé

de telles conditions, que ce serait rendre la chose impossible.

M. le ministre de l'intérieur a repoussé ces re. proches.

Sans doute, a-t-il dit, il sera moins commode pour les familles de pouvoir placer, à leur gré, dans une maison de santé, ceux de leurs membres atteints d'aliénation mentale. Mais n'y a-t-il donc que l'intéret des familles dont nous devons nous préoccuper ici? N'est-il pas vrai, au contraire, que la première préoccupation du législateur, lorsqu'il s'agit de disposer de quelques-uns des mem⚫ bres de la société, c'est la liberté individuelle ?

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Cette préoccupation n'existe pas seulement chez nous. On a discuté longuement, dans un autre pays, une loi sur les aliénés. Quelle a été la principale préoccupation du législateur? Ç'a été la liberté individuelle. Et je suis bien aise de dire que les législateurs anglais ont été beaucoup plus loin que nous. Vous seriez peut-être effrayés des précautions accumulées par le gouvernement anglais pour préserver la liberté individuelle..........

"Le gouvernement anglais a été trop loin; je crois que nous sommes dans la juste mesure. Dès que l'aliéné sort de la famille pour être mis dans une maison de spéculation, nous faisons en quelque sorte une addition de la spéculation de la famille à la spéculation de l'intérêt privé, et nous prenons toutes les précautions pour en prévenir les dangers.

Telle est la pensée qui a dirigé le gouvernement du roi dans l'article qui est soumis en ce moinent à vos délibérations. »

Répondant à l'objection prise du petit nombre des établissemens consacrés aux aliénés, d'où résulterait la difficultés du placement tant à cause de l'éloignement que des frais qu'il entraînerait, M. le ministre a dit qu'il existe en ce moment quatreciaux pour le traitement des aliénés sans compter vingt-quatre établissemens publics ou privés spéles maisons de santé ; que, d'un autre côté, il est évident que s'il s'agit de déposer pour une nuit un aliéné dans un hospice, ou de le déposer pour deux nuits dans une maison de santé, il n'y aura à cela aucune difficulté; car la loi a prévu ce cas : l'aliéné indigent, mais à toute espèce d'aliénés. ▪ la prévision de la loi s'applique non seulement à

Il y a des cas d'urgence, a dit ailleurs M. le ministre, dans lesquels l'autorité du lieu, le préfet, le sous-préfet ou le maire prendra tout sur lui, et fera entrer le malade dans la maison de santé, et en rendra compte immédiatement. La loi ne peut prévoir tous les cas, il faut laisser quelque chose à l'exécution, à la jurisprudence. Quand ces cas d'urgence se présenteront, on trouvera le moyen d'y pourvoir à l'instant même.» V. art. 24. »

Quant au reproche de gêner les familles pour le dépôt d'un aliéné dans une maison de santé, M. le ministre, loin de le nier, a déclaré que la loi voulait qu'il en fût ainsi, et il a justifié ce vœu en invoquant la protection qui en résultait pour la lis

tions auxquelles seront soumis les établis semens autorisés (1).

7. Les réglemens intérieurs des établissemens publics consacrés, en tout ou en partie, au service des aliénés, seront, dans les dispositions relatives à ce service, soumis à l'approbation du ministre de l'intérieur (2).

berté individuelle, en soutenant en second lieu que le traitement en commun est ce qu'il y a de meilleur. « Or, a-t-il dit, si vous multipliez les maisons où pourront être reçus les aliénés, vous disséminez et amoindrissez par conséquent la surveillance qu'il est nécessaire d'exercer sur ces maisons. Le jour où vous permetterez de traiter les aliénés dans les maisons de santé, toutes les personnes auxquelles vous avez donné le droit de visite ne suffiraient pas à faire l'inspection que vous voulez qu'eiles fassent. »

Le reproche fondé sur le vague du mot aliéné a reçu aussi une réponse. « Il faut le reconnaître, a dit le ministre, le traitement de l'aliénation mentale demande une spécialité. Qu'on veuille bien remarquer que nous parlons des aliénés seulement. On vient nous parler de fièvres cérébrales. On est aliéné ou on ne l'est pas ; si l'on n'est pas aliéné, on peut être traité dans une maison de santé ; si l'on est aliéné, on doit être placé dans un établissement public ou privé spécial. On veut qu'on puisse mettre l'aliéné dans une maison de santé, d'accord; mais quand cette maison aura été autorisée, quand certaines conditions auront été remplies, et qu'alors vous aurez toutes les garanties pour la société, qui doit être préservée des atteintes de ses membres; pour la famille dont la situation sera suffisamment favorisée, et pour l'individu que vous devez surtout avoir en vue, parce qu'on pourrait abuser d'une fièvre cérébrale, d'une faiblesse passagère du cerveau, pour en faire un aliéné qu'on priverait de tous droits de famille. »

Je crois que cette réponse laisse subsister la difficulté; mais aussi je reconnais qu'il était difficile de lui donner une solution franche et péremptoire. C'est aux directeurs des maisons de santé à faire constater l'existence de la maladie avec tous les caractères qui la constituent, lorsqu'un individu leur sera présenté, et à ne le recevoir que sur la déclaration des médecins que le malade est atteint d'une véritable aliénation mentale. Il y aura néanmoins toujours des erreurs, et quelquefois aussi la loi pourra être éludée. Les familles qui voudront avoir leur malade sous les yeux et dans une maison de santé, tâcheront de trouver des médecins complaisans, qui, d'accord avec le directeur de la maison de santé, déclareront qu'il n'y a pas démence, mais fièvre cérébrale ou toute autre affection analogue.

M. le rapporteur, répondant à la question nettement posée de savoir si un établissement de santé pourrait recevoir un aliéné avant d'en avoir obtenu l'autorisation, a dit :

« L'on demande si, lorsqu'un aliéné se présentera dans une maison de santé ordinaire, surtout, dans un pays où il n'existera point d'établissement spécial, la porte de cette maison devra lui être refusée, par le motif qu'elle ne serait pas autorisée. Evidem. ment, non. La loi charge, en certains cas, le maire de pourvoir d'office au logement de l'aliéné avant

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qu'il puisse être dirigé sur un établissement spécial, et on lui refuserait le droit d'autoriser un placement temporaire dans une maison de santé ! Cela n'est pas supposable.

a Revenons, a continué l'orateur, à l'amendement de M. le comte Portalis.........

« Cet amendement ne nous paraît pas pouvoir être adopté; il n'offre pas les mêmes garanties que celui de la commission, tant sous le rapport de la liberté individuelle que sous celui du bien-être de l'aliéné. Nous n'hésitons pas à le dire, la plus forte des garanties est dans la moralité du chef de l'établissement; aussi la loi a-t-elle voulu que, non seulement l'établissement, mais encore son directeur, fussent approuvés et agréés par le ministre de l'intérieur.

«Si une maison de santé peut recevoir des aliénés sous la seule condition d'être soumise aux me sures de surveillance prescrites par la loi, il est évi dent qu'on arrivera, sans le vouloir, à se passer da la garantie si essentielle que doit offrir un chef d'établissement agréé par le ministre, et dont il peut briser l'existence pour le moindre méfait. Qui garantit d'ailleurs que, dans un établissement que vous ne soumettrez pas à l'autorisation du gouver nement, il existera les divisions les plus indispen sables; que, par exemple, les deux sexes seront sé; parés? Personne n'ignore que les aliénés ont les passions violentes, et que les plus graves désordres ne tarderaient pas à naître dans une maison où n'existerait aucuns moyens de les prévenir ou de les réprimer. Vous n'aurez jamais, dans les maisons ordinaires, les mêmes moyens de surveillance que dans les établissemens spéciaux. »

L'amendement de M. Portalis a été rejeté. (Voy. toute cette discussion dans le Moniteur du 10 février 1837.)

Sur la demande de M. Mounier, la Chambre des Pairs a substitué les mots à cet effet, à ceuxci en ce cas, qui se trouvaient dans l'amendement de la commission qui a été adopté. Voy. art. 41. (1) Voy. l'art. 41.

(2) Dans le projet, cet article formait un deuxiè me paragraphe de l'article 6. Il était ainsi conçu : a Tout établissement public, consacré en tout ou « en partie au service des aliénés, sera, soit dans son « ensemble, soit dans la portion de l'établissement affectée à ce service, soumis, pour la gestion et le « régime, à des réglemens d'administration publi· que.»

a

La raison de cette rédaction de la Chambre des Pairs était, que la partie de l'établissement non consacrée aux aliénés ne devait point être soumise aux réglemens spéciaux.

Quoique la distinction ne se retrouve pas expressément dans l'art. 5, la pensée n'en est pas moins restée. On en a supprimé l'expression comme sur◄ abondante et inutile. (Voy. sur ce point les notes de l'art. 5.)

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Elle le sera sur la demande de l'autorité militaire pour les militaires.

Le placement, soit avant, soit après l'interdictien, pourra ètre ordonnée d'office par le pré fet, lorsqu'il sera motivé par l'intérêt de la sû* relé publique.

"

le

L'autorisation ou l'ordre seront donnés par préfet, sur les rapports du maire ou du souspréfet, et sur l'avis d'une commission instituée dans les formes qui seront déterminées par un réglement d'administration publique.»

La commission de la Chambre des Députés supprima ces deux articles; et l'intervention de l'autorité publique fut écartée.

Le motif pour lequel on avait exigé l'autorisation préalable du préfet avait été de protéger la liberté individuelle; la commission pensa que cette précaution n'était pas indispensable.

Le projet du gouvernement, porte le premier rapport de M. Vivien, vous propose d'exiger une autorisation préalable du préfet, et, selon l'exposé des motifs, l'isolement de l'aliéné ne peut être effectué, dans aucun cas, sans l'intervention d'une autorité publique.

"Les motifs sur lesquels se fonde cette proposi tion sont graves et dignes de la plus sérieuse attention. Le placement d'une personne dans un établissement d'aliénés est une alleinte formelle à sa liberté. La faculté de l'ordonner peut devenir la Source des plus coupables abus: elle peut servir d'arme à la vengeance, d'instrument à la cupidité. La liberté individuelle est un des droits que la Charte a garantis; le législateur ne peut l'entourer de trop de protection, et des mesures qui la mettraient en question, répandraient à juste titre l'inquiétude dans le pays.

"Votre commission adopte ces principes, mais elle ne croit pas qu'ils justifient le projet du gouvernement. Elle accepte toutes les précautions qui tendront à faire connaître à l'adininistration le placement d'un citoyen dans une maison d'aliénés;

elle

provoque toutes les visites qui pourront aider à constater son état mental; elle ne veut pas qu'en ancun cas une personne saine d'esprit puisse être privée de sa liberté, séparée violemment de sa famille et séquestrée dans un établissement d'aliénés; mais elle ne croit pas qu'il soit nécessaire d'exiger, préalablement à l'admission, une autorisation de l'administration; elle differe en ce point seulement du projet du

gouvernement,

Le but de ce projet est le soulagement des alié nés, les facilités à donner à leur traitement, C'est pontrarier ouvertement ce but que de subordonner

1° Une demande d'admission contenant les noms, profession, âge et domicile,

à un acte de l'autorité publique, la mesure la plus favorable à la guérison.

« L'isolement des aliénés est en effet le premier et le plus énergique des moyens de traitement; il est en même temps le plus urgent un retard de quelques jours peut aggraver le mal au point d'en rendre la guérison quelquefois impossible, toujours beaucoup plus difficile. Ce retard résulterait nécessairement de l'obligation de recourir préalablement au préfet.

a

Pourquoi exposer à ce danger tous les malheureux dont la raison se sera égarée ? Si l'on signalait des atteintes déjà portées par ce moyen à la liberté individuelle, nous hésiterions encore à adopter la mesure proposée, car, pour protéger quelques hom. mes contre de coupables tentatives, elle menace tous les aliénés, sacrifiant ainsi la santé de tous à la liberté de quelques-uns; mais, dans la plus grande partie de la France, à Paris notamment, où les mauvais projets peuvent si aisément se cacher dans l'ombre, les familles sont admises aujourd'hui à effectuer librement des placemens dans les établissemens d'aliénés. Ces établissemens sont visités avec soin; on ne cite aucun exemple de séquestrations fondées sur une aliénation mentale supposée ; les tribunaux donnent accès à toutes les plaintes : de pareils fails auraient retenti bien haut s'ils eussent été traduits devant eux : les feuilles publiques les eussent enregistrés avec empressement. Qui se rappelle aucun procès où ces coupables abus aient été dénoncés ? La liberté individuelle n'est donc pas menacée ; aucun motif ne rend nécessaire l'établissement d'une formalité nouvelle.

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Qu'on ne suppose pas, d'ailleurs, que la liberté individuelle manque de garanties. Une famille ne se détermine pas facilement à porter la main sur la liberté d'un de ses membres. Avec des établissemens qui présenteront toutes les garanties que nous exigeons, comment prévoir une admission qui, dépourvue de cause, constituerait un crime puni par les lois? il faudrait une complici é qui ne peut se supposer. L'admission se fût-elle effectuée sans motif, on ne pourrait espérer que le séjour dans l'établissement fût long; alors quel profit apporterait-il aux auteurs de l'attentat? et, s'il ne doit point leur servir, dans quel but s'exposeraient-ils aux peines portées contre les coupables de détention arbitraire?

Dans l'intérêt même de la liberté individuelle, l'autorisation préalable du préfet ne doit pas être exigée. Les familles, maîtresses d'effectuer ellesmêmes le placement, demeurent chargées de toute la responsabilité de cet acte; elles en sont seules comptables à la justice du pays. Si, au contraire, le préfet a donné son autorisation, la responsabilité de la famille disparaît, et passe tout entière à l'administration. Or, croit-on qu'il serait toujours impossible de surprendre cette autorisation dans les cas où la séquestration serait effectuée dans de cou, pables vues?

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