Page images
PDF
EPUB

doit vérifier l'existence des conditions légales requises, pourrait refuser de procéder à la celébration tant qu'on ne lui fournirait pas la justification que l'empêchement dirimant ou prohibitif dénoncé n'existe pas.

351. Dans la plupart des cas les opposants ne veulent que gagner du temps, et ils ne se font aucune illusion sur la valeur de leur opposition. Ils ont atteint leur but s'ils arrêtent le mariage un certain temps. Aussi, après une opposition levée apparaît souvent une nouvelle opposition dont il faut obtenir mainlevée.

Si les oppositions émanent de personnes différentes, le droit de l'une n'ayant pu altérer le droit des autres, le futur époux doit obtenir la mainlevée de toutes les oppositions successivement faites.

Mais que décider au cas où l'opposition émane de la même personne? Si c'est un ascendant qui, à peine la mainlevée de l'opposition prononcée en justice, dépose une nouvelle opposition, aura-t-il par son entêtement le moyen d'arrêter indéfiniment le mariage? La réponse à cette question résulte des distinctions suivantes :

a) Si la première opposition a été déclarée nulle pour vice de forme, la personne peut en faire une nouvelle, au regard de laquelle il faudra procéder par une demande de mainlevée.

b) Si la première opposition a été déclarée irrecevable pour défaut de qualité, toute nouvelle opposition émanée de la même personne doit être déclarée non avenue de plano par la justice. Il est définitivement jugé que la personne n'a pas qualité pour faire opposition, et la justice peut ordonner, en donnant mainlevée, qu'il sera passé outre à la célébration du mariage, nonobstant nouvelle opposition émanée de la même personne (art. 1351, C. civ.).

c) Enfin, si l'opposition faite en premier lieu a été levée, sous prétexte qu'il n'y avait aucun empêchement à mariage, nous pensons qu'une nouvelle opposition émanée de la même personne et donnant des motifs nouveaux remet tout en question. Il n'y a pas chose jugée sur l'opposition, car la cause est différente dans les deux cas, et il faut obtenir la mainlevée de la nouvelle opposition.

352. Pour que le droit d'opposition ne devienne pas vexatoire contre les époux, les tribunaux peuvent condamner les opposants, au cas de mainlevée prononcée, à des dommages-intérêts: ils tiendront compte dans la fixation de ces derniers de la situation respective des parties, de la bonne ou mauvaise foi des opposants.

Les ascendants sont présumés ne se laisser guider que par l'affection qu'ils ont pour leurs enfants: ils ne peuvent être condamnés aux dommages-intérêts (art. 179, C. civ). Mais s'ils succombent, ils pourront être condamnés aux dépens à moins que le tribunal ne préfère les compenser (art. 130 et 131, C. p. civ.).

$5.

Conditions de forme pour la validité du mariage

353 Le mariage est un contrat solennel; pour qu'il se forme, il ne suffit donc pas de constater que les époux ont donné leur consentement, il faut encore que les formes édictées par la loi aient été suivies. On s'explique ces solennités à cause de l'importance particulière que ce contrat présente pour la société. Nous nous occuperons successivement des mariages des Français en France, et des mariages des Français à l'étranger.

A. Des mariages des français, célébrés en France.

354. Le mariage est un contrat solennel qui ne peut se former que devant un officier de l'état civil: si cette condition faisait défaut, un élément essentiel au mariage manquerait et il n'y aurait qu'apparence de mariage.

La loi attache une telle importance au mariage, qu'elle a prescrit des formalités particulières nécessaires à la validité de l'union. En supposant que le mariage ait lieu entre Français, nous étudierons d'abord les questions suivantes :

1o Quelles sont les formalités exigées pour la célébration du mariage? 2o Quelles sont celles qui le sont à peine de nullité. Et dans un appendice nous examinerons sommairement la condition des mariages d'Étangers en France.

1. Quelles sont les formalités du mariage?

355. L'article 165 du Code civil formule les règles suivantes: « Le ma› riage sera célébré publiquement, devant l'officier de l'état civil du › domicile de l'une des deux parties. » De ce texte résultent donc deux conditions importantes :

a) Le mariage doit être célébré devant l'officier de l'état civil du domicile de l'une des deux parties.

b) Le mariage doit être célébré publiquement.

356. a) Le mariage doit être célébré devant l'officier de l'état civil du domicile de l'une des parties; que faut-il entendre par là ? Il résulte de l'article 74 du Code civil que le domicile, quant au mariage, s'établit par › six mois d'habitation continue dans la même commune ». Mais en posant cette règle, le législateur a évidemment voulu faire une faveur au futur conjoint. Il en résulte que si cette résidence existe en un autre lieu que le domicile général, elle ne peut pas enlever au conjoint la faculté de se marier à son domicile général (art. 102, C. civ.) où il peut accomplir tous les actes qui l'intéressent. Il faut donc entendre l'article 165

comme autorisant la célébration du mariage: 10 au domicile général de l'un des époux (art. 102, C. civ.), en vertu des principes généraux, et 20 au lieu où l'époux aurait une résidence continue de six mois, bien qu'il n'ait pas là son domicile général (art. 74 et 165, C. civ.).

L'officier de l'état civil du domicile de l'une des deux parties, compétent pour procéder à la célébration du mariage, ne le sera que tout autant que le mariage aura lieu sur le territoire même de sa commune. Il n'est investi de ses fonctions qu'à l'égard d'un territoire limité: sa commune; hors de ce territoire, il est incompétent pour remplir ses fonctions.

357. b) Le mariage doit être célébré publiquement (art. 165, C. civ.). Le mariage présente le caractère de publicité lorsqu'il a été célébré avec les formalités exigées par la loi; la publicité ne résulte pas de l'accomplissement de telle ou telle formalité particulière, mais de l'ensemble des formalités. Au mariage publiquement célébré on oppose le mariage clandestin.

Quelles sont donc les formalités exigées en matière de mariage et dont l'accomplissement constitue la publicité? Les unes sont antérieures à la célébration, les autres concomitantes et les autres postérieures. Disons quelques mots de chacune de ces catégories.

358. La principale des formalités antérieures au mariage sont les publications de mariage; ce sont des actes destinés à porter à la connaissance du public le mariage projetė.

La

Leur origine les rattache à une pratique très ancienne du clergé, confirmée par les conciles de Latran et de Trente. Le Droit civil réglementa cette formalité par l'article 40 de l'ordonnance de Blois de 1579. législation intermédiaire la maintint (loi du 20 sept. 1792): « une seule › publication était faite le dimanche à midi ». Le Code civil a recueilli cette formalité des mains de l'ancienne jurisprudence; elle a pour but de faire connaître le projet de mariage, et provoque ainsi les oppositions qui auraient à se produire.

Les publications sont exécutées par l'officier de l'état civil sur la requête des parties; elles sont au nombre de deux, qui sont faites à huit jours d'intervalle le jour du dimanche à la maison commune. Elles font connaître le projet de mariage..: « Les publications et l'acte qui en sera dressé énonceront les prénoms, noms, professions, et domiciles des » futurs époux, leur qualité de majeur et de mineur, et les prénoms, › noms, professions et domicile de leur père et mère. Cet acte énon› cera en outre les jours, lieux et heures où les publications auront été faites; il sera inscrit sur un seul registre, qui sera coté et paraphé, › comme il est dit en l'article 41, et déposé, à la fin de chaque année, au • greffe du tribunal de l'arrondissement » (art. 63. C. civ.).

>

[ocr errors]

› Un extrait des publications sera et restera affiché à la porte de la › maison commune, pendant les huit jours d'intervalle de l'une à l'autre publication... Ces deux publications ne sont qu'un des éléments de la publicité du mariage, sans cependant la constituer seules. L'article 169, combiné avec les articles 3 et 4 de l'arrêté du 20 prairial an XI (9 juin 1803) autorise le procureur de la république, près le tribunal du lieu où le mariage sera célébré, à dispenser les époux de la seconde publication; ce magistrat doit justifier dans un rapport spécial au grand juge des motifs graves de cette dispense.

359. Où les publications doivent-elles être faites?

Il résulte de la combinaison des articles 166 et 167 que les publications sont faites à la municipalité du lieu où chacune des parties a son domicile (art. 166, C. civ.): ce qui s'applique au cas où la partie a son domicile là où elle a sa résidence.

Mais si, ayant conservé son domicile général en un lieu, la personne avait acquis un domicile spécial pour le mariage (74, C. civ.) par six mois de résidence en un autre lieu, les publications de mariage devraient être faites aux deux domiciles (art. 167, C. civ.).

En outre, aux termes de l'article 168, les publications doivent être faites à la municipalité du domicile de ceux sous la puissance desquels les futurs époux se trouvent (art. 168, C. civ.); c'est-à-dire au domicile des ascendants ou au domicile du conseil de famille (là où la tutelle s'est ouverte, est le domicile de la tutelle et le siège légal du conseil de famille ; là doivent être faites les publications renvoi au titre de la tutelle). Les publications faites, le mariage ne peut être célébré au plus tôt, avant le troisième jour, depuis et non compris celui de la seconde › publication » (art. 64, C. civ.) et au plus tard, dans l'année à compter de l'expiration de ce délai (art. 65, C. civ.). Ces formalités ont pour but d'assurer la publicité du mariage.. La sanction en est assurée par une amende contre l'officier de l'état civil qui aurait procédé au mariage en contravention avec ces dispositions, et par une autre, contre les parties contractantes ou ceux sous la puissance desquels elles ont agi: amende proportionnée à leur fortune (art. 192, C. civ.).

360. L'officier de l'état civil procède à la célébration du mariage sous sa responsabilité; il doit donc vérifier par lui-même l'accomplissement de toutes les formalités édictées par la loi et la réunion des conditions exigées pour le mariage; c'est ainsi qu'il doit s'assurer:

1° Que les publications ont été faites et qu'il n'y a pas eu d'opposition au mariage: preuve légale fournie par le certificat de publications délivré conformément à l'article 69 du Code civil. Si ce certificat mentionne qu'il a été fait des oppositions, l'officier de l'état civil doit exiger des parties la production des mainlevées amiables ou judiciaires.

20 Que les parties ont l'âge compétent pour le mariage. La preuve légale est faite ici par la production de l'acte de naissance. Si cet acte présentait des irrégularités dans le nom d'un des futurs époux, orthographié dans son acte de naissance autrement que celui de son père, ou si l'on avait omis dans l'acte de naissance les prénoms de ses parents, conformément à l'avis du Conseil d'État du 30 mai 1808, l'identité du futur époux serait suffisamment établie par le témoignage des père, mère et aïeux assistant au mariage, sans qu'il y eût lieu de procéder à la rectification des actes de l'état civil.

Si l'époux n'est pas en état de fournir son acte de naissance, il pourra y suppléer par un acte de notoriété, délivré par le juge de paix du lieu de sa naissance, ou par celui du domicile (art. 70), et suivant la procédure des articles 71 et 72 du Code civil. L'acte de naissance serait aussi suppléé, conformément aux principes généraux, par un jugement rendu par application de l'article 46 du Code civil; et, pour les époux dont les actes faisaient partie des registres de l'état civil de la ville de Paris détruits en 1871, conformément à la procédure de la loi du 10 juillet 1871 (art. 1 et 2).

3o Que les ascendants ont donné leur consentement (au cas où il est nécessaire) ou que leur conseil a été requis, ou bien qu'on administre la preuve de leur décès. Rigoureusement le décès des ascendants devrait être établi par la production d'un acte régulier de décès; mais la loi, pour favoriser la célébration du mariage, se contente comme preuve du décès de l'attestation des ascendants d'un degré plus éloigné, ou de l'affirmation sous serment des futurs époux, conformément aux dispositions de l'avis du Conseil d'État du 4 thermidor an XIII (23 juillet 1805).

Enfin d'une manière générale, l'officier de l'état civil doit s'enquérir que les conditions exigées pour le mariage sont remplies, et s'il a connaissance de quelque empêchement dirimant ou prohibitif au mariage, il doit exiger des époux la preuve que cet empêchement n'existe pas. Par exemple si le futur conjoint est militaire sous les drapeaux, l'officier de l'état civil exigera la production de l'autorisation des supérieurs hiérarchiques; s'il y a parenté au degré prohibé, la preuve des dispenses accordées; si l'un des époux a été antérieurement marié, la preuve légale de la dissolution du précédent mariage, etc.

361. Par ce que nous venons de dire, on voit qu'il faut constituer un dossier en vue du mariage, réunir des pièces nombreuses et que des frais considérables doivent être exposés. Ces frais ne seraient-ils pas de nature à entraver souvent les mariages? Le législateur l'a craint, et, par une loi des 18-27 novembre, 10-18 décembre 1850, et pour encourager le mariage des indigents, il décharge les parties des frais nécessaires à la constitu

« PreviousContinue »