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Successeurs

Louis XVI, que je quitte aussi ma place! Amelot, conseiller-d'état, remplaça Malesherbes, qui fut généralement regretté.

La même cabale et le même expédient qui de Turgot, avait fait renvoyer Turgot, firent mettre à sa place Clugny, intendant de Bordeaux, qui ne fut pas long-temps contrôleur - général. La mort qui le surprit au bout de quelques mois, ne lui permit de faire ni aucun bien ni aucun mal. Taboureau, conseiller - d'état, lui succéda, ayant Necker (1) pour adjoint sous le titre de conseiller des finances et de directeur du trésor royal.

1777.

mens

D'autres changemens eurent encore lieu dans Change- le ministère. Le comte de Saint-Germain, qui, depuis 1775 avait le département de la guerre, devenu vacant par la mort du comte de Muy,

dans le

uinistère.

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(1) Necker, né à Genève, après avoir été commis à Paris chez un banquier, dont il devint ensuite l'associé, s'était fait une fortune qui surpassait celle des plus fortes maisons de banque, mais dont la rapidité incroyable fit naître des soupçons légitimes. Des traités frauduleux avec la compagnie des Indes, et des spéculations sur les fonds anglais, au moment de la paix de 1763, dont il fut instruit à l'avance, furent les principes de cette étonnante fortune. (Voyez Du Gouvernement, des mœurs, et des conditions en France avant la révolution, etc., par M. Senac de Meilhan, ancien intendant de Valenciennes. Hambourg, 1795, in-8°.)

s'était fait de puissans ennemis par les réformes militaires qu'il exécutait; voyant qu'il ne pouvait conserver long-temps sa place, il fut contraint de se retirer. Le prince de Montbarrey, qui lui avait été adjoint, resta seul chargé de ce ministère. Taboureau ayant aussi donné au roi sa démission de contrôleurgénéral, Necker, son collégue, lui succéda, sous le nom de directeur-général des fi

nances.

Aussitôt les effets publics remontèrent con- Opération sidérablement ; ce qui pouvait être l'effet de de Necker, la manœuvre d'un banquier connaissant les astuces employées pour la hausse et la baisse des fonds publics. A peine en place, Necker renvoya les administrateurs qui lui faisaient ombrage. Les offices d'intendans du commerce furent supprimées; opération onéreuse à l'état, par les remboursemens qu'elle exigeait. Ce nouveau ministre, entouré d'hommes qui lui étaient entièrement dévoués, ne fut plus gêné dans ses projets régénérateurs. On ne parlait que des suppressions, des réformes, des améliorations qu'il se proposait; un enthousiasme général s'était déclaré en sa faveur. A sa place, un homme de génie eût rétabli la fortune publique. Les circonstances étaient, à la vérité, fort difficiles; cependant, avec les ressources infinies qu'avait la France, le niveau entre la

Voyage de

en France.

recette et la dépense pouvait être rétabli par le simple retranchement de trop fortes pensions et des autres charges parasites de l'état. Au lieu d'avoir recours à cet expédient, dans la crainte de se faire des ennemis, Necker employa la méthode facile des emprunts. N'éprouvant aucun obstacle dans ses opérations financières, il passait pour un grand administrateur, dans le temps même qu'il préparait la foudre qui devait bientôt anéantir et le monarque et la monarchie.

Un événement particulier excita l'attention Joseph II de l'Europe : ce fut le voyage que fit cette année en France l'empereur d'Allemagne, Joseph II, frère de la reine. Ennemi de la pompe, vêtu et vivant en simple particulier, il ne prit que le titre modeste de comte de Falkenstein. Pendant son séjour à Paris, il visita les divers. monumens, les manufactures et ateliers célèbres de cette capitale.

La France

secours aux

Un autre objet plus intéressant fixait alors envoie des les regards des puissances de l'Europe: c'écolonies taient les efforts que faisait l'Angleterre pour anglaises. réduire, par la force des armes, ses colonies.

septentrionales de l'Amérique, qui s'étaient déclarées, en 1776, États libres et indépendans. Profitant de cette guerre pour affaiblir la puissance de l'empire britannique, le cabinet de Versailles fournissait des munitions en tout

genre aux Américains insurgés, et protégeait ouvertement leur république naissante. Des officiers français, du nombre desquels était le marquis de la Fayette, entrèrent même à leur service, et, sous les drapeaux de la liberté, combattirent pour assurer l'indépendance des colonies anglaises.

1778. Louis XVI reconnaît

Enfin, par un traité d'amitié et de commerce avec les Américains, signé à Paris au mois de février 1778, Louis XVI reconnut et leur indés'engagea directement à maintenir leur indépendance. pendance et souveraineté. C'était déclarer la guerre à l'Angleterre. Cette conduite de la France envers la Grande-Bretagne fut le signal des hostilités qui commencèrent bientôt entre les deux nations, quoiqu'il n'y eût de part ni d'autre aucune déclaration de guerre.

Départ

du comte

pour

l'Amérique.

Le comte d'Estaing ne tarda pas à partir de Toulon avec douze vaisseaux de ligne et quatre d'Estaing frégates, dirigeant sa course vers les côtes de l'Amérique. Dans le même temps, une flotte plus considérable avait été équipée dans le port de Brest; le comte d'Orvilliers la commandait; l'avant-garde était sous les ordres du comte de Chaffaut, et l'arrière-garde sous ceux du duc de Chartres, depuis si connu sous le nom de duc d'Orléans. Cette flotte, ayant mis à la voile, rencontra celle des Anglais, égale en forces, et commandée par

Combat l'amiral Keppel : un combat des plus vifs d'Ouessant. s'engagea vers l'île d'Ouessant. L'action fut

Prise de

divers éta

blissemens

et de Pon

dichéry par

indécise les deux flottes, également maltraitées, rentrèrent dans leurs ports respectifs, et les deux nations s'attribuèrent également l'avantage de l'action.

Cette même année, les Anglais s'emparèrent des établissemens français à Chandernafrançais gor, à Yamen, à Karical, à Masulipatan, et de Pondichery, qui fut contraint de capituler, les Anglais. après quarante jours de tranchée ouverte. Dans les Indes-Occidentales, ils se rendirent Lucie aussi maîtres de l'île de Sainte-Lucie; d'un les mêmes, autre côté, les Français, sous la conduite du Dominique marquis de Bouillé, prirent celle de la DomiFrançais. nique.

Prise de

Sainte

par

et de la

par les

Emprunts

Cependant, les dépenses extraordinaires de Necker. qu'entraînait la guerre, fixaient tous les regards de la nation sur Necker, qui avait promis de remettre les finances au pair. Le moment était arrivé de remplir ses promesses. Il n'établissait pas de nouveaux impôts; mais il étendait sourdement les anciens d'une manière effrayante. Il faisait des suppressions sans remboursemens, des réformes sans profit, des emprunts sans mesure. Dans les deux années 1777 et 1778, il avait emprunté plus de deux cents millions: c'est ainsi qu'il préparait la ruine inévitable de la France.

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