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pays occupé par ces peuples, éprouva quelques échecs; César entreprit alors d'abattre la forêt où il se trouvait, et, pour empêcher que ses soldats ne fussent pris en flanc par les barbares, il fit entasser tout le bois coupé en face de l'ennemi et sur les deux côtés, en forme de rempart. En peu de jours ce travail fut achevé sur une immense étendue (1).

Germanicus, pénétrant dans la forêt Césia, fortifiait tous les jours ses camps avec des abatis (2).

De toutes les fortifications de campagne, les abatis sont, dans un pays couvert, ce qu'il y a de plus prompt, de plus commode et de plus fort. Les guerres de la révolution nous en ont offert une foule d'exemples.

LÉON RENIER.

ABAT-JOUR. (Architecture.) Baie dont le plafond ou l'appui, et fréquemment l'un et l'autre, sont inclinés de l'extérieur à l'intérieur pour y introduire la lumière.

On donne aussi ce nom au chapeau sphéri que ou conique tronqué, qu'on adapte au-dessus d'une lumière pour en diriger les rayons. DEBRET.

ABATTOIR. (Architecture.) Établissement dans lequel se fait l'abatage des bestiaux destinés à la consommation et à l'approvisionnement d'une ville.

Un abattoir se compose d'une avant-cour, dans laquelle sont : un corps de bâtiment consacré à l'administration; des parcs, tant pour les bœufs que pour les moutons; bouveries, bergeries, échaudoirs, triperies, fondoirs de suif, remises et écuries pour les bouchers; de grandes conserves d'eau, tant pour l'assainis sement que pour les besoins de chaque partie de l'établissement.

Selon les localités, cet édifice doit être placé intérieurement et proche des murs d'enceinte d'une ville, ou au-dessous du cours du fleuve qui la traverse :

1o Pour raison de salubrité;

2o Pour éviter le passage de bestiaux dans l'intérieur.

Au nombre des monuments utiles qui depuis trente ans ont été élevés dans Paris, les abattoirs doivent assurément occuper le premier rang.

Cinq édifices de ce genre, construits avec une sage économie, mais spacieux, ne laissant rien à désirer quant aux besoins et à la grande disposition de l'établissement, sont placés à l'extrémité des faubourgs correspondant aux quartiers les plus populeux. Depuis 1812 et 1813, époque de leur achèvement, ils ont fait disparaître du centre de la capitale les tueries

(1) Guerre des Gaules, III, 29. Sur l'abatis employé par César, au siége d'Alesia, Voy. Guischardt, Mem. milit., t. I, p. 234.

(2) Tacite, Annales, 1, 50.

infectes que d'anciens usages avaient concentrées dans les rues les plus étroites.

Les architectes qui ont été chargés de ces monuments sont, pour l'abattoir du Roule M. Petit-Radel; de Montmartre, M. Poitevin; de Ménilmontant, M. Happe; d'Ivry, M. Leloir; de Grenelle, M. Gisors.

On trouvera des plans détaillés de ces édifices dans l'ouvrage de M. Bruyère, intitulé: Etudes relatives à l'art des constructions; Paris, 1823. Notre as planche d'ARCHITECTURE Contient le plan, l'élévation et la coupe de l'abattoir de Montmartre. DEBRET.

ABAT-VENT. (Architecture.) Petit toit placé dans des baies de tour ou de clocher, et qui, par l'inclinaison qu'on lui donne du dedans au dehors, sert non-seulement à garantir l'intérieur de la pluie ou de la neige, mais encore à rabattre le son des cloches. On le couvre ordinairement en plomb ou en ardoise. DEBRET.

ABAZES, Abasci ou Abasgi (Géographie et histoire, peuplade caucasique, composée d'environ quatre-vingt mille individus qui habitent les rives supérieures du Kouban, et ont donné leur nom (Abazie) à une province de la Russie, à laquelle ils appartiennent depuis 1813. Les Abazes, pour la plupart nomades, élèvent cependant des abeilles, des chevaux d'une race très-estimée, et fabriquent des armes que l'on recherche dans les contrées voisines; belliqueux et pillards, ils infestent dans des barques les côtes de la mer Noire, exercent le brigandage dans les montagnes, et ne font guère que nominalement partie de l'empire russe, dont ils méconnaissent souvent l'autorité. Convertis au christianisme du temps du Bas-Empire, ils embrassèrent l'islamisme en passant sous la domination des Turcs, et aujourd'hui encore, quoiqu'ils ne soient rien moins que de fidèles musulmans, ils se reconnaissent pour sectateurs de Mahomet. LÉON RENIER.

ABBASSIDES. (Histoire.) Parmi les premiers disciples qui crurent à la mission divine que s'attribuait Mahomet et se rassemblèrent à sa voix, l'un des plus influents par l'action qu'il exerça sur ses compatriotes fut Abbas, l'oncle du législateur arabe. Son zèle pour la religion nouvelle, son intégrité, son désintéressement lui avaient acquis la vénération des successeurs du prophète, et lorsque le khalife Othman, dont l'empire s'étendait des colonnes d'Hercule aux frontières de la Perse, rencontrait dans les rues de Médine Abbas marchant à pied, il descendait de son cheval pour l'accompagner jusqu'à sa demeure. Abbas, en mourant plein de jours, dans la 34me année de l'hégire, laissa plusieurs fils, héritiers de ses vertus. L'aîné de tous, Abdallah, doué d'une intelligence active et pénétrante, embrassa dans l'étendue de son esprit toutes les connaissan

ces humaines, et acquit au plus haut point, par son profond savoir, le respect des Islamites; dite qu'une tradition remonte au fils d'Abbas, c'est lui assurer aux yeux des Musulmans l'authenticité la plus incontestable. Lorsque la mort d'Ali livra la succession de Mahomet aux fureurs des partis, et que tous les chefs éminents purent prétendre à l'empire, Abdallah, plus que tous les autres, réunissait en sa faveur les chances d'un prompt succès. Sa haute sagesse, sa libéralité, son immense doctrine, surtout son titre de proche parent du prophète, lui assuraient de nombreux partisans; mais Abdallah s'était dévoué à la cause des Alides au moment même où cette cause semblait à jamais perdue, il repoussa toute pensée d'employer l'influence acquise par ses vertus pour usurper le titre de khalife qui, selon lui, ne pouvait appartenir qu'aux descendants d'Ali. Cependant, les Ommiades s'étant emparés du trône, les brillantes qualités de quelques-uns d'entre eux assurè rent pour longtemps le repos à l'empire; la domination musulmane s'étendit sous leur règne jusqu'aux rives du Bosphore, jusqu'aux plaines de la Touraine; ils encouragerent les arts, la poésie chère aux Arabes, et les mécontents, effrayés par leurs succès, reuon cèrent pour un temps à renverser la dynastie régnante. Mais, plus tard, les vices d'une administration corrompue, les réactions d'une sévérité qui fomentait la révolte en voulant la punir, réveillèrent des espérances longtemps déçues. Les Alides reprirent courage, et cette fois les descendants d'Abbas, loin de faire cause commune avec eux, résolurent d'exploi ter à leur profit la répugnance avec laquelle les Arabes se soumettaient désormais à la domination mal acquise des Ommiades. Ce fut dans ce but qu'ils propagèrent parmi le peuple le récit d'une prétendue cession, que leur aurait faite un descendant d'Ali, de tous ses droits au khalifat. D'après eux, ce légitime héritier du titre d'Imam, empoisonné à la cour de Damas, par les ordres du khalife Soliman, serait venu mourir dans le Hedjaz, chez le petitfils d'Abdallah, et lui aurait dit en présence de plusieurs schiites ou partisans d'Ali : « Nous avons jusqu'à présent regardé l'Imamat « comme inhérent à notre famille; mais c'est à « vous qu'il appartient maintenant, à vous et « à vos enfants qui viendront s'asseoir sur le a trône usurpé par les enfants d'Ommiah. « Marchez sur Coufah, vous y trouverez des << amis dévoués à votre cause. » Quelle que fût l'authenticité de ce discours et la valeur de cette cession, depuis ce jour Mohammed-BenAli, arrière-petit-fils d'Abbas, prit le titre d'Imam et se fit un grand nombre de partisans, surtout dans la province du Khoraçan, dont la population belliqueuse lui assurait de puis

sants auxiliaires. Mohammed ne vécut pas assez longtemps pour assurer le triomphe de sa race, et son fils Ibrahim succomba lui. même en voulant faire-valoir ses droits contre Mervan, le dernier khalife de la famille des Ommiades; mais il légua le soin de sa vengeance à son frère Abou'l-Abbas, que les cruautés qu'il exerça contre ses rivaux abattus firent surnommer plus tard EsSaffah ou le sanguinaire. Abou'l-Abbas, appuyé par un des plus habiles généraux de cette époque, Abou-Moslem, fut proclamé khalife à Coufah, marcha contre Mer. van, le battit sur le champ de bataille, le contraignit à fuir en Égypte, où il fut tué dans un dernier combat, et devint ainsi le maître de tout l'empire. C'est de la 132me année de l'hégire, pendant laquelle fut déployé pour la première fois l'étendard noir des Abbassides, que l'on doit compter l'avènement de cette longue suite de khalifes, qui, pendant plus de cinq cents ans, gouvernèrent un État aussi vaste que l'empire romain. Trente-sept princes de la même famille se succédèrent sur le trône et portèrent la civilisation de l'Orient au plus haut point qu'elle ait jamais atteint. Abou-Djafar-el-Mançour, fondateur de Baghdad, Haroun-el-Reschid que les conteurs arabes prennent si souvent pour le héros de leurs brillantes improvisations, Almamoun, son fils, avaient appelé à leur cour les poëtes, les savants, les artistes. Par leurs ordres s'élevaient ces élégantes mosquées, ces palais arabes dont les frèles colonnettes et les ogives dentelées ont orné, depuis les croisades, nos vieilles cathédrales. On traduisait les auteurs grecs, on ajustait l'ancienne civilisation romaine aux mœurs de l'Orient, et la cour de Charlemagne s'étonnait à la vue des présents envoyés à son souverain par le khalife de Baghdad. Après avoir ainsi jeté le plus brillant éclat sur le moyen âge, la dynastie des Abbassides s'affaiblit peu à peu en force, en richesse, en puissance; et, lorsqu'au treizième siècle de notre ère, Holagou, le cinquième empereur des Mongols, partit du Turkestan pour conquérir à son tour le monde oriental, le dernier prince de la maison d'Abbas lui offrit à peine une résistance sérieuse et tomba sous ses coups, entraînant dans sa chute l'empire des Arabes. NOEL DESVERGERS. ABBAYE. ABBESSE. (Histoire et architecture.) Le mot Abbaye, en latin Abbatia, sert à désigner un monastère dont les religieux ou les religieuses sont gouvernés par un abbé ou par une abbesse; il se prend aussi pour le bénéfice ou les revenus dont jouit l'abbé ou l'abbesse; enfin il s'applique encore à l'ensemble des bâtiments destinés au logement et au service des religieux dirigés par l'abbé et de l'abbé lui-même.

ABBÉ.

Originairement les abbés étaient élus par les moines, et les abbesses par les nonnes; généralement leur nomination recevait ensuite la connrmation du pape ou au moins celle de l'archevêque métropolitain. Mais les monarques et les princes souverains, par suite des donations qu'ils firent aux abbayes, s'arrogèrent cette nomination, en retour de leur libéralité; puis ils se la réservèrent dans les abbayes dont ils furent les fondateurs. Dès lors, on commença à distinguer les abbayes en règle des abbayes en commende. Les premières, comme celles de Cluny, de Citeaux, de Prémontré, de SainteClaire en France, de Fulde en Allemagne, de Saint-Gall en Suisse, demeurèrent électives; elles ne relevaient que du souverain pontife, et leur chef acquit, par là, un haut degré de puissance, qui s'éleva même parfois jusqu'à la souveraineté temporelle. Les secondes, placées plus directement sous l'autorité civile et laïque, ne furent guère que des bénéfices conférés par la faveur, des dignités sans charge et sans devoirs religieux réels. Les abbés pourvus de ces abbayes prirent le nom de commendataires, par opposition aux autres abbés, qui s'appelaient réguliers. Les abbés commendataires n'étaient donc que des clercs séculiers pourvus par le pape d'une abbaye, avec permission d'en percevoir les fruits durant leur vie.

Ce mot de commende vient du latin commendare, qui signifie donner en garde. En effet, quand un bénéfice était vacant ou par l'absence ou par la mort d'un titulaire, on en confiait l'administration à un économe jusqu'à ce qu'il fût pourvu d'un pasteur. Cet économe était ou laïque, ou évêque, ou simple ecclésiastique. Dès le huitième siècle, on commença à donner les évêchés et les abbayes en commende perpétuelle. Voilà ce qui explique pourquoi on vit des seigneurs laïques prendre le titre d'abbés de certaines abbayes; les rois de France Philippe 1er, Louis VII, et ensuite les ducs d'Orléans, s'intitulaient abbés du monastère de Saint-Aignan d'Orléans; les ducs d'Aquitaine, abbés de Saint-Hilaire de Poitiers ; les comtes d'Anjou, abbés de Saint-Aubin; les comtes de Vermandois, abbés de Saint-QuenLin.

Les prieurés n'étaient dans l'origine que de simples fermes dépendant des abbayes. L'abbé y envoyait un certain nombre de religieux, pour les faire valoir; ces religieux n'avaient que l'administration et rendaient leurs comptes tous les ans à l'abbé; ces fermes s'ap. pelaient alors obédiences ou prieurés, parce que celui des religieux qui avait le gouvernement des autres, portait le nom de Prévôt ou de Prieur. Au commencement du treizième siècle, les religieux envoyés dans les fermes dépendant des abbayes, commencèrent à s'y |

établir et à y demeurer leur vie durant. Ils s'accoutumèrent de la sorte à se regarder comme usufruitiers des biens dont leurs prédécesseurs n'avaient eu que l'administration momentanée; et cet abus se répandit si bien, qu'au commencement du quatorzième siècle, les prieurés étaient regardés et réglés comme de véritables bénéfices. Il faut, au reste, bien distinguer les prieurés indépendants qui prirent ainsi naissance et que l'on qualifia de conventuels, du prieuré qui n'était qu'une charge placée sous l'autorité de l'abbé et que l'on nommait prieuré claustral. Ces prieurs qui gouvernaient les religieux sous les abbés soit réguliers, soit commendataires, n'étaient réellement que des sous-supérieurs.

Il existait aussi des prieurés-cures qui étaient également devenus des bénéfices, de simples administrations qu'ils avaient été auparavant. De ces prieurés, les uns étaient d'anciennes paroisses qui étaient tombées dans les mains des religieux; les autres avaient commencé par être des chapelles particulières de la ferme origine du prieuré; ces chapelles, fréquentées par les gens qui habitaient dans le voisinage du monastère, s'étaient peu à peu élevées au rang de paroisses, et les prieurs en avaient pris le titre de curés.

En France, la plupart des grandes abbayes étaient de fondation royale; telles étaient celles de Saint-Denis, de Saint-Germain des Prés, de Corbie, de Chelles. Un assez grand nombre furent sécularisées, et devinrent des chapitres ou des collégiales; de ce nombre furent celles de Vézelay, d'Aurillac, de Saint-Victor, de Saint-Sernin de Toulouse. D'autres furent érigées en évêchés, comme celles de la Rochelle, Luçon, Aleth, Vabres, Castries, Tulle, Condom et Pamiers.

En France, les abbayes de filles étaient toutes électives, et quoique dans le siècle dernier les abbesses fussent presque toutes nommées par le roi, néanmoins les bulles qu'elles obtenaient de Rome, portaient toujours qu'elles avaient été élues par leur communauté. Cette différence entre les abbayes d'hommes et celles de filles venait de ce que ces dernières n'avaient point été comprises dans le concordat entre le pape Léon X et François 1er.

On comptait en France, à la fin du siècle dernier, deux cent vingt-cinq abbayes d'hommes en commende, et quinze abbayes chefs-d'ordre ou de congrégation, dont une de filles, celle de Fontevrault; cent quinze abbayes régulières d'hommes et deux cent cinquante-trois abbayes régulières de filles, sans y comprendre les abbayes et chapitres nobles de filles, ainsi que les abbayes réunies à des colléges, à des hôpitaux et à d'autres pieux établissements.

L'abbaye, considérée comme bâtiment religieux, ne se distingue par aucun caractère tran.

ché, d'un monastère quelconque, et son église d'une paroisse, ou même d'une cathédrale. Toutefois on juge facilement par l'étendue et par le nombre des parties distinctes qui composent la totalité de l'édifice, si le monastère était un simple couvent ou une abbaye, ces dernières ayant généralement une étendue assez considérable. En effet, les abbayes ne renfermaient guère moins de vingt religieux, et le nombre de ceux-ci s'élevait souvent jusqu'à près de cent, comme à Clairvaux et à Citeaux, en France, à Glocester et à Bury-SaintEdmond, en Angleterre. A Fontevrault, il y avait cent soixante religieuses et soixante religieux. Du temps de Pierre le Vénérable, l'abbaye de Cluny comptait quatre cent soixante religieux. En général, les abbayes de filles étaient en France plus peuplées que les abbayes d'hommes. Outre les religieux ou religieuses, ces édifices devaient contenir de nom. breux domestiques et les personnes qui leur étaient attachées à différents titres.

Les plus grandes abbayes comme celles de Westminster, de Bury-Saint-Edmond, de Tewkesbury, de Glastonbury, en Angleterre, de Saint-Germain des Prés, de Cluny, de Clairvaux, en France; de Fulde, de Corvey, en Allemagne; du Mont-Cassin, de Subiaco, Grottaferrata, en Italie, se composaient ordinai. rement de deux grandes cours quadrangulaires, le long desquelles régnaient des corps de bâtiment. Tous les bâtiments, tels que fermes, greniers, granges, moulins, écuries, étaient entourés d'une haute muraille qui formait ce que l'on nommait le clos ou enclos, clausum, et souvent cet ensemble de bâtiments offrait l'aspect d'une ville fortifiée. Autour de la cour quadrangulaire principale ou cloître, se trouvaient l'église et ses dépendances, la salle capitulaire, le réfectoire, l'aumônerie, l'infirmerie, la bibliothèque et les parloirs. Dans les abbayes d'une certaine importance, le logement de l'abbé constituait à lui seul un édifice important et même un palais, qui communiquait directement avec l'église et le chapitre. Il s'y trouvait un oratoire ou chapelle particulière, où, durant le carême, l'abbé passait le temps qui s'écoulait entre la première messe et le moment du diner; mais cet usage des premiers temps avait disparu dans les siècles derniers.

La maison du portier constituait aussi, fréquemment, un bâtiment important et dont l'architecture n'était pas sans élégance; c'est ce qu'on observe surtout dans les restes des abbayes anglaises, à Saint-Alban, à Saint-Augustin de Cantorbéry où cette partie du monastère est flanquée de tours octogones, à Evesham, où elle est décorée d'un beau campanile. Mais l'architecture des abbayes était trop variée, les plans de ces édifices étaient

trop différents, pour qu'on puisse leur assigner une disposition spéciale.

Richard et Guiraud, Bibliothèque sacrée. a édit. Paris, 1827. Articles ABBAYE, PRIEURE.

Moroni, Dizionario di erudizione ecclesiastica, Rome, 1840. Art. ABBADIA.

Neudecker, Handwærterbuch der Kirchengeschi chte. Art. ABTEI.

Thomassin, Traité de la discipline ecclésiastique. 1725. In-fol., tom. 3.

J. Britton, A Dictionary of the architecture and archæology of the middle ages. Art. ABBEY, Londres, 1818, in-4°.

ALFRED MAURY.

ABBEVILLE. (Histoire.) Cette ville, située sur la Somme, à cinq lieues de la mer, n'était dans l'origine qu'une maison de plaisance du riche et puissant abbé de Saint-Riquier (Abbatis villa.) Peu à peu la villa abbatiale se trans. forma en un château entouré de maisons. A la fin du dixième siècle, Hugues Capet, trouvant cette position convenable, la fortifia pour arrêter les ravages des Normands, dont les barques remontaient alors tous les fleuves de la France qui se jetaient dans l'Océan; et il y établit un de ses vassaux, qui porta le titre d'avoué, parce qu'il devait protéger les terres du monastère. Plus tard l'avoué s'adjugea le titre héréditaire de comte de Ponthieu, et Abbeville devint la capitale de ce comté.

Au moyen âge, Abbeville fut une cité industrieuse et commerçante; elle fabriquait de gros draps qui trouvaient un grand débit aux foires de Champagne, où ses marchands conduisaient de nombreux troupeaux de porcs et de moutons. Colbert fit beaucoup pour l'industrie de cette ville en y appelant le Hollandais Van-Robais, qui y établit des fabriques de draps fins, façon de Hollande et d'Angleterre. Ce fut alors le temps de la plus grande prospérité d'Abbeville, et le géo. graphe Sanson, qui vivait à cette époque et qui y était né, porte le nombre de ses habitants à trente-cinq ou quarante mille. Elle n'en compte aujourd'hui que 19,162; cependant, elle occupe encore un rang impor. tant parmi nos villes industrielles, par ses manufactures de draps, de velours et de moquettes.

Abbeville se vante de n'avoir jamais été prise, et elle se faisait appeler autrefois Abbeville la Pucelle. Tant que les Anglais restèrent maîtres de Calais, la possession de cette ville fut très-importante, parce que, gardant la ligne de la Somme, elle couvrait une partie de la Picardie et de la Normandie. Aussi les rois de France récompensèrent-ils la fidélité de ses habitants (semper fidelis était sa devise) par la concession d'importants priviléges, dont plusieurs étaient encore conservés au dernier siècle par ses majeurs. C'étaient comme les restes de l'ancienne constitution communale que les bourgeois d'Abbeville avaient obtenue en 1130,

et qui fut confirmée le 9 juin 1184 par le comte de Ponthieu. Le préambule de cette charte de confirmation expose la cause de l'insurrection populaire. « Lorsque mon aïeul Guillaume

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Talvas, disait le comte, eut vendu la com<«<mune aux bourgeois d'Abbeville, à cause « des injustices et des vexations que les grands de sa terre leur faisaient subir fré

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quemment, etc. » Abbeville eut donc alors, comme les autres communes, son maire, ses échevins, ses arbalétriers, sa milice du guet, ses corporations d'arts et métiers, son beffroi, le droit de battre monnaie, une juridiction étendue, etc. Plus tard la charge de majeur anoblit celui qui en était revêtu. En 1789, le gouvernement aussi bien que la justice, la police et la milice de la ville et des habitants, appartenaient encore à ce magistrat.

Abbeville est aujourd'hui l'un des chefslieux d'arrondissement du département de la Somme. L'hôtel de ville et l'église de SaintVulfran sont des monuments remarquables.

C'est dans cette ville que fut ratifié, en 1258, le traité par lequel Louis IX rendit à Henri III le Limousin, le Périgord, l'Agenois, le à Quercy et une partie de la Saintonge, charge par le monarque anglais de lui rendre hommage pour ces provinces et pour Bayonne, Bordeaux et la Guienne.

Abbeville est la patrie des géographes N. Sanson, Phil. Briet et Pierre Duval, des graveurs CI. Mellan et Fr. de Poilly, du poëte Millevoye.

Histoire d'Abbeville, par M. Louandre, 2 vol. in-8°.

ABCÈS. (Médecine.) Dans l'état actuel de la science, on nomme abcès (1), toute collection de pus dans une poche circonscrite, quels que soient d'ailleurs le siége et l'origine de la matière purulente que cette matière remplisse une cavité récemment formée, sous l'influence de la maladie, dans le tissu cellulaire ou dans un viscère quelconque; qu'elle soit déposée dans une cavité naturelle, telle qu'une articu. lation, le sinus maxillaire, la caisse du tympan, le globe de l'œil, etc.; ou bien, enfin, que dans une cavité naturelle, comme celle d'une veine, par exemple, elle occupe un espace circonscrit par des adhérences anormales. Cependant, toutes les fois qu'une quantité quelconque de pus se trouve réunie dans une des grandes cavités naturelles, comme la poitrine, l'abdomen, le crâne, elle constitue ce qu'on appelle un épanchement; elle prend le nom d'infiltration ou de fusée quand le pus, plus ou moins abondant, est répandu entre les mailles du tissu d'une région ou d'un or. gane.

(1) Ce mot vient du latin abscessus, lequel n'est luimème qu'une traduction du grec àñóσtημa, substantif formé du verbe àpioτauai, je me retire, je me sépare.

L'idée que fait naître généralement la présence d'un abcès est celle de la préexistence d'une inflammation: l'abcès n'est donc que le produit, que le résultat, et souvent même que la terminaison d'une maladie. Néanmoins, chirurgicalement parlant, il peut être considéré comme une maladie à part, exigeant un traitement spécial, indépendant de la cause qui lui a donné naissance.

Les abcès offrent de nombreuses variétés sous le rapport du volume, du nombre, du siége, du contenu, de la marche, etc.

Le volume peut varier depuis la grosseur d'un grain de millet jusqu'à celle de la tête, et même davantage. Plus l'abcès est volumineux, plus son diagnostic est grave. On con. çoit, néanmoins, que cette proposition souffre quelques exceptions, et qu'un abcès de la cornée transparente, du globe de l'œil, du cerveau, soit toujours, malgré son peu de développement, une affection fort sérieuse.

Les abcès sont solitaires ou multiples. Dans ce dernier cas, ils se rattachent le plus souvent à une cause générale, et présentent peu de volume; on en compte quelquefois vingt et trente chez le même individu. Les abcès multiples sont du ressort de la médecine, puisque, pour arriver à la guérison, il faut combattre la diathèse par des moyens généraux. Les abcès solitaires, plus fréquents, réclament plus particulièrement l'emploi des moyens chirurgicaux.

Les abcès peuvent naître dans tous les tissus de l'économie, à l'exception, toutefois, de l'épiderme et de ses appendices. Cette proposition est absolue, puisqu'il suffit qu'une partie soit enflammée à un certain degré (hyperphlogose, Lobstein) pour qu'il y ait sécrétion de pus. Cependant, le siége le plus ordinaire des abcès est le tissu cellulaire, et surtout le tissu cellulaire sous-cutané; et ils sont d'autant plus fréquents dans une région que ce tissu y est plus abondant et plus lâche; aussi est-ce au cou, à l'aisselle, à l'aine, aux environs de l'anus, qu'on les rencontre le plus ordinairement.

La richesse du réseau vasculaire favorise également la formation des abcès, mais il faut qu'à cette condition se réunisse la laxité des tissus; et, en effet, les abcès ne se déve loppent que très-rarement dans le tissu dense et serré de la langue, malgré l'abondance des vaisseaux sanguins qui s'y distribuent.

Il résulte de tout ce qui vient d'être dit que les abcès, pouvant naître dans toutes les parties du corps, sont superficiels ou profonds, c'est-à-dire, cutanés, sous-cutanés, sous-aponévrotiques, sous-musculaires, inter-osseux, sous-osseux, etc.

Si nous envisageons les abcès par rapport à leur contenu, ils seront simples, sanguins,

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