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aucune connoissance de l'existance de cette société; mais je vous répète aussi, que si elle existe en effet, je ne doute nullement que vous et vos amis ne preniez toutes les mesures convenables, non-seulement pour ne pas embarrasser, mais pour aider sa marche. I importe fort peu par qui l'animal soit terrassé, il suffit que vous soyez tous prêts à joindre la

chasse.

Les autres objets dont vous me parlez seront incessamment pris en considération, et j'aurai soin de vous faire passer les instructions nécessaires; en attendant, je dois vous observer que neje saurais prendre aucune résolution définitive, sans avoir un tableau plus clair, plus détaillé et plus circonstancié des ressources et des moyens que la personne que vous qualifiez du titre de général et les chefs de votre association peuvent avoir, ainsi que de la manière dont ils peuvent les employer."

Dans une lettre du 27 Décembre suivant, il dit les renseignemens que vous me donnez sur la composition de votre comité, me suffisent, et je ne désirerais connaître les noms des personnes, qu'autant que vous auriez jugé que cette communication pourrait se faire sans entraîner aucun inconvénient, et sans risquer de vous compromettre avec vos amis.

Je ne conçois pas comment quelques membres de votre co❤ mité ont pu imaginer que nous n'avions pas le projet sérieux de les aider à attaquer l'usurpateur, d'autant plus que toutes vos instructions visent à ce but; celle-ci et vos rapports des con versations que vous avez eues avec moi suffiront, j'espère, pour les désabuser. Vous savez que je ne vous ai recommandé de diriger tous vos soins vers les moyens d'acquérir la connoissance des projets de B. que par la conviction intime dans laquelle je suis que c'est un des moyens les plus efficaces pour sapper dans ses fondemens l'édifice de la puissance de cet homme. Au reste, vous pourriez les assurer de nouveau que l'affaire principale sera poursuivie de ma part sans relâche, et de la manière la plus conforme à vos instructions originales.

Mais c'est à votre comité à déterminer jusqu'à quel point elles sont praticables, d'après la situation des choses et les dise positions des personnes dans l'intérieur. Puisque j'ai touché ce sujet j'ajouterai par forme de réponse à un article d'un de vos der niers bulletins, que je sais bien que tout se décide au comité secret de Saint-Cloud, mais que je sais aussi que les mesures de détail et d'exécution doivent nécessairement être confiées aux bureaux, et qu'ils sont par conséquent en état de fournir des notions très-précises sur ce qui se fait et sur ce qui doit se faire &c.

Je n'ai aucune connaissance de M. Talon, et je vous répète à cette occasion que quant à moi, je ne suis lié à aucune agence de Paris, excepté la vôtre. Je ne vous dis pas que je n'y ai aucune correspondance, il faut bien en avoir pour être plus en mesure de constater l'exactitude des rapports en les comparant les uns aux autres,

Votre comité pourra se servir du canal de Jersey pour trans

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mettre ses avis directement à Bordeaux (Londres) de la manière que vous indiquez dans votre lettre du 5, mais seulement dans des cas essentiels; vous concevez bien qu'il serait imprudent de risquer la perte de ce canal pour l'avenir, pour des choses de peu d'importance."

L: Le ministre Drake, dans une lettre du 37 Janvier dernier s'exprime en ces termes;

Je vous ai prévenu, dans ma dernière, que le gouverne ment consulaire avait conçu quelques soupçons sur l'existance d'une correspondance entre moi et l'intérieur de la France, c'est à cela qu'il faut attribuer l'insertion dans le Moniteur. No. 115 de cette année, d'un article en forme de note à des prétendues nouvelles de Londres, du 2 Janvier, marquant l'arrivée d'un courier extraordinaire de Munich le jour précédent; cette circonstance est de toute fausseté. Au reste, ce n'est pas la première fois que le Consul a employé cette manœuvre, puisqu'il en fit usage très-peu de tems après mon arrivée à Munich, comme on peut le voir dans le Moniteur No. 101 du premier Janvier 1803. Il paraît qu'il n'a fondé ses soupçons que sur des bases très-vagues; il sait que pendant mon séjour en Italie, j'ai eu des liaisons avec l'intérieur de la France; et il croit qu'il en doit être de même à présent, d'autant plus que je me trouve être dans ce moment un des ministres anglais les moins éloignés de la frontière. On voit cependant que tout en voulant faire croire à l'existance de quelques intelligences entre moi et les mécontens de l'intérieur, le gouvernement consulaire n'a pas même acquis le plus léger indice qui puisse le porter à se douter de notre correspondance, puisque, dans ce cas il n'au rait pas coupé le fil qui aurait pu conduire à des découvertes ultérieures, en faisant publier des articles qui doivent nous mettre en garde et nous engager au besoin, à changer le canal de notre communication, afin de dérouter ses calculs.

Le moyen dont il s'est servi, pour faire quelques découvertes en Allemagne, ne lui a pas réussi, puisque je viens de recevoir des avis positifs que l'émissaire, dont je vous ai parlé, n'a pu se procurer la moindre lumière nulle part. Vous pouvez donc être parfaitement tranquille sur cet article. Je vous recommanderai, cependant, de ne pas mettre la date ni l'endroit en encre ordinaire dans vos lettres ou bulletins, mais seulement en encre sympathique, vous en coucevrez la raison, sans que je m'arrête à vous la déduire.

Je suis extrêmement peiné d'apprendre tous ces mouvemens partiels et décousus, dont vous me parlez, et je partage votre conviction, qu'ils ne peuvent avoir d'autre effet que celui d'engager le gouvernement à un redoublement de vigilance, et le porter à des mesures de sévérité qui seront funestes à bien des honnêtes gens qui auraient pu rendre de grands services, s'ils avaient été mieux employés.

Le sort du comité dont il est question dans votre lettre du

5, et l'existence duquel je n'ai su que par vous, servira sans doute à vous, mettre sur vos gardes contre de faux frères, et doit vous engager à être circonspect quant aux personnes auxquelles vous confiez tout votre secret. Le grand art de conduire une opération pareille à celle dont vous êtes chargé, consiste à confier à chacun précisément ce qu'il faut pour qu'il remplisse le rôle que vous lui assignez, mais rien de plus. Quant au désir que votre général a témoigné (d'après le bulletin No. 13) d'avoir un aperçu de l'époque quand il faudra s'ébranler, je vous répondrai qu'on se réglera à cet égard sur les notions qui seront reçues du progrès de vos opérations. D'a près votre lettre du 25 Décembre, vous vous proposez de faire un éclat dans quatre départemens à un jour donné; mais je doute que cette mesure, si elle est isolée, puisse produire un grand effet elle pourrait causer un moment d'embarras au Premier Consul, mais il me paraît impossible qu'elle réussisse à la longue. Si l'armée de B. est disponible, ou si Fon we s'est pas assuré préalablement d'une bonne partie de ces troupes.

Je vous prie de me faire savoir sur quoi on peut compter quant à ce dernier objet, afin que je puisse régler mes idées et calquer notre marche là-dessus. Le point principal, à mon avis est de chercher à gagner des partisans dans l'armée; car je suis fermement d'opinion que c'est par l'armée seule qu'on peut raisonnablement espérer le changement tant désiré. Je souhaite aussi ardemment que vous, de voir arriver l'époque où l'on pourra se montrer; mais il faut que toute mesure soit arrangée d'avance, afin d'être assuré que le coup ne manquera pas, faute d'être préparé pour tout événement, et que nos moyens ne soient pas dissipés à pure perte: il faudra d'ailleurs ar rêter d'avance la marche que l'on doit suivre aussitôt l'insurection éclatée (pour ne pas errer à l'aventure) en mettant les royalistes à même de profiter des troubles que les républicains auront ainsi suscités.

Le 14 février il écrit toujours de Munich.

Je vous répète encore une fois, et ce sera pour la dernière, que je n'ai aucune agence en France, excepté la vôtre,

Quant aux correspondans que je pourrais y avoir, je suis par faitement à mon aise sur leur compte, malgré tout ce que vous me dites de leur prochaine arrestation &c.

Je suis excessivement peiné de toutes ces ridicules méfiances qui, d'après votre rapport, commencent à percer dans votre comité. Vous tâcherez de les faire cesser avant que de partir, et vous pourrez hardiment déclarer à vos amis de ma part, et de la manière la plus solennelle, que je n'ai aucune connai sance des circonstances et des événemens sur lesquels elles paraissent fondées. Au reste, je vous prie de lui faire entrevoir qu'il sera de toute impossibilité pour moi de travailler efficacement avec eux, s'ils se laissent" aller à leurs soupçons à chaque nouvel incident qui survient.

Il n'est pas nécessaire de m'envoyer la quittance du comité il suffira que vous l'apportiez avec vous. Je ne dois pas ou blier de vous prévenir qu'il vous faudra, en partant de Chalons (Paris) prendre vos mesures pour pouvoir y retourner pour le cas que l'état de nos affaires puisse par la suite l'exiger.

Croyez-moi avec les sentimens de la plus parfaite estime, Monsieur,

Votre très-humble serviteur. Il paraît que le Français qui correspondait avec le plénipotentiaire Drake, lui donna quelques renseignemens sur la conspiration.

Sa réponse jette un jour bien précieux.

"Votre lettre du 10 m'est parvenue le 21, et celle du 13 vient de m'arriver dans le moment; il est très-instant que Vous vous rendiez ici le plutôt possible, puisque je ne saurais vous donner des instructions ultérieures sans avoir été préalablement éclairé sur une infinité de points qui ne peuvent être discutés dans tous les détails que de vive voix. D'ailleurs, mon homme fait des difficultés quant au passage de nos lettres, et il nous faudrait établir le mode de communication dont je vous ai entretenu dans ma dernière.

Je suis prévenu de tous les événemens du 16 de ce mois, et je concois bien que la police aura l'œil sur tous les voyageurs. Par conséquent, vous guetterez le moment propice, afin de ne courir aucun risque. Je n'ai su que par vous les détails relatifs à Georges &c. Je n'ai d'autre connoissance de ses projets que celle que votre lettre m'a fournie, mais si vous avez les moyens de tirer d'embarras quelques-uns de ses associés, ne manquez pas d'en faire usage. Je vous prie aussi très-instamment de faire dresser et imprimer sur le champ une courte adresse à l'armée (officiers et soldats), les interpellant de ne pas laisser périr Moreau, leur frère d'armes, qui les a si souvent menés à la victoire, comme victime de la rage et de la jalousie du Premier Consul. Vous pouvez observer dans cette adresse que le mérite de Moreau a depuis long-tems offusqué la vue du petit tyran, et que le Premier Consul, pour se défaire de son rival, a choisi le moment de l'arrivée des nouvelles du malheureux Port de Saint Domingue, afin de détourner l'attention d'un désastre qui provient uniquement de sa mauvaise conduite. Vous ferez bien de ne pas perdre un moment à faire cette petite adresse, et à la faire circuler par toutes les armées avec la plus grande diligence."

Drake n'est pas le seul agent de l'Angleterre dont la mission politique soit aussi odieuse.

Il en est un autre placé dans les états de Wirtemberg, qui paraît également ne s'occuper, depuis son arrivée au lieu de sa résidence, que de moyens de séduction et de soulevement. Un rapport fait par le grand juge, ministre de la justice au Premier Consul, démontre qu'il était en correspondance avec

un agent existant en Hollande, un autre soldé à Abbeville, dont les pièces ont été saisies, et avec un comité en activité pres du ministère anglais.

On va voir l'intelligence qui régnait entre lui et Drake re lativement à la conspiration.

Le Citoyen Rosey, Capt. au 9me. régiment d'infanterie de ligne, est mis au courant des motifs de la correspondance.

On l'instruit de ce qu'il doit dire et de ce qu'il doit faire, et, en qualité d'aide de camp du général français dont on avait parlé au plénipotentiaire, on l'envoie à Munich pour solliciter des fonds nécessaires pour soulever des départemens et s'emparer des places.

Dix mille ceut quatorze livres dix sept sous six deniers, en papier sur Paris, sont remises à l'aide de camp.

Une lettre est écrite à M. Smith, & Stutgard, pour qu'il s'occupe de ramasser de son côté le plus de fonds qu'il pourra &c. Une autre est confiée à l'aide de camp pour le général, ou nom duquel on avait annoncé les plus grandes epérances. On y lit:

Puisque le général montre une telle confiance dans ses moyens, puisqu'il croit que le moment présent est singulièrement propice pour commencer les opérations; puisqu'il est d'opinion que si on le laisse échapper, des circonstances également favorables ne se trouveront plus. L'ami d'ici ne peut qu'obtempérer à ses désirs, en lui promettant toute l'assistance qui dépend de lui. L'ami doit nécessairement abandonner les détails d'exécution au général qui est sur les lieux, et qui est plus intéressé que tout autre à ce que les mesures soient bien préparées et bien combinées, que le but ne soit pas manqué. Il observera cependant qu'il est de la plus haute importance qu'on s'assure, le plutôt possible, d'une place sur la frontière de la France et de l'Allemagne, afin que l'ami puisse avoir une communication libre, prompte, active, et sûre avec le général, pour la trans mission de ce qui pourrait devenir récessaire par la suite. Huningue sera la place la mieux située pour cet effet d'autant qu'elle est assez raprochée du champ des opérations principales.

Il faudra du moins établir des hommes affidés de six lieues en six licues, depuis Besançon jusqu'à Fribourg, pour porter et raporter des avis.

La toute première opération paraît devoir être la saisie de Besançon, qui servira comine place d'armes, et en cas de mal heur, de place de défence; dans ce dernier cas, une partie des insurgés pourra se jeter sur les Cévennes et les montagnes de l'ancien Vivarais, et s'y soutenir pendant long-tems, pourvu qu'on lui ménage une communication sûre pour recevoir des secours pécuniaires, soit par Hunjugue, soit par Bale et la Suisse. Après s'être rendus maîtres de Besançon &c.; et avoir insurgé les provinces voisines, on ne doit pas perdre un K

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