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pour chasser les mineurs : une 1re expédition fut repoussée, une 2o s'empara des placers et soumit les mineurs qui ne purent s'enfuirent à des supplices épouvantables (1). Pour empêcher de nouvelles incursions de Sibériens, les Chinois élevèrent sur la rive droite de l'Amour, le poste fortifiée de Mokho (il a été rasé en 1900 par les tronpes russes). La loi chinoise, qui avait interdit jusque-là l'exploitation de l'or, l'autorisa à partir de 1888, pour les Chinois seuls et au profit du trésor impérial.

En dépit des mesures prises, de nombreux chercheurs d'or vinrent. de Sibérie en Mandchourie et, courant tous les périls, découvrirent d'autres placers, notamment près du fleuve, à 140 ou 170 kilomètres de son confluent avec le Soungari, à la hauteur des Stanitzas de Chingan, de Pollikarpova et de Coïousnaïa. En même temps, les Compagnies chinoises de Mokbéchan et de Toulounkho, recevaient la concession des mines d'or situées dans la province de Hei-Loung-Tsiang.

La Cie de Toulounkho, fondée en 1898, ne put arriver à exploiter ses placers des rivières Toulounkho et Guiton, qui furent pillés par les Toungouses. Celle de Mokbéchan exploitait, avant la guerre, divers placers voisins de l'Amour et sur ses affluents, et donnant 71 grammes d'or par tonne; des retranchements durent être construits et des soldats placés là pour repousser les attaques des Toungouses. D'autres placers étaient exploités clandestinement par des Sibériens ou des Chinois. En outre, le tzian-tzoun de Tsitsikhar (gouverneur gal de la province) faisait extraire à la dérobée, lui aussi, de l'or pour son compte en divers endroits.

La Mandchourie renferme des veines de quartz aurifère; en 1899, des ouvriers russes chargés de poser les poteaux du télégraphe ont découvert des pépites dans les trous qu'ils creusaient. Le Houang-Tong (à l'extrémité de la péninsule de Liao-Toung), abonde en gisements aurifères. Enfin, la partie occidentale du bassin de l'Amour fournit depuis longtemps plus de 10.000 kg. d'or par an, et la Mongolie du nord-est (province de Tse-Tsen-Khan) est aussi riche en or que la Mandchourie.

La soie est surtout produite dans la province de Fongtien, au sud de Moukden et à la pointe de la péninsule; les principaux centres sont Haichung, Keotchao, Houng-Ginh et Fouchou. Cette soie sauvage propient d'un ver qui se nourrit de feuilles de chêne. Il y a deux récoltes

(1) Voir Revue Française, décembre 1886, le récit de ce dramatique épisode.

par an, au printemps et à l'automne. Cette soie sert, sous le nom de tussahsilk, à la fabrique lyonnaise, qui la réexpédie à Vienne, Berlin et Crefeld; on en vend surtout à la France, l'Italie et la Suisse. Les cocons percés et autres dérivés sont vendus à l'Angleterre, qui les carde et les réexpédie aux États-Unis, où on en confectionne des tissus de peluche ou veau marin.

La Mandchourie renferme beaucoup d'animaux sauvages, dont les peaux ont de la valeur. Citons le tigre, la panthère, la martre zibeline, la belette, le renard, le loup, la loutre, le petit-gris. Le chien sert à fabriquer des gants, des doublures et des couvertures de voyage. L'agneau sert comme doublures de manteaux, la marmotte pour les casquettes. Toutes ces peaux sont envoyées à Nanking pour y être tannées et envoyées à Tientsin et Niouchouang.

Les forêts sont riches en cerfs, dont les cornes sont employées en pharmacie par les Chinois.

Parmi les villes que traversera le chemin de fer transmandchourien, on peut citer Khaylar, Tsitsikar, Khoulan-Tchan, Bayan-Sousou, AgéKhé, Bidchou, Djabandjan, Ningouta.

Khaylar est le centre de la région de l'Argoun; située à 5 kilomètres de l'embouchure de l'Iben-Gold, elle est formée d'une seule rue de 500 mètres de long et renferme 2.000 habitants, surtout des marchands et artisans chinois et des forgerons indigènes. A 150 kilomètres de Khaylar, près du temple d'Andjar-Soumet, a lieu tous les ans une foire célèbre, en août, où arrivent des produits de la Mongolie, de la Mandchourie, de la Chine et de la Transbaïkalie russe.

Tsitsikar, sur la rive gauche du Nonni, renferme 400 magasins (dont 50 possèdent de 50 à 75 employés chacun) et 9 banques faisant des prêts sur gages. La population est évaluée, selon les auteurs, entre 30,000 et 70.000 habitants. En septembre-octobre, il se tient à Tsitsikar une foire importante, où sont amenés des produits de Khaylar, de Khoulan-Tchan, de Bayan-Sousou, de Nen-Tchjouna, etc.

Khoulan-Tchan, à 15 ou 23 kilomètres de l'embouchure du Khoulan-Khé, renferme, suivant les opinions, de 30.000 à 70.000 hab. Elle possède 102 maisons de commerce, 11 banques, 350 magasins, 50 fabriques d'huile et un grand nombre de fabriques d'alcool.

Bayan-Sousou, à 15 kilomètres au nord du Soungari, renferme 30.000 habitants, dont 1.500 chrétiens. Il y a 18 usines d'alcool, 60 fa

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XXIX (Mars 1904.) N° 303.

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briques d'huile. Agé-Khé, sur le fleuve du même nom, à 30 kilomètres au sud du Soungari, expédie beaucoup de produits agricoles vers le port de Niou-Tchouang. On y consomme beaucoup de produits européens. Bidcheou, à l'est d'Agé-Khé, a 20.000 habitants. Djabandjan, qui est à 30 kilomètres, a 1.000 maisons et 10.000 habitants; c'est le centre de production de l'opium. Ningouta, sur la rive gauche du MoudanKiang, a 20.000 habitants. Les maisons sont presque toutes en argile, quelques-unes seulement en briques.

Un certain nombre d'autres villes profiteront de la nouvelle ligne ferrée, notamment Ghérin-Oula, Bodouné, Sansin, Merghen, BeiTouane Lin-Tzé, etc.

Ghirin ou Ghérin-Oula (120.000 hab.), à 300 kilomètres du chemin de fer, est la ville la plus peuplée de la région; on y fait surtout le trafic du tabac et des fourrures, A 50 kilomètres au nord se trouvent des usines à poteries.

Bodouné (20 à 30.000 hab.), à 250 kilomètres du chemin de fer, sur la rive gauche du Soungari, compte 300 négociants (dont 9 font ensemble pour 3 millions d'affaires par an), 8 banques, 440 magasins. L'industrie est représentée par des fabriques de tissus de coton, de tapis, de feutre, de cordes, de pelleterie, de cuir, d'huile, par des meuneries. Sansin, au confluent du Moudan-Kiang et du Soungari, à 200 kilomètres du chemin de fer, renferme 15.000 habitants; on y trouve 10 maisons de commerce, 5 banques, 60 magasins, 2 distilleries, 10 fabriques d'huile, 3 teintureries, quelques pelleteries, quelques menuiseries, des bijouteries, une fabrique de papier, une fonderie, des meuneries. On y rencontre 11 temples chinois, 1 temple musulman et 15 écoles. On échange à Sansin les produits des chasses de la contrée. Merghen, sur la rive gauche du Nonni, à 250 kilomètres au-dessus de Saussi-Khara, n'a que 2.000 habitants. Chouan-Tchen-Tin (35.000 hab.), à 130 kil. de Bodouné, est un centre de culture pour le tabac; on y compte 8 distilleries et 40 fabriques d'huile. Bei-Touan-Lin-Tzé est une des villes dont les progrès sont les plus rapides.

La situation de ces villes, surtout de celles voisines de la ligne du transmandchourien, n'a pas été sans subir des modifications, parfois importantes, depuis l'occupation russe. A côté des cités chinoises, des villes entièrement russes ont pris naissance. Tel est le cas de Kharbine, qui n'était naguère qu'un simple village mandchou. Aujourd'hui, à 3

verstes de là, s'élève une ville nouvelle bàtie par la Cie de l'Est chinois. Tout le long de la voie ferrée, naissent et se développent des villes russes qui ne tarderont pas à monopoliser le commerce du pays au détriment de presque toutes les vieilles cités chinoises.

La position du Kharbine russe, au point de jonction des deux lignes de chemins de fer de Port-Arthur et de Vladivostok, lui donne déjà une haute importance, qui ne fera que croître dans l'avenir.

Cette ville naissante se trouve en outre au cœur même de la Mandchourie, sur la rive droite du Soungari, la plus importante rivière de la province. En prévision de la création en ce point, d'un futur grand centre industriel et commercial, l'administration du chemin de fer avait fait l'acquisition de grandes étendues de terrain, et la superficle attribuée à la ville et à ses futurs faubourgs n'occupe pas moins de 33 verstes carrées. Là où il y a 6 ans, n'existait qu'un désert, se dressent aujourd'hui de nombreux bâtiments affectés aux services multiples du chemin de fer, au logement du personnel et des ouvriers. A la suite de cette création, un grand nombre de marchands, d'industriels, de fournisseurs du chemin de fer et des troupes sont venus rapidement s'installer dans le voisinage des ateliers et logements et former ainsi le germe puissant d'une grande ville, qui l'an dernier, comptait déjà plus de 20 000 habitants.

Il s'est ainsi créé 3 groupements importants: ceux du Vieux-Kharbine, du Nouveau-Kharbine et du Port. Le 1er se compose presque entièrement de maisons en terre, ayant servi tout d'abord d'asile aux constructeurs de la ligne; des habitations y ont aussi été élevées par des maisons de commerce locales. Le 2o, Nouveau-Kharbine, situé sur un plateau à pentes douces, sera le centre de la ville. C'est là que s'élèveront tous les édifices publics dont plusieurs sont en construction: poste et télégraphes, écoles, hôpital. bâtiments administratifs et du chemin de fer, etc. Une église permanente y existe. On y a déjà construit plus de 300 maisons en pierre. Enfin le Port est formé par un groupe d'ateliers et de magasins situés sur la rive même du Soungari, là où s'arrêtent les bateaux à vapeur. C'est la partie la plus animée de la ville.

Cet accroissement est d'autant plus remarquable que, jusqu'en 1901, il était interdit aux particuliers d'acheter des terrains dans la zone. réservée. Ce n'est que depuis 3 ans que des terrains de plus en plus nombreux ont été adjugés aux enchères et ont permis à Kharbine de

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