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orientale, et en Neustrie ou France occidentale. Le trône d'Austrasie fut vacant à la mort de Dagobert II en 715. Les maires du palais étoient alors très puissans; bientôt ils usurpèrent toute l'autorité. Pepin d'Heristel, maire du palais en Austrasie, non-seulement fut le maître de ce royaume sous Dagobert II, et empêcha ceux de Neustrie de succéder à ce roi, mais il se fit encore nommer maire du palais en Neustrie. A dater de cette époque malheureuse, l'autorité royale passe toute entière aux maires du palais, tous hommes à caractère ; et le seul titre de roi reste à des princes foibles et que l'on cherchoit sans doute à rendre incapables de tenir les rênes du gouvernement. Aussi l'histoire leur a-telle donné le nom de rois fainéans. Ces rois sont Thierri III, Clovis III, Childebert III Dagobert III, Chilperic II, Clotaire IV Thierri IV et Childeric III. Les maires du palais qui gouvernèrent le royaume sous ces ombres de rois, sont Pepin d'Heristel, Charles Martel son fils naturel, et ensuite Pepin et Carloman fils de Charles Martel; Pepin gouvernant la Neustrie après la retraite de son frère Carloman qui avoit l'Austrasie, et se trouvant maître de toute l'autorité, se décide enfin à ajouter le titre de roi aux fonctions qu'il en remplissoit; en conséquence il expulse Childeric III qu'il avoit mis sur le trône, s'empare de la couronne sans aucune révolution, et devient chef de la race sui

vante.

II. RACE CARLOVINGIENNE. Cette race qui

a pour chef Pepin le Bref, commence en 752, finit à Louis V en 987, et compte quinze rois dans l'espace de deux cent trente-cinq ans. Charlemagne, fils de Pepin, et le plus grand homme de cette race, lui donne son nom; à la suite de conquêtes considérables, ce prince fonde le second empire d'Occident, qui comprend la France, l'Allemagne et l'Italie presque entière. Cet empire qui brille comme un météore au milieu des ténèbres de la barbarie, sembloit affermi, sur des bases solides; mais la foiblesse de Louis le Débonnaire et le partage de son vaste héritage entre ses trois fils (Lothaire, Louis le Germanique et Charles le Chauve), renouvellèrent bientôt les troubles qui avoient perdu la première dynastie. Ces troubles s'accrurent à mesure que la succession de Charlemagne se subdivisa entre ses arrière-petitsfils. Enfin Charles le Gros réunit tous les états de son aïeul, soit par héritage, soit par usurpation; mais trop foible pour soutenir un tel poids, il le laisse échapper, et son incapacité le fait déposer en 888. Alors le vaste empire est démembré; plusieurs états séparés et indépendans se forment. Eudes est élu roi de France; Rodolphe occupe la Bourgogne transjurane (Savoie, Valais, Suisse); Boson a la Bourgogne cisjurane (Dauphiné, Provence); Arnoul possède l'Allemagne ; Gui de Spolette et Berenger de Frioul sontrois d'Italie. Adater de cette funeste époque, les Carlovingiens se trouvent à peu près dans le même état que les Mérovingiens dépouillés de l'autorité sous les maires du

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palais. Il y a cependant cette différence que sous les Mérovingiens il restoit une unité de pouvoir, sinon dans les mains du roi, au moins dans celles du maire du palais, au lieu que sous les Carlovingiens, le pouvoir fut disséminé entre plusieurs grands vassaux qui devinrent indépendans et qui donnèrent lieu au fameux systême féodal. A peine étoit-ce une confédération qui, souvent tumultueuse, quelquefois anarchique, n'avoit guères conservé que le titre de monarchie. Et si l'on reconnoissoit encore un roi de France, c'étoit seulement de nom, car ces grands seigneurs, absolus dans leurs terres, y levoient les impôts, rendoient la justice dictoient des lois, frappoient monnoie et faisoient la guerre. Leur dépendance du roi étoit donc purement nominale, et ils ne la reconnoissoient que par le besoin de résister aux Barbares du Nord ou Normands qui ravageoient le pays. Il étoit difficile que dans cet état de choses l'autorité royale se fit beaucoup respecter, d'autant plus que les princes qui en étoient revêtus n'avoient ni la force de caractère ni des moyens de puissance assez grands pour exiger obéissance et faire désirer feur protection. Certains grands vassaux rivalisoient en propriétés territoriales avec le rois on devoit donc s'attendre que l'un des plus puissans et des plus habiles d'entre eux saisiroit le premier moment favorable pour supplanter un roi foible et lui ravir la couronne; c'est ce qu'a fait Hugues Capet à l'égard de Charles duc de Lorraine, héritier naturel de Louis V. Ainsi s'est terminée la seconde race.

Nous verrons par la suite que si l'un de ces grands vassaux étoit par sa naissance, par son génie et par ses richesses, digne de porter la couronne, c'étoit sans contredit celui qui s'en est emparé.

III. RACE DES CAPÉTIENS. Cette race qui a pour chef Hugues Capet, en 987, compte jusqu'à ce moment trente-cinq rois dans l'espace de huit cent vingt-sept ans. Nous voyons sous cette race l'autorité royale éprouver un sort bien différent de celui qu'elle a eu sous les Mérovingiens et les Carlovingiens; deux fois elle s'étoit affoiblie par suite des partages de la succession royale entre les fils des rois; deux fois elle avoit fini par être entièrement anéantie; c'est l'époque de la disparution des deux premières dynasties. Mais sous la troisième race, nous allons la voir foible dans ses commencemens, se fortifier insensiblement par un systême héréditaire soutenu; s'agrandir, soit par des conquêtes, soit par des alliances, soit par des réunions, et enfin reprendre successivement tout ce dont la féodalité l'avoit dépouillee. Mais pour en venir là, il fallut beaucoup d'adresse, de persévérance, et surtout être souvent secondé par la fortune. C'est à plusieurs princes de la première branche des Capétiens que l'on doit cet admirable ouvrage. Hugues Capet en jeta les bases par sa politique adroite et par sa pru dence. Il supprima la place de maire du palais si fatale à la royauté sous ses prédécesseurs (1), convoqua tous les grands du royau

(2) Il y avoit encore un abus qui absorboit l'autorité royale;

me, leur fit renouveler hommage, et ordonna le réglement des douze pairs. Louis le Gros porta un des premiers coups à la puissance des grands vassaux, en établissant les communes, en affranchissant les serfs dans ses domaines et en ordonnant qu'il y eût appel aux juges royaux. Les croisades, quoiqu'elles fussent une calamité pour l'Europe, puisque elles coûtèrent deux millions d'hommes et plus de deux cents millions d'argent; les croisades, dis-je, contribuèrent à l'agrandissement de l'autorité royale en ce qu'elles appauvrirent les seigneurs. Philippe-Auguste continua heureusement ce qu'avoit commencé Louis le Gros; il prit des troupes à sa solde remporta des victoires importantes, et confisqua les domaines de Jean sans Terre situés en France et relevant du duché de Normandie. Saint Louis affermit son autorité la sagesse de ses ordonnances; elles affoiblirent l'importance des justices seigneuriales. Mais à mesure que la puissance du roi augmentoit, il en étoit de même de ses besoins; il falloit des impôts et des taxes; si la nation ne les consentoit pas, cela pouvoit devenir très dangereux, car les impôts ont toujours été la cause première des révolutions; nos rois n'avoient plus autant à redouter la riva

par

c'étoit celui des régences. Les rois n'étoient majeurs qu'à vingtdeux ans ; ils n'exerçoient la royauté qu'après leur sacre. Aussi les régens différoient cette cérémonie autant qu'ils le pouvoient. Philippe le Hardi a commencé à porter atteinte à cet abus, en déclarant que la minorité des rois finiroit à quatorze ans; mais ce n'est que sous Charles V et depuis Charles VI, que cet abus a été vraiment déraciné. Les déclarations de ces rois formèrent la règle de notre droit public à cet égard.

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