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taire, soient purement personnelles, elles sont lier, distinct de la propriété, et susceptible cependant mises au rang des actions réelles-immo- d'ètre aliéné, doit donner la faculté de sortir de bilières, mais quant à la compétence des tribunaux l'in division. Si cependant le propriétaire éprouseulement. Ainsi c'est devant le juge de la situa- vait quelque préjudice du partage, l'usufruitier ne tion de l'objet litigieux, qu'elles doivent toujours serait peut-être pas fondé à le demander, parce être portées. (Code de proc., art. 3.) qu'en définitive il n'a droit de jouir que comme le propriétaire lui-même (Code civ., art. 578 et 597), et qu'il doit prendre les choses dans l'état où il les trouve. (Ibid., art. 600.)

IV. Les actions que les lois appellent mixtes, c'est-à-dire, celles qui sont personnelles-réellesimmobilières, peuvent être portées devant le juge de la situation de l'immeuble litigieux, ou devant le juge du domicile du défendeur. (Code de proc. art. 59.)

Si l'action mixte est subordonnée à une action personnelle, celle-ci devenant préjudicielle, l'autre doit être portée devant le tribunal du défendeur. C'est ce que la cour de cassation, statuant par voie de réglement de juges, a décidé par arrêt du 18 janvier 1820. (Sirey 1820, pag. 127.) V. L'action en pétition d'hérédité compète à celui qui est héritier, soit ab intestat, soit en vertu d'un testament valable ou d'une institution contractuelle, et à ses héritiers ou ayant-cause. (Code civ. art. 724, 788, et 1166.)

Elle s'exerce contre le détenteur de la succession ou de partie d'icelle, ainsi que contre celui qui par dol, a cessé de posséder. (Code civ. art. 724; L. L. 131, 150 et 157, ff de div. reg. jur. (1).) Quelle que soit sa nature, réelle ou mixte, elle se porte devant le tribunal du lieu de l'ouverture de la succession (Code de proc. art. 59.)

VI. L'action en partage de succession appartient à chaque héritier, qui la dirige contre ses cohéritiers. Elle est portée devant le tribunal du lieu où la succession est ouverte, qnelle que soit sa nature, réelle ou mixte. (Code civ. art. 815 et 822, et Code de proc., art. 59.)

VII. L'action en partage d'un bien particulier (communi dividundo) appartient à ceux qui ont une chose commune entre eux. Si elle est mixte, elle se porte devant le tribunal de la situation de l'immeuble indivis, ou devant le tribunal du domicile du défendeur. Si elle est réelle, elle est portée devant le juge de la situation. (Code de proc. art. 59.) L'action en partage ne peut être exercée par ceux qui ont pris en commun un immeuble à loyer ou à ferme, parce qu'en faisant le bail ils ont du prévoir les inconvénients qui résulteraient pour eux de l'état d'indivision (2). Si cependant de partage de la location ou de la ferme peut s'opérer sans préjudice pour le propriétaire, il est juste qu'ils puissent le demander et l'obtenir.

D'après la loi 7, § 7, ff communi dividundo, deux usufruitiers du même bien peuvent en demander le partage. Cette décision est juste en principe, car l'usufruit étant un droit réel-immobi

(1) Qui dolo desierit possidere, pro possidente damnatur, quia pro possessione dolus est. Dict. Leg. 131.

(2) Neque colonis, neque eis qui depositum susceperunt hoc judicium competit. L. 7, § 11, ff. com. div.

VIII. L'action en bornage appartient au propriétaire d'un héritage, dont les limites sont confondues avec celles des héritages voisins, et se dirige contre les propriétaires des fonds adjacents (Code civ., art. 646). Si elle est mixte, elle se porte devant le juge du domicile du défendeur, ou devant celui de la situation des immeubles qu'il s'agit de borner. Si elle est réelle (suprà, §1, n° v), elle doit être déférée au tribunal de la situation des immeubles à borner. (Code de proc., art. 59.)

Cette action tenant essentiellement au droit de propriété, ne compète ni au fermier ni à l'usufruitier; ils peuvent seulement obliger le propriétaire à faire fixer, dans un temps déterminé, les limites de son héritage. Par la même raison, l'action en bornage ne peut être inteutée ni contre le fermier, ni contre l'usufruitier; elle doit toujours être dirigée contre le propriétaire.

IX. Lorsque l'action pétitoire est réelle, elle se porte devant le juge de la situation de l'immeuble litigieux; et si elle est mixte, devant le tribunal du domicile du défendeur, ou devant le tribunal de la situation de l'immeuble. (Code de proc., art. 59.)

X. Relativement aux personnes qui peuvent, et contre qui l'on peut intenter les actions possessoires, de même que pour les tribunaux devant lesquels elles doivent être portées, voy. Complainte et Justice de paix.

Quant aux actions de la compétence des tribunaux d'exception, voyez les articles Justice de paix, Tribunal de commerce, Conseil de prud'hommes, Conseil de préfecture et Conseil-d'état.

ACTION CIVILE. Elle est en général de la compétence des tribunaux civils ordinaires. Voy. Action et Juridiction.

Mais quelquefois aussi elle peut se porter devant les tribunaux de justice répressive; c'est lorsque le fait qui en est le fondement, peut donner lieu à l'application d'une peine, ou que l'inculpé, acquitté du fait pour lequel il a été poursuivi, forme incidemment, devant le tribunal de répression, une demande en dommages-intérêts contre la partie civile.

Voy. Tribunal correctionnel, no VII.

ACTION PUBLIQUE. Voy. Ministère public. ACTIONS, OU INTÉRÊTS DANS LES COMPAGNIES DE FINANCE, DE COMMERCE OU Peut-on D'INDUSTRIE. les saisir et les vendre?

Voy. Saisie des rentes constituées sur particuliers, ministration légale des biens qui la composent Voy. Absence.

$ 1, n° III.

ADIRER. Ce mot signifie égarer, perdre. On dit un papier adiré, une piece adirée, pour dire un papier perdu, une pièce perdue. Cette expression s'emploie particulièrement en matière de lettres de change.

Voy. Lettre de change.

Un exécuteur testamentaire est encore un administrateur comptable, voyez Exécuteur testamentaire. Il en est de même du tuteur chargé, d'après les art. 1055 et 1056 du Code civil, de l'exécution des donations faites avec charge de restitution. Voy. Donation entre-vifs.

Les sociétés anonymes sont aussi gérées par des

ADITION D'HÉRÉDITÉ. Cette expression est administrateurs. Voy. Société commerciale. synonyme d'acceptation de succession. Voy. Acceptation de succession.

ADJOINT. C'est l'officier public qui, dans chaque commune, remplace le maire, en cas d'absence ou d'empêchement, et remplit les fonc tions que celui-ci lui délégue.

Voy. Commune et Acte de l'état civil.

ADJUDICATAIRE. Quelles personnes peuvent ou ne peuvent pas se rendre adjudicataires des immeubles dont la vente est poursuivie en justice? Voy. Saisie-immobilière, § 1. Code de proc., art. 713, et les notes.

ADJUDICATION. C'est l'acte par lequel on adjuge un meuble, un bail, un bien, au plus offrant et dernier enchérisseur.

Quels sont les effets de l'adjudication sur expropriation forcée ?

Voy. Saisie-immobilière, § 11. Gode de proc., art. 731, et notes.

Quand l'adjudication d'un immeuble constituet-elle une vente volontaire ou forcée ?

Voy. ibid. Code de proc., art. 746. Celle faite en justice ou devant notaire est-elle valable, indépendamment de la signature des parties?

Voy. Vente des biens immeubles, § 1. Code de proc., art. 965, note 2.

Quant à l'adjudication des meubles, voy. Saisieexécution, et Saisie des rentes sur particuliers; Et relativement à celle des coupes de bois, voy. Bois.

ADMINISTRATEUR. On entend, par ce mot, celui qui gère les biens d'une succession, d'une société, d'un mineur, d'un interdit.

Le père est, durant le mariage, administrateur comptable des biens de ses enfants mineurs. Voy. Tutelle.

Après la dissolution du mariage, les biens des enfants mineurs sont gérés jusqu'à leur majorité ou leur émancipation par un tuteur. Voy. ibid.

Les biens d'un interdit sont également confiés à l'administration d'un tuteur. Voy. Interdiction. On confie à un curateur l'administration des biens qui composent une succession vacante. Voy. Curateur.

En cas d'absence du mari, la femme qui opte pour la continuation de la communauté, a l'ad

C'est un principe, que les administrateurs ne peuvent se rendre adjudicataires, ni par eux-mêmes, gestion leur est confiée. Voy. Vente des biens imni par personnes interposées, des biens dont la meubles et Saisie immobilière, § 1; art. 713, Code de proc., aux notes.

Les articles 905 du Code de procédure et 575 du Code de commerce les déclarent inadmissibles 612 de ce dernier Code, ils ne sont point, en cas au bénéfice de cession; et, aux termes de l'art. de faillite, susceptibles d'être réhabilités.

Voy. Cession de biens.

On appelle aussi administrateurs ceux qui dirigent les administrations publiques, et ceux qui sont dépositaires d'une portion de l'autorité publique, tels que les ministres, directeurs - génépréfets, maires, adjoints.

raux,

ADMINISTRATION. Ce mot s'entend de la

régie des biens d'une succession, d'un mineur, d'un interdit.

Voy. Bénéfice d'inventaire, Curateur, Tutelle, Interdiction.

On désigne aussi par ce mot la portion de l'autorité publique qui s'exerce par les maires, les souspréfets, les préfets, les directeurs-généraux et les ministres. Voy. Ministres, Préfet, Conseil-d'état, Conseil de préfecture, Conflit, Mise en jugement.

ADMINISTRATION PUBLIQUE. On appelle ainsi les compagnies chargées d'administrer les biens et les droits de l'état et du roi. Telles sont l'administration de l'enregistrement et des domaines, l'administration des forêts, l'administration des douanes, l'administration de la caisse d'amortissement et de la caisse des dépôts et consignations, l'administration de la loterie, l'administration des contributions indirectes, etc.

Ces administrations se nomment quelquefois régies. Cela est déterminé par des ordonnances royales.

Elles intentent et soutiennent les actions relatives aux objets dont la régie leur est confiée.

ADOPTION. C'est un acte par lequel on déclare faire son propre enfant de quelqu'un né dans une famille étrangère.

Chez les Romains, le principal effet de l'adoption était de faire passer l'adopté dans la famille de l'adoptant, et de conférer à celui-ci tous les droits

de la puissance paternelle sur la personne et sur les droits de l'adopté, qui éprouvait par ce moyen un changement dans son état, s'il était alors maître de ses droits; si, au contraire, l'adopté était fils de famille, il sortait de la famille et de la puissance de son père naturel, pour passer sous la puissance et dans la famille de son père adoptif. Justinien fit un tel changement dans les principes de l'adoption, qu'il n'en conserva, pour ainsi dire, que le nom. Il n'en laissa subsister les effets que dans le cas où l'adoptant était un des ascendants de l'adopté; dans tous les autres cas, l'adopté ne passait ni dans la famille, ni sous la puissance de l'adoptant, auquel seulement il acquérait le droit de succéder ab intestat, sans que ce droit fût réciproque. (Instit. de adoptionibus, 1. 10, Cod. eod. tit.)

Suivant le Code civil, l'adoption est tout autre chose l'adopté reste dans sa famille naturelle, où il conserve tous ses droits; il demeure dès lors sous la puissance de ses père et mère naturels, sans passer sous la puissance, ni dans la famille de l'adoptant, aux parents duquel il ne succède pas. (Art. 348 et 350.)

Les principes du droit romain et du droit français ne sont donc pas comparables, puisqu'ils reposent sur des bases différentes; de là il suit que ce n'est qu'avec une extrême circonspection que l'on peut invoquer les lois romaines, pour éclairer les difficultés qui naîtront sous le Code civil.

Nous ne dirons pas autre chose de l'adoption pratiquée chez les Romains; ce serait un travail plus curieux qu'utile.

En France, l'adoption a deux époques bien marquées par la législation, celle antérieure au Code civil, et celle établie par ce Code. Nous allons en exposer les principes, et rendre compte des principales difficultés qu'ils ont fait naître.

Cela formera la matière de deux sections.

SECTION I.re

De l'adoption en France avant le Code civil. I. L'adoption a été usitée sous nos rois de la première race, comme le prouvent les capitulaires et les formules de Marculfe; mais on n'y voit pas

clairement quelle en était alors la nature.

Un fait aussi certain qu'incontestable, c'est qu'elle avait entièrement cessé d'être usitée longtemps avant la révolution.

II. Le 18 janvier 1792, l'assemblée législative décréta, en principe, que l'adoption aurait lieu en France. Elle chargea son comité de législation de comprendre, dans son plan général des lois civiles, celles relatives à l'adoption; mais elle n'en détermina ni la nature, ni les conditions, ni la forme, ni les effets ces points n'ont été réglés que par

łe Code civil.

Mais, dans l'intervalle du 18 janvier 1792, au 2 germinal an 11 (23 mars 1803), date de la pu

blication du titre du Code civil de l'adoption et de la tutelle officieuse, le principe que l'adoption était autorisée avait été mis en pratique. Nombre d'adoptions avaient été faites; or, faire rétroagir indistinctement et entièrement ce code, c'eût été porter le trouble dans plusieurs familles. On prit le parti fort sage de régler le sort de ces adoptions intermédiaires par une loi transitoire du 25 germinal an 11, dont l'art. premier, et le plus important à connaître, porte: «Toutes adoptions faites par actes authentiques, depuis le 18 janvier 1792 jusqu'à la publication des dispositions du Code civil relatives à l'adoption, seront valables quand elles n'auraient été accompagnées d'aucune des conditions depuis imposées pour adopter et être adopté. »

Cette loi a eu le sort de toutes les autres; elle a donné lieu à une foule de questions transitoires qui ne présentent plus d'intérêt. Nous allons dèslors passer à la législation actuelle.

SECTION II.

De l'adoption suivant le Code civil.

En organisant le principe de l'adoption, le Code a voulu donner à la vieillesse une consolation et une partie des jouissances attachées au titre de père; au talent, et plus souvent encore à l'indigence, une protection et un appui, et à la patrie des citoyens utiles. Il a voulu encore que l'adoption fût un moyen de récompenser les actions généreuses. Il l'a ainsi dirigée vers un but à la fois moral et utile, en donnant à la bienfaisance toute l'étendue de l'amour paternel, et à la reconnaissance le charme de l'amour filial.

La différence des conditions requises pour l'adoption semble en faire trois espèces:

La première espèce d'adoption, qui a le caractère d'une pure libéralité de la part de l'adoptant, est soumise à toutes les conditions établies par la loi;

La seconde a lieu pour reconnaître un grand service de l'adopté qui a sauvé la vie à l'adoptant; elle est dispensée de plusieurs de ces conditions; qui meurt avant la majorité de son pupille, après La troisième n'est permise qu'au tuteur officieux cinq ans révolus depuis le commencement de la

tutelle.

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§ 1.er

Des conditions requises pour l'adoption.

I. Pour adopter, six conditions sont requises: 1o L'adoptant, quel que soit son sexe, doit être âgé de plus de cinquante ans. (Cod. civ., 243.) 2o Il faut qu'il n'ait à l'époque de l'adoption ni enfants, ni descendants légitimes (ibid.). Un enfant naturel, ni un enfant adoptif, ne font donc pas obstacle à l'adoption d'un autre enfant. (Ibid., 348.)

La survenance d'enfants n'annule pas l'adoption faite avant leur naissance. Mais il en serait sans doute autrement si l'enfant légitime était conçu au temps de l'adoption, parce que la loi le répute né toutes les fois qu'il s'agit de ses intérêts. (Ibid., 725 et 906.)

3° L'adoptant doit avoir au moins quinze ans de plus que l'adopté. (Ibid., 343.)

4 Si l'adoptant est marié, il faut que l'autre conjoint consente à l'adoption, à moins qu'il n'ait déjà donné son consentement à la tutelle officieuse qui a précédé l'adoption. (Ibid., 344 et 362.)

Mais consentir à l'adoption n'est pas adopter l'époux à qui le consentement est accordé est le seul adoptant.

5° Il faut que l'adoptant ait donné à l'adopté, pendant qu'il était mineur, des secours et des soins non interrompus pendant six ans au moins (ibid., 345). C'est un temps d'épreuve établi pour que l'adoption ne soit pas l'effet du caprice, mais qu'elle soit toujours le résultat d'un attachement solide, mûri par le temps et la réflexion. 6o L'adoptant doit jouir d'une bonne réputation (ibid., 355). Après avoir recueilli les renseignements convenables, la conscience du juge décide souverainement de ce point de fait; et, pour lui laisser plus de latitude, la loi le dispense d'énoncer les motifs de sa décision. (Ibid., 356.) A défaut d'une seule de ces six conditions, l'adoption doit être rejetée.

II. Les conditions requises pour être adopté sont au nombre de trois :

1o Il faut que l'adopté soit majeur. (Cod. civ., 346.)

2o. Si l'adopté ayant encore ses père et mère, ou l'un d'eux, n'a point accompli sa vingt-cinquième année, il est tenu de rapporter le consentement donné à l'adoption par ses père et mère, ou par le survivant; et, s'il est majeur de vingt-cinq ans, de requérir leur conseil. (İbid.)

Le conseil est requis, suivant la forme expliquée à l'art. Acte respectueux. Il suffit d'un seul acte. Après la mort des père et mère, le consentement des autres ascendants n'est pas requis.

3° Il faut que l'adopté ne l'ait pas déjà été par une autre personne, si ce n'est par le conjoint de l'adoptant. (Ibid., 344.)

C'est qu'en effet on ne peut pas plus fictivement. que naturellement avoir plusieurs pères ou plusieurs mères.

III. Lorsque l'adopté a sauvé la vie à l'adoptant, soit dans un combat, soit en le retirant des flammes ou des flots, l'adoption est dispensée des trois conditions suivantes :

1° De la nécessité que l'adoptant soit âgé de plus de cinquante ans; il suffit qu'il soit majeur; 2o De la nécessité qu'il y ait quinze ans de différence entre l'adoptant et l'adopté; il suffit que le premier soit plus âgé, ne fût-ce que d'un jour;

3o De la nécessité d'avoir donné des soins et des secours à l'adopté pendant six ans il peut l'adopter de suite. (Cod. civ., art 345.)

IV. L'enfant naturel peut-il être adopté par son père qui l'a précédemment reconnu?

La négative paraît évidente: 1° d'après la lettre de la loi; 2o d'après son esprit; 3° d'après le témoignage de ses auteurs; 4° d'après le dernier état de la jurisprudence.

1o La lettre de la loi: d'abord, que signifie le mot adoption écrit dans le texte du code civil? C'est, comme nous l'avons déja dit, l'acte par lequel on choisit pour son enfant celui qui n'est pas tel d'après la nature; définition de laquelle découle cette conséquence invincible, que l'enfant naturel reconnu ne saurait être adopté par son père, puisqu'il est son véritable enfant, non-seulement d'après la nature, mais encore aux yeux de la loi, qui lui accorde, à ce titre, des droits particuliers, des avantages, et même le bienfait de la légitimation par le mariage subséquent de ses père et mère.

En second lieu, la loi n'est pas seulement expresse dans le cas où elle dispose d'une manière formelle et littérale; elle l'est encore lorsque son vœu résulte de l'ensemble des dispositions législatives de la matière: Pro expressis habentur quæ necessariò descendunt ab expressis.

Or, qu'on jette les yeux sur les dispositions du code civil relatives à l'adoption et aux enfants naturels reconnus, on y verra que celui qu'on veut adopter, doit obtenir le consentement, ou requérir le conseil de ses père et mère; que l'adopté reste dans sa famille naturelle; qu'il en conserve le nom, en y ajoutant celui de l'adoptant. Comment concevoir dès-lors la possibilité d'adopter l'enfant naturel qu'on a reconnu? Car ce dernier ne peut demander ni le consentement ni le conseil de son père, puisqu'il n'a d'autre père que l'adoptant; il ne peut ajouter à son nom celui de l'adoptant, puisque la reconnaissance le lui a déja conféré enfin il ne peut que rester dans sa famille naturelle; puisqu'il n'a d'autre famille que celle de l'adoptant; et la loi qui suppose toujours deux familles distinctes, celle de l'adoptant et celle de l'adopté, repousse évidemment toute adoption entre deux individus qui n'en font qu'une. La raison qui ne saurait admettre à la fois la fiction et la vérité, ne

résiste-t-elle pas à ce qu'une même personne puisse, réunir la paternité fictive que produit l'adoption et la paternité réelle qui dérive de la nature? D'un autre côté, le législateur n'a point oublié les moyens d'améliorer le sort et même de changer totalement l'état des enfants naturels en général. Mais ces moyens sont au nombre de deux seulement, la reconnaissance, et la légitimation. Par là il a implicitement écarté l'adoption; et l'admettre comme un troisième moyen, serait ajouter à la loi, et la violer ouvertement.

Enfin, après avoir fixé avec beaucoup de soin, et de précision, les droits des enfants naturels reconnus, les rédacteurs du code civil ont pressenti la facilité qu'on aurait de les avantager au-delà des limites légales, par des dispositions à titre gratuit; et ils ont érigé en principe, que les enfants naturels reconnus ne pourraient, par donation entre-vifs ou par testament, rien recevoir au-delà de ce qui leur est accordé au titre des successions (art. 908). Ils ont aussi proscrit, par la disposition générale de l'art. 911, les libéralités frauduleuses qui pourraient être faites au profit des enfants naturels, soit sous la forme d'un contrat onéreux, soit sous le nom de personnes interposées. Qu'on suppose pour un moment l'adoption des enfants naturels légalement reconnus; et voilà qu'ils recevront bien au-delà de ce qui leur a été accordé par la loi; voilà que, contre le vœu du législateur, ils seront habiles à recueillir tous les avantages réservés aux enfants légitimes. Une telle doctrine peut-elle être admise sans fouler aux pieds le texte exprès de la loi ?

Tenons donc pour certain que l'adoption des enfants naturels reconnus serait inconciliable avec les dispositions les plus précises, et les plus formelles du code civil, et qu'il faut entendre ce code, comme s'il y était écrit en toutes lettres: l'enfant naturel reconnu ne peut être adopté par son père.

2° L'esprit de la loi: on l'a vu; la loi a introduit l'adoption, comme une consolation pour la vieillesse sans enfants, et non comme un encouragement au célibat; comme le prix des bonnes mœurs, et non du libertinage.

S'il était permis au père d'adopter son enfant naturel légalement reconnu, ce serait porter le coup le plus funeste au mariage. La légitimation par mariage subséquent, dont le but est si moral, ne serait plus qu'une superfétation dans notre code; et en effet, de deux moyens qui seraient offerts pour appeler au rang d'enfants légitimes les enfants naturels, on ne préférerait que trop souvent le plus commode, celui de l'adoption, dont les conséquences ne sont pas les mêmes, pour l'adoptant, que celles qui résultent de la légitimation, par mariage subséquent; il était donc du devoir du législateur, pour l'honneur du mariage et l'intérêt des familles, de ne pas laisser une pareille alternative.

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Celui qui a reconnu dans les formes établies par la loi un enfant né hors du mariage, ne peut l'adopter, ni lui conférer d'autres droits qui résultent de cette reconnaissance; mais hors ce cas, il ne sera admis aucune action tendante à prouver que l'enfant adopté est l'enfant naturel de l'adoptant.

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Cet article fut discuté et rejeté dans la séance du 16 frimaire an x; et on en a tiré l'induction que le conseil-d'état avait entendu que la reconnaissance d'un enfant naturel n'empêchait pas son père de l'adopter. Mais tout porte à penser, au contraire, que la suppression de l'article présenté a eu lieu à cette époque, non pas comme trop rigoureux, ainsi que le prétendaient quelques membres du conseil, mais bien comme surérogatoire, d'après les dispositions du Code civil, qui fixaient le sort des enfants naturels d'une manière spéciale.

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Il faut remarquer d'ailleurs que le procès-verbal du 16 frimaire ne fait point partie des procès-verbaux imprimés par ordre du conseil et que la découverte n'en a même été faite par M. Locré dans les cartons du conseil-d'état, que long-temps après l'impression des autres procèsverbaux dont il a été distrait.

Ajoutons qu'une circonstance particulière ayant donné lieu à la réorganisation du tribunat, la discussion du Code civil fut suspendue et reprise ensuite entre le conseil-d'état et la section de législation du tribunat, conformément à deux arrêtés des 10 et 18 germinal an x. Tous les projets, d'après M. Locré, furent de nouveau mis en délibération (1); l'impression de cette discussion nouvelle et générale fut ordonnée; mais on ne voit nulle part que, dans celle du projet de loi sur l'adoption, il ait été soutenu que le père pourrait adopter son enfant naturel après l'avoir

données par le président du conseil-d'état, à la séance du 22 fruc(1) A l'appui de ce fait nous pouvons rapporter les explications tidor an x.

« Le consul Cambacérès dit que, conformément à l'arrêté pris par le gouvernement, et au vou manifesté par le tribunat, il a été ouvert, en sa présence, des conférences sur le projet de Code civil; que les titres concernant la publication, les effets et l'application des lois en général, les droits civils, les actes de l'état civil, le domicile, les absents et le mariage, y ont été discutés; que la dernière rédaction de ces projets sera présentée de nouveau cussion des titres qui n'ont pas encore été examinės, sera égaleau conseil-d'état pour y être définitivement arrêtée; que la dis

ment reprise.

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