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aliments à leurs enfants, jusqu'à ce qu'ils puissent s'en procurer par leur travail. (Code civ., art. 203.) leur travail. (Code civ., art. 203.) Quoique les autres ascendants ne soient pas nominativement compris dans cette disposition, elle leur est cependant commune.

Indépendamment des dispositions du droit romain qui imposaient cette obligation à tous les ascendants, comme aux pères et mères, indépendamment encore de l'autorité de la jurisprudence qui y était parfaitement conforme, le Code civil a formellement imposé cette obligation à tous les ascendants envers leurs descendants, à quelque degré qu'ils soient.

En effet, par son art. 205, il oblige les enfants à fournir des aliments à leurs père, mère et autres ascendants, qui sont dans le besoin; et par son art. 207, il rend cette obligation réciproque. Le Code civil dispose donc bien formellement que les ascendants doivent des aliments à tous leurs descendants. (Ainsi jugé par arrêt de la cour de cassation du 28 octobre 1807.)

Les beaux-pères et belles-mères, les gendres et belles-filles, sont également soumis à l'obligation de se fournir mutuellement des aliments, mais sous une double modification: la première, que cette obligation cesse vis-à-vis de la belle-mère, lorsqu'elle a passé à de secondes noces; la seconde, qu'elle cesse vis-à-vis de tous, lorsque l'époux qui produisait l'affinité, et les enfans nés de son union avec l'autre époux, sont décédés. (Code civ., art. 206.)

Lorsque le fils mineur a des biens-fonds, son père est-il néanmoins obligé de lui fournir des aliments?

Non la dette du père cesse dès que le fils a des biens de lui-même. Si donc le père a été tuteur de son fils, ou s'il a eu l'administration de ses biens à tout autre titre, il peut mettre, dans le chapitre de la décharge de son compte, la valeur des aliments qu'il a fournis à son fils, à partir du moment où celui-ci a eu des propres et jusqu'à concurrence de leur revenu. Ainsi jugé par arrêt de la cour de cassation du 13 mars 1813, au rapport de M. Lefessier - Grandprey. (Sirey, 1813, p. 457. Journal des Audiences, 1813, pag. 314.)

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II. L'obligation de fournir des aliments dans tous les cas déterminés par la loi, cesse pour tout ou partie, avec le besoin qui en est le principe, ou lorsque celui qui les fournissait se trouve hors d'état de les continuer; dans l'un et l'autre cas la réduction ou la décharge entière peuvent en être demandées. (Code civ., art. 209.)

La demande d'aliments dus entre parents, peutelle, après le décès de celui à qui ils seraient dus, être formée par ses créanciers?

La cour de cassation a décidé que non, par arrêt du 12 mai 1812, rapporté en ces termes au Bulletin civil:

Après le décès de René- Nicolas Mondon, la

veuve Sebille a actionné sa veuve et ses héritiers en paiement d'une somme de 504 liv. 16 sous, dont il s'était reconnu débiteur envers François Sebille, pour fournitures à lui faites par ce dernier, et pour sa nourriture pendant quatre années. La veuve Sebille a allégué que Mondon, séparé de sa femme après la ruine absolue de leur commerce de boulangerie, et tombé dans la plus grande détresse, avait trouvé un asile dans la maison de Sebille, son mari, boulanger comme lui, où il était resté depuis le 15 mai 1791 jusqu'au 15 mai 1795, époque à laquelle il arrêta, avec Sebille, un compte de fournitures et nourritures, dont le montant se portait aux 504 liv, 16 sous réclamés.

Elle a soutenu que la dette ayant pour cause des aliments, les veuve et enfants Mondon, quoiqu'ayant renoncé, l'une à la communauté et les autres à la succession de Mondon, n'étaient pas moins tenus d'acquitter la somme par elle réclamée, d'après l'obligation naturelle où ils avaient été de fournir des aliments à leur époux et père, obligation reconnue par la jurisprudence ancienne et consacrée formellement par la nouvelle législation.

Les veuve et enfants Mondon ont opposé à la veuve Sebille leur renonciation respective à la communauté et à la succession de leur époux et père. Ils ont, d'ailleurs, posé en fait que Mondon avait été reçu chez Sebille en qualité de garçon boulanger, qu'il jouissait d'une pension de 150 livres en qualité d'ancien employé des fermes; qu'ainsi il avait eu des moyens personnels d'existence, et que, par conséquent, il n'avait pu être à la charge de Sebille.

Le 25 juillet 1808, jugement du tribunal de Châtillon-sur-Seine, qui condamne les veuve et enfants Mondon au paiement de la somme demandée par la veuve Sebille, attendu que cette créance a pour cause les aliments et logement fournis au mari et au père; que la renonciation de l'une et des autres, soit à la communauté, soit à la succession, ne peut être un obstacle au paiement qui leur est demandé du montant de cette créance; et qu'en effet, les aliments fournis à un mari, à un père, sont, de la part d'une femme et des enfants, une dette sacrée, du paiement de laquelle rien ne peut les dispenser.

Fausse application des articles 205 et 206 du Code civil, et violation des art. 208, 209 et 210 du même Code. L'une et l'autre ont été réprimées par l'arrêt suivant :

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Ouï le rapport de M. Boyer, l'un des conseillers en la cour; les observations de Jousselin, avocat de la défenderesse; et les conclusions de M. Daniels, avocat-général;

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sous bénéfice d'inventaire, il n'était pas tenu de payer ultra vires hæreditatis, et sur ses biens personnels, qui ne sont point confondus avec le patrimoine de son père;

mée que du vivant et de la part de celui à qui les aliments peuvent être dus, puisque cette demande suppose la vérification préalable des besoins réels de celui qui réclame des aliments, et des facultés suffisantes de celui contre lequel ils sont réclamés, et puisque le débiteur d'aliments peut même être admis à s'affranchir du paiement d'une pension alimentaire en offrant de recevoir, nourrir et entretenir dans sa demeure celui auquel ces ali-lui-ci eût été en position, en sa qualité d'émigré, ments sont dus;

« Attendu que, néanmoins, dans l'espèce, la condamnation à une somme représentative de prétendus aliments fournis à René-Nicolas Mondon, a été prononcée plusieurs années après le décès de ce dernier, sans qu'il paraisse que, de son vivant, il en eût jamais formé la demande, et sans aucune vérification préalable de la réalité des besoins qu'avait éprouvés cet individu, ni de la suffisance des facultés des demandeurs en cassation à l'époque dont il s'agit;

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Qu'ainsi le jugement attaqué contient une violation formelle des articles cités du Code civil, en même temps qu'il fait une fausse application des art. 205 et 206 du même Code; par ces motifs la cour casse, etc. »

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C'est sur le même principe qu'un arrêt du 7 juillet 1817, rapporté à l'article Enfant naturel, § 1o, no 11, a jugé que l'enfant naturel reconnu ne peut, après le décès de son père, demander des aliments à son aïeul.

Voici enfin un arrêt du 17 mars 1819, qui a consacré le même principe dans l'espèce suivante: Le marquis de Sayve, se rendant en pays étranger, en qualité d'émigré, rencontra à Chambéry, le comte de Vourey, son ancien ami, qui avait aussi pris le parti d'émigrer, emmenant avec lui son jeune fils.

Il fut pressé par celui-ci de lui prêter de l'argent, ce qu'il eut la facilité de faire: il fournit au sieur de Vourey père, une somme de 5640 francs, dont il reçut une reconnaissance de pareille somme portant intérêts.

Cette reconnaissance, datée du 9 juillet 1791, portait que la somme de 5640 francs avait été avancée à l'emprunteur dans ses plus pressants be

soins.

Le sieur de Vourey père est mort sans avoir remboursé le marquis de Sayve, qui, se croyant fondé à poursuivre le sieur de Vourey fils, l'a fait assigner au tribunal de première instance de Grenoble, à fin de paiement de la somme de 5640 f., qu'il disait avoir prêtée à son père pour le faire subsister avec son fils.

Le sieur Vourey fils se défendit de cette demande, en disant:

3° Qu'il ne pouvait pas non plus être recherché comme héritier de sa mère et de son aïeul maternel, sous le prétexte qu'ils auraient été condamnés à fournir des aliments à son père, si ced'en former la demande contre eux, et qu'ayant fourni ces aliments à leur décharge, leur héritier en devait le remboursement, etc.

Le tribunal de première instance n'eut aucun égard à sa défense, et il fut condamné à payer au sieur de Sayve la somme de 5,640 fr., avec les intérêts, par jugement du 16 juin 1817.

Sur l'appel qu'il crut devoir interjeter, il ne fut pas plus heureux; il vit confirmer le jugement da tribunal de première instance.

Alors il crut devoir se pourvoir en cassation, parvint à faire admettre sa requête, la fit signifier avec l'arrêt à son adversaire, qui combattit ses moyens de cassation par écrit, et l'affaire devint ainsi contradictoire.

Au soutien de son pourvoi, le demandeur proposait deux moyens : le premier pris d'un excès de pouvoir emportant violation de l'article 1165 du Code civil, qui décide que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ;

Le second, tiré de la violation des articles 208, 209 et 210 du même Code, et de la fausse application des articles 205 et 206.

Il développait les premiers moyens en disant qu'il n'était point partie dans l'engagement souscrit par son père, et que l'article 1165 s'opposait dès lors à ce qu'on lui en demandât le remboursement;

Que, quand il serait vrai qu'il eût profité du prêt fait à son père, il ne serait pas pour cela civilement tenu d'en restituer le montant; qu'il existerait tout au plus, en pareil cas, une obligation naturelle, qui, ne produisant aucune action, ne saurait motiver une condamnation contre lui;

Que, fût-il constant que le prêt eût été fait pour fournir à son père des aliments dont il aurait profité lui-même, il ne serait cependant pas obligé, en droit, à restituer le prêt;

Que c'était l'avis unanime des auteurs, et qu'Alciat, sur la loi Si certum petatur, n'hésitait point à décider que le fils nourri du froment emprunté par son père, n'était pas tenu de le restituer.

Que cette opinion était partagée par tous les auteurs estimés; que d'ailleurs, quand on pourrait admettre l'opinion contraire, il faudrait justifier que la demande à fin de paiement d'ali1° Qu'il n'était point l'obligé personnel du de-ments aurait été formée du vivant de ceux qui mandeur; que la reconnaissance dont il était porteur n'était pas signée de lui, et qu'il ne s'était engagé à rien envers lui;

les auraient dus, s'ils n'avaient pas eu de bons moyens pour la repousser; que c'était ce que la cour de cassation avait elle-même décidé dans l'af2o Qu'ayant accepté la succession de son père | faire Mondon, et qu'elle avait nettement établi en

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principe, par son arrêt, que les demandes à fin | tion, elle a rendu l'arrêt de cassation dont la de paiement d'aliments, devaient avoir été formées teneur suit: du vivant de ceux qui auraient pu être actionnés pour en fournir, pour qu'on pût demander à leurs héritiers le remboursement de ceux qui auraient pu être fournis par des tiers.

moyens

De son côté, le défendeur soutenait, 1o que le prêt qu'il avait fait au sieur de Vourey père, avait eu pour objet de lui procurer d'exisdes tence ainsi qu'à son fils; 2o Que celui-ci ayant profité du prêt, en devait le remboursement personnellement;

3o Que ce prêt ayant été fait à la décharge de la dame de Vourey et du sieur de Rignaud son père, qui tous deux auraient été condamnés à lui en fournir, si le sieur de Vourey père eût pu agir ouvertement contre eux en France, l'obligation de rembourser ce prêt s'était trouvée dans leur succession, recueillie par le demandeur en cassation;

4° Que la jurisprudence constante du parlement de Grenoble établissait ce principe; qu'en rendant l'arrêt attaqué, la cour de Grenoble n'avait fait que le consacrer de nouveau, et qu'en s'attachant aux dispositions des lois romaines, seules encore applicables à l'affaire, en considérant la date de la reconnaissance dont le remboursement était demandé, cette cour n'avait pu contrevenir aux dispositions du Code civil, qui n'était point alors promulgué.

La cour, après avoir mûrement examiné les moyens respectivement invoqués par les parties, les lois relatives à l'émigration, et les principes relatifs aux demandes tendantes à obtenir des aliments, a reconnu que celui qui prétendait être dans le cas de demander des aliments, devait exercer son action; que les aliments ne pouvaient être accordés que lorsqu'il était vérifié que le demandeur était réellement dans le cas d'en solliciter et après avoir apprécié les moyens que pouvaient leur opposer ceux à qui la loi imposait l'obligation de les fournir, après toutefois que le tribunal aurait jugé l'action fondée; que cette demande devait être formée contre eux lorsqu'ils étaient vivants, et qu'il ne pouvait être exercé aucun recours contre leurs successions, par ceux qui prétendaient en avoir fourni à leur décharge, lorsqu'ils auraient négligé d'en exercer la répétition pendant qu'ils existaient encore, et pouvaient faire valoir leurs moyens pour s'en défendre; et considérant qu'en 1791, le sieur de Vourey père, encore qu'il eût déjà quitté la France, était cependant autorisé à former sa demande contre son épouse et contre son beau-père, aucune loi ne l'ayant à cette époque frappé de mort civile, et que, ne l'ayant pas fait, on était fondé à en conclure que, s'il ne l'avait pas formé, c'est qu'il ne s'y croyait pas fondé, et qu'il pensait que sa femme et son beau-père auraient eu des exceptions solides à y opposer; et, frappée de cette considéra

Tome I.

Ouï le rapport fait par M. le conseiller Minier, les observations de Nicod, avocat du demandeur; celles de Loiseau, avocat du défendeur; ensemble les conclusions de M. l'avocat-général Cahier; et après qu'il en a été délibéré en la chambre du conseil;

« Vu les articles 208 et 1315 du Code civil; « Attendu que Vourey père aurait pu, en 1791, date du billet par lui souscrit, former une demande à l'effet d'obtenir une pension alimentaire, s'il s'y était cru fondé, puisque ce n'est que par des lois postérieures que les émigrés ont été privés de la jouissance des droits civils;

Attendu que Vourey père, ainsi que sa femme et son beau-père, étaient tous décédés lorsque de Sayve a intenté son action contre Vourey fils, comme exerçant les droits de son débiteur;

« Attendu que, dans une pareille situation des choses, les tribunaux n'ont pu connaître, ni les motifs qui avaient déterminé Vourey père à ne pas demander de pension alimentaire à sa femme et à son beau-père, ni les moyens de fait et de droit que ceux-ci auraient pu avoir à lui opposer, ni la somme à laquelle ladite pension, si elle avait dû être accordée, aurait été arbitrée (comme l'article 208 du Code civil l'exige) dans la proportion du besoin de Vourey père, et de la fortune de sa femme et de son beau-père;

<< Attendu, d'ailleurs que, si les créanciers peuvent en général exercer les droits et actions de leur débiteur, l'article 1166 du Code civil en excepte néanmoins ceux qui sont exclusivement attachés à sa personne, ce qui s'applique naturellement au droit qu'a ce débiteur de demander, ou de ne pas demander de pension alimentaire pour ses besoins actuels et personnels;

Attendu enfin que Vourey fils, qui ne pouvait pas être tenu du paiement du billet dont il s'agit au procès, comme héritier de son aïeul, ou de sa mère, ne s'était obligé personnellement, par aucun acte, à en payer le montant; que de là il suit que le marquis de Sayve réclamait contre lui l'exécution d'une obligation dont l'existence n'était pas prouvée, et qu'en condamnant Vourey fils à l'acquitter, la cour royale de Grenoble a expressément violé les articles 208 et 1315 du Code civil, ci-dessus cités, lesquels articles n'ont fait que confirmer les anciens principes;

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Par ces motifs, la cour casse et annule l'arrêt rendu par la cour royale de Grenoble, le 27 août 1817, etc. »

Voy. ci-après n° vII, l'arrêt du 18 août 1813. III. La quotité et le mode de prestation des aliments sont abandonnés à la prudence des tribunaux, qui doivent prononcer sur l'un et l'autre objet d'après les circonstances particulières de chaque espèce. Ainsi, lorsque celui à qui une pension alimentaire est demandée justifie qu'il

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est dans l'impossibilité de la payer, le tribunal peut ordonner qu'il recevra dans sa maison, nourrira et entretiendra celui à qui la loi l'oblige de fournir des aliments. (Code civil, art. 210.)

IV. En principe général, les père, mère et autres ascendants, ne sont tenus de fournir des aliments à leurs enfants et descendants que dans leur propre maison. Il peut arriver cepen'dant que les père, mère et autres ascendants, conçoivent, contre leurs enfants ou descendants, des préventions qui rendraient à ces derniers la vie trop dure et trop amère s'ils étaient obligés d'habiter dans leur maison dans ce cas, le tribunal peut, malgré les offres faites par les père, mère ou autres ascendants, de recevoir leur enfant ou descendant dans leur maison, et de l'y nourrir et entretenir, les condamner à lui payer une pension alimentaire pour vivre séparément. Ainsi jugé par arrêt de la cour de cassation du 14 germinal an XIII, motivé sur les art. 210 et 211 du Code civil; « Attendu, y est-il dit, qu'il résulte évidemment de ces articles, que la quotité et le mode de prestation des aliments, dus dans les cas prévus, sont laissés à la prudence des juges.

L'obligation imposée aux enfants de fournir des aliments à leurs père, mère et autres ascendants, est solidaire. Ainsi jugé par arrêt du 3 août 1669, rapporté par Soefve, tom. II, cent. 4, chap. 40, et par un autre arrêt du 18 février 1768, rapporté au nouveau Répertoire de jurisprudence de M. Merlin, au mot Aliments, § II.

Voyez Enfant adultérin.

VI. Il est un cas où il est dû des aliments par un individu à un autre individu, encore bien qu'il n'existe entre eux aucun lien de parenté ni d'affinité, et que l'obligation ne soit pas réci proque : le donataire doit des aliments à son donateur, lorsque ce dernier est dans l'indigence. Le Code civil n'impose cependant pas expressément cette obligation au donataire, mais elle résulte implicitement des dispositions de ses articles 953 et 955, dont le premier met l'ingratitude au nombre des causes qui peuvent faire révoquer les donations entre vifs; et dont le second énonce positivement parmi les causes d'ingratitude le refus, par le donataire, de fournir des aliments au donateur. Il y a donc évidemment obligation du donataire de fournir des aliments au donateur, puisque, faute de le faire, la donation peut être révoquée. Mais par une conséquence nécessaire, le donataire peut s'affranchir de cette obligation en renonçant à la donation. , VII. Le mandataire qui a fourni des aliments aux enfants mineurs de son mandant, peut-il, après la mort de celui-ci, exiger d'eux le remboursement de ses avances, quoiqu'ils ne soient pas héritiers purs et simples de leur père ?

L'affirmative a été jugée par arrêt de la cour de cassation, du 18 août 1813, au rapport de M. Boyer, dont voici les motifs.

« La cour, — attendu que l'obligation imposée aux pères et mères, par l'art. 203 du Code civil, de nourrir et entretenir leurs enfants, en donV. Dans l'ancienne jurisprudence, le mari était nant à ceux-ci une action pour contraindre au tenu de fournir des aliments à sa femme séparée besoin leurs pères et mères à remplir ce devoir, par autorité de justice, lorsqu'elle était dans l'in-ne les affranchit pas pour cela de l'obligation de digence, encore bien qu'elle ne lui eût apporté aucune dot; et pareillement, la femme séparée de biens devait des aliments à son mari indigent, lorsqu'elle était en état de lui en fournir. Le Code civil a sanctionné cette jurisprudence en disposant, art. 212, que les époux se doivent mutuellement secours et assistance.

L'article 301 porte même que l'époux, qui a obtenu le divorce, peut, s'il est dans l'indigence, obtenir une pension alimentaire sur les biens de l'autre époux, jusqu'à concurrence du tiers des revenus de ce dernier; et cette disposition s'applique a fortiori, au cas de la séparation de corps, comme l'a jugé la cour de cassation par arrêts des 8 mai 1810 et 28 juin 1815. (Sirey, 1810, pag. 229; et 1815, pag. 380.)

Les enfants naturels reconnus doivent-ils des aliments à leurs père et mère dans le besoin, et cette obligation est-elle réciproque ?

Le père qui a reconnu, pendant son mariage, un enfant naturel qu'il avait eu tandis qu'il était libre, peut-il être contraint, durant le mariage, à fournir des aliments à cet enfant ? Voyez Enfant naturel.

Quid, des enfants adultérins ou incestueux?

satisfaire par eux-mêmes, lorsqu'ils en ont les moyens, au paiement des avances que des étrangers peuvent avoir faites pour leur nourriture et entretien, faute par les pères et mères d'y subvenir;

α

Qu'ainsi l'arrêt attaqué a pu, dans l'espèce, condamner les demandeurs au paiement des avances faites par le sieur Gerbert, pour leur nourriture et entretien, sans contrevenir à l'article précité du Code civil; rejette, etc. »

Dans cette affaire, la cour a été principalement déterminée par la considération que les demandeurs avaient profité des avances du mandataire, et que par conséquent ils étaient personnellement obligés envers lui. Voilà en quoi cet arrêt diffère de celui du 17 mars 1819, rapporté ci-dessus, no II.

ALLUVION. Le Code civil appelle alluvion les attérissements et accroissements qui se forment successivement et imperceptiblement aux fonds riverains d'un fleuve où d'une rivière (art. 556). Cette définition est puisée dans la loi romaine qui s'exprime ainsi per alluvionem id videtur adjici quod ita paulatim adjicitur ut intelligere non possi

mus quantum, quoque momento temporis adjiciatur. | en forme une île. Ce propriétaire n'en conserve acq. rer. dom. pas moins son champ; nulle distinction sur ce

L. 7, ff. de alluvion existe, disait M. Portalis, point entre la rivière navigable ou flottable et

« Pour que

il faut que l'accroissement ait été successif et imperceptible; ces deux conditions sont absolument indispensables. La nature, par une opération si petite, semble s'être complue à gratifier les fonds riverains de ce supplément de richesse; c'est en effet le fonds riverain qui profite de l'alluvion. » Ce droit s'applique à toute espèce de fleuve ou de rivière. Seulement, si la rivière est navigable, il faut toujours laisser le marchepied ou chemin de hallage conformément aux réglements (art. 556). Si l'accroissement est produit par l'effet insensible d'une eau courante qui s'est portée d'une rive sur l'autre, le propriétaire qui aurait souffert n'a rien à réclamer contre celui qui en profite. (Art. 557, ibid.).

I. De la définition donnée par le Code de ce qu'il faut entendre par alluvion, il résulte que ce droit ne peut avoir lieu à l'égard des lacs et étangs. Chaque propriétaire conserve son terrain, quoiqu'il soit couvert quelquefois car il n'y a pas accroissement successif et imperceptible. (Art. 558.)

Ce droit n'a pas lieu non plus à l'égard des relais de la mer. Ce sont des dépendances du domaine public qui ne sont point susceptibles d'une propriété privée (Art. 538 et 557.)

Le Code en rangeant aussi parmi les dépendances du domaine public les fleuves et rivières navigables ou flottables n'a pas voulu qu'il en fût de même de leurs relais.

celle qui n'est dans aucun de ces deux cas. La loi dit conserve et en effet il n'acquiert pas car ce que le fleuve ou la rivière lui a laissé n'est pas une chose nouvelle pour lui. C'est bien la moindre faveur qu'on puisse obtenir, lorsqu'on a perdu une partie de son bien, que cette partie n'entraîne pas celle de tout le reste. (Art. 256.)

Si le fleuve ou la rivière, au lieu de se former un bras nouveau, abandonne son ancien lit pour se former un nouveau cours, les riverains ont droit au lit abandonné, chacun dans la proportion du terrain qu'il a perdu. Ce droit leur est dévolu à titre d'indemnité, quelle que soit l'espèce des rivières (art: 563). Si c'est une rivière navigable, ils doivent toujours laisser le chemin de hallage.

Ici, ce n'est pas, à proprement parler, une accession: c'est un remplacement réclamé par la justice et fondé sur l'humanité.

V. Ce qu'on appelle alluvion étant un accroissement successif et imperceptible, il en résulte que les terres enlevées tout à coup par un fleuve ou une rivière navigable ou non, et portées vers un champ inférieur, ou sur la rive opposée, ne peuvent être considérées comme terres d'alluvion; aussi l'art. 559 du Code civil porte-t-il que, dans ce cas, le propriétaire de la partie enlevée peut réclamer sa propriété.

« L'enlèvement de ces terres, disait l'orateur du Tribunat, est l'effet d'une crise violente opposée à la marche ordinaire de la nature. L'on ne II. Mais il a réservé à l'état les îles, îlots et at-peut pas dire que sa nature a uni; on doit dire térissements qui se forment dans leurs lits, et cette au contraire que la violence a désuni. Tant que réserve est fondée sur l'intérêt de la navigation le propriétaire du champ auquel la partie enlevée (Code civ., art. 560). L'article ajoute, s'il n'y a se trouve jointe n'a pas encore pris possession de titre ou prescription contraire. cette partie, l'ancien propriétaire est recevable à réclamer. Il ne l'est plus, s'il a laissé passer ur an depuis la prise de possession.

Cette addition est un hommage rendu par le législateur au droit de propriété. Si l'on se prévaut d'un titre d'acquisition, il faut qu'il soit revêtu des formes légales. Si l'on oppose la prescription, il faut qu'elle ait été acquise suivant les conditions déterminées par la loi.

Il convient d'observer ici que l'état est soumis aux mêmes prescriptions que les particuliers. (Art. 2227.)

« Un plus long terme prolongerait l'incertitude des nouveaux possesseurs, et retarderait la culture de leurs nouvelles terres. Le silence que l'ancien propriétaire a gardé pendant une année suffit pour faire présumer qu'il n'a pas voulu faire usage de son droit de réclamation. >>

VI. Le partage de l'alluvion, quand elle corIII. Quant aux îles, îlots et attérissements for- respond à plusieurs propriétés appelées à en promés dans le lit des rivières qui ne sont ni navi- fiter, donne souvent lieu à des difficultés sérieuses. gables ni flottables, la propriété en appartient Le partage se fera-t-il en prolongeant jusqu'au fil aux riverains du côté où l'île s'est formée. Si elle de l'eau les lignes plus ou moins obliques de déne s'est pas formée d'un seul côté, elle appartient marcation des propriétés riveraines? ou bien, en aux riverains des deux côtés à partir de la ligne partant de l'ancienne rive, se redressera-t-on perqu'on suppose tracée au milieu de la rivière (art.pendiculairement au cours de la rivière ? 561). Dans le dernier cas, chacun à sa part divisée. Tous ces principes se retrouvent dans la loi 29, ff. de acq. rer. dom.

IV. Il arrive quelquefois qu'un fleuve ou une rivière, en se formant un bras nouveau, coupe et embrasse le champ d'un propriétaire riverain et

Les difficultés sont encore plus graves dans le cas où l'ancien lit est abandonné. Le nouveau lit formé par irruption n'ayant jamais une superficie égale au lit abandonné, le Code a été obligé de prévoir que le partage de celui-ci serait fait proportionnellement au terrain perdu; mais dans

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