Page images
PDF
EPUB

faire a conclu au rejet du pourvoi, et ses conclusions ont été suivies ;

an xii, le sieur Tilsman a institué pour son héritière universelle la dame Delvigne, sa nièce, à charge, entre autres, « de donner à chacun des quatre ouvriers de la ferme où je réside, qui y seront encore employés au jour de ma mort, quatre mesures de seigle» Ce sont les expressions du

testament.

Debroux et Landrain, journaliers, employés alors par le sieur Tilsman, ont signé comme

témoins.

10 pluviose an XII, décès du testateur. A cette époque, Debroux et Landrain étaient encore employés dans la ferme dont il s'agit.

Les héritiers légitimes ont demandé la nullité du testament, sous prétexte que Debroux et Landrain qui l'ont signé comme témoins, étaient en même temps légataires de quatre mesures de seigle.

<< Attendu, sur le premier moyen, que les jugements interlocutoires ne lient pas les juges, etc. »

Cet arrêt décide bien nettement qu'un jugement interlocutoire, quoique préjugeant le fond, n'a aucunement l'effet de la chose jugée, et qu'il ne lie pas les juges; et ce principe a été de nouveau consacré par un arrêt du 16 avril 1822, rapporté à l'article Contrat aléatoire, § 11, art 1, n' II. Il peut cependant arriver qu'ils soient liés par un jugement interlocutoire, si ce jugement porte en même temps un caractère définitif. C'est ce qui est arrivé dans l'espèce suivante, jugée par arrêt de la cour de cassation, sect. civile, du 16 mai 1809, au rapport de M. Coffinhal.

La demoiselle Claire, se qualifiant Rosalie Gombaut, mariée avec le sieur Daurian, intente

Le 29 messidor an xii, un jugemet interlocutoire du tribunal civil de Liége a admis les hé-action pour être déclarée fille naturelle du sieur ritiers à prouver, tant par voix d'interrogatoire que par témoins, que Debroux et Landrain étaient effectivement ouvriers de la ferme où résidait le testatcur, et à l'époque de la confection du testament, et à l'époque du décès.

L'interrogatoire subi par madame Delvigne, et une enquête, ont prouvé la vérité de l'allégation des demandeurs. En conséquence, par jugement définitif du 28 juillet 1807, le testament a été déclaré nul.

La dame Delvigne a interjeté appel de ce dernier jugement, mais sans attaquer l'interlocutoire elle s'est bornée à soutenir que les deux ouvriers Debroux et Landrin, témoins au testament, n'étaient pas légataires dans le sens de l'art. 975 du Code civil.

Ce moyen a été accueilli par la cour d'appel de Liége, qui, par arrêt du 31 décembre 1808, a infirmé le jugement du 28 juillet 1807, et déclaré le testament valable.

Les héritiers se sont pourvus en cassation, pour violation de la chose jugée, et pour contravention aux articles 975 et 1001 du Code civil.

D'abord, ils prétendaient que la question de nullité avait été préjugée par l'interlocutoire du 29 messidor an XII, qui n'avait pas été attaqué. Suivant eux, le sort de la contestation dépendait de la preuve ordonnée par ce jugement : il n'était plus permis à la cour d'appel de s'en écarter: elle ne pouvait en faire abstraction sans violer la chose jugée.

Gombaut. Elle prétendait avoir une reconnaissance authentique aux termes du Code civil; toutefois elle n'avait qu'une déclaration faite par Gombaut, relativement à ses impositions, en présence des commissaires vérificateurs de l'emprunt forcé. C'est dans cette circonstance que, pour être moins taxé, il indiqua, disait-on, toutes ses charges, et mit au nombre Rosalie sa fille naturelle; on ajoutait que la pièce avait été apostillé par le citoyen Colas, l'un des commissaires-vérificateurs. Ainsi le fond du procès était une question d'état ; et cette question se trouvait dans l'espèce uniquement subordonnée au point de savoir si l'acte produit était authentique.

2 mars 1807, arrêt de la cour d'appel de Bordeaux, qui ordonne une vérification d'écritures et signatures;

« Attendu qu'une déclaration pour l'emprunt forcé était faite en vertu d'une loi, d'après les formes qu'elle avait prescrites pour en assurer la certitude et l'authenticité; qu'elle devait être remise dans un dépôt public, soumise à l'examen des fonctionnaires publics nommés à cet effet ; ce qui lui donnait le caractère authentique ; attendu toutefois que la signature Gombaut, apposée au bas de la déclaration dont il s'agit, n'a été reconnue ni contestée par les sieurs Gombaut fils; que dès lors il devient indispensable d'en ordonner la vérification.

[ocr errors]
[ocr errors]

Pourvoi en cassation. Arrêt d'admission Signification et assignation. Fin de non receSur le moyen pris de la contravention à l'art 975 voir, prise de ce que le pourvoi n'était pas recedu Code civil, les demandeurs en cassation sou-vable, l'arrêt étant interlocutoire. Arrêt qui tenaient qu'il importait peu que Debroux et Lan- rejette la fin de non recevoir; drain ne fussent pas nommément désignés comme Attendu légataires dans le testament; qu'il était toujours vrai de dire qu'ils étaient légataires, et qu'ainsi ils n'avaient pu être témoins du testament sans le

vicier de nullité.

M. Merlin ayant porté la parole dans cette af

[ocr errors]
[ocr errors]

que l'arrêt attaqué ordonne une instruction qui préjuge le fond de la manière la plus formelle, puisqu'il admet définitivement que la déclaration pour l'emprunt forcé, attribuée au feu sieur Gombaut, sous la date du 28 novembre 17934 assure l'authenticité de la reconnaissance

de la veuve Daurian; et qu'un semblable interlocutoire, qui n'est même modifié par aucune réserve des droits des parties au principal, réserve inconciliable d'ailleurs avec l'opinion manifestée par l'arrêt sur le fond de la contestation, ne permettrait plus aux demandeurs d'en espérer la rétractation, la vérification ordonnée une fois faite; que la loi du 3 brumaire an 11 n'avait au surplus exclu d'autre appel que celui des jugements préparatoires; que si elle n'avait pas suffisamment distingué ces jugements de ceux qui devaient être réputés interlocutoires, l'art. 452 du Code de procédure a clairement fait revivre cette distinction, et a pris même le soin de définir l'une et l'autre espèce de jugement; que l'arrêt attaqué est évidemment interlocutoire, d'après la définition donnée par cet article; et que le recours en cassation est ouvert contre cet arrêt, de même que l'appel a été reçu contre le jugement de première instance dont les dispositions préjugeaient bien moins le fond; qu'ainsi la fin de non recevoir contre la demande en cassation, ne saurait être admise sans étendre la dispotion de la loi d'un cas à un autre; »

Il résulte de cet arrêt que l'on peut se pourvoir en cassation contre un jugement interlocutoire qui porte en même temps un caractère définitif. C'est aussi ce qu'a formellement décidé un arrèt de la même cour, section civile, du 25 novembre 1817, qui a jugé en même temps que le pourvoi en cassation contre un pareil jugement rendu en dernier ressort, n'est plus recevable, si trois mois se sont écoulés depuis la signification. (Sirey, 1818, pag. 182.)

Voici un autre arrêt de la même section civile, en date du 9 mars 1809, qui a décidé que l'on peut se pourvoir en cassation contre un arrêt purement interlocutoire, dont les effets sont irréparables en définitive.

La dame Folignier était en instance devant la cour d'appel de Paris, relativement à une opposition qu'elle avait formée au mariage projeté par la demoiselle Folignier, sa fille, avec un sieur Gouraincourt. L'opposition de la mère était notamment fondée sur ce que sa fille s'étant depuis sa majorité retirée chez son amant, elle ne devait pas être réputée libre pour demander le consente

ment de sa mère.

Sur les conclusions de la mère, un arrêt de la cour d'appel ordonna, avant faire droit, que la demoiselle Folignier se retirerait pendant six mois chez une de ses parentes pour vérifier si elle était ou non influencée pour contracter mariage.

La demoiselle Folignier s'étant pourvue en cassation contre cet arrêt, sa mère lui opposa une fin de non recevoir, tirée de ce qu'un avant faire droit ne peut être attaqué qu'aprés le jugement définitif; mais ce système fut rejeté par la cour de cassation;

« Attendu que l'arrêt attaqué soumet la déci

sion à intervenir à une épreuve; que dès lors cet arrêt est interlocutoire, et peut être attaqué par voie de cassation. »>

Si l'on ne considérait que les termes de cet arrêt, on pourrait croire que la voie de cassation est ouverte contre tout interlocutoire, avant le jugement définitif. Mais ils doivent être rapprochés de l'espèce dans laquelle l'arrêt a été rendu, et l'on voit que l'arrêt de la cour de Paris faisait à la demoiselle Folignier un grief irréparable en définitive.

Si le préjugé résultant d'un interlocutoire était réparable en définitive, il serait bien susceptible d'être attaqué par la voie de l'appel, mais il ne pourrait l'être par celle de la cassation. C'est ce que la cour de cassation, section civile, a jugé par arrêt du 12 avril 1810, dont voici l'espèce:

Entre la dame Noguès et le sieur Duplaa, il y avait action en restitution par suite de minorité, lésion, etc. Contre un désistement par elle donné à des lettres de ratification obtenues sur une vente de biens de M. de Navailles. La question de lésion ne pouvait être jugée, sans qu'au préalable les juges fussent fixés sur la valeur des biens libres que le sieur de Navailles possédait au 3 juin 1809, époque de l'opposition formée par la mineure, ainsi qu'au 14 juillet suivant, époque de son désistement.

31 mai 1808, arrêt de la cour d'appel de Bordeaux qui, avant de prononcer sur l'appel, ordonne que, par des experts, qui seront convenus par les parties, ou qui, faute d'en convenir, seront pris et nommés d'office, il sera procédé à la sommaire prisée des biens libres du sieur de Navailles, tant à l'époque du 3 juin 1809, date de l'opposition faite par la dame Noguès au bureau des hypothèques, qu'au 14 juillet suivant, date du désistement de ladite opposition.

[ocr errors]

Pourvoi en cassation. Arrêt d'admission. Signification et assignation. - Fin de non-recevoir prise de ce que l'arrêt est interlocutoire. Arrêt ainsi conçu :

« Vu l'art. 14 de la loi du 2 brumaire an iv, spéciale pour la cour de cassation; - considé rant qu'aux termes de cet article, le recours en cassation contre les jugements en dernier ressort qui ne sont pas définitifs, n'est ouvert qu'après le jugement définitif; et que l'art. 451 du Code de procédure, qui ne parle que de l'appel, n'a point dérogé audit article 14 de la loi du 26 brumaire an Iv; — la cour déclare la dame Noguès, quant à présent, non-recevable dans son pourvoi ».

Ce principe a de nouveau été consacré par un autre arrêt de la même section, en date du 13 janvier 1818, dont voici les termes : « La cour,

vu l'art. 14 de la loi du 11 brumaire an iv, spéciale pour la cour de cassation; Considérant qu'aux termes de cet article, le recours en cassation contre les jugements en der

[merged small][ocr errors]

Attendu que le jugement attaqué est un avant faire droit, qui ne statue rien de définitif, qui ne préjuge rien; que la preuve ordonnée d'office, et pour apprécier les moyens invoqués par les deux parties, ne fait à aucune d'elles un grief irréparable en définitive; que ce jugement ne lie pas non plus les juges, et ne saurait les empêcher de revenir en définitive aux moyens de droit, sur lesquels ils pouvaient d'abord prononcer, indépendemment de ce préliminaire;

[ocr errors]

« Déclare l'administration de l'enregistrement non-recevable quant à présent dans son pourvoi». Il résulte nettement de ces deux arrêts, que pour la cassation, les jugements purement interlocutoires sont compris dans la classe des préparatoires, qui ne peuvent être attaqués par voie de cassation qu'après le jugement définitif.

XI. C'est une importante question dans la pratique et sur laquelle les auteurs sont partagés, que celle de savoir si en même temps que l'on fait appel d'un jugement définitif, on peut prendre la même voie contre un jugement interlocutoire, encore bien que l'on y ait acquiescé, ou que trois mois se soient écoulés depuis la signification.

Il en serait autrement si le jugement interlocutoire portait en même temps un caractère définitif, ou s'il causait un grief irréparable en définitive, comme dans les espèces sur lesquelles sont intervenus les arrêts de la cour de cassation des 9 mars et 16 mai 1809 rapportés ci-dessus. Des jugements de cette nature ayant l'autorité de la chose jugée, lient réellement les juges qui les ont rendus. La partie contre laquelle ils sont prononcés y acquiesce donc en connaissance de cause après leur signification, si elle les exécute volontairement et sans réserves, puisqu'ils lui nuisent actuellement; elle se rend donc par là non-recevable à les attaquer, de même que si, sans en appeler, elle laisse passer le délai de trois mois depuis leur signification.

XII. Peut-on appeler d'un jugement non signifié?

La signification n'a pour objet que de faire connaître le jugement à la partie condamnnée pour qu'elle ait à l'exécuter volontairement, et d'autoriser la partie à la requête de qui elle est faite à faire exécuter ce jugement par les voies légales. La signification n'est donc qu'un acte préalable d'exécution étranger à l'appel on ne peut donc pas opposer à l'appelant que le jugement n'a pas été signifié. C'est ce que la cour de cassation, section civile, a formellement décidé par arrêt du premier août 1808. (Répertoire de jurisprudence de M. Merlin, v Appel, § v, no 11.)

Peut-on appeler d'un jugement par défaut rendu en justice de paix, après le délai de l'opposition?

[ocr errors]

Le tribunal civil de Clamecy avait décidé la négative par jugement du 2 mai 1820, Attendu qu'il résulte des principes sur l'institution des justices de paix, et des dispositions du livre Ir du Code de procédure civile, que l'appel d'un jugement par défaut rendu par le juge de paix n'est pas recevable ».

Il a été jugé par l'arrêt de la cour de cassation du 17 janvier 1810 qui vient d'être rapporté, que les jugements interlocutoires en général ne lient pas les juges qui les ont rendus. Quelque préjugé qui en résulte pour la décision définitive à intervenir sur le fond, la partie contre les intérêts de laquelle, s'élève ce préjugé, peut espérer que les juges prendront pour base de leur jugement définitif d'autres éléments que ceux qui résultent de l'exécution du jugement interlocutoire. Or, l'interlocutoire ne liant pas la conscience du juge, et sa décision future étant incertaine pour les parties, on ne peut pas dire que l'une d'elles s'est Mais sur le pourvoi d'office de M. le procurendue non-recevable à attaquer ce jugement reur-général près la cour de cassation, ce jugesous prétexte qu'elle l'a exécuté; car on ne peut ment a été annulé par arrêt du 7 novembre 1820, acquiescer à un jugement que quand il est rendu.au rapport de M. Trinquelague, dont voici la Mais le jugement interlocutoire ne faisant pas connaître quel sera le jugement définitif, une partie ne saurait se rendre non-recevable à attaquer un interlocutoire qui ne lui nuisait pas avant le jugement définitif; et par une suite nécessaire, ce n'est qu'à compter de la signification du jugement définitif que court le délai pour attaquer l'interlocutoire (1).

(1) Ainsi jugé par deux arrêts de la cour d'appel de Colmar des 5 mai 1809 et 6 avril 1811, et par arrêts de la cour d'appel de Trèves du 1er août 1810, et de la cour royale de Nancy, du 28 juillet 1817 (Sirey, 1818, Code civ., pag. 89). Telle est aussi la doctrine professée par M. Mourre, procureur-general près la l'arrêt de cette cour du 27 février 1818, rapporté dans le recueil de Sirey, 1818, p. 153 et suiv.

cour de cassation, dans un réquisitoire sur lequel est intervenu

teneur :

[ocr errors]

La cour,

[ocr errors]

vu les art. 16 et 443 du Code de procédure civile; attendu le livre Ier que de ce Code, a pour objet de régler tout ce qui concerne la juridiction des juges de paix, et que les dispositions de ce livre forment la loi à suivre dans cette matière; attendu que la disposition de l'art. 4 du tit. 3 de la loi du 24 octobre 1790, qui interdisait, dans tous les cas, l'appel d'un jugement du juge de paix rendu en défaut, établissait une règle exorbitante du droit commun, et que cette disposition n'a point été reproduite dans le Code de procédure civile; contraire que l'art. 16 ci-dessus cité, en déterminant d'une manière générale, et sans distinction des jugements contradictoires et des juge

attendu au

ments en défaut, le délai après lequel l'appel des jugements des juges de paix ne serait pas recevable, autorise par là même l'appel des uns et des autres dans ce délai, et que l'art. 443 ne laisse aucun doute à ce sujet, puisque, sans faire aucune différence entre les jugements des tribunaux civils et les jugements des justices de paix, il fixe l'époque à laquelle commence à courir le délai de l'appel des jugements par défaut; qu'ainsi le tribunal civil de Clamecy a formellement violé ces deux articles en déclarant le sieur Mariaux non-recevable dans son appel :-casse...» Même décision dans un arrêt rapporté ci-après Şi, no x.

XIII. Les appels des jugements des justices de paix se portent devant le tribunal de première instance de l'arrondissement,

Ceux des tribunaux de première instance et des tribunaux de commerce se portent devant les cours royales dans le ressort desquelles ils sont établis (loi du 24 août 1790, tit. III, art. 12; — loi du 27 ventose an VIII, art. 22. Code de comm., art. 644). Ceux des conseils de prud'hommes se portent devant le tribunal de commerce. Voy. Conseil de prud'hommes.

XIV. L'appel des jugements arbitraux est porté devant les tribunaux de première instance, pour les matières qui, s'il n'y eût point eu d'arbitrage, eussent été, soit en premier, soit en dernier ressort, de la compétence des juges de paix. Il l'est devant les cours royales pour les matières qui eussent été, soit en premier, soit en dernier ressort, de la compétence des tribunaux de première instance. (Code de proc., art. 1023.)

Quoique les juges de paix et les tribunaux de première instance jugent, en quelques circonstances, en premier et dernier ressort, et que les arbitres soient censés remplir le premier degré de juridiction, il résulte cependant des termes de l'art. 1023, qu'en matière d'arbitrage il y a toujours lieu à l'appel, à moins que, conformément à l'art. 1010, les parties n'y aient formellement renoncé. Voy. Arbitrage.

§ II.

Délai de l'appel.

I. Le délai pour interjeter appel est de trois mois: il court, pour les jugements contradictoires, du jour de la signification à personne ou domicile; et pour les jugements par défaut, du jour où l'opposition n'est plus recevable (Cod. de proc. art.443). Ces trois mois doivent être francs, c'est-à-dire que l'on ne doit y comprendre ni le jour de la signification, ni le jour de l'échéance. La cour de cassation, section civile, l'a ainsi jugé par trois arrêts des 22 juin 1813, 20 novembre 1816 et en juillet 1817. (Bulletin civil.)

Le motif de ces arrêts est que l'article 1033 du Code de procédure renferme une disposition gé

Tome I.

nérale à laquelle il n'a pas été dérogé pour les cours royales, et que l'appel est un acte qui se signifie à personne ou domicile.

Le délai de trois mois se compte du quantième d'un mois au quantième correspondant d'un autre mois, d'après le calendrier grégorien, sans avoir égard au nombre de jours dont chaque mois est composé. C'est ce que la cour de cassation, section civile, a formellement décidé par arrêt du 12 mars 1816, dont voici les motifs :

[ocr errors]

Attendu que le calendrier grégorien ayant force de loi en France, aux termes du sénatus-consulte du 22 fructidor an XIII, qni en ordonne l'exécution, les mois doivent être pris tels qu'ils sont réglés par ce calendrier, pour la supputation des délais que la loi fixe par mois, à moins que la loi même n'en dispose autrement; qu'aucune loi en vigueur ne porte, que les mois dont se compose le délai de l'appel en matière civile doivent être formés égaux de trente jours chacun, ni d'une autre manière que celle fixée par le calendrier grégorien ; que conséquemment ils doivent être pris de quantième à quantième tels qu'ils sont réglés par le calendrier.

D

II. Lorsqu'un appel interjeté après le délai est contesté, une cour royale peut-elle s'appuyer sur des moyens tirés du fond pour le déclarer recevable?

La cour de cassation a décidé que non, par arrêt du 13 janvier 1817, en annulant un arrêt de la cour de Rennes qui avait jugé le contraire. L'arrêt portant cassation est ainsi motivé:

[ocr errors]

Attendu que quand l'appel n'est pas recevable, le tribunal d'appel ne peut s'occuper du fond de l'affaire, pour en induire la recevabilité de l'appel qui en est absolument indépendante; que la seule chose dont les cours d'appel doivent s'occuper, lorsque l'appel est soutenu non-recevable, c'est de juger la recevabilité de l'appel ; et que ce n'est que lorsque cet incident est jugé, qu'elles peuvent entrer dans le mérite du fond.»

III. Celui qui fait appel d'un jugement rendu entre lui et une femme qui s'est mariée pendant ou depuis le procès de première instance, doit, à peine de nullité, assigner le mari sur l'appel pour autoriser sa femme; et cette nullité est tellement absolue, qu'elle peut être proposée en tout état de cause, et même pour la première fois en cassation. Ainsi jugé par arrêt de la cour de cassation, section civile, du 7 août 1815 (Sirey, 1815, pag. 346). Cet arrêt est fondé sur ce que ceux qui intentent un procès doivent s'assurer de la qualité de la personne qu'ils poursuivent, et veiller à ce que les formalités prescrites pour la validité des jugements soient remplies. Loi 19, ff de Reg. jur.)

IV. Le délai de trois mois pour faire appel court-il du jour de la signification du jugement à un domicile élu pour la notification des actes de l'instance?

Cette question s'est présentée devant la cour

22

de cassation qui l'a résolae négativement par ar- de l'appel : en conséquence, il avait déclaré l'aprêt de la section civile, du 3 janvier 1817. (Re-pel de Wegman non recevable. cueil de Sirey, 1817, p. 379.) C'était violer ouvertement l'article 443, et ad

2 mars

suit:

[ocr errors]

Un second arrêt de la même section, du 3 mettre, contre la disposition générale de cet araoût 1818, a jugé que la signification d'un juge-ticle, une exception que ni les art. 422 et 111, ni ment au domicile élu pour la notification des aucune autre loi, n'autorisent. En conséquence, actes de l'instance, ne fait pas courir les délais du l'annulation de l'arrêt a été prononcée ainsi qu'il pourvoi en cassation. (Ibid., 1819, pag. 74.) Un autre arrêt de la même cour, du 1814, a décidé que l'élection de domicile faite dans le lieu où siége le tribunal de commerce, aux termes de l'art. 422 du Code de procédure, ne peut autoriser l'autre partie à faire signifier son acte d'appel au domicile élu. Voici cet arrêt, tel qu'il est rapporté au Bulletin civil:

Il s'agissait de savoir si le délai de l'appel d'un jugement rendu par le tribunal de commerce de Genes, le 26 mars 1811, au profit de Fiers, contre Wegman, avait couru du jour de la signification de ce jugement faite à Wegman au domicile par lui élu en première instance devant ce tribunal, et si, en conséquence, l'appel interjeté hors le délai à partir de cette signification était ou n'était point recevable.

Fiers prétendait que le délai avait dû courir du jour de cette signification, d'après l'art. 422 du Code de procédure, portant, que si les parties comparaissent, et si, à la première audience, il n'intervient pas de jugement définitif, les parties non domiciliées dans le lieu où siége le tribunal, sont tenues d'y faire élection de domicile, faute de quoi toute signification, même celle du jugement définitif, peut être faite au greffe du tribunal; que c'était aussi le vœu de l'art. 111 du Code civil, qui dit que, lorsqu'un acte contient élection de domicile pour son exécution, les significations, demandes et poursuites relatives à cet acte, peuvent être faites au domicile convenu. Wegman soutenait, au contraire, que l'art. 443 du Code de procédure établit comme règle générale, que le délai de l'appel ne commence à courir que du jour de la signification du jugement à personne ou domicile; que cette règle embrassant tous les cas, il ne peut y être admis d'exception qu'en vertu d'une loi formelle; qu'il n'y est aucunement dérogé par l'art. 422, puisqu'en autorisant à signifier le jugement au domicile élu, ou, à défaut d'élection, au greffe du tribunal, il n'ajoute point que cette signification fera courir le délai de l'appel d'où il suit qu'il n'a pour objet que l'instruction de la procédure et l'exécution du jugement; que l'art. 111 n'y déroge pas davantage, puisqu'il est uniquement relatif au domicile conventionnel.

L'arrêt avait jugé que de la combinaison des articles 111 du Code civil, 422 et 443 du Code de procédure, il résulte qu'il suffit que le jugement ait été signifié au domicile élu devant le tribunal de commerce pour faire courir le délai

Ouï le rapport de M. le conseiller Cassaigne, et les conclusions de M. l'avocat-général Joubert; Vu l'article 443 du Code de procédure;

[ocr errors]

« Attendu que, suivant cet article, le délai de l'appel ne commence à courir que du jour de la signification du jugement à personne ou domicile; Que cette règle étant générale, il n'est permis n'est établie par une loi expresse; aux juges d'admettre aucune exception, si elle

«

[ocr errors]

nature de l'art. 422 du même Code, pour le cas Qu'il ne résulte aucune exception de cette de domicile d'élection prévu par cet article, puisqu'en disposant que si les parties comparaissent, et qu'à la première audience il n'intervienne pas de jugement définitif, les parties non domiciliées dans le lieu où siége le tribunal seront tenues d'y faire élection d'un domicile; que l'élection de domicile sera mentionnée sur le plumitif de l'audience, et qu'à défaut de cette élection, toute signification, même celle du jugement définitif, sera faite valablement au greffe du tribunal, cet article n'ajoute point que le délai de l'appel courra du jour de cette signification;

[ocr errors]

Qu'il ne résulte non plus aucune exception à la disposition générale de la loi, dans l'espèce de l'art. 111 du Code civil, puisque cet article n'a pour objet que le domicile conventionnel, et ne peut être étendu au domicile judiciaire, qui a ses bornes particulières et doit être restreint à son

cas;

« Que, par conséquent, en décidant que du rapprochement des trois articles ci-dessus cités, il résulte qu'il suffit de signifier le jugement au domicile élu devant le tribunal de commerce, pour faire courir le délai de l'appel, l'arrêt attaqué a expressément violé l'art. 443 du Code de procédure, et a en même temps commis un excès de pouvoir en créant une exception qu'aucune loi n'autorise :

[ocr errors]

la

La cour casse et annule l'arrêt rendu par
cour de Gênes le 16 novembre 1811.
« Fait et jugé.
Section civile. »
Mais il en est autrement de l'appel des juge-
ments rendus en matière d'ordre : il est valable-
ment notifié à domicile élu.

Voyez Ordre, § iv, n° 1.
Siv,

V. Lorsque l'exploit de signification d'un jugement est nul, il ne fait point courir le délai de l'appel. La cour de cassation, section civile, l'a ainsi jugé par arrêt du 5 août 1807. Dans l'espèce jugée par cet arrêt, la copie de l'exploit de signification portait une date antérieure de plusieurs

« PreviousContinue »