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par arrêt du 11mai 1810, au rapport de M. Ver-au directeur général des contributions indirectes gés. (Bulletin criminel, p. 127.)

SECTION III.

Des abonnements pour la perception des octrois.

I. L'arrêté du 4 thermidor an x autorisait les communes à établir des droits d'octroi par abon

nement.

L'article premier de l'ordonnance royale du 3 juin 1818 leur a retiré cette faculté, comme contraire au texte de la loi du 28 avril 1816, art. 147. L'administration des contributions indirectes a reconnu et admis en principe, que les traités autorisés entre elle et les communes ne peuvent avoir pour objet le produit de l'impot, mais seule ment les frais de perception tels qu'ils sont établis dans l'art. 95 de l'ordonnance royale du 9 décembre 1814.

Mais cette défense ne s'étend pas aux abonnements consentis avec des bouchers, ou avec quelque autre classe de contribuables: ceux-ci sont considérés comme des fermes partielles. Il est seulement à remarquer qu'un abonnement consenti avec la clause qu'il ne pourra s'établir dans la commune d'autres individus exerçant la même profession, ne peut être approuvé, attendu qu'il constituerait un véritable privilége exclusif.

qui prononce définitivement. Les maires conservent le droit de surveillance sur les préposés, et celui de transiger sur les contraventions dans les cas déterminés par l'ordonnance du 9 décembre 1814.

IV. Les traités conclus avec les communes subsistent de plein droit, jusqu'à ce que la commune ou la Régie en ait notifié la cessation. Cette notification doit toujours avoir lieu de part ou d'autre six mois au moins à l'avance. Les receveurs versent le montant de leurs recettes pour le compte de l'octroi, dans la caisse municipale, aux époques déterminées, sous la déduction des frais de perception convenus par le traité, et dont ils comptent comme de leurs autres recettes pour le trésor. (Ordonnance royale du 9 décembre 1814, art. 94, 95, 96 et 97.)

ABORDAGE. On appelle ainsi le contact de deux navires qui se heurtent.

I. Le choc entraîne des dommages plus ou moins considérables, selon qu'il est plus ou moins violent. Pour savoir par qui et comment ces dommages sont supportés, il faut distinguer trois cas: 1° le choc est un pur accident; 2° ou il provient de la faute de l'un des capitaines; 3° ou il n'est pas possible d'en connaître la cause.

II. Nous venons de dire que les communes Si l'abordage est purement fortuit, le dommage. peuvent traiter de gré à gré avec la Régie des con- qui en résulte est supporté par celui des navires tributions indirectes pour la perception de leurs qui l'a éprouvé ainsi le voulait la loi 29, § Iv, octrois. Ces abonnements ne sont définitifs qu'a- ff. ad legem Aquiliam portant: Si tanta vis navi près l'approbation du ministre des finances. (Ar-facta sit, quæ temperari non potuit, nullam in ticle 158 de la loi du 28 avril 1816.)

Les communes qui jugentà propos de traiter ainsi doivent adresser, par l'intermédiaire du sous-préfet, leurs propositions au préfet ; celui-ci les communique au directeur des contributions indirectes pour donner ses observations, et les soumettre ensuite avec son avis au directeur général de ladite administration qui propose, s'il y a lieu, au ministre des finances de les approuver.

III. Les conventions à faire entre les communes et la Régie ne portent que sur les traitements fixes ou éventuels des préposés : tous les autres frais généralement quelconques sont intégralement acquittés par les communes sur les produits bruts de l'octroi. La conséquence de ces conventions est de remettre la perception et le service entre les mains des employés ordinaires des contributions indirectes. Cependant, dans les villes où il est nécessaire de conserver des préposés affectés spécialement au service de l'octroi, ces préposés sont nommés par le préfet, après avoir pris l'avis du directeur des contributions indirectes; leur nombre et leur traitement sont fixés par cette Régie. Ils sont révocables, soit sur la demande du maire, soit sur celle du directeur. Lorsque le préfet ne juge pas convenable de déférer à la demande de ce dernier, il fait connaître ses motifs

dominum dandam actionem; ainsi le veut l'art. 407 du Code de commerce. Cela est conforme au principe que nul n'est responsable des événements de force majeure.

Il faut remarquer que c'est par le navire seul que le dommage est supporté; et cela, comme le dit l'art. 407, sans aucune répétition. Il suit de là que le chargement n'y contribue point.

L'art. 350 met l'abordage fortuit au nombre des risques qui sont à la charge des assureurs : ceux-ci, par conséquent, sont tenus d'indemniser les assurés des pertes et détériorations occasionées par cet accident.

II. Lorsque l'abordage a lieu par la faute de l'un des capitaines, alors, d'après la maxime que celui qui, par son fait, cause du préjudice à autrui est tenu de le réparer, le dommage est à la charge du capitaine qui l'a causé. Telle est encore la décision de l'art. 407. C'était aussi celle de la loi romaine que nous venons de citer : Si navis tua, y est-t-il dit, impacta in meam scapham, damnum mihi dedit, quæsitum est, quæ actio mihi competeret? Et ait Proculus, Si in potestate nautarum fuit, ne id accideret, et culpá eorum factum sit, lege Aquilia cum nautis agendum. (§ 2.)

L'estimation du dommage à réparer par le ca

pitaine, dans cette espèce d'abordage, doit, comme en entier le dommage qu'il cause à celui qui, le prescrit l'art. 407, être faite par experts. étant à la cape, ne peut se mettre à l'écart. L'art. 350 ne met aux risques des assureurs 6° Celui qui dans le port ne garde pas la disque l'abordage fortuit, et très-évidemment il extance prescrite, ou qui se place mal, doit payer clut celui qui arriverait par la faute du capi-le dommage qu'il cause. taine de l'un des navires. Cependant, comme l'art. 353 permet de mettre à la charge des assureurs ce qu'on appelle baraterie de patron, si le contrat d'assurance renfermait cette stipulation, il n'y a point de doute que les assureurs ne fussent tenus des suites de l'abordage arrivé par la faute du capitaine du navire assuré.

Mais il n'est pas toujours facile de reconnaître si l'abordage est le résultat d'une faute de l'un des capitaines, ou s'il est l'effet d'un accident; il ne l'est même pas de discerner quel est celui des capitaines qui est en faute.

C'est un point qui ne peut qu'être abandonné à l'appréciation et aux lumières des juges.

Émérigon, dans son Traité des assurances, pose quelques règles qui peuvent faciliter la solution de la difficulté, et que, pour cette raison, il nous paraît utile de retracer.

7° << Ne pourront les mariniers amarrer leurs vaisseaux qu'aux anneaux et lieux destinés à cet effet, à peine d'amende arbitraire. » (Ordonn. de 1681, titre des ports, art. 3.) Ainsi quiconque, par un amarrage contraire à cette disposition, embarrasse le passage, est responsable des suites de l'abordage qui peut arriver. Emérigon rapporte une sentence de l'amirauté de Marseille, du 6 octobre 1757, confirmée par arrêt du parlement d'Aix, du 31 juin 1758, qui a jugé en ce sens.

III. Enfin, quand il est impossible de discerner la cause de l'abordage, l'art. 407 du Code de commerce dispose que le dommage est réparé à frais communs, et par égale portion, par le navire qui l'a fait et par celui qui l'a souffert. La quotité des dommages est fixée par experts, comme dans le cas où l'abordage provient de la faute de l'un des capi

taines.

action peut facilement se perdre, si celui à qui elle appartient ne remplit pas avec célérité les formalités prescrites pour la conserver. L'art. 435 du Code de commerce la déclare non-recevable, si le capitaine, pouvant agir dans le lieu de l'abordage, n'a point fait de réclamation; si cette réclamation n'a point été, comme le prescrit l'art. 436, faite et signifiée dans les vingt-quatre heures; et si, dans le délai d'un mois, à partir de sa date, elle n'a été suivie d'une demande en justice. Ces trois conditions sont corrélatives, et l'absence d'une seule éteindrait toute action.

1o Lorsque deux vaisseaux se présentent pour IV. De l'obligation de payer le dommage résulentrer dans un port de difficile accès, le plus tant de l'abordage, dérive nécessairement une éloigné doit attendre que le plus proche ait dé-action pour en exiger le paiement. Mais cette filé, et que le passage soit devenu libre. S'ils abordent, le dommage sera imputé au dernier venu, à moins que celui-ci ne prouve qu'il n'y a aucune faute de sa part. Ainsi jugé par l'ainirauté de Marseille, le 17 juillet 1754, en faveur de David Julliard, commandant le vaisseau l'Espérance, et de Guillaume Caillot, commandant le vaisseau le Saint-Jean, contre Fugeroy de Coudray, capitaine du navire la Louise de Granville. Celui-ci, arrivé le dernier, au lieu d'attendre que les vaisseaux qui étaient avant lui à l'entrée du port, et qui se touaient, fussent entrés, tomba sur Julliard et Caillot, envers lesquels il fut condamné à tous les dommages-intérêts et aux dépens.

2o Le vaisseau qui sort du port doit faire place à celui qui y entre.

3o Celui qui sort du port le dernier, doit prendre garde au navire qni est sorti avant lui. A l'appui de cette règle, l'auteur du Traité des assurances cite deux sentences de l'amirauté de Marseille, des 22 mars et 7 décembre 1751.

4°. Quand un vaisseau en rade voudra faire voile pendaut la nuit, le maître sera tenu, dès le jour précédent, de se mettre en lieu propre pour sortir sans aborder ou faire dommage à aucun de ceux qui seront en même rade, à peine de tous dépens, dommages-intérêts et d'amende arbitraire. » C'est la disposition de l'art. 5, titre des rades, de l'Ordonnance de la marine. Ainsi celui qui aborderait, faute d'avoir pris les précautions prescrites, paierait le dommage causé par l'abordage.

5o Le vaisseau qui court à voile déployée doit

Tome I.

Le Code de commerce accorde à cet égard plus de latitude que l'Ordonnance de la marine du mois d'août 1681, qni voulait, à peine de déchéance, que l'action judiciaire fût intentée dans les vingt-quatre heures du dommage reçu. Ainsi on ne jugerait pas aujourd'hui comme jugea le parlement de Paris, lorsque, par son arrêt du 19 août 1777, il déclara déchu, en se conformant au texte de l'ordonnance, le capitaine du vaisseau la Marie-Louise, qui, heurté violemment par le navire le Jeune Tobie, avait bien fait sa réclamation dans le délai de vingt-quatre heures, mais qui n'avait formé de demande en justice que huit jours après cette réclamation.

La déchéance prononcée par les art. 435 et 436 du Code de commerce étant une prescription, c'est en vertu de la maxime contra non volentem agere non currit prescriptio, que le premier de ces articles n'exige la réclamation du capitaine dans les vingt-quatre heures de l'abordage que lorsque l'évènement arrive dans un lieu où il est possible d'agir. Il suit de là que, si l'a

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bordage a lieu en pleine mer, ou dans tout autre endroit dans lequel le capitaine se trouve dans l'impuissance d'agir, le délai de vingt-quatre heures ne court que de l'arrivée dans un lieu où le capitaine ait la faculté d'agir.

dans un

La loi ne faisant point de distinction entre le cas où le navire périt entièrement et celui où il n'est détruit qu'en partie, la déchéance a lieu cas comme dans l'autre. C'est d'ailleurs ainsi que l'a jugé la cour de cassation dans une espèce régie par l'Ordonnance de 1681, qui, sous ce rapport, ne différait point du nouveau code. Son arrêt est du 5 messidor an xiii.

II. Si les présumés absents sont intéressés dans des inventaires, comptes, partages et liquidations, le tribunal, à la requête de la partie la plus diligente, commettra un notaire pour les représenter (Code civ., art. 113). Il est clair que ce notaire, constitué le mandataire légal des présumés absents, ne pourra point instrumenter dans ces opérations. L'art. 7 de la loi du 6 octobre 1791 contenait, à cet égard, une disposition expresse, et le mot représenter, employé par les rédacteurs du Code civil, annonce assez qu'ils n'ont pas entendu adopter un principe différent.

ABSENCE. Dans le langage de la loi, on appelle absent celui qui a cessé de paraître au lieu de son domicile ou de sa résidence, dont on n'a point de nouvelles, et qui a été déclaré tel par un jurisconsultes. Mais il nous semble que, les mesures gement.

Le Code se sert de l'expression générique parties intéressées, pour désigner les personnes qui peuvent demander qu'il soit pourvu à l'administration des biens des présumés absents. Ces mots ont été interprétés diversement par plusieurs juordonnées dans l'intérêt des absents présumés Ainsi, il ne faut pas confondre l'éloignement n'étant que des actes conservatoires, on doit comou la simple non-présence, avec l'absence pro- prendre parmi les parties intéressées toutes les prement dite; ce sont deux choses bien dif-personnes qui ont un intérêt réel à la conservaférentes. tion des biens des présumés absents, telles que les créanciers, les héritiers présomptifs, l'époux présent.

Pour exposer avec clarté les principes de notre législation sur l'absence, nous les distribuerons en cinq sections:

Dans la première, nous traiterons de la présomption d'absence;

Dans la deuxième, de la déclaration d'absence; Dans la troisième, des effets de l'absence; Dans la quatrième, de la surveillance des enfants mineurs dont le père ou la mère a disparu; Dans la cinquième, de l'absence des militaires.

secours;

SECTION Ire

De la présomption d'absence.

I. Lorsqu'une personne a quitté son domicile et sa résidence, et qu'on n'a point de ses nouvelles, on la présume absente. Si elle a chargé un fondé de pouvoir du soin de gérer ses affaires et d'administrer ses biens, la loi ne doit point venir à son mais si l'absent n'a point laissé de mandataire, si le mandat qu'il a donné est insuffisant, ou s'il vient à cesser, et qu'il y ait nécessité de pourvoir à l'administration de tout ou partie de ses biens, le Code civil veut qu'il y soit statué par le tribunal de première instance, sur la demande des parties intéressées (art. 112). Il doit être, à cet effet, présenté au président du tribunal une requête à laquelle soient joints les pièces et documents. Le président commet un juge pour faire le rapport à jour indiqué; les pièces sont communiquées au procureur du roi, qui met ses conclusions au pied de l'ordonnance; et, sur le rapport du juge commis, le tribunal statue en la chambre du conseil. (Code civ., art. 114; Code de proc., art. 83 et 849.)

III. A quel tribunal doivent s'adresser les parties intéressées? Est-ce à celui du domicile du présumé absent? est-ce à celui de la situation des biens?

Avant de pourvoir à l'administration des biens, il faut, comme le remarquait M. Tronchet lors de la discussion au Conseil d'état, juger le fait de la prévention d'absence; or, il ne peut l'être bien que là où l'individu est connu, c'est-à-dire, au lieu de son domicile. Ce n'est pas au lieu de la situation des biens, disait ce savant jurisconsulte, dans lequel il n'a jamais paru, qu'on peut décider s'il doit être réputé absent. Il serait scandaleux d'exposer un citoyen qui n'aurait pas quitté sa demeure, à voir ses biens séquestrés dans un autre département.

D'après cette observation, M. Regnier proposa de décider que la prévention d'absence serait déclarée par le tribunal du domicile, et que, d'après ce jugement, chaque tribunal devrait pourvoir à l'administration des biens situés dans son ressort.

Cette opinion à laquelle M. Tronchet se rendit, fut adoptée par le Conseil d'état; elle est conforme aux principes et à la justice.

SECTION II.

De la déclaration d'absence.

I. Lorsqu'une personne qui n'a point laissé de fondé de pouvoir, a cessé de paraître au lieu de son domicile ou de sa résidence, et que depuis quatre ans on n'en a point eu de nouvelles, les parties intéressées peuvent se pourvoir devant le tribunal de première instance, afin que l'absence soit dé

clarée (Code civ., art. 115). Mais si elle a eu le soin de constituer, avant son départ, un fondé de procuration, cette prévoyance fait présumer qu'elle a eu l'intention de s'absenter pour un temps plus long, et, alors, les parties intéressées ne peuvent se pourvoir en déclaration d'absence qu'après dix années révolues depuis sa disparition ou ses dernières nouvelles (121 ibid.). Il en sera de même şi la procuration vient à cesser, parce que la même présomption existe toujours. (122 ibid.)

Les mots parties intéressées n'ont pas ici le même sens que dans l'article 112. La déclaration d'absence devant conduire à l'envoi en possession des biens de l'absent, il est clair que ceux-là seuls sont admis à la provoquer, qui peuvent obtenir l'envoi en possession dont nous parlerons dans la

section suivante.

Le tribunal auquel on doit s'adresser est évidemment celui du domicile de l'absent présumé, ou, s'il n'a pas de domicile, celui de sa résidence; comme nous l'avons déja dit, c'est lui qui est le plus à même d'avoir des renseignements sur sa personne et sur son existence.

car,

II. Pour constater l'absence, le tribunal saisi de la demande ordonne, d'après les pièces et documents produits, qu'une enquête sera faite contradictoirement avec le procureur du roi dans l'arrondissement du domicile, et dans celui de la résidence, s'ils sont distincts l'un de l'autre (Cod. civ., art. 116). Le tribunal du domicile est le seul qui doive ordonner les enquêtes. Si donc le domicile et la résidence ne sont pas situés dans le ressort du même tribunal, l'enquête sera faite devant le tribunal du lieu de la résidence, en exécution du jugement du tribunal du domicile, et en vertn d'une commission rogatoire. C'est ce qui résulte de la discussion qui a eu lieu au conseil

d'état.

En statuant sur la demande des parties intéressées, le tribunal n'ordonne pas de plein droit les enquêtes: il apprécie d'abord les pièces, les documents produits et les preuves alléguées pour établir l'absence; il a égard aux motifs de l'éloignement, aux causes qui peuvent empêcher de recevoir des nouvelles du présumé absent (Code civ., art. 116 et 117); et après avoir pesé toutes ces considérations, il rejette la demande ou ordonne les enquêtes, suivant les circonstances.

III. Aussitôt que le jugement est rendu, il doit être transmis par le procureur du roi à M. le garde-des-sceaux, ministre secrétaire d'état de la justice, chargé de le rendre public. (Code civ., art. 118.)

SECTION III.

Des effets de l'absence.

La déclaration d'absence change l'ordre des choses. Jusqu'ici, l'absent a été présumé vivant; actuellement sa vie et sa mort deviennent également incertaines. Ce principe, qu'il ne faut pas perdre de vue si l'on veut bien connaître les conséquences qui résultent de l'état d'absent, a été développé avec beaucoup de clarté par M. Bigot-Préameneu, dans l'exposé des motifs du titre des absents. « On est parti, a-t-il dit, d'idées simples et qui ne puissent pas être contestées. Lorsqu'un long temps ne s'est pas encore écoulé depuis que l'individu s'est éloigné de son domicile, la présomption de mort ne peut résulter de son absence; il doit être regardé comme vivant. Mais si pendant un certain nombre d'années on n'a point de ses nouvelles, on considère alors que les rapports de famille, d'amitié, d'affaires, sont tellement dans le cœur et l'habitude des hommes, que leur interruption absolue doit avoir des causes extraordinaires, causes parmi lesquelles se place le tribut même rendu à la nature. Alors s'élèvent deux présomptions contraires : l'une, de la mort par le défaut de nouvelles ; l'autre, de la vie par son cours ordinaire. La conséquence juste de deux présomptions contraires est l'état d'incertitude. Les années qui s'écoulent ensuite rendent plus forte la présomption de la mort; mais il n'est pas moins vrai qu'elle est toujours plus ou moins balancée par la présomption de la vie; et si, à l'expiration de certaines périodes, il est nécessaire de prendre des mesures nouvelles, elles doivent être calculées d'après les différents degrés d'incertitude, et non pas exclusivement par l'une ou l'autre des présomptions de vie ou de mort. » Telle est la boussole qui a guidé le législateur, telle est celle qui doit aussi diriger le magistrat et le jurisconsulte interprètes de la loi.

Les effets de l'absence s'étendent aux biens de l'absent, aux droits éventuels qui peuvent lui compéter, et à son mariage. De là une subdivision de cette section en trois paragraphes.

S I.

Des effets de l'absence relativement aux biens que l'absent possédait au jour de sa disparition.

I. Lorsque l'absence est déclarée, l'incertitude sur la vie et le retour de l'absent exige que ses biens soient soumis à un nouveau mode d'administraSi, d'après cette publicité, le présumé absent tion. La loi, toujours occupée du soin de défendre ne donne point de ses nouvelles dans le délai d'un ses intérêts, n'a cru pouvoir lui choisir de manan, à compter du jugement qui a ordonné l'en-dataires, de dépositaires plus propres à inspirer quête ou les enquêtes, le jugement définitif de déclaration d'absence sera prononcé (119 ibid.), et il sera, comme le premier, adressé au ministre de la justice, et rendu public. (118 ibid.)

la confiance, que ceux qui sont appelés à recueillir un jour sa succession. De tels mandataires sont en effet intéressés eux-mêmes à apporter tous leurs soins à gérer un patrimoine qui doit devenir le

leur. En conséquence, les héritiers présomptifs | l'époux présent, dont le titre seul doit inspirer de l'absent au jour de sa disparition ou de ses d'ailleurs autant de confiance que celui d'héritier dernières nouvelles, peuvent, en vertu du juge- présomptif. ment définitif qui a prononcé la déclaration d'absence, se faire envoyer en possession provisoire des biens qui lui appartenaient au jour de son départ ou de ses dernières nouvelles; mais, comme ils ne sont que dépositaires, et, comme tels, soumis à une reddition de compte et à une restitution, ils doivent donner caution pour sûreté de leur administration. (Code civ., art. 120.)

II. Leur demande, à cet égard, doit être formée par une requête présentée au président du tribunal qui a déclaré l'absence; ils y joignent les pièces et documents ainsi que le jugement de dé claration : le président commet un juge pour faire le rapport au jour indiqué, et le tribunal prononce après avoir entendu le procureur du roi. (Code de proc., art. 859 et 860.)

L'envoi en possession étant une conséquence naturelle de la déclaration d'absence, les héritiers présomptifs peuvent même demander tout à la fois l'une et l'autre, et le tribunal peut statuer sur le tout par un seul et même jugement. (Arrêt de la cour de cassation, du 17 novembre 1808. Voy. Denevers, tom. 6, p. 532; ou Sirey, tom. 9, p. 104.)

III. Les héritiers se présentent, pour obtenir l'envoi provisoire, dans l'ordre établi au titre des successions. Ainsi, si l'époux absent n'a point laissé de parents habiles à lui succéder, l'autre époux pourra demander l'envoi en possession (Code. civ., art. 140 et 767); mais s'il existe des enfants naturels reconnus, nous croyons que, d'après les principes établis par l'art. 767 précité, ils doivent être préférés à l'époux présent.

IV. Lorsque l'envoi en possession provisoire est prononcé, le testament, s'il en existe un, est ouvert à la réquisition des parties intéressées, ou du procureur du roi, et les légataires, les donataires, ainsi que tous ceux qui avaient sur les biens de l'absent des droits subordonnés à la condition de son décès, peuvent les exercer provisoirement, à la charge de donner caution. (Art. 123.)

La disposition de cet article a été dictée par le même motif que celle qui prononce l'envoi en possession provisoire en faveur des héritiers présomptifs les légataires, les donataires, et en général tous ceux dont les droits ne devaient s'ouvrir qu'au décès de l'absent, sont admis à les exercer provisoirement, parce qu'il s'agit, pour eux, d'administrer des biens qui doivent devenir les leurs. V. Il est cependant un cas où toutes les personnes que nous venons de désigner'ne doivent pas obtenir la préférence; c'est lorsque l'absent est marié sous le régime de la communauté, et que son conjoint est présent. La communauté conjugale est un contrat de société qui s'est formé avec le mariage, un contrat synallagmatique, qui ne peut être rompu contre la volonté et au préjudice de

Cet époux présent aura donc la faculté d'opter pour la continuation de la communauté, ou pour sa dissolution provisoire; s'il opte pour la continuation de la communauté, il pourra empêcher l'envoi en possession provisoire et l'exercice provisoire de tous les droits subordonnés à la condition du décès de l'absent, et prendre ou conserver par préférence l'administration des biens de l'absent; si au contraire il demande la dissolution provisoire de la communauté, il exercera ses reprises et tous ses droits légaux et conventionnels, à la charge de donner caution pour les choses susceptibles de restitution. (Art. 124.)

Il faut remarquer ici que l'obligation de donner caution ne s'applique qu'à la seconde partie de cet article, c'est-à-dire, en cas de dissolution provisoire de la communauté, et relativement à l'exercice des reprises matrimoniales et des droits légaux et conventionnels. Ainsi, dans le premier cas, c'est-à-dire lorsque l'époux opte pour la continuation de la communauté, il n'y a aucune caution à donner, soit que l'administration légale demeure au mari présent, soit que, si c'est lui qui est absent, elle passe dans les mains de sa femme, encore bien qu'alors cette administration embrasse, comme l'article le dit assez clairement, non-seulement les biens communs, mais encore ceux qui sont propres à l'époux absent, et qu'elle exclue les héritiers présomptifs, les légataires, les donataires, etc. de la possession provisoire des uns et des autres.

En thèse générale, la femme qui a une fois accepté la communauté ne peut plus y renoncer (Čode civ., art. 1454 et 1455); mais, en matière d'absence, il ne doit pas en être ainsi à l'égard de celle qui opte pour la continuation de la communauté; une mesure adoptée dans son intérêt ne peut point lui être préjudiciable. Ainsi elle conservera le droit de renoncer, même après son option. (Code civ., art. 124.)

VI. La possession provisoire n'est, ainsi que nous l'avons dit, qu'un dépôt qui donne à ceux qui l'obtiennent l'administration des biens de l'absent, et qui les rend comptables envers lui, en cas qu'il reparaisse ou qu'on ait de ses nouvelles. (Art. 125).

En conséquence, ceux qui auront obtenu l'envoi provisoire (et l'on entend par là les héritiers présomptifs, les légataires, les donataires, etc.), ou l'époux qui aura opté pour la continuation de la communauté, devront faire procéder à l'inventaire du mobilier et des titres de l'absent. Cet inventaire sera fait en présence du procureur du roi près le tribunal de première instance, ou d'un juge de paix par lui requis. Le tribunal ordonnera, s'il y a lieu, de vendre tout ou partie du mobilier, et, dans le cas de vente, il sera fait emploi du prix, ainsi que des fruits échus. (Art. 126.)

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