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ou non,

mieux que de rapporter ses propres paroles. « La raison de douter, dit-il, était qu'il n'y a proprement de guerre ni même d'hostilités proprement dites, que lorsqu'elles ont été précédées d'une déclara tion solennelle de guerre: sans cela ce sont pures violences et voies de fait; ce sont pirateries, dont les assureurs sont toujours garants: Hostes sunt quibus bellum publicè populus romanus decrevit, vel ipsi populo romano; L. 24, ff de capt. et postlim. La raison de décider que le cas de ces hostilités devait être censé renfermé dans ces clauses (en cas de guerre, en cas de déclaration de guerre), est que la déclaration de guerre est requise, à la vérité, pour rendre les hostilités légitimes selon le droit des gens; mais qu'elles aient été légitimes précédées, ou non, d'une déclaration de guerre, elles n'en étaient pas moins, dans le fait, des hostilités. Or le cas qu'ont eu en vue les contractants, dans la clause d'augmentation de prime, en cas de guerre, est le seul fait d'hostilités qui se commettent en guerre, et non leur légitimité, étant chose fort indifférente par rapport au contrat d'assurance, que ces hostilités se commettent d'une façon régulière ou irrégulière. Ces hostilités sont, dans l'intention des contractants, un commencement de guerre; et, par conséquent sont renfermées dans la clause en cas de guerre. Elles le sont même dans la clause en cas de déclaration de guerre; car, ces hostilités sont, dans le fait, une déclaration de guerre, et celles que les parties contractantes avaient en vue. » Le même auteur ajoute que la question a été résolue en ce sens par une foule d'arrêts et notamment par un arrêt de la première chambre des enquêtes, confirmatif d'une sentence de l'amirauté du Palais, du 16 mars 1761, rendue au profit de la première chambre des assurances de Paris.

Ces principes, consacrés sous l'empire de l'ordonnance de 1681, ont la même autorité sous le Code de commerce, et si la question dont nous parlons se représentait, il n'y a pas de doute qu'elle ne dût recevoir la meme solution.

qu'en 1756. Le sieur Des-Aunois fut condamné à payer la prime de vingt-cinq pour cent. « On a jugé, dit Pothier, n° 85, que même dans ce cas la clause d'augmentation de prime en cas de décla ration de guerre, ne devait pas être entendue du cas d'une solennelle déclaration, qui est une chose indifférente aux parties contractantes; mais du cas de la continuation des hostilités. Ce cas était un cas futur et incertain, qui a pu être l'objet de la clause; parce que, au temps de la police, on pouvait encore espérer que les puissances s'arrangeraient, et que les hostilités ne continueraient pas.

Si la même question se représentait sous le droit nouveau, elle serait infailliblement décidée dans le même sens. C'est pourquoi nous insistons sur l'autorité de l'ancienne doctrine.

IV. C'est ici le lieu de rapporter une contestation, née de la déclaration de guerre qui a eu lieu au mois de floréal an x1, entre la France et l'Angleterre, et soumise à la cour de cassation. Cette contestation présentait à juger la question suivante :

L'augmentation de prime stipulée pour le cas de guerre est-elle due par le seul fait de la déclaration de guerre pendant le voyage, lors même que le navire est arrivé au lieu de sa destination, avant que la déclaration ait pu y être connue?

Le 9 pluviose an x1, les armateurs du navire la Côte-d'Or firent faire des assurances à Bordeaux pour le voyage de ce navire de Brest à Pondichery et Chandernagor.

La prime fut fixée à quatre et un quart pour cent pour les risques de mer; et quoique l'on fût en pleine paix, on stipula une seconde prime pour le cas possible de guerre pendant la navigation, ainsi que cela est d'usage dans les polices d'assurances depuis la guerre de 1756.

Cette seconde prime fut de vingt-cinq pour cent dans le cas de guerre entre la France et quelque puissance maritime pendant la durée des risques.

Le navire assuré partit de Brest le 15 ventose an x1, arriva au Cap de Bonne-Espérance le 1er prairial suivant, et le 24 messidor à Pondichery, un des lieux de sa destination; mais au lieu de se rendre de Pondichery à Chandernagor, sa dernière destination, il rétrograda de Pondichery à l'Ile-de-France, où il arriva le 3 fructidor.

III. Les mêmes circonstances qui ont précédé la déclaration de guerre du 8 juin 1756 ont fait naître une autre question, celle de savoir si, lorsque la police n'a été faite que depuis le commencement des hostilités, leur seule continuation donne également lieu à l'augmentation de prime stipulée pour le cas de déclaration de guerre. Le 27 floréal précédent avait été l'époque de l'exL'affirmative a été jugée par arrêt de la grand'- pédition des lettres de marque en Angleterre, c'estchambre, du 9 août 1756, rendu au profit de la à-dire, de la déclaration de guerre avec la France. deuxième compagnie d'assurance de Paris, contre A l'expiration du terme assigné au paiement le sieur Des-Aunois, négociant à Dunkerque. La des primes, les assureurs prétendirent qu'ils police avait été signée le 23 juillet 1755, par con- avaient droit aux deux primes, d'après la police séquent depuis les hostilités commencées. Elle d'assurance. Les assurés soutinrent au contraire contenait la stipulation d'une prime de quatre que, d'après cette même police, ils ne devaient pour cent, et celle d'une autre prime de vingt-que la prime de quatre et un quart pour cent pour cinq pour cent, en cas de déclaration de guerre. les simples risques de mer. Le vaisseau assuré fut pris le 18 septembre 1755, bien avant la déclaration de guerre qui n'eut lieu

Jugement du tribunal de commerce de Bordeaux, du 5 germinal an XII, rendu au profit de

venue en cas de

par corps.

quelques-uns des assureurs, qui condamne les as- | sulte de l'absence du risque effectif, l'absence du surés à payer l'augmentation de la prime con- risque possible. avec contrainte guerre, La demande des autres assureurs fut renvoyée à des arbitres, qui rendirent le 5 fructidor suivant un jugement arbitral, lequel:

«Condamne les assurés à payer aux assureurs l'augmentation de la prime convenue, avec contrainte par corps.»

Sur l'appel, arrêt confirmatif de la cour d'appel de Bordeaux, du 26 mars 1806.

Pourvoi en cassation, pour contravention aux principes en matière d'assurance, et par suite, violation du contrat du 9 pluviose an x1.

Voici le raisonnement qu'on faisait valoir pour le demandeur en cassation.

Il est, disait-on, de l'essence du contrat d'assurance, que la prime convenue soit l'équivalent du risque; prime et risque sont deux corrélatifs qui ne peuvent subsister l'un sans l'autre ; ôtez le risque, il ne peut plus y avoir de contrat d'assurance, et par conséquent il ne peut plus y avoir de prime.

A l'appui de ce principe, que la prime est le prix du risque, et que là où il n'y a pas de risque, il ne saurait y avoir de prime, on invoquait l'autorité des divers auteurs qui ont traité la matière, notamment celle d'Émérigon, de Valin, et en particulier du réglement de la chambre de commerce de Bordeaux, qui, en établissant les principes sur les assurances, dit page 28:

« Il ne faut pas faire participer l'assurance de la gageure; car où l'assuré n'a pas de risques à courir, il n'y a plus d'assurance à recevoir pour l'assureur.»

Or, continuait-on, par le contrat du 9 pluviose an xr, on n'a nullement dérogé aux principes. qui sont de l'essence des contrats d'assurance.

« Considérant, que le 9 pluviose an x1, les assurances ont été faites sur pacotille et corps du navire la Côte-d'Or, pour, de Brest, aller à Pondichéry et Chandernagor, à raison de quatre et un quart pour cent de prime; que, par les mêmes contrats, il a été convenu d'une augmentation de prime, de vingt-cinq pour cent, en cas de guerre entre la France et quelque puissance maritime, et que le cas prévu est arrivé; que de l'aveu des assurés, le navire la Côte-d'Or est parti de Brest le 15 ventose an x1; qu'il a relâché à Falsebay, le I prairial; qu'il en est sorti le 10 du même mois; qu'il est arrivé à Pondichery le 24 messidor; que sur l'avis secret du général Linois, confié au général Binot, le capitaine Dufresne coupa ses cables, la nuit, pour aller à l'Ile-de-France; que, le lendemain, il fut joint par une frégate anglaise, qui lui donna l'ordre de revenir au mouillage; qu'il y rentra, en effet, le 25 dudit mois; qu'après avoir pourvu aux réparations et aux approvisionnements nécessaires, il est reparti de Pondichéry le 4 thermidor, et qu'il est arrivé à l'Ile-de-France, où il a désarmé le 3 fructidor an x1; que la guerre s'étant déclarée le 27 floréal an x1, entre la France et l'Angleterre, toutes les circonstances ci-dessus détaillées démontrent évidemment que le navire la Côte-d'Or a navigué trois mois et six jours pendant la guerre; que les termes des deux contrats du 9 pluviose an xr devant être entendus dans leur propre sens, et le temps des risques étant réglé par la stipulation, les assureurs n'en ont été déchargés que le jour où l'entier déchargement dudit navire a été mis à terre à l'Ile-de- En stipulant deux primes, les parties y ont France, parce que ce n'est que forcément que le nécessairement attaché deux risques, par une suite capitaine Dufresne a abandonné les lieux de ris-même de la nature de toute prime, qui n'est que ques déterminés par le contrat, et que là où le l'équivalent d'un risque. déroutement est forcé, ces mêmes lieux se retrouvent aux yeux de la loi : que la clause de ces contrats doit être prise à la lettre, sans aucune extension, et qu'il est de principe que le seul fait de la guerre, avant l'arrivée du bâtiment à sa destination, décide du droit de faire valoir la stipulation de l'augmentation de prime : que dans l'hypothèse, il ne s'agit de prendre cette clause que dans le sens que les parties avaient entendu y attacher de part et d'autre, c'est-à-dire, considérer la déclaration de guerre et ses effets, comme événements incertains, qu'elle ajoutait à ceux qui devaient former la matière desdits contrats; que dès qu'il y a eu déclaration de guerre, longtemps avant l'arrivée du navire la Côte-d'Or à l'Ile-de-France, on ne peut pas dire que ce navire soit étranger au fait de la guerre; qu'il ne serait pas plus raisonnable de soutenir, qu'il ré

Les parties ont stipulé deux primes : l'une de quatre et un quart pour cent, pour les risques et fortunes de mer; l'autre de vingt-cinq pour cent, en cas de guerre.

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La prime stipulée pour les risques maritimes,' est due par le fait seul du voyage.

L'augmentation, au contraire, de cette prime, ne peut être due que dans le cas où le navire assuré aura pu courir des risques par le seul fait de la guerre: telle est la loi du contrat.

Maintenant, le navire la Côte-d'Or a-t-il été, a-t-il pu être exposé, pendant la navigation, à aucun des risques de la guerre ? La négative résulte des faits mêmes convenus au procès.

Il est convenu, en effet, que le navire assuré est arrivé à l'Ile-de-France le 3 fructidor an xr, et qu'il y a terminé son voyage.

Il est convenu, d'un autre côté, que le réglement de la chambre de commerce de Bordeaux, sur les primes dues en cas de guerre, a établi que la possibilité des risques de guerre, pour tous les navires venant de l'Europe à l'Ile-de-France,;

n'avait commencé que le 17 du même mois, c'està-dire, quatre jours après l'arrivée du navire la Côte-d'Or à sa déstination.

Il est donc bien sensible que la prime convenue en cas de guerre, n'était pas due aux assureurs, puisqu'ils n'avaient couru ni pu courir aucuns risques par l'effet de cette guerre, dont la nonvelle n'avait pu parvenir au lieu de la destination du navire assuré, qu'après que ce navire y était déja lui-même arrivé.

Vainement le jugement arbitral, confirmé par l'arrêt attaqué, prétend-il que le seul fait de la guerre, avant l'arrivée du navire à sa destination, décide du droit de faire valoir la stipulation de l'augmentation de prime; et que dès que le navire a navigué pendant la guerre, on ne peut pas dire qu'il soit étranger au fait de la guerre.

N'est-il pas encore sensible en effet que la navigation d'un navire, depuis la déclaration d'une guerre, mais avant que cette déclaration ait pu parvenir dans les parages où cette navigation avait eu lieu, rendait cette navigation parfaitement étrangère au fait et aux risques de cette guerre ? N'est-il pas sensible que la déclaration faite à Londres, le 27 floréal, ne fut, ce même jour, qu'une continuation de paix pour l'Inde, et qu'ainsi il y eut impossibilité physique, que la navigation qui eut lieu à cette époque dans l'Inde, fût exposée à aucun événement, à aucun risque résultant de la déclaration de guerre?

N'est-il pas sensible que cette impossibilité physique dura pendant tout l'intervalle de temps qui s'écoula entre la déclaration de guerre et la possibilité de la connaissance de cette déclaration dans l'Inde?

N'est-il pas, par conséquent, sensible que la navigation faite dans cet intervalle fut absolument étrangère, soit au fait de la guerre, soit aux risques qu'elle pouvait causer?

*

Le jugement arbitral et l'arrêt confirmatif reconnaissent aussi que ce n'est pas du simple fait de la guerre, mais de ses effets, que résulte le droit à l'augmentation de la prime; « Il faut considérer la déclaration de guerre et ses effets comme événements incertains, que la clause ajoutait à ceux qui devaient former la matière du

contrat.

Mais si les effets de la guerre n'ont pu atteindre le navire assuré pendant tout le cours de sa navigation, il faut en conclure (d'après l'arrêt même attaqué, qui interprète l'intention des parties), que l'événement incertain qui devait produire l'augmentation de la prime n'est pas arrivé, et que cette augmentation n'est pas due.

Quel était cet événement incertain? Les risques à courir par suite des effets de la guerre. Or, là où ces effets de la guerre n'ont pu exister, là n'ont pu avoir lieu non plus les risques de la navigation, et là aussi n'a pu se réaliser la condition à

laquelle était essentiellement attachée l'augmentation de prime.

Ainsi, l'arrêt attaqué ayant considéré que d'après l'intention des parties, la déclaration de guerre et ses effets étaient les événements incertains desquels devait dépendre l'augmentation de la prime, il aurait dû déclarer cette augmentation non due, puisque la déclaration de guerre avait eu lieu, sans que les effets de cette guerre eussent pu être ressentis par le navire assuré, pendant toute la durée de son voyage.

En décidant le contraire, l'arrêt a consacré la maxime aussi fausse qu'injuste, qu'il peut y avoir prime sans possibilité de risques, et il a ouvertement violé la loi du contrat qui, dans l'intention des parties, ne pouvait accorder et n'accordait effectivement une augmentation de prime que dans le cas où les effets de la guerre pourraient atteindre le navire assuré, c'est-à-dire, lui faire courir des risques avant qu'il fût arrivé à sa destination.

Tel a été le système présenté à la cour de cassation; mais il n'a pas été accueilli, et, par arrêt de la section des requêtes du 28 janvier 1807, le pourvoi a été rejeté en ces termes : «< Considérant qu'il a été reconnu en fait que la déclaration de guerre de la part du gouvernement anglais a eu lieu le 27 floréal an x1; que le navire la Côted'Or n'est arrivé à Pondichery que le 24 messidor, et à l'Ile-de-France que le 3 fructidor suivant; conséquemment qu'il a navigué trois mois et six jours pendant la guerre ;

« Considérant que la cour d'appel de Bordeaux, en appliquant à ces faits reconnus la clause de la police d'assurance, et en jugeant que la guerre à été déclarée pendant la durée des risques, n'a violé ni les lois maritimes, ni le contrat d'assurance; la cour rejette, etc.

»

V. Lors du retour imprévu de la paix de 1748, le roi, par deux arrêts du conseil, des 16 janvier de la même année, et 28 janvier 1749, ordonna une modération des primes stipulées dans les contrats d'assurance faits pendant la guerre. Ces arrêts du conseil, fondés sur la consideration de l'intérêt des assurés, comme la jurisprudence qui, à la guerre de 1756, augmenta les primes fixées pendant la paix, étaient évidemmeut une atteinte por

tée à des conventions antérieures. Aussi n'hésitons

nous point à répéter que, dans l'état actuel de notre législation, et dans les principes de notre gouvernement représentatif, la prime doit rester telle que l'ont fixée les parties, sans qu'elle puisse être modifiée par la survenance de la paix ou de la guerre, à moins que les contrats ne renferment des stipulations à cet égard, auquel cas il faut que ces stipulations soient respectées et suivies.

VI. La prime consiste ordinairement en une somme déterminée, ou en une somme proportionnelle au montant de l'assurance, c'est-à-dire à raison de tant pour cent. Mais rien n'empêcherait

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Des formes du contrat d'assurance.

I. La loi veut que le contrat d'assurance soit rédigé par écrit; l'art. 332 du Code de commerce l'exige en des termes aussi exprès que l'ancienne ordonnance de la marine. La formalité de l'écriture est-elle, pour ce contrat, une sorte de solennité sans laquelle il ne saurait y avoir de convention obligatoire ? ou bien n'est-elle prescrite que ad probationem, et l'assurance verbale pourraitelle être prouvée par l'aveu de la partie qui en nierait l'existence, ou par le serment décisoire? La preuve testimoniale serait-elle admissible, si le montant de l'assurance était moindre de 150 f., ou s'il y avait un commencement de preuve par

écrit ?

re

,

Emérigon, dans son Traité des assurances, chap. 2, sect. I' ne reconnaît aucune autre preuve de la convention que celle qui résulte de la police qui en a été rédigée. Il s'exprime là-dessus de la manière la plus positive; voici ses propres paroles : « Le contrat sera rédigé par écrit : l'ordonnance le veut ainsi. Cette dernière disposition est absolue. Elle établit un point de forme qui est de rigueur. Jusqu'à ce que la police soit signée, le contrat n'est point parfait. Il est permis aux parties de revenir sur leurs pas. L'écriture seule fixe et caractérise leur volonté. Requiritur ad existentiam instrumentum assecurationis, dit Kuricke. Je crois donc, d'après notre ordonnance, qu'on ne peut ni déférer le serment décisoire à celui qui dénie l'assurance verbale, ni le faire répondre cathégoriquement, ni moins encore admettre la preuve testimoniale, sous prétexte, soit de la modicité de la somme, soit d'un commencement de preuve par écrit.

Sur l'aveu et le serment des parties, Valin et Pothier sont d'une opinion contraire à celle d'Emérigon. Leur sentiment nous semble préférable. Il est difficile en effet de voir dans le contrat d'assurance un acte solemnel comme le sont les donations, les testaments, les constitutions d'hypothèque, et nous sommes portés à croire que le législateur n'a voulu un acte écrit que pour la preuve de la convention.

Touchant la preuve testimoniale, il est vrai de dire avec Emérigon qu'elle est exclue par cela seul

que la loi recommande la formalité de l'écriture' même lorsque l'objet assuré est d'une valeur audessous de 150 fr. La raison en est que la preuve par témoins n'est pas admissible pour établir l'exis tence d'un contrat que le législateur ordonne de rédiger par écrit, quelque modique que soit la valeur sur laquelle les parties ont traité:

la

Il est vrai que Valin, dans son commentaire sur l'art. 2 tit. 6 de l'ordonnance de 1681, est d'une opinion contraire. Cet auteur pense que preuve par témoins pouvait être admise dans les assurances dont l'objet était moindre de 100 livres ; mais il est victorieusement réfuté par Pothier, Traité du contrat d'assurance n° 100.

Enfin à l'égard de la preuve testimoniale dans le cas où il y a un commencement de preuve par écrit, Pothier est du sentiment d'Emérigon. Il dit n° 101: « J'aurais de la peine à l'admettre (la preuve par témoins). L'ordonnance ayant fait une disposition particulière, pour la forme dans laquelle doit être rédigé le contrat d'assurance maritime, elle l'a tiré de la thèse générale des autres contrats. » Il ajoute que son opinion est conforme à celle d'un savant magistrat, qui avait l'expérience de ces matières.

Mais cette opinion, très-conséquente dans l'ouvrage d'Emérigon qui n'admet d'autre preuve qu'une police écrite, ne l'est pas également dans celui de Pothier qui reconnaît la possibilité de suppléer à l'écriture par l'aveu et par le serment décisoire; elle nous paraît inconciliable avec l'idée que le contrat d'assurance n'a rien de solennel, et que l'acte n'est considéré que comme un iustrument de preuve. Nous inclinons donc à penser comme le fait M. Pardessus, dans son cours de droit commercial, no 792, 2o édit., qu'avec le secours d'un commencement de preuve par écrit, on peut prouver par témoins la convention d'assu rance.

En effet, l'art. 1341 du Code civil exige un acte écrit pour toute convention dont l'objet excède 150 fr., et cependant, par exception, l'art. 1347 admet dans ce cas la preuve testimoniale, s'il existe un commencement de preuve par écrit. Or, dans cette hypothèse, quelle différence y a-t-il entre ce principe général du droit civil, et la disposition spéciale du Code de commerce sur le contrat d'assurance? Aucune dans un cas, comme dans l'autre, la loi veut un acte écrit, et elle doit nécessairement admettre les mêmes exceptions.

II. L'acte écrit exigé par le Code de commerce peut être fait par-devant notaire, ou par l'intermédiaire des courtiers d'assurances, ou sous seingprivé, sans le ministère d'aucun officier public.

Il paraît que, dans l'usage, les notaires rédigent en brevet les contrats d'assurance, et qu'ils se bornent à les inscrire tant sur leur répertoire que dans un registre spécial, tenu conformément à l'art. 69, tit. 6, liv. 3 de l'ordonnance de la marine. Mais un tel usage, s'il existe, est textuelle

Les courtiers d'assurance rédigent concurremment, avec les notaires, les polices d'assurance; c'est un droit que leur reconnaît l'article 79 du Code de commerce. Ils ne sont obligés par aucune loi d'en garder minute; mais ils sont tenus de les inscrire sur leurs livres.

Enfin, lorsque la convention est consignée dans un acte privé, comme elle est d'une nature synallagmatique, l'art. 1325 du Code civil lui est applicable, et il faut le rédiger en double original. Ce n'est cependant pas ce qui a lieu dans l'usage, où l'on se borne à un seul exemplaire de la police. Mais cet usage peut avoir de graves inconvénients. D'abord, il met le sort de la convention dans les mains de celui qui conserve l'acte, et qui peut l'anéantir, s'il a intérêt à le faire. Ensuite il n'est pas même certain que l'acte soit valable, malgré la faveur justement attachée aux transactions commerciales, et les principes plus larges qui les régissent. En effet, par un arrêt du 23 novembre 1814, la cour royale d'Aix, qui a l'habitude et l'expérience des affaires maritimes, a déclaré nulle une police d'assurance qui n'avait pas été faite double; et un second arrêt ayant consacré le même principe, a été confirmé par la cour de cassation. Voici l'espèce dans laquelle il a été rendu Le 1 mai 1812, acte sous seing-privé, par lequel les sieurs Lénadie, Reimbaud et autres, assurent au sieur Dallen vingt caisses de vin et deux caisses d'eau-de-Cologne, chargées sur un bateau partant de Marseille pour Livourne.

il est

ment contraire à la loi du 25 ventose an x1 qui | Code civil pour les contrats auxquels les disposiveut, à peine de nullité, que les notaires gardent tions du Code civil sont applicables; que c'est minute des actes qu'ils reçoivent, à l'exception de ainsi qu'à l'art. 18 du Code du commerce, certains actes seulement qu'elle désigne, et au dit que le contrat de société se régit par le droit nombre desquels n'est point le contrat d'assu- civil, et qu'à l'art. 92 il est dit que les droits et rance. (Voyez Acte notarié, § III, no 1.) devoirs du commissionnaire, qui agit au nom. du commettant, sont déterminés par le Code civil; que dans le titre des Assurances, le Code de commerce s'est occupé de la forme et de l'objet du contrat d'assurance; que l'art. 332 porte qu'il peut être fait sous signature privée; que le contrat d'assurance, soit qu'il existe sous signature privée, ou par police close par un officier public, n'est ordinairement revêtu que de la signature des assureurs, quoique le Code civil et la loi sur le notariat exigent impérieusement la signature de toutes les parties contractantes; que, par un usage aussi ancien que l'existence des billets privés d'assurance, ces sortes de billets n'ont jamais été faits. en double, et n'ont jamais été souscrits par les assurés; que les diverses obligations des assurés, résultant du contrat d'assurance, sont presque toujours des modifications apportées aux obligations des assureurs; que le défaut de paiement de la prime, lors de la signature du contrat d'assurance, est un crédit accordé de bonne foi à l'assuré par l'assureur, qui aurait pu exiger une reconnaissance de la prime qui lui est due, reconnaissance qui est indépendante de la perfection du contrat d'assurance, dont l'objet est de régler le risque et toutes les conditions qui tiennent de ce contrat; qu'il est contraire à la bonne foi qui doit régir tous les actes de commerce; que les assurants, après avoir consenti leur obligation relative à l'assurance, et après que, sur la foi de cette obligation, l'assuré a mis en risque l'objet qui a fait la matière de l'assurance, et qu'ainsi le contrat d'assurance a été exécuté de part et d'autre, viennent réclamer contre leur obligation, sur le fondement qu'ils ont suivi la foi de l'assuré, pour le paiement de la prime, sans avoir exigé de luimême une reconnaissance; considérant que l'usage généralement admis tient lieu de loi dans la société, et plus particulièrement dans les transactions commerciales; que le Code civil, art. 1135, veut que les conventions obligent à toutes les suites que l'équité, l'usage et la loi donnent à l'obligation, d'après sa nature; qu'au moyen de ce, le contrat d'assurance, fait sous seing-privé dont il s'agit, doit être exécuté, quoiqu'il n'ait pas été fait double. »

er

Le contrat d'assurance fut fait en un seul original. La prime fut stipulée payable comptant, cependant elle ne fut pas payée.

Le 4 du même mois, second acte, par lequel les mêmes assureurs garantissent au sieur Masse quinze paniers de verreries chargés sur le même bateau. L'ennemi s'empare du bateau.

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les assu

Sur la demande des sieurs Dallen et Masse, afin d'obtenir l'effet du contrat d'assurance, reurs se refusent à toute garantie. Ils se fondent, dans leur exception, sur ce que les contrats d'assurance sont des contrats synallagmatiques qui doivent être faits doubles, aux termes de l'art. 1325 du Code civil.

Les 11 mars et 2 juin 1813, jugements du tribunal de commerce de Marseille, qui rejettent les moyens de nullité : « Considérant (portent ces jugements, dont les motifs sont conçus dans les mêmes termes), que, d'après l'article 1107 du Code civil, les règles particulières aux transactions commerciales sont établies par les lois relatives au commerce; que, dans le Code de commerce, le législateur à eu soin de renvoyer au

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