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blique, vu la dépréciation notoire de ces rentes; qu'ainsi il n'a point commis de contravention à l'art. 989 du Code de procédure, qui ne prescrit des formalités pour la vente de ces sortes de biens que pour prévenir des ventes arbitraires qui pourraient être préjudiciables aux créanciers; attendu, sur le deuxième moyen, tiré de la violation de l'art. 808 du Code civil, que l'héritier bénéficiaire ne peut être déchu de cette qualité qu'autant que les actes par lui faits seraient de nature à le faire déclarer héritier pur et simple; mais que les paiements qu'il a faits à divers créanciers, soit en totalité, soit d'une portion de leurs créances, en les supposant irréguliers, ne seraient que des actes d'une mauvaise administration dont il serait responsable vis-à-vis des créanciers lésés, sans qu'il pût résulter de là qu'il fût déchu de sa qualité d'héritier bénéficiaire; — rejette, etc. » XVI. L'héritier déchu du bénéfice d'inventaire pour avoir frauduleusement omis dans l'inventaire plusieurs effets de la succession, peut-il être condamné à payer intégralement les legs, sans avoir le droit de demander la réduction de ceux qui porteraient atteinte à sa réserve légale, par le motif qu'il s'est mis, par son propre fait, dans l'impuissance de composer le patrimoine du défunt de manière à prouver que la portion disponible a été excédée ?

L'affirmative a été décidée par un arrêt du 16 janvier 1821, rapporté au Journal des Audiences de la cour de cassation, vol. de 1821, page 207. Voici l'espèce de cet arrêt:

Philippe Bertrand est décédé le 16 floréal an 111, laissant pour héritiers ab intestat ses frères et sœurs, et pour héritier testamentaire Sébastien Bertrand, qu'il avait institué son légataire universel, à la charge d'acquitter plusieurs legs, dont l'un de 25,000 fr. en faveur de la demoiselle Lafond, sa filleule, et un autre de 4000 fr. au profit du sieur Jevin, son ami.

Cette succession s'ouvrait, comme on voit, sous l'empire de la loi du 17 nivose an 2, qui ne permettait au testateur de disposer que du sixième de ses biens. Elle a été acceptée, sous bénéfice d'inventaire, par les frères et sœurs du défunt.

La demoiselle Lafond, représentée par le sieur Cabaud, et le sieur Jevin, légataires particuliers qui n'avaient pas été appelés à l'inventaire, ont demandé aux héritiers bénéficiaires la délivrance de leurs legs.

fraude, et ils ont conclu à ce que les frères et sœurs Bertrand fussent déclarés héritiers purs et simples, et, comme tels, condamnés à payer l'intégralité des legs.

Le 19 août 1814, jugement du tribunal civil de Lyon, qui, en effet, déclare les héritiers Bertrand déchus du bénéfice d'inventaire, et les condamne, comme héritiers purs et simples, à payer l'intégralité des legs réclamés par le représentant de la demoiselle Lafond et par le sieur Jevin; attendu, dit le tribunal, que ces héritiers ont commis sciemment des infidélités dans l'inventaire auquel ils ont fait procéder, et que dès lors cet inventaire ne présente pas le véritable état de la succession. Sur l'appel, ce jugement a été confirmé par arrêt de la cour royale de Lyon, du 28 août 1817, qui a adopté les motifs des premiers juges.

Les héritiers Bertrand ont déféré cet arrêt à la censure de la cour de cassation, pour violation de l'art. 11 de la loi du 5 brumaire an 2, et de la loi du 17 nivose de la même année.

Le sieur Bertrand, disait-on pour les demandeurs, ne pouvait disposer que du sixième de ses biens; les cinq autres sixièmes formaient une réserve légale en faveur des héritiers du sang. La cour royale de Lyon, en condamnant les frères et sceurs Bertrand à payer l'intégralité des legs, sous prétexte qu'ils avaient perdu les avantages attachés à leur qualité d'héritiers bénéficiaires, à donc violé les articles cités.

eux la

Sans doute, cette cour pouvait, en reconnaissant certains faits comme constants, déclarer les frères et sœurs Bertrand déchus du bénéfice d'inventaire, et, par suite, héritiers, purs et simples; mais elle ne pouvait leur dénier l'exception qui leur était accordée par la loi, ni méconnaître en faculté de demander la composition du patrimoine du défunt pour faire réduire les legs à la portion disponible, c'est-à-dire au sixième de la succession; car le testateur était décédé sous l'empire des lois des 5 brumaire et 17 nivose an 2, qui ne lui permettaient de disposer que d'un sixième de son patrimoine, et qui établissaient, au profit des héritiers Bertrand, une réserve légale des cinq autres sixièmes, dont il n'était pasrau pouvoir de la cour royale de les dépouiller. La composition du patrimoine du défunt était encore possible malgré l'irrégularité déclarée de l'inventaire; il fallait recourir à l'inventaire pour commune renommée, plutôt que d'évincer arbitrairement des héritiers légitimes d'une réserve qui leur est as

Les héritiers Bertrand ont opposé à cette demande qu'il fallait composer la masse de la suc-surée par la loi. cession pour déterminer le montant du sixième dont la loi autorisait seulement la disposition, et pour faire réduire les legs qui excéderaient cette quotité,

Le compte de l'hérédité bénéficiaire ayant été rendu et les pièces justificatives produites, les légataires ont argué l'inventaire d'infidélité; ils ont prétendu que cet acte était infesté de dol et de

Les défendeurs à la cassation répondaient à ce moyen, que la cour royale de Lyon ne s'était pas uniquement fondée, pour déclarer les héritiers Bertrand déchus du bénéfice d'inventaire, sur ce que l'inventaire par eux fait n'était pas exact; qu'elle avait de plus déclaré que cet inventaire portait tous les caractères de l'infidélité et de la fraude, et annonçait le projet formé de tromper

les ayant-droits à la succession; qu'elle s'était at- | pas être contraint à payer au-delà de ce que la tachée à fortifier cette déclaration par le rappro- succession aura réellement produit.

chement de toutes les circonstances propres à en Or, par la vente ou cession de ses droits sucétablir la véracité, et qu'en tirant de cette con- cessifs en masse, il ne change rien à la nature et viction de fraude la conséquence que les héritiers à la consistance des effets de l'hérédité; il ne moBertrand s'étaient mis eux-mêmes dans l'impuis-difie, sous aucun rapport, les droits des créanciers sance de former, d'une manière satisfaisante, la vé-sur ces effets. Son cessionnaire ne fait que prenritable masse du patrimoine du défunt, qu'ainsi dre sa place, il le représente à tous égards; et ils s'étaient, par leur propre fait, privés de l'ex- de là il ne résulte aucun préjudice pour les ception que la loi leur accordait pour assurer créanciers de la succession qui conservent égalel'intégralité de leur réserve légale, et que, dès ment leur action contre cet héritier bénéficiaire, lors, ils étaient tenus d'acquitter indéfiniment les si son cessionnaire venait à spolier la succession. legs dont la succession se trouvait grevée, l'arrêt attaqué n'avait pu violer aucune loi, ni donner prise à aucune critique raisonnable.

« La cour, sur les conclusions conformes de M. Cahier, avocat-général, et après qu'il en a été délibéré en la chambre du conseil; -attendu que l'arrêt attaqué a déclaré, en fait, que l'inventaire, représenté dans l'instance par les héritiers Bertrand, portait tous les caractères de l'infidélité et annonçait le projet formé sciemment de cacher le véritable état de la succession, au préjudice de ceux qui avaient des droits à exercer contre elle, projet qui a reçu son exécution autant que cela a dépendu desdits héritiers Bertrand; attendu que de là il résulte que c'est par leur propre fait que ces héritiers se sont mis dans l'impuissance de pouvoir composer le patrimoine du défunt, de manière à établir que leur réserve légale était entamée par les legs faits aux défendeurs, et qu'ils devaient être réduits ad legitimum modum, s'ils se trouvaient excéder le sixième du patrimoine du défunt, et qu'en les déclarant déchus du bénéfice d'inventaire, et en induisant de leur conduite qu'ils étaient tenus d'acquitter intégralement les legs réclamés, la cour royale de Lyon a rendu hommage aux principes qui ne permettent pas aux tribunaux de laisser profiter de la fraude ceux qui s'en sont rendus coupables, et n'a violéaucune loi; - par ces motifs, rejette, etc.» XVII. L'héritier bénéficiaire qui cède ses droits XVII. L'héritier bénéficiaire qui cède ses droits successifs, devient-il par cela seul héritier pur et simple?

Si, nonobstant cette cession, il conserve sa qualité d'héritier bénéficiaire, peut-il au moins être contraint, par les créanciers de la succession, à leur rapporter la somme qu'il a reçue de son cessionnaire et à la comprendre dans le compte qu'il doit leur rendre?

La négative de ces deux questions paraît incon

testable.

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Si l'héritier bénéficiaire était décédé, son héritier naturel ou testamentaire exercerait les mêmes droits que lui; son cessionnaire doit être de même condition.

Il pourrait faire exercer tous ses droits par un fondé de pouvoirs; il peut de même les faire exercer par un cessionnaire qui n'est que son représentant.

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Vainement objecterait-on l'art. 780 du Code civil qui porte que « la donation, vente ou transport que fait de ses droits successifs un des • cohéritiers, soit à un étranger, soit à tous ses cohéritiers, soit à quelques-uns d'entre eux, emporte, de sa part, acceptation de la succession. » Car, en combinant cet article avec ceux qui le précèdent, il est évident qu'il ne s'applique qu'au cas où les choses sont entières, c'est à dire au cas où l'héritier n'a pas encore fait connaître la qualité qu'il voulait prendre, et non à celui où il n'a accepté la succession que sous bénéfice d'inventaire.

par

A l'égard du prix de la cession, il n'est point extrait du patrimoine du défunt. L'héritier bénéficiaire n'en doit donc pas compte aux créanciers de la succession. C'est la décision d'un arrêt du parlement de Paris du 4 juillet 1767, rapporté par Denizart, verbo Hérédité, n° 16, qui a jugé in terminis « l'héritier bénéfice d'invenque taire, qui transporte son droit, moyennant un prix, ne peut être contraint par les créanciers de la succession à rapporter ce prix; et qu'il est quitte envers eux, en leur rendant, ou leur faisant rendre par son cessionnaire, le compte de la succession. » Telle est aussi la doctrine développée par M. Merlin, dans ses questions de droit, t. 6, verbo Héritier, § 2.

BESTIAUX. Quel est le sens de ce mot dans la loi du 28 septembre-6 octobre 1791 sur la police rurale?

Voy. Colombier,no 1.

BIENS. Tous les biens sont meubles ou immeubles. (Code civil, art. 516.) Il n'est aucune espèce de biens en effet, qui ne doive être comprise dans l'une de ces deux classes. Voyez ce que nous avons dit à cet égard aux mots Meubles et Immeubles.

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Quant aux différentes modifications dont les ceux à la propriété ou au produit desquels les biens sont susceptibles, ou nous avons le droit habitants d'une ou de plusieurs communes ont un d'en jouir et disposer tout à la fois, ou nous n'endroit acquis. avons qu'un simple droit de jouissance ou même de détention, ou enfin nous n'avons que des services fonciers sur la propriété d'autrui. (Code civ., art. 543 et 2071.)

Ayant traité de ces diverses matières sous les mots propriété, usufruit, usage, habitation, nantissement et servitude, il ne nous reste qu'à considérer les biens dans leur rapport avec ceux qui les possèdent. Encore ne doit-il être ici question que de ceux qui sont susceptibles de propriété privée: car les biens qui n'en sont pas susceptibles, tels que les chemins, routes et rues à la charge de l'état, les fleuves et rivières navigables ou flottables, les rivages, lais et relais de la mer, les ports, les havres, les rades, les portes, murs, fossés, remparts des places de guerre et des forteresses, et autres de cette nature, qui sont inaliénables imprescriptibles, sont des dépendances du domaine public. (Code civ., art. 538.)

Nous ne parlerons ici ni de ces biens, ni de ceux appartenant soit aux hospices, soit aux fabriques, soit aux cougrégations hospitalières, etc., par la raison que leur administration et leur vente sont soumises à des formes et à des règles particulières, que nous expliquerons sous les mots qui leur sont propres.

Nous dirons cependant, 1° que la propriété des terrains vains et vagues situés sur le territoire d'une commune, ne peut appartenir aux anciens seigneurs, encore qu'ils aient une possession quadragénaire. (Avis du conseil-d'état du 17 juillet 1808.)

2o Que les lois qui règlent le mode d'exercice des actions des communes, ne sont pas applicables à une collection de propriétaires riverains. et(Arrêt de la cour de cassation du 15 novembre 1808.)

Voy. Inalienabilité et Prescription. Les biens susceptibles de propriété privée, appartiennent ou non à des particuliers.

S'ils appartiennent à des particuliers, ceux-ci en ont la libre disposition, sous les modifications établies par les lois. (Code civ., art. 537.)

3o Que la pêche des rivières non navigables, ni flottables sur trains ou radeaux, né peut, dans aucun cas, appartenir aux communes; que les propriétaires riverains doivent en jouir, en se conformant aux règlements locaux sur la pêche, aussi longtemps que les rivières ne sont pas devenues navigables ou flottables. (Avis du conseil-d'état des 30 pluviose an XIII, et 21 février 1822, rapportés à l'article Pêche, sect. I, nos 2 et 3.)

Ces mots font assez voir que cette libre disposition peut être limitée, quand la sûreté publique ou l'intérêt général de la société le commandent. Tous les biens sont-ils réputés patrimoniaux de C'est ainsi, par exemple, que la loi du 16 septembre droit, tant qu'il n'y a pas preuve du contraire? 1807 assujettit, par ses articles 3, 4 et suivants, Est-il vrai que celui-là seul qui peut donner les propriétaires de marais à opérer les desséche- des lois, ait droit de conférer à un héritage le priments jugés par le gouvernement utiles et néces-vilège de l'inaliénabilité ? saires, ou à les laisser opérer par des concessionnaires, lorsque les propriétaires ne se sont point accordés pour les effectuer. Voy. Expropriation pour cause d'utilité publique et Desséchements des ́marais et des étangs.

Si les biens susceptibles de propriété privée n'appartiennent pas à des particuliers, ils sont administrés et ne peuvent être aliénés que dans les formes et suivant les règles qui leur sont particulières. (Code civ., art. 537.)

Ces biens peuvent être dans la possession de l'état ou des communes.

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S'ils sont dans la possession de l'état, ils font partie du domaine public. De ce nombre sont tous les biens vacants et sans maître, et ceux des sonnes qui décèdent sans héritiers, ou dont les successions sont abandonnées, les terrains, fortifications et remparts des places qui ne sont plus places de guerre. Ces biens peuvent être aliénés, encore qu'ils fassent partie du domaine public. (Code civ., art. 539, 540 et 541.)

Si les biens susceptibles d'une propriété privée sont dans la possession des communes, on les appelle biens communaux.

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Les biens communaux, porte l'art. 542, sont

Tome I.

L'axiome, Point de souverain sans cour souveraine, est-il vrai en ce sens que le dernier ressort de la justice caractérise essentiellement la souveraineté ?

Les ducs de Lorraine tenaient-ils leur duché de Bar sous le ressort et sous la souveraineté de la couronne de France?

Ces importantes questions ont été affirmativement résolues par un arrêt de la cour de cassation du 30 janvier 1821, dont le Bulletin civil retrace l'espèce en ces termes :

La terre de Saudrupt, située dans le ci-devant Barrois mouvant, faisait partie de la baronnie d'Ancerville.

Dans la transaction qui eut lieu, le 17 octobre 1530, entre Antoine duc de Lorraine et de Bar, et Claude son frère puîné, chef de la branche de Guise, au sujet de la succession de René leur père, la baronnie d'Ancerville échut à Claude par contrat du 5 avril 1600; Charles de Guise, arrière-petit-fils de Claude, détacha de la baronnie la terre de Saudrupt, et la vendit à Jean Comptain, des mains duquel elle a été transmise, par des aliénations successives, à la famille Bourlon. Tranquilles possesseurs de ce domaine, Pierre

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propos; et

Antoine et Pierre-Henri Bourlon, seigneurs de | étrangers les infractions aux actes qu'il appelerait Sandrupt, fournirent, le 1er décembre 1779, des des lois, et que ces tribunanx, sur lesquels il aveux et dénombrements, sur lesquels, et par ar- n'aurait aucune supériorité, ne statueraient que rêt de 4 février 1782, la chambre des comptes quand et comme ils le jugeraient à du duché de Bar (ainsi que l'atteste l'arrêt de la de là cet axiome si connu, Point de souverain sans cour de Nancy, dénoncé maintenant à la cour de cour souveraine; cassation), croyant la patrimonialité de ces biens douteuse, et dans la vue de conserver au domaine du roi les droits qui pouvaient lui compéter, apposa des réserves et des déclarations pour le cas où la question de domanialité viendrait à s'élever.

« Attendu qu'il est si constant, particulièrement en France, que le dernier ressort de la justice est le signe caractéristique de la souveraineté; que même dans ces temps à peine séparés de nous par un intervalle de quatre siècles, où les hautsbarons jouissaient dans leurs terres des droits régaliens les plus éminents, comme battre monnaie, imposer des taxes, faire la paix et la guerre, on reconnaissait généralement que la souveraineté du royaume était attachée à la couronne, parce que là était le dernier ressort de la justice; que c'est sous le poids des jugements en dernier ressort, que l'on a vu s'affaisser l'énorme puissance des ducs de Bar, qui se soient maintenus plus longtemps dans l'exercice de ces grandes régales dont on vient de parler, cela prouve moins un droit reconnu, qu'un plus haut dégré de faveur, ou des ménagements conseillés par la politique;

Ce ne fut que le 13 avril 1812, que le préfet du département de la Meuse et l'administration de la régie des domaines, prétendirent que la terre de Saudrupt était un bien domanial, soumis aux dispositions de la loi du 14 ventose an 7. Sur l'opposition de la demoiselle Bourlon, ils l'assignèrent au tribunal de Bar, et ensuite en appel devant la cour royale de Nancy; mais celle-ci, par arrêt du 22 novembre 1819, confirma le jugement du tri-grands feudataires; et s'il en est, tels que les bunal de Bar, qui, en accueillant l'opposition de la demoiselle Bourlon, la maintient dans la propriété, possession et jouissance des biens en question, à titre patrimonial et incommutable.

L'arrêt de la cour de Nancy s'est étayé de plusieurs motifs; mais la cour de cassation à laquelle cet arrêt a été déféré, a fixé principalement son attention sur le motif pris de l'impuissance où étaient les ducs du Barrois mouvant de créer des lois domaniales, puisque ce motif, s'il était fondé, suffirait pour détruire dans leur base toutes les inductions que le préfet tirait des réserves consignées dans l'arrêt précité de la chambre des comptes de Bar, et tous les autres moyens de cas

sation.

L'arrêt de la cour de cassation est ainsi conçu: « Ouï le rapport de M. Botton de Castellamonte, conseiller, et les conclusions de M. Joubert, avocat-général;

« Attendu que le droit naturel et la loi civile se réunissent pour rendre tous les biens patrimoniaux, et les mettre tous dans cette grande communauté qui compose la société;

« Qu'ainsi la prohibition d'aliéner est une exception au droit commun, qui, comme toutes les exceptions, ne peut être établie que par une loi très-positive ou une disposition de l'homme autorisée par la loi;

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Attendu que de ces notions très-simples il résulte que celui-là seul peut conférer à un domaine le privilége de l'inaliénabilité, qui a le droit de donner des lois au pays dans lequel ce domaine est situé;

Attendu que le pouvoir de donner des lois, et celui de les faire exécuter, sont deux corrélatifs inséparables;

« Attendu que l'exécution des lois ne peut être légalement assurée que par le dernier ressort de la justice, puisque celui qui n'aurait pas ce dernier ressort serait obligé de déférer à des tribunaux

«< Attendu que cette théorie subordonnait la difficulté qui s'était élevée entre le préfet du département de la Meuse et le sieur Bourlon, à la question de savoir à qui du roi ou du duc de Lorraine appartenait le dernier ressort de la justice, et par conséquent la souveraineté du duché de Bar;

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Que cette question, purement de fait, était résolue par un grand nombre de pièces du procès dont la série embrasse le laps de plus de cinq siècles;

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Que dans la plupart de ces actes, dont le premier est sous la date de l'an 1301, il est dit formellement que les ducs de Bar tiennent leur duché sous l'hommage-lige du roi, et que les jugements des tribunaux du Barrois ressortissaient au bailliage de Sens pour les cas présidiaux, et pour tous les autres cas, au parlement de Paris;

«Que le chancelier d'Aguesseau, dont l'autorité est si grave dans les questions de droit public, reprochant aux juges du bailliage de Bar d'avoir mé connu la souveraineté du roi, disait, en parlant des mêmes actes, que, si ces officiers les avaient mieux consultés, ils auraient aisément reconnu, dans la réserve expresse de l'hommage-lige et du ressort, ce double caractère de supériorité d'un côté et de dépendance de l'autre, qui constitue toute l'essence de la souveraineté ;

«

Attendu que cette souveraineté du roi sur le duché de Bar est si généralement reconnue, que la coutume de Bar, rédigée pour la première fois en l'année 1579, fut homologuée au parlement de Paris, et que cette cour, informée que les officiers du bailliage de Bar affectaient dans leurs jugements de donner au roi la qualification de

roi Très-Chrétien, rendit le célèbre arrêt du 27 mars 1699, qui fait défense au bailli de Bar et à tous juges, d'ajouter dans leurs jugements le surnom de Très-Chrétien, ni de souffrir que les avocats et procureurs, qui plaident devant eux, s'expriment de cette manière, en parlant du roi ; leur enjoint d'en parler dans les termes qui conviennent à des sujets qui parlent de leur souverain seigneur, à peine d'interdiction; et ordonne que le présent arrêt sera lu et publié à l'audience du bailliage, et, afin que personne n'en ignore, affiché partout où besoin

sera;

a Attendu que de ces développements il résulte, en droit, que l'inaliénabilité ne peut être conférée que par une loi formelle, et que, par conséquent, pour rendre un domaine inaliénable, il faut en avoir la souveraineté; et, en fait, que les ducs de Lorraine, simples vassaux du roi à raison de leur duché de Bar, tenaient ce duché, comme tous les autres grands feudataires du royaume, sous la mouvance, sous le ressort et sous la souveraineté de la couronne de France;

«

Qu'ainsi tout ce qu'ils possédaient dans la circonscription de cette seigneurie, n'était et ne pouvait être dans leurs mains que des propriétés privées et aliénables à perpétuité, comme toutes les autres propriétés patrimoniales;

« Ce qui conduit à cette dernière conséquence, que la cour royale de Nancy, non-seulement n'a violé aucune loi, mais a fait une juste application des principes de notre droit public, en jugeant que le domaine de Saudrupt, quoique anciennement possédé par les dues de Lorraine, n'en appartenait pas moins aux sieurs Bourlon, à titre patrimonial et perpétuel, et ce, nonobstant l'arrêt de la cour des comptes de Bar, qui n'avait rien préjugé sur une question de domanialité qu'on n'élevait point devant elle;

<< La cour rejette, etc. »

BILAN. C'est l'état de l'actif et du passif d'un débiteur en faillite, ou en déconfiture. Voyez Faillite et Banqueroute, § 1, et Cession de biens, n° v.

BILATÉRAL, Un contrat est bilatéral lorsque deux ou plusieurs personnes s'obligent réciproquement les unes envers les autres, (Code civil, art. 1101 et 1102.)

Voyez Convention, sect. 1, § 11.

BILLET. Quelles sont les formes nécessaires pour la validité d'un billet ou promesse sous seingprivé, portant obligation unilatérale ?

Voyez Acte sous seing-privé, sect. 1, § III. BILLET A DOMICILE. Dans l'ancien droit, le billet à domicile était assimilé à la lettre-dechange. Il contient en effet le contrat de change, puisque par ce billet une personne s'oblige del

faire payer à une autre personne, ou à celle qui aura son ordre, dans un certain lieu, à une échéance déterminée, par le ministère de son correspondant, une certaine somme dont elle reçoit, ou doit recevoir la valeur dans un autre lieu. (Pothier, Contrat de change, no 225.)

Ainsi, le billet à domicile contient remise de place en place comme la lettre-de-change; mais il en diffère en ce que le souscripteur du billet à domicile en est seul débiteur, et que la personne indiquée pour payer, n'est pas obligée personnellement au paiement, ne paie pas en son nom, et paie seulement à l'acquit et pour le compte du souscripteur.

On voit, par la discussion qui a eu lieu au conseil-d'état, relativement aux billets à domicile, qu'on avait proposé de les distinguer des billets à ordre, et de les rapprocher davantage de la lettre-de-change,

Le conseil a pensé au contraire, que « les billets à domicile sont de véritables billets à ordre, qui ne diffèrent des autres qu'en ce qu'ils sont payables dans un lieu différent de celui où ils ont été faits », et il a arrêté en conséquence qu'il ne serait fait aucune mention de ces billets, qui se trouvent ainsi fixés dans la classe des billets à ordre. Procès-verbal, du 26 février 1807.

Le protêt d'un billet à domicile, ou payable au domicile d'un tiers, doit-il nécessairement être fait à ce domicile ?

Faute de protêt en temps utile, le porteur d'un billet à domicile est-il déchu de son recours contre le tireur, si celui-ci justifie qu'il y avait provision à l'échéance?

Si un billet à domicile a pour cause une dette non commerciale, le juge peut-il, selon les circonstances, accorder un délai au débiteur ?

La cour de cassation a résolu ces trois questions pour l'affirmative dans l'espèce suivante:

En novembre 1814, Maillet souscrit au profit de Langlois un billet à ordre de 460 fr. payable le 30 avril 1815 au domicile dudit Langlois. Ce dernier le passe à l'ordre de Lafond qui, faute de paiement à l'échéance, le fait protester le lendemain au domicile de Maillet, tireur. Maillet répond que c'est mal à propos qu'on s'adresse à lui, parce qu'il ne doit plus rien, et, qu'aux termes de son engagement, il en a déposé le montant, le jour même de l'échéance, au domicile de Langlois qui lui en a fourni quittance.

En cet état, Lafond assigne devant le tribunal civil de Montbrison Maillet, tireur, et Langlois, endosseur, pour les faire condamner solidairement à lui payer le montant du billet.

Devant ce tribunal, Langlois est convenu d'avoir reçu le montant du billet et il s'en est reconnu débiteur; mais en invoquant l'art. 1244 du Code civil, il a demandé un délai pour le paie. ment.

De son côté, Maillet a soutenu que le protêt

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