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En conséquence, ouï le rapport de M. Poriquet, chevalier, conseiller en la cour, et les conclusions de M. Jourde, avocat-général ;

Vu l'article 4 du décret du 17 mars 1808, les art. 1319 et 1320 du Code civil, et l'art. 19 de la loi du 25 ventose an x1;

I. L'acte authentique fait pleine foi, entre les Par là, cette cour avait étendu, au préjudice parties contractantes, leurs héritiers ou ayant- de Levy, la loi d'exception faite contre les Juifs, cause, de toutes les conventions qu'il renferme, et contrevenu au principe général de la foi due même de ce qui n'y est exprimé qu'en termes aux actes authentiques. énonciatifs, pourvu toutefois que l'énonciation ait un rapport direct à la disposition. Mais si les énonciations sont étrangères à la disposition, elles ne peuvent servir que de commencement de preuve par écrit. (Code civ., art. 1319 et 1320.) Il peut cependant arriver que cette foi soit ébranlée, et que l'exécution de l'acte soit suspendue; c'est ce qui a lieu lorsque l'une des parties argue cet acte de faux: mais il faut pour cela qu'il y ait inscription de faux principal ou incident. Dans le premier cas, l'exécution est suspendue de plein droit par la mise en accusation; dans le second, les tribunaux peuvent, suivant les circonstances, la suspendre provisoirement. (Code civ., art. 1319.)

Voyez Faux incident.

II. Lorsqu'un contrat authentique contient nu mération d'espèces, un tiers intéressé peut-il en prouver la simulation au moyen de la preuve testimoniale, encore bien qu'il n'ait aucun commencement de preuve par écrit?

Oui, sans doute, et la cour de cassation l'a ainsi jugé par un arrêt du 10 juin 1816, rapporté à l'article Preuve, § 1, no 33.

Mais si c'est l'une des parties contractantes qui veut prouver par témoins la simulation du contrat, contre un tiers intéressé à la validité de l'acte, la preuve testimoniale doit-elle être admise? Non, parce que la simulation n'a le caractère de fraude qu'à l'égard des tiers, et non entre les parties contractantes qui l'ont respectivement voulue et consentie. C'est ce que la même cour a décidé par un arrêt du 8 janvier 1817, rapporté à l'article Preuve, § 1, no 6.

III. Sous l'empire du décret du 17 mars 1808, concernant les Juifs, pouvait-on assujettir un Juif porteur d'une obligation authentique constatant que les espèces avaient été comptées en présence des notaires, à rapporter une preuve du prêt celle qui résultait de cette obligation

autre que même ?

La cour de cassation a décidé que non, par arrêt du 15 mars 1815, rapporté en ces termes au Bulletin civil:

Par acte passé devant notaire, le 29 brumaire an XIII, Etminger s'était reconnu débiteur envers Isaac Levy de la somme de 2,880 livres tournois. L'acte énonçait, dans les termes les plus exprès, que le prêt avait été fait comptant en présence du notaire, et que les deniers avaient été de suite retirés par Etminger et sa femme. Cependant, par arrêt du 2 juin 1813, la cour d'appel de Colmar, sans méconnaître que la preuve du prêt subsistait dans l'acte même du 29 brumaire, avait cru devoir assujettir Levy à rapporter une preuve autre que cet acte, de la vérité du prêt.

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Attendu que l'obligation du 29 brumaire an XIII atteste, dans les termes les plus précis, que le prêt dont il s'agit a été fait comptant en argent au cours du jour en présence du notaire; que la cour de Colmar n'a pas décidé le contraire; et que, néanmoins, elle a cru pouvoir assujettir le juif Levy à rapporter une preuve du prêt autre que celle qui résultait de cet acte authentique ; que, par cette disposition, elle a fait une fausse application de l'art. 4 du décret du 17 mars 1808, en donnant à cette loi d'exception une extension arbitraire, et violé expressément les art. 1319 et 1320 du Code civil, et l'art. 19 de la loi du 25 ventose an XI, relatifs à la foi due aux actes authentiques;

Par ces motifs, la cour donne défaut....., et pour le profit, casse et annule l'arrêt de la cour de Colmar du 2 juin 1813.

On peut voir au Bulletin civil deux arrêts semblables, des 16 février et 19 décembre même année.

Voyez à l'article Acte sous seing privé la différence qui existe entre cet acte et l'acte authentique.

Voyez aussi Acte notarié.

ACTE CONFIRMATIF. Voyez Acte récognitif et confirmatif.

ACTE CONSERVATOIRE. Ces mots renferment leur définition; ils expriment l'acte qui a pour objet de conserver nos droits, d'empêcher qu'il n'y soit porté préjudice.

I. Un héritier présomptif peut faire, dans la succession à laquelle il est appelé, tous les actes conservatoires qu'il juge nécessaires, sans qu'il en résulte adition d'hérédité, pourvu qu'il n'y prenne ni le titre ni la qualité d'héritier, et que ces actes ne supposent pas nécessairement son intention d'accepter. (Code civ., art. 778 et 779.)

Voyez Acceptation de succession et Exception, S IV, n° 1.

L'héritier bénéficiaire peut aussi, et à plus forte raison, faire des actes conservatoires, sans devenir héritier pur et simple. Il peut même, avec l'autorisation de la justice, faire vendre les meubles susceptibles de dépérissement ou dont la conservation est dispendieuse. (Code. civ., art. 796.) Voyez Bénéfice d'inventaire.

Une assignation donnée à l'héritier pendant les

délais pour faire inventaire et délibérer, est-elle un acte conservatoire ?

Voyez Exception, § IV, n° 1.

Lorsqu'une succession est vacante, les actes conservatoires sont faits par un curateur nommé par le tribunal de première instance.

Voyez Curateur.

La femme commune en biens peut, après la dissolution de la communauté, faire des actes conservatoires, sans qu'il y ait de sa part immixtion. (Code civ., art. 1454.)

Voyez Acceptation de communauté.

II. En général, nous exerçons des actes conservatoires comme propriétaires ou comme créanciers. Il faut distinguer ces deux hypothèses.

Comme propriétaires, nous revendiquons ou un immeuble, ou une chose mobilière. Dans le premier cas, la règle ordinaire est que nous ne pouvons point faire d'acte de conservation, parce que le tiers qui possède est, jusqu'à ce que notre droit soit reconnu, présumé propriétaire en vertu de la maxime, Possession vaut titre jusqu'à preuve contraire; d'ou il suit que l'acte que nous exercerions serait considéré comme un trouble, et donnerait lieu à l'action possessoire connue sous le nom de complainte. Mais si le détenteur de l'immeuble le dégrade depuis la demande que nous avons formée, et dont il pressent le succès, nous pouvons faire des actes tendant à arrêter, à empêcher les dégradations. Nous pouvons, par exemple, faire ordonner le séquestre de l'immeuble. Code civ., art. 1961.) Voyez Séquestre.

Lorsque nous revendiquons une chose mobilière, quoique, aux termes de l'art. 2279 du Code civil, la possession vaille titre, nous avons néanmoins la faculté de faire ce qui est nécessaire pour la conservation de notre propriété, lors même qu'il en résulte un trouble dans la jouissance de celui qui possède. Cette différence est fondée sur ce que nous n'avons pas à craindre de voir disparaître un immeuble, tandis qu'il est très-facile de soustraire un objet mobilier. Si la chose mobilière que nous réclamons est en la possession de celui contre lequel nous voulons agir, la loi nous autorise à former entre ses mains une saisierevendication. Si, au contraire, elle est en la possession d'un tiers, nous pouvons faire procéder entre les mains de ce tiers soit à une saisie-revendication, soit à une opposition.

Voyez les mots Saisie-arrêt, et Saisie-revendi

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et renouvelle des inscriptions pour la sûreté de sa créance et la conservation de son hypothèque ou de son privilége; ce sont des actes conservatoires.

Voyez Hypothèque, Inscription hypothécaire, Privilége et Vérification d'écriture, article 194, et les

notes.

2o Le créancier conditionnel ou à terme a la faculté de faire des actes de conservation, avant l'accomplissement de la condition ou l'échéance du terme. (Code civ., art. 1181 et 1188; et Code de proc., art. 125.).

Voyez Condition, Délai, Terme.

3o Tout créancier peut exercer les droits et actions de son débiteur, à l'exception de ceux qui sont exclusivement attachés à la personne. (Code civ., art. 1166.)

Voyez Nullité, § 111, no 3.

4o En matière d'ordre, un créancier peut prendre inscription pour conserver les droits de son débiteur. (Code de proc., art. 778.) Voyez Ordre.

5° L'article 819 du Code de procédure donne au propriétaire, pour sûreté de ses loyers ou fermages, la voie de la saisie-gagerie.

Voyez Saisie-gagerie.

6o L'article 822 du même Code autorise la saisie-arrêt sur les débiteurs forains.

Voyez Saisie-arrêt et Saisie-arrêt sur débiteur forain.

7o La voie de la séparation de biens est accordée à la femme pour la conservation de sa dot et de ses reprises matrimoniales, et les créanciers du mari peuvent intervenir dans l'instance ouverte à cet égard pour la conservation de leurs intérêts. (Code civ., art. 1443, 1447 et 1563.) Voyez Séparation de biens.

8o En matière de faillite, les actes conservatoires sont exercés pour l'intérêt de la masse des créanciers, par les agents ou les syndics. Voyez Faillite et Banqueroute.

ACTE DE COMMERCE. La loi qualifie actes de commerce certaines opérations faites dans la vue d'un bénéfice quelconque. Elles sont énumérées dans les articles 632 et 633 du Code de commerce. On peut les diviser en deux classes: les unes sont réputées actes commerciaux ellespar mêmes, et indépendamment des personnes qui les font; les autres ne sont présumées telles qu'à raison des individus qui s'y livrent. Nous traite-rons de celles-là dans un premier paragraphe, et de celles-ci dans un second.

SI.

Des actes qui sont commerciaux par leur nature.

I. Au premier rang des opérations que la loi qualifie actes de commerce, sont placés les achats de denrées et marchandises pour les revendre, soit en nature, soit après les avoir travaillées et

mises en ceuvre, ou pour en louer simplement vue de se procurer des intérêts plus élevés, en l'usage telle est la première disposition de l'article 632 du Code de commerce.

L'expression achat, dont se sert le législateur, donne lieu à plusieurs observations qui, en développant ses intentions, y ajouteront une clarté

nouvelle.

Ce mot a l'avantage d'indiquer plus directement sous quel rapport l'opération qui a lieu doit être considérée comme un acte de commerce. De même qu'il n'y a point d'acheteur sans vendeur, il n'y a point d'achat sans vente vente d'une part et achat de l'autre sont deux choses corrélatives, nécessaires pour constituer le contrat; et il est important de distinguer ces deux choses, pour savoir quel caractère doit avoir le contrat à l'égard de chaque partie contractante. Celui qui vend peut ne point faire un acte de cómmerce, quoique l'acheteur en fasse un, s'il donne à son achat la destination prévue par la loi, c'est-à-dire, s'il se propose de revendre la chose achetée ou d'en louer l'usage.

Ainsi, le propriétaire qui vend les fruits ou denrées qu'il a récoltés ne fait point un acte de commerce, quoique l'acheteur puisse en faire un; il ne fait point d'acte de commerce, soit qu'il les vende en nature ou après leur avoir fait subir une transformation; qu'il vende des pommes ou du cidre, des raisins ou de l'ean-de-vie et du vin, ce ne sont toujours que des denrées de son crû, à la vente desquelles l'article 638 du Code de commerce n'attribue pas le caractère d'acte commercial.

La qualité d'acte de commerce est attachée à l'achat en lui-même; la revente la confirme, mais n'est pas nécessaire pour la donner. Il suffit, aux termes de la loi, qu'il y ait achat pour revendre, c'est-à-dire, que l'acheteur ait l'intention de revendre la chose achetée. Ainsi, celui qui achète des marchandises ou des denrées dans la vue de les revendre, fait une opération commerciale, et devient, à raison de cette opération, justiciable des tribunaux de commerce, quoiqu'il n'en ait encore revendu aucune partie.

L'intention de revendre est plus à considérer que la revente elle-même; elle est indispensable pour rendre l'achat commercial. Ainsi l'achat des denrées ou marchandises pour son usage ne constitue point une opération commerciale, lors même que l'acheteur est commerçant. L'intention de revendre qui accompagne l'achat, lui attribue un caractère irrévocable, que ne lui donnerait pas la revente sans cette intention. Par exemple, un particulier achète des denrées pour son usage; par un excès de prévoyance, il en achète une trop grande quantité; il vend ensuite ce qu'il a de trop, pour en prévenir le dépérissement. Cette revente ne fait pas de son achat un acte de commerce, parce qu'il n'a pas acheté pour revendre. Il en est de même de celui qui, dans la seule

conservant la facilité de réaliser promptement ses capitaux, achète des rentes sur l'état qu'il revend ensuite. Il en serait ainsi, quand bien même la revente serait faite dans la vue d'un bénéfice quelconque. Par exemple, un individu achète, pour sa consommation et sans aucune intention de revendre, une grande quantité de blé ou de vin ; une grande augmentation de prix étant survenue dans ces denrées, il en vend une portion, et il ne fait point d'acte de commerce.

Le principe général qui doit servir à faire reconnaître les actes qui sont commerciaux, de ceux qui ne le sont pas, a été exprimé d'une manière aussi précise qu'exacte par le tribunal de commerce de Pont-Audemer, dans ses observations sur le Code de commerce. Ce tribunal proposait de considérer comme actes de négoce les achats qui font entrer les denrées et marchandises dans le commerce, comme lorsqu'un fabricant achète de la laine d'un cultivateur; et non ceux qui les en font sortir, comme lorsqu'un marchand de drap vend à un bourgeois. « Telle est, dit M. Locré, la règle à laquelle il faut se tenir pour entrer parfaitement dans l'esprit de l'article 632 du Code de commerce. »> (Esprit du Code de commerce, tom. 8, p. 273.)

II. Les achats de choses dont on se propose de vendre les fruits; de bestiaux, pour en vendre le croît, la laine, le lait, le fumier; d'abeilles, pour en vendre le miel; de volailles, pour en vendre les ceufs, sont-ils des actes de commerce? Non: il n'y a point là achat avec intention de revendre la chose achetée. L'acheteur qui, devenu propriétaire des bestiaux, des abeilles, des volailles, en vend ensuite la laine, le lait, le croît, le fumier, le miel, la cire, les œufs, ne revend pas ce qu'il a acheté; il ne fait que vendre des productions de son crû.

En est-il de mème des achats que font les artisans et manufacturiers, des instruments de leur métier, tels que marteaux, enclumes, tours, meules de moulin, etc.? Oui sans doute: on ne peut pas dire que les artisans et manufacturiers achètent, dans l'intention de revendre, les instruments qui leur sont nécessaires. Ils les achètent pour leur usage, pour leur consommation. (Voyez Esprit du Code de commerce, tome 8, page 274.)

III. Comme nous l'avons dit au commencement de cet article, il y a acte de commerce, soit qu'on achète des denrées ou marchandises pour les revendre en nature, soit qu'on ne les achète pour les revendre qu'après les avoir travaillées et mises

en ceuvre.

Sous ce dernier rapport, l'art. 4, tit. 12 de l'ordonnance de 1673 donnait pour exemples les ventes faites à tailleurs d'habits, pour étoffes, passements et autres fournitures; boulangers et pâtissiers, pour blé et farine; maçons, pour pierre,

moellon et plâtre; charpentiers, menuisiers, charrons, tonneliers et tourneurs, pour bois; serruriers, maréchaux, taillandiers et armuriers, pour fer; plombiers et fonteniers, pour plomb, et autres semblables. Ainsi les achats de choses destinées à être travaillées avant la revente, sont ceux que font les artisans, fabricants et manufacturiers pour se procurer les matières premières.

IV. Pour que la revente puisse attribuer le caractère d'acte de commerce à l'achat qui l'a précédée, il faut qu'elle soit principale, c'est-à-dire que les choses achetées ne soient pas vendues comme accessoires de choses principales qui n'ont pas été achetées. Il faut bien faire attention à ce principe qui décide beaucoup de questions dans lesquelles on serait souvent embarrassé, si on l'oubliait. Il est très-bien développé par M. Pardessus dans son Cours de droit commercial, tome 1, nos 14, 15 et 16, 1re édit.

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Pour que la revente d'une chose, dit-il, attribue la qualité d'acte de commerce à l'achat qui l'a précédée, il faut qu'elle soit principale: elle n'a pas ce caractère, lorsqu'elle n'a lieu que comme accessoire de la vente de choses qui n'ont pas été achetées. Ainsi, le cultivateur qui vend, avec son vin, ou avec les liqueurs qu'il a fabriquées du produit de ses récoltes, des tonneaux achetés, n'est pas présumé faire une revente capable d'attribuer la qualité commerciale à l'achat qu'il a fait; mais, par une juste conséquence de ce principe, on ne pourrait en dire autant du distillateur qui compose des liqueurs avec les vins ou autres liquides qu'il se procure à prix d'argent. L'achat qu'il fait des tonneaux pour contenir et vendre le produit de ses distillations, est réputé acte de com

merce.

<< De même l'auteur qui fait imprimer à son compte, et qui débite ses ouvrages, n'est pas présumé avoir fait un acte de commerce en achetant le papier et les autres matières qui ont servi à cette impression; mais cette exception ne militerait pas en faveur du libraire qui aurait fait imprimer l'ouvrage dont l'auteur lui a donné ou vendu le manuscrit; du journaliste qui, ne rendant compte que d'évènements ou d'objets qui sont en quelque sorte du domaine commun, ne peut pas être assimilé à l'auteur d'un ouvrage purement littéraire, quoique périodique.

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« La même distinction sert à décider quelques autres questions. L'artiste-peintre qui achète des couleurs, des toiles, des cadres, qu'il revend ensuite, convertis en tableaux, ne fait point acte de commerce, quoique l'artisan peintre en bâtiment fasse un acte de commerce dans la même circonstance. Un instituteur, en achetant des marchandises et denrées pour les besoins de sa pension, n'a pas fait un acte de commerce, parce qu'il ne revend ensuite ces choses aux élèves que comme accessoire de l'instruction et de l'éducation qu'il leur donne; mais le restaurateur, l'aubergiste,

Tome I.

le maître de poste, l'entrepreneur de transports, font des actes de commerce dans l'achat des vivres et denrées nécessaires à l'exercice de leurs fessions.

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« Les mêmes exceptions s'appliquent au cas où la revente est la suite, et en quelque sorte un moyen de certaines opérations agricoles, étrangères aux spéculations commerciales. Un cultivateur achète souvent des animaux maigres qu'il engraisse et revend ensuite : cet achat ne doit pas être réputé acte de commerce, quoique cependant au fait de la revente se joigne celui qu'en achetant il avait l'intention de revendre. Mais il est nécessaire que l'agriculture soit sa véritable profession; s'il spéculait sur l'achat d'animaux pour les revendre après les avoir fait engraisser, il faudrait déclarer ces achats actes de commerce. »

V. La loi, comme nous l'avons dit, considère les achats comme actes de négoce, non-seulement lorsque l'acheteur a l'intention de revendre les choses achetées, mais même lorsqu'il se propose d'en louer simplement l'usage.

Les achats qui, sous ce dernier point de vue, sont actes de commerce, sont ceux que font les maîtres de poste, les loueurs de carrosses, les loueurs de chevaux, pour se procurer les chevaux, les voitures qu'ils louent ensuite au public; les maîtres d'hôtels garnis, pour meubler les appartements de leurs hôtels, etc.

C'est sur ce principe qu'un arrêt de la cour de cassation, section des requêtes, du 9 janvier 1810, au rapport de M. Bailly, a décidé que l'entrepreneur du service public des pompes funèbres doit être rangé dans la classe des commerçants, à raison des fournitures qui lui sont faites relativement à son entreprise, parce qu'il ne les a achetées que pour en louer l'usage. (Sirey, 1810, p. 125.)

VI. Le Code ne qualifie actes de commerce que les achats de denrées ou marchandises. Ainsi, l'acquisition d'immeubles pour les revendre n'est point une opération commerciale. Il en est de même de l'achat d'un fonds de commerce quelconque.

Il n'est pas douteux que les créances qui appartiennent au commerce ne doivent être considérées comme marchandises, et que leur négociation ne soit un acte de commerce. Mais peut-on en dire autant des créances purement civiles? M. Pardessus ne le pense pas. « La spéculation, dit-il, d'une personne qui achéterait des créances établies par des contrats de constitution, par de simples reconnaissances ou par tous autres titres civils et étrangers aux opérations commerciales, dans la vue de les revendre ou de faire un profit quelconque, ne serait pas considérée comme un acte de commerce. » (Cours de droit commercial, tom. 1 pag. 9, 1 édit.)

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Quid des créances sur l'état? La loi du 28 floréal an 7, et le décret du 13 thermidor an 13 7

condamné à leur payer une somme de 34,249 fr. qu'il devait à la maison Fonvielle et compagnie. La seconde, à ce qu'il fût tenu de justifier du versement de sa mise de fonds dans la société Fonvielle, à défaut de quoi il fût condamné à payer le montant de cette mise.

ayant déterminé, pour rendre plus facile et plus rapide la circulation des effets publics, des formes qui les assimilent, en quelque sorte, aux créances commerciales, il semble qu'on doit les ranger dans la classe des marchandises, et réputer acte de commerce l'achat de ces créances fait par un particulier, dans l'intention de les revendre. C'est en effet ce qu'a jugé la cour de cassation, par arrêt de la section des requêtes, du 19 juin 1808, dans lequel on lit ces motifs : « Attendu que si l'achat d'effets publics que l'acheteur destinerait à être employés pour son compte, soit en acquisitions, soit pour se libérer, ne le rend pas justiciable des tribunaux de commerce, il en est autrement si cet acheteur les a négociés ou les a achetés pour les négocier.....»

VII. Les autres opérations que la loi classe parmi les actes commerciaux par leur nature sont les entreprises de manufactures, de commission, de transport par terre et par eau; les entreprises de fournitures, d'agences, bureaux d'affaires, établissements de ventes à l'encan, de spectacles publics; les opérations de banque, change et courtage; entre toutes personnes, les lettres de change, ou remises d'argent faites de place en place; les entreprises de construction; les achats, ventes et reventes de bâtiments pour la navigation intérieure et extérieure; les expéditions maritimes; les achats ou ventes d'agrès, apparaux et avitaillements; tout afrétement ou nolissement, emprunt ou prêt à la grosse; toutes assurances et autres contrats concernant le commerce de mer; tous accords et conventions pour salaires et loyers d'équipages; tous engagements de gens de le service des bâtiments de commerce. mer pour (Voy. Code de commerce, art. 632 et 633.) Il suffit d'indiquer ici que ces diverses opérations sont des actes de commerce; nous en parlerons avec plus d'étendue sous les différents mots qui les désignent.

VIII. Un individu non-commerçant est-il justiciable du tribunal de commerce, par cela seul qu'il est poursuivi à raison d'actes de commerce? La cour de cassation a décidé l'affirmative par un arrêt du 3 juin 1817, rapporté en ces termes au Bulletin civil:

En 1808, les sieurs Fonvielle et compagnie formèrent en cette ville une société qui avait pour objet des spéculations de commerce maritime. Elle était composée d'un grand nombre d'actionnaires en commandite, entre autres du sieur Piau, qui devait fournir pour sa mise de fonds une somme de 20,000 francs.

La maison Fonvielle ayant fait faillite, ses créanciers nommèrent des syndics qui procédèrent à la liquidation des affaires.

Ces syndics ont intenté contre le sieur Piau deux demandes qu'ils ont portées devant le tribunal de commerce de Paris.

La première tendait à ce que le sieur Piau fût

Sur la première demande, le sieur Piau a décliné la juridiction du tribunal de commerce, par le motif qu'il n'était pas négociant.

Deux jugements, l'un du 23 juin 1809, l'autre du 16 mai 1810, ont admis les syndics à prouver que Piau faisait et n'avait cessé de faire le commerce.

Les syndics n'ont pas procédé à cette preuve, et ils ont soutenu qu'elle était inutile : attendu qu'en fait, les actes à raison desquels ils poursuivaient Piau étaient des actes de commerce; et, en droit, que, d'après ces actes, Piau, quelle que fût sa profession, était justiciable du tribunal de commerce.

Ce système fut accueilli.

« Considérant qu'il résulte des débats et plaidoiries qui ont eu lieu entre les parties, que les opérations faites entre les sieurs Fonvielle et Piau ont été des actes de commerce, et ont eu pour but la réalisation d'opérations commerciales le tribunal de Paris se déclara compétent, et, au fond, condamna Piau à payer aux syndics la somme répétée.

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Sur la seconde demande, le tribunal se déclara également compétent, malgré le déclinatoire encore proposé par Piau, et le condamna à justifier, dans trois jours, du versement de sa mise, ou à en payer le montant.

Sur l'appel interjeté par Piau, arrêt de la cour de Paris, en date du 27 avril 1814, qui prononce que Piau est complètement libéré des 20,000 fr. montant de sa mise.

Quant à l'autre demande relative aux 34,249 fr., l'arrêt rappelle les deux jugements du tribunal de première instance qui avaient chargé les syndics Fonvielle de prouver que Piau était négociant: puis « attendu que les syndics n'ont pas exécuté lesdits jugements dans le délai qu'ils leur prescrivaient, ni même depuis, et que même ils ne se sont pas mis en devoir de commencer la preuve à laquelle les jugements les contraignaient», la cour déclare que le tribunal de commerce n'avait pu compétemment prononcer sur cette affaire, et renvoie les parties à se pourvoir devant les juges qui en doivent connaître.

Les syndics se sont pourvus contre cet arrêt et ont présenté plusieurs moyens : le principal a consisté à soutenir qu'en supposant que Piau ne fût ni négociant, ni marchand, ni banquier, il suffisait que la demande dirigée contre lui eût pour objet des actes de commerce, pour qu'on eût eu le droit de le traduire devant le tribunal de commerce;

Qu'il était constant en fait, reconnu par le ju

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