Page images
PDF
EPUB

1819, au rapport de M. Buschop. (Sirey, 1819, | l'arrêt rendu le 19 juillet 1820, est par défaut et page 317.) qu'il n'a pas été signifié au prévenu; que dès lors cette chambre n'est point dessaisie, déclare qu'il y a litispendance, et renvoie les parties à se pouvoir pardevant qui de droit.

XVIII. Mais la prescription est-elle interrompue par des poursuites dirigées, soit par un magistrat compétent, soit par la partie civile, si le magistrat qui a fait ces poursuites exerce près d'un tribunal incompétent pour juger le délit, ou si la citation est donnée devant un tribunal qui ne peut en connaître ?

Est-il vrai qu'en matière criminelle comme en matière civile, la citation donnée devant un juge incompétent interrompe la prescription?

Un juge suppléant ne peut-il être jugé en matière correctionnelle que par la cour royale, comme tout membre de tribunal de première in

stance?

En matière criminelle, le juge est-il tenu de suppléer d'office le moyen résultant de la prescription ?

Un arrêt est-il à l'abri de la cassation, encore bien que ses motifs soient en contravention avec la loi, si son dispositif y est conforme ?

La cour de cassation a résolu ces importantes questions pour l'affirmative dans l'espèce suivante: Le 12 novembre 1818, le sieur Lombardi, propriétaire à Ajaccio, traduisit devant le tribunal correctionnel de cette ville le sieur Hector Cristianacce, pour s'être permis, le 10 du même mois, de l'injurier dans la salle d'audience, au milieu d'un nombreux concours de spectateurs. Le 5 décembre, jugement par défaut qui condamne Cristianacce, à 16 fr. d'amende et aux dépens.Le 23 décembre, appel par le condamné. Le 14 juin 1820, arrêt de la cour royale de Corse, chambre des appels de police correctionnelle, qui ordonne que Lombardi, qui ne paraît à l'audience, sera réassigné. Le 19 juillet suivant, autre arrêt qui, attendu que le sieur Cristianacce, comme juge-suppléant, est membre du tribunal d'Ajaccio, et qu'en cette qualité, il n'est point justiciable du tribunal de cette ville, mais bien de la cour royale, déclare le jugement du 5 décembre nul comme incompétemment rendu, sauf à poursuivre ledit sieur Cristianacce conformément à

la loi.

Enfin, le 9 août 1821, arrêt définitif qui déclare l'action prescrite et éteinte; déclare en conséquence, qu'il n'y a lieu à prononcer contre Cristianacce aucune condamnation et le renvoie de la plainte. Les motifs de cet arrêt sont :

[merged small][merged small][merged small][merged small][ocr errors][merged small]
[ocr errors]

Qu'en fait, et, d'après ces principes, le fait imputé à Cristianacce ayant eu lieu le 10 novembre 1818, il s'est écoulé, depuis cette époque jusqu'à celle de l'arrêt de la cour, plus de vingt mois, sans poursuites, ou du moins sans poursuites valables, temps plus que suffisant pour prescrire l'action intentée par Lombardi.»

Le procureur-général de la cour royale de Corse, s'est pourvu contre cet arrêt, pour fausse. application de l'art. 29 de la loi du 26 mai 1819, et violation de l'art. 2246 du Code civil.

Mais après un délibéré, prorogé pendant huit jours, arrêt est intervenu le 18 janvier 1822, au rapport de M. Aumont, par lequel,

[ocr errors]
[ocr errors]

Le ministère public, en exécution de l'art. 479 du Code d'instruction criminelle, et de l'art. 4 du décret du 6 juillet 1810, obtint de M. le premier président de la cour royale, une ordonnance portant permission d'assigner Cristianacce, à la chambre civile de cette cour. - Le 19 mai 1821, arrêt qui déclare la citation nulle et comme non avenue pour avoir été donnée devant la chambre correctionnelle, au lieu de l'avoir été devant la chambre civile conformément à l'ordonnance du président, condamne l'huissier signataire de la« citation aux frais occasionnés par sa faute, et ordonne que le prévenu sera, réassigné.

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

Vu l'art. 29 de la loi du 26 mai 1819, portant: L'action publique contre les crimes et délits commis par la voie de la presse ou tout autre moyen de publication, se prescrira par six mois révolus, à compter du fait de publication qui donnera lieu à la poursuite.

S'il a été fait, dans l'intervalle, un acte de poursuite ou d'instruction, l'action publique ne se prescrira qu'après un an, à compter du dernier acte, à l'égard même des personnes qui ne Le 2 juin 1821, nouvel arrêt, sur la réassigna-« seraient pas impliquées dans les actes d'instruction prescrite par la cour, qui, considérant que « tion ou de poursuite....

[ocr errors]

« L'action civile ne se prescrira, dans tous les cas, que par la révolution de trois années, à compter du fait de la publication. »

« Vu, aussi, les art. 637 et 638 du Code d'instruction criminelle; attendu que les dispositions de ces articles sur l'interruption de la prescription, ne sont pas subordonnées à la compétence des tribunaux, auprès ou dans le ressort desquels sont placés les magistrats ou officiers publics qui ont procédé aux actes d'instruction ou de poursuites, ou devant lesquels la citation à la requète de la partie civile a pu être directement donnée;

Que la compétence de ces tribunaux ne devrait en effet être prise en considération, que relativement aux actes qui leur seraient propres, et que, d'après les articles ci-dessus relatés, il suffit pour l'interruption de la prescription, de simples actes d'instruction ou de poursuite, sans qu'il soit nécessaire qu'il ait été statué par des tribunaux;

Que des actes d'instruction ou de poursuite, émanés d'un magistrat ou officier public, ayant qualité pour instruire ou pour suivre sur le fait du délit considéré en lui-même, sont des actes valables, et qu'ils ont un caractère judiciaire, quelque puisse être, d'ailleurs, le tribunal qui, à raison de la qualité du prévenu, devra postérieurement prononcer sur le délit; qu'ils établissent donc légalement que l'action de la justice a été mise en exercice; que, par conséquent, lorsqu'ils sont faits avant que la prescription soit acquise, ils en détruisent la source et en arrêtent le cours, Qu'il en est de même d'une citation directement donnée par une partie civile; qu'elle a eu l'effet de saisir le tribunal, d'obliger le prévenu d'y comparaître pour présenter ses défenses ou pour proposer son déclinatoire, que lors donc qu'elle a été régulière, dans la forme, elle a eu un caractère légal et a ainsi constitué un acte de poursuite; que si cette poursuite a été mal dirigée, à raison de l'incompétence du tribunal, elle n'en a pas moins existé, et qu'elle a dû conséquemment interrompre la prescription;

[ocr errors]

«

Que c'est sur des principes analogues que les art. 2246 et 2247 du Code civil, ont statué pour les matières civiles, que la prescription n'était pas interrompue par une assignation nulle pour défaut de forme, mais qu'elle l'était par une citation en justice régulière dans la forme, quoiqu'elle eût été donnée devant un juge incompétent;

Mais, attendu, dans l'espèce, que si la prescription de l'action publique, pour le délit d'injures proférées dans un lieu public, a été prorogée à un an, conformément à l'art. 29 de la loi du 26 mai 1819, par la citation donnée à la requête de la partie civile, le 12 novembre 18:8, devant le tribunal de police correctionnelle d'Ajaccio, il s'est écoulé plus d'une année sans actes d'instruction ou de poursuite, depuis la déclaration d'appel faite au greffe par le prévenu, le 23 décembre suivant,

du jugement par défaut contre lui rendu, le 5 dudit mois de décembre, et qui lui avait été notifié le 16 du même mois, et la citation donnée seulement le 23 mai 1820 par le ministère public, audit prévenu, pour voir statuer sur cet appel; que, par cette discontinuation d'actes d'instruction et de poursuite pendant plus d'une année, la prescription avait été acquise en sa faveur d'après les dispositions de l'art. 29 de la loi du 26 mai 1819; que l'arrêt de la cour royale de la Corse, qui l'a ainsi jugé, a donc fait une juste application de la loi;

La cour rejette le pourvoi du procureur-gé

néral..

XIX. La prescription d'un mois établie pour tout délit de chasse, à compter du jour où le délit a été commis, s'étend-elle au délit de portd'armes?

Ainsi, un homme a chassé sur les terres d'autrui, sans le consentement du propriétaire, ou sur son propre terrain, en temps prohibé, avec des armes sans permis. Si les poursuites n'ont commencé qu'après le délai d'un mois, le délit de chasse est prescrit, et le prévenu ne pourra pas être condamné aux peines portées contre ce délit par la loi du 30 avril 1790.

Mais la prescription de ce délit couvre-t-elle également le délit de port-d'armes commis simultanément; et après le délai d'un mois, le prévenn est-il à l'abri des peines établies contre ce second délit par le décret du 4 mai 1812?

Sous l'empire des anciennes ordonnances, le fait de port-d'armes sans permis, constituait à lui seul une infraction aux lois répressives, et pour être punissable, il n'avait pas besoin d'être joint au fait de chasse. Il était alors tout simple que ces deux faits, indépendants l'un de l'autre, ne fussent pas considérés comme assujettis à la même prescription; et cette distinction avait été consacrée par un arrêt de la cour suprême, du 1 août 1811. (Bulletin criminel, page 217.

er

Mais le décret de 1812 ayant abrogé implicitement les anciennes ordonnances sur le portd'armes, comme la même cour l'a jugé par l'arrêt rapporté ci-dessus, n° xIII, et établi que le délit de port-d'armes est toujours et nécessairement accessoire à un fait de chasse, il en résulte que la prescription fixée pour le délit de chasse, s'étend également au délit de port-d'armes. C'est aussi ce qui a été décidé dans l'espèce suivante :

"

« Claude-Pierre Vivenot, Pierre-Rémi et JeanBaptiste Sure, prévenus d'un délit de chasse, sans permis de port-d'armes, ont été traduits par le ministère public, devant le tribunal correctionnel de Neufchâteau; mais l'action n'ayant été intentée contre eux que plus d'un mois après le procèsverbal qui avait constaté le délit, un jugement du 10 juin 1813 les a renvoyés de la demande. Sur l'appel, ce jugement a été confirmé par le tribunal correctionnel d'Épinal, le 28 juillet sui

[ocr errors]

Cet article, par lui-même et par la manière dont il a été introduit dans la loi, prouve qu'il établit une exception au droit commun. Et cette exception ne peut pas s'entendre seulement du droit exclu

attenant aux maisons royales, car ce ne serait lui attribuer que le droit qu'a tout autre propriétaire ou usufruitier, et alors l'article serait sans objet; mais elle signifie que sa majesté a le droit exclusif de chasser, et de faire détruire le gibier dans les propriétés particulières, enclavées dans les forêts et parcs réservés pour ses plaisirs par ledit article 16. La cour de cassation l'a ainsi décidé par arrêt du 2 juin 1814.

vant. Pourvoi en cassation, de la part du ministère public, pour fausse application de l'art. 12 de la loi du 30 avril 1790, qui ne s'applique qu'au délit de chasse, et non au délit distinct de port d'armes à la chasse sans permis, et contra-sif du roi, de chasser dans ses forêts et les parcs vention expresse aux art. 637 et 638 du Code d'instruction criminelle, qui établissent la prescription de trois ans pour tous les délits qui ne sont pas soumis à une prescription spéciale. Mais par arrêt du 1er octobre 1813, au rapport de M. Buschop, -« considérant que la loi du 30 avril 1790, sur la chasse, a été maintenue par le décret du 4 mai 1812; que l'art. 12 de ladite loi fixe le temps de la prescription du délit de chasse à un mois, et que, dans l'espèce, les prévenus n'ont été poursuivis qu'après l'expiration dudit temps de prescription; d'où il suit qu'à leur égard, le délit de chasse a dû être considéré comme n'existant pas; que, dans ces circonstances, il ne pouvait plus y avoir lieu à l'application des peines établies par le décret du 4 mai 1812, contre le port-d'armes sans permis, puisque ce fait n'est puni par ce décret qu'autant qu'il est uni au fait de chasse; qu'il suit de là que le renvoi des prévenus, prononcé par le jugement dénoncé, d'ailleurs régulier dans sa forme, n'est point en contravention à la loi, par ces motifs, la cour rejette...

>>

[ocr errors]

Il y a même raison de décider lorsque le délit de port-d'armes à la chasse sans permis, n'est pas joint au délit de chasse, comme si l'on chasse sur son terrain en temps non prohibé, mais sans être muni d'un permis de port-d'armes. S'il y avait en même temps délit de chasse, les deux délits seraient converts par la prescription d'un mois; s'il n'y a que le délit de port-d'armes avec simple fait de chasse, la prescription ne saurait être plus longue.

XX. L'Assemblée constituante, après avoir, par son décret du 4 août 1789, art. 3, aboli le droit exclusif de chasse, toutes capitaineries, même royales, et toute réserve de chasse sous quelque dénomination que ce soit, déclara que tout propriétaire était libre de détruire et faire détruire toute espèce de gibier sur son terrain seulement; et néanmoins elle se réserva de pourvoir à la conservation des plaisirs personnels du roi.

Lorsque les abus commis à la chasse, l'obligèrent à organiser une loi de police sur cette matière, elle présenta les quinze premiers articles de la loi du 22-30 avril 1790, qui ne parlant que de la chasse en général, laissaient les plaisirs du roi dans le droit commun. Mais sa majesté fit connaître que la loi ne pouvait être sanctionnée, qu'autant qu'on y ajouterait le seizième article qui s'y trouve actuellement, par lequel il est défendu à toutes personnes de chasser et de détruire aucune espèce de gibier, dans les forêts appartenant au roi et dans les parcs attenant aux maisons royales y désignées.

Tome I.

Voici dans quelles circonstances il a été rendu. Le 7 décembre 1812, procès-verbal de deux gardes de la forêt de Compiègne, qui constate que le sieur Paris, propriétaire du domaine des étangs, enclavé dans cette forêt, a été trouvé chassant avec plusieurs personnes, armées comme lui de fusil, et tirant, entre autre gibiers, sur des faisans. Le 5 février 1813 le sieur Paris est cité, à la requête de l'administrateur-général des forêts de la couronne, devant le tribunal correctionnel de Compiègne, pour se voir condamner à l'amende portée par l'art. 4, du tit. xxx de l'ordonnance des eaux et forêts de 1669. Le 14 mars suivant, nouveau procès-verbal contre le sieur Paris, constatant les mêmes faits de chasse ; et le 14 avril de la même année, nouvelle citation devant le même tribunal.

10

A ces deux citations, le sieur Paris oppose que les procès-verbaux sont nuls, parce que les deux gardes de la forêt de Compiègne n'ont pas le droit de verbaliser dans sa propriété; 2° que les prétendus délits constatés par ces procès-verbaux, sont prescrits, d'après l'art. 12 de la loi du 30 avril 1790, qui veut que les actions, pour délit de chasse, soient intentées dans le mois, à compter du jour où le délit aura été commis, 3° qu'au fond, il n'a fait, en chassant sur son propre terrain, quoique enclavé dans une forêt de l'état, qu'user d'un droit légitime.

Le 10 mars et le 21 avril 1813, jugements qui, sans s'arrêter à la nullité ni à la fin de non-recevoir, et vu l'art. 16 de la loi du 22-30 avril 1790, ainsi que l'art. 4 du tit. xxx de l'ordonnance de 1669, condamnent le sieur Paris à cent francs d'amende.

Ces deux jugements sont confirmés, le 9 août suivant, par le tribunal correctionnel de Beauvais, faisant les fonctions de tribunal d'appel.

Le sieur Paris s'est pourvu en cassation pour contravention aux principes par lui invoqués en première instance et en appel, et particulièrement pour fausse application de l'art. 4, du tit. xxx de l'ordonnance de 1669, violation de l'art. 3 du décret du 4 août 1789, et du décret du 31 août 1790.

Et, par arrêt, au rapport de M. Audier-Mas 60

[ocr errors]

"

sillon, et sur les conclusions de M. Merlin at-fondé à se pourvoir en dommages-intérêts contre tendu, sur le premier moyen, que les procès-ver-la liste civile; car il y a négligence des officiers baux dressés par les gardes particuliers de la forêt de S. M. à faire détruire le gibier, et la liste cide Compiègne ont été par eux signés et affirmés, vile en est responsable, aux termes des art. 1383 en conformité de la loi; que ces procès-verbaux et 1384 du Code civil. Voyez Liste civile. faisaient aussi, seuls, preuve suffisante, et que, d'ail- Ce même arrêt décide en outre: leurs, les faits attestés par ces procès-verbaux étaient avoués le réclamant; sur le second par moyen, que le délit de chasse est placé par la loi, au rang des délits forestiers, qui ne se prescrivent que dans le délai de trois mois, et qu'ainsi l'assignation a été donnée dans un temps utile;-sur le troisième moyen, que, s'agissant d'un délit forestier, les gardes avaient le droit de verbaliser dans toute l'étendue de la forêt; sur le quatrième et cinquième moyens, que, par l'art. 3 du décret du 4 août 1789, qui abolit le droit exclusif de la chasse et toutes les capitaineries, même royales, il a été expressément réservé de pourvoir à la conservation des plaisirs du roi; que c'est en exécution de ce décret, qu'en attendant qu'il y eût été pourvu définitivement, il a été assigné provisoirement, par l'art. 16 de la loi du 30 avril 1790, pour les plaisirs de S. M., des forêts et des parcs attenants aux maisons royales énoncées dans cet article, dans lesquels la forêt de Compiègne se trouve comprise, et qu'il a été fait défense à toutes personnes d'y chasser et d'y détruire aucune espèce de gibier; que si, par la prohibition générale à toutes personnes de chasser dans les forêts et dans les parcs attenants aux maisons royales énumérées dans cet article, on n'avait pas entendu comprendre les terres enclavées dans ces forêts et dans ces parcs, l'article aurait été absolument inutile, puisqu'il n'aurait rien attribué au roi qui ne lui eût été dévolu par l'art. 13 de cette même loi; que même cet art. 16 aurait eu l'effet de placer le roi, à cet égard, dans une classe inférieure à celle de tous les autres propriétaires, en limitant son droit de chasse à ceux de ces domaiues seulement qui y étaient énumérés; que cette réserve des forêts destinées aux plaisirs du roi, et leur désignation provisoire, contenues dans le susdit art. 16, sont rappelées dans toutes les lois relatives à la chasse; que cette disposition prohibitive dudit art. 16 de la loi du 30 avril 1790, n'a point été modifiée par le décret du 30 août de la même année, qui n'en renferme aucune abrogation, et qui, d'ailleurs, a été rendu sur des faits, dans des circonstances, et relativement à des lieux particuliers: -- par ces motifs, la cour rejette le pourvoi... »

1° que les gardes des domaines de la couronne ont qualité pour constater les délits de chasse commis dans les propriétés particulières qui y sont enclavées;

2o Que ces délits sont passibles des peines prononcées par l'ordonnance de 1669.

3° Que c'est par trois mois seulement que se prescrivent les délits commis dans les forêts de la liste civile. Ce principe a été consacré, d'une manière encore plus formelle, par un second arrêt de la même cour, au rapport de M. Buschop, du 30 août 1822. (Bulletin crim., page 34.)

XXI. En décidant que les délits de chasse commis dans les forêts de la liste civile ne se pres. crivent que par trois mois, la cour les a considérés comme des délits forestiers qui aux termes de l'art. 8 du tit. 1x de la loi du 29 septembre 1791, ne se prescrivent en effet que par ce laps de temps; et elle s'est déterminée à le juger ainsi parce qu'elle a pensé que l'art. 16 de la loi du 30 avril 1790 établit, pour les bois de la couronne, une excep tion aux principes qu'elle contient, généralement. pour toutes autres propriétés.

Cet arrêt juge nettement que l'art. 16 de la loi du 30 avril 1790 établit pour les propriétés particulières, enclavées dans les bois et les forêts de la liste civile, une charge réelle qui confère au roi le droit exclusif de chasser et de faire détruire le gibier sur ces propriétés. Il se peut, dès lors, que le gibier y vienne en telle abondance, que les récoltes en soient dévastées. Dans ce cas, nul doute que le possesseur, ou fermier, ne soit bien

Il avait paru néanmoins que cette exception devait être étendue aux délits de chasse commis dans tous les bois de l'état, attendu que l'ordonnance de 1669 est pour ces bois une législa tion spéciale, et que, dès qu'il est reconnu qu'elle s'applique à ce genre de délit commis dans les bois de la liste civile, elle devait aussi s'appliquer aux mêmes délits commis dans les bois de l'état, les bois de la liste civile appartenant réellement à l'état, puisque le roi n'en est qu'usufruitier. Un arrêt de la cour de cassation, du 27 juin 1817, avait même consacré cette doctrine. (Bulletin criminel, page 139)

Mais la cour l'a retractée, et a reconnu que la loi du 30 avril 1790 s'applique généralement à tous les délits de chasse commis sur les propriétés particulières et sur celles de l'état, et qu'il n'y a d'exception que pour les bois de la liste civile. En effet, cette loi est intitulée: Loi générale sur la chasse. Elle s'étend donc à tous les faits de chasse, en quelque lieu qu'ils soient commis; et, puisqu'elle ne fait d'exception que pour les bois de la liste civile, elle régit les délits de chasse commis dans tous les autres bois, et notamment dans ceux de l'état, à moins qu'ils ne soient accompagnés de circonstances qui, n'étant point prévues par cette loi, et l'ayant été par l'ordonnance de 1669, appellent l'application de cette ordonnance. En voici un exemple:

Un procès-verbal du 11 octobre 1821, dressé par le garde-général, constate que le même jour,

sur les dix heures et demie du soir, Louis Hérault a été trouvé chassant avec un fusil et sans permis de port-d'armes, dans la forêt du parc appartenant à l'état.

Par exploit du 10 janvier 1822, l'administration forestière fait citer Louis Herault devant le tribunal correctionnel de Beauvais, pour se voir condamner aux peines par lui encourues à raison du fait de chasse constaté par ledit procès-verbal. Mais, le 17 du même mois, jugement du tribunal de Beauvais, qui déclare le délit prescrit aux termes de l'art. 12 de la loi du 30 avril 1790, et renvoie, en conséquence, le prévenu de toutes poursuites.

1791, en refusant de faire son application. Ces principes ne peuvent être révoqués en doute, puisque la cour les a consacrés par son arrêt du 27 juin 1817.

[ocr errors]

Par arrêt du 31 mai 1822, au rapport de M. Buschop : Considérant la loi du 30 avril 1790, sur que la chasse, est générale; qu'elle ne contient d'autre restriction que celle faite par son art. 16, relativement aux domaines faisant partie de la liste civile, et destinés aux plaisirs de chasse du roi; que ses dispositions sont donc applicables à tous les délits de chasse commis sur des propriétés autres que celles mentionnées audit article 16, conséquemment à ceux commis dans les bois et forêts de l'état, comme à ceux commis sur les propriétés communales ou particulières; d'où il suit que tous ces délits de chasse se prescrivent généralement par le laps d'un mois, conformément à l'art. 12 de ladite loi d'avril 1790; - que, dans l'espèce, le délit de chasse imputé à Louis Hérault n'avait point été commis sur un domaine de la liste civile; et que ce délit n'a point été poursuivi dans le mois après qu'il eut été constaté par procèsverbal; d'où il suit qu'en déclarant le délit prescrit et en renvoyant, en conséquence, ledit Hérault de toute poursuite, la cour royale d'Amiens a fait une juste application dudit article 12 de la loi du 30 avril 1790; - d'après ces motifs, la cour rejette.....

Appel par l'administration; et le 2 mai suivant, arrêt conarmatif de la cour d'Amiens, ainsi conçu: « Attendu que la loi du 30 avril 1790, est spéciale pour tous les délits de chasse, puisqu'une autre ne l'a remplacée, modifiée ou abrogée depuis son existence; attendu que l'art. 1, qui fait défense à toutes personnes de chasser sur le terrain d'autrui sans son consentement, n'établit aucune distinction entre les propriétés sur lesquelles le délit de chasse peut être commis; -attendu que l'art. 12 porte, que toute action pour délit de chasse sera prescrite par le laps d'un mois, à compter du jour où le délit aura été commis, et qne, dans le fait, le délit dont il s'agit, constaté par procès-verbal du 11 octobre 1821, n'a été suivi d'assignation que le 10 janvier suivant; attendu qu'en vain on voudrait argumenter de l'art. 8 du tit. ix de la loi du 29 septembre 1791, sur l'administration forestière, lequel porte à trois mois la prescription pour délits forestiers, puisque cette loi, dans aucune de ses dispositions, n'a parlé des délits de chasse, et n'est applicable qu'à tous les autres délits qui peuvent porter atteinte à la production desdits bois et forêts;- adoptant, au surplus, les motifs des premiers juges, la cour met l'appellation au néant, ordonne que le jugement, dont est appel, sera suivi et exécuté selon sa forme et teneur, et condamne l'adminis-munal. tration forestière aux dépens.

ע

XXII. Puisque la loi du 30 avril 1790, est seule applicable aux délits de chasse commis dans les bois de l'état, il en est de même, à plus forte raison, de ceux commis dans les bois des communes ou des établissements publics.

Cependant deux jugements du tribunal correctionnel de Troyes, jugeant en appel, des 25 février et 25 mars 1822, avaient appliqué l'ordonnance de 1669 à denx délits de chasse commis, l'un dans la forêt de Saint-Jean, appartenant à la caisse d'amortissement, l'autre dans un bois com

Ces deux jugements faisaient une fausse application de l'ordonnance de 1669, qui ne régit les délits de chasse qu'autant qu'ils sont commis dans les parcs et bois de la liste civile ; ils avaient en même temps expressément contrevenu à la loi du 30 avril 1790, qui s'applique à tous les délits de chasse, commis soit dans les bois de l'état, soit sur les | propriétés des communes et des établissements publics, soit sur celles des particuliers.

Le ministère public s'est pourvu en cassation pour fausse application de l'art. 12 de la loi du 30 avril 1790, et violation de l'art. 8 du tit. 1x de celle du 29 septembre 1791. Le délit de chasse commis dans une forêt de l'état, a-t-il dit, est un vrai délit forestier prévu par l'ordonnance de 1669, et l'arrêté du gouvernement du 28 vendémiaire an v : dès lors les règles de la prescription doivent, à son égard, être puisées dans la loi du 29 septembre 1791, qui l'a fixée à trois mois. Or, dans l'espèce, les trois mois n'étant pas révolus, il s'ensuivait que le délit n'était pas prescrit, et qu'ainsi la cour royale d'Amiens devait procéder à l'instruction et au jugement au fond. Ne l'ayant pas fait, elle a faussement appliqué la loi du 30 avril 1790, qu'elle a prise pour base de son arrêt, et elle a violé celle du 29 septembre | nière invariable.

M. le procureur-général les a', en conséquence', et pour le seul intérêt de la loi, déférés à la cour suprême, qni en a prononcé l'annulation, par arrêt du 30 mai 1822, au rapport de M. Buschop. (Bulletin criminel. — Sirey, 1822, page 280.)

Ainsi il est maintenant hors de doute que les principes que nous avons exposés, sont bien ceux que la cour régulatrice suit maintenant d'une ma

« PreviousContinue »