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rente, en vertu du transfert qui leur en a été consenti par le gouvernement, il est incontestable que c'était précisément la même demande qui avait été écartée par les jugements des 20 brumaire et 11 frimaire an xiv.

Que, d'ailleurs, les deux demandes ont eu lieu entre les mêmes parties, et ont été formées par elles et contre elles en la même qualité, puisque, en l'an xiv, le gouvernement représentait les hospices de Rouen, à l'égard des débiteurs de la rente, à défaut de notification du transfert;

De tout quoi les demandeurs ont conclu, qu'aux termes de l'art. 1351 du Code civil, les jugements des 20 brumaire et 11 frimaire an xiv, avaient l'autorité de la chose jugée, contre la demande des administrateurs des hospices de Rouen.

Les défendeurs ont répondu,

1o Que les demandeurs étaient non-recevables proposer encore la fin de non-recevoir qu'ils font résulter de l'art. 474 du Code de procédure civile, contre la tierce-opposition aux jugements rendus avec la Régie des domaines; qu'en effet, ils avaient présenté cette fin de non-recevoir devant le tribunal de première instance de Dieppe; mais que ce tribunnal n'y avait eu aucun égard, puisqu'il n'avait débouté les hospices de leur demande que le seul motif que la rente était mélangée de féodalité; et qu'ainsi les demandeurs, n'ayant pas interjeté appel du jugement rendu par le tribunal de Dieppe, n'étaient plus recevables à reproduire la fin de non-recevoir rejetée par ce jugement;

par

2° Que la demande formée en 1814 par la Régie des domaines, n'était pas la même que celle que les hospices avaient formée en 1809, puisque la régie n'avait plus le droit de demander, après le transfert du 4 prairiai an x1, que les arrérages de la rente antérieurs au transfert, et qu'aussi elle n'avait demandé que ces arrérages; mais, que les hospices n'ont démandé que les arrérages échus postérieurement au transfert, et qu'en outre, ils ont demandé qu'il fût passé reconnaissance ou titre nouvel de la rente, ce qui n'avait pas été réclamé par la Régie des domaines;

3° Que la disposition de l'art. 1690 du Code civil n'est pas applicable à un transfert de rentes consenti par l'état; que cette espèce de transfert est une vente de biens nationaux; qu'il est généralement reconnu que les domaines nationaux, leur régime et leur aliénation ont des principes qui leur sont propres et qui font exception au droit commun; et qu'en effet, ni la loi du 21 ventose an VIII, qui a ordonné l'aliénation des rentes dues à l'état, ni l'arrêté du gouvernement du 27 prairial suivant, qui a réglé la forme de la transmission de ces rentes, n'ont exigé la notification des transferts;

4° Qu'au surplus, l'art. 1690 du Code civil dit bien que le cessionnaire n'est saisi, à l'égard des tiers, que par la signification du transport faite au débiteur; mais que les tiers mentionnés dans

cette disposition ne comprennent pas le débiteur Ini-même; que ce sont ceux qui peuvent avoir droit, du chef du créancier, à l'objet qui a été transporté; et qu'aussi l'article mentionne séparément et différemment les tiers et le débiteur;

Qu'il n'y a qu'une exception relative au débiteur; qu'elle est exprimée dans l'art. 1691, et que c'est pour le cas où, avant que le cédant ou le cessionnaire eût signifié le transport au débiteur, celui-ci aurait payé le cédant; que, dans ce cas, le débiteur serait valablement libéré; mais que la loi ayant précisé le cas d'exception, sa disposition doit y être renfermée, et ne peut pas s'étendre à un autre cas non exprimé; qu'ainsi, d'après le texte de l'art. 1691, le débiteur doit être libéré, s'il a payé le cédant, qui aura reçu, au mépris du transport non signifié; mais, qu'il ne s'ensuit pas que le cédant puisse compromettre sur la créance cédée, en faire la remise gratuitement, enfin l'anéantir par sa seule volonté ; et que c'est alors le cas de l'application de la règle Res inter alios acta alteri nocere non potest.

« Sur tout quoi, ouï le rapport fait le 15 de ce mois, par M. Chabot de l'Allier, conseiller en la cour; les observations faites par Duprat, avocat des demandeurs, et par Champion, avocat des défendeurs; ensemble les conclusions de M. HenriLarivière, avocat-général; et après qu'il en a été délibéré cejourd'hui, en la chambre du conseil; « Vu les art. 1351, 1690 et 1691 du Code civil, et l'art. 474 du Code de procédure civile; « Attendu, 1° que, sur l'appel qui avait été interjeté par les défendeurs, du jugement rendu par le tribunal de première instance de Dieppe, les demandeurs avaient le droit de reproduire, pour obtenir la confirmation du jugement, tous les moyens qu'ils avaient proposés en première instance; qu'aussi, sur cet appel, les défendeurs n'ont pas conclu à ce que les demandeurs fussent déclarés non-recevables dans les moyens non adoptés dans les motifs du jugement, et qu'en effet, l'arrêt dénoncé a statué sur ces moyens, en les discutant au fond, et non par fin de nonrecevoir;

2o Que c'était un principe établi par les lois anciennes, et qui a été confirmé par l'art. 1690 du Code civil, que le cessionnaire d'une créance n'en est saisi, à l'égard des tiers, que par la signification du transport faite au débiteur, et qu'ainsi, le cédant reste toujours saisi de la propriété de la créance, à l'égard des tiers, tant que le transport n'a pas été signifié; que c'est en appliquant ce principe, que l'art. 1691 a disposé que le débiteur serait valablement libéré, s'il avait payé au cédant avant la signification du transport; qu'il résulte, conséquemment, des deux articles réunis. et combinés, que le cédant, puisqu'il reste saisi à l'égard du débiteur, peut procéder en justice avec ce débiteur, sur la propriété même de la créance, tant que le transport n'a pas été signifié ;

et qu'ainsi, par une autre conséquence également le jugement rendu entre lui et le débiteur prinincontestable, ce débiteur peut être valablemeut cipal, est, à l'égard de la caution, res inter alios judilibéré par un jugement qui est intervenu entre lui cata, parce que l'obligation de la caution étant et le cédant, avant la signification du transport, essentiellement une dépendance de celle du décomme il serait valablement libéré par une quit- biteur principal, la caution ne peut devoir que tance que lui aurait donnée le cédant; ce qui est dû par le débiteur principal, et peut en conséquence opposer au créancier toutes les exceptions in rem que le débiteur principal pourrait lui opposer. (L. 21, § 4, ff., de Except. rei judic.)

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3° Que les dispositions des art. 1690 et 1691, étant générales et sans limitation, doivent être appliquées aux transferts de rentes consenties par l'état, puisqu'il n'existe aucune loi particulière qui ait prononcé une exception à l'égard de ces transferts; et que, d'ailleurs, les motifs d'intérêt public, qui ont fait exiger, pour les transmissions de créances, les notifications des transports, s'appliquent évidemment aux rentes que l'état a transférées, et surtout à celles qu'il a transférées par de simples actes d'administration, qui ne sont pas rendus publics par l'insertion au Bulletin des lois; 4° Que, dès lors, il est démontré que les défendeurs devaient être déclarés non-recevables, conformément à l'art. 474 du Code de procédure civile, dans la tierce-opposition qu'ils avaient formée aux jugements rendus avec l'administration des domaines, les 20 brumaire et 11 frimaire an xiv, puisque, à défaut par eux d'avoir signifié le transfert de la rente, l'administration des domaines les représentait, lors desdits jugements, pour la propriété de cette rente, à l'égard des débiteurs;

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X. Par une conséquence nécessaire de ce que la caution est considérée comme représentée par le débiteur principal, le créancier peut opposer à la caution le jugement rendu contre le débiteur principal et le faire déclarer exécutoire contre elle. Mais elle peut y former tierce-opposition, si elle se fonde sur des moyens qui lui sont personnels, comme la cour de cassation l'a décidé par un arrêt du 27 novembre 1811, rapporté à l'article Tierce-opposition, § 1, no v.

Par la même raison, si le débiteur n'a obtenu congé de la demande que sur le fondement d'une exception personnelle, comme celle de minorité, la caution ne peut se prévaloir du jugement. (Code civil, arg. de l'art. 2012.)

XI. Si le jugement a été rendu contre la caution, il ne fait aucun préjudice au débiteur principal, parce que l'obligation de celui-ci ne dépend pas de celle de la caution.

En est-il de même si le jugement a été rendu

5° Enfin, que les jugements des 20 brumaire et 11 frimaire an xiv, ayant déclaré la rente pres-au profit de la caution? crite, pour n'avoir pas été servie pendant plus de cinquante-un ans, ont réellement statué sur le principal et l'existence même de cette rente; qu'ils ont donc statué précisément sur ce qui est devenu l'objet de la demande qu'ont formée, en 1809, les défendeurs en cassation, et qu'en conséquence, ils ont, contre cette demande, toute la force de l'autorité de la chose jugée;

« De tout quoi il suit que l'arrêt dénoncé, en déclarant recevable et bien fondée la tierce-opposition formée par les défendeurs, et en ne maintenant pas, d'ailleurs, l'autorité de la chose jugée, a formellement violé les art. 1351, 1690 et 1691 du Code civil, et l'art. 474 du Code de procédure civile ;

« La cour, vidant le délibéré, sans s'arrêter à la fin de non-recevoir proposée par les défendeurs, casse et annule l'arrêt rendu par la cour royale de Rouen, le 18 novembre 1813, etc.

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« Fait et jugé, etc. Section civile. IX. Comme l'obligation de la caution est une dépendance de l'obligation du débiteur principal, le jugement rendu soit au profit de ce débiteur, soit contre lui, est censé rendu avec la caution. Ainsi, lorsque le jugement rendu en faveur du débiteur principal a la force de chose jugée, l'exception de chose jugée qui en résulte appartient à la caution, comme au débiteur principal, sans que le créancier puisse opposer à la caution que

La difficulté vient de ce que, suivant l'art. 1365 du Code civil, le jugement rendu d'après le serment décisoire prêté par la caution, non pas sur le simple fait du cautionnement, mais sur le fait de la dette, profite au débiteur principal et aux autres cautions: d'où l'on conclut que lorsque le jugement porte sur la dette elle-même, le débiteur peut l'invoquer, bien que sa libération ne dépende pas de celle de la caution.

Mais l'analogie entre ces deux cas n'est qu'apparente. La disposition relative au serment décisoire est fondée sur ce que le créancier, prenant pour juge la caution elle-même sur le fait de la dette, il reconnaît qu'il n'y en a pas, si elle le déclare sous la foi du serment. Or, cela ne peut se dire des cas où la caution a été renvoyée de la demande pour toute autre cause; car de ce qu'il a été jugé, à l'égard de la caution, qu'il n'y avait pas de dette, ou que l'engagement était vicieux ou éteint, il ne s'ensuit pas que cela soit rigoureusement vrai à l'égard du débiteur, dont l'obligation ne dépend pas de celle de la caution, comme celle de cette dernière dépend de celle du premier. Cette différence entre le congé de la demande par suite de la prestation du serment décisoire, et le congé pour toute autre cause, est clairement établie par les lois 28, § 1, ff. De jure jurando, et 52, § 11, ff. De fidejus. et mandat. La première de ces lois décide, comme

l'art. 1365 du Code civil, que le serment déci- | avec lesquels il a été rendu, aient été remplacés soire prêté sur le fait de la dette par l'un des dé- par d'autres, parce que c'était l'établissement pubiteurs solidaires, libère les autres; et la seconde blic qui était la véritable partie, par le ministère porte, que le congé de demande, obtenu par l'un de ses administrateurs, et que c'est conséquemde ceux qui avaient donné à quelqu'un le mandat ment avec lui que le jugement a été rendu. de prêter de l'argent à un individu, et qui par cela même étaient garants solidaires du remboursement, ne profite pas aux autres. Plures ejusdem pecuniæ credende mandatores, si unus judicio eligatur, absolutione quoque secuta non liberantur, sed omnes liberantur pecunia soluta. La raison en est que leurs obligations ne dépendant pas de celle de leur codébiteur, quoiqu'elles soient de même nature, ce qui est réputé vrai par rapport à l'un, ne l'est pas nécessairement par rapport à l'autre. XII. De même, si l'un des débiteurs solidaires est renvoyé de la demande, par suite du serment décisoire, prêté sur le fait de la dette et non sur celui de la solidarité, ses codébiteurs peuvent invoquer le jugement, suivant les raisons que nous venons de déduire. (Code civil, art. 1365.)

Mais, si c'est pour toute autre cause qu'il a obtenu le congé de la demande, les autres ne peuvent se prévaloir du jugement, comme le décide la loi 52, § 11, ff. De fidej. et mandat. C'est qu'en effet l'obligation d'un débiteur solidaire ne dépend point de celle de son codébiteur, quoiqu'elle soit de même nature. Voilà pourquoi l'un d'eux ne peut opposer la compensation de ce que le créancier doit à son codébiteur. (Code civil, art. 1294.)

En sens inverse, le jugement rendu contre l'un des débiteurs solidaires, n'a point l'autorité de la chose jugée contre les autres, toujours parce que leur obligation ne dépend point de la sienne. La preuve en est qu'ils ne sont libérés, ni par la compensation qui le libère, ni par le serment, par lui prêté, qu'il n'est point débiteur solidaire, ou simplement qu'il ne doit rien, ni par l'effet de son incapacité personnelle. (Code civil, art. 1294, 1365 et 2012.)

XIII. On est censé avoir été partie dans un jugement encore bien qu'on n'y ait pas été partie par soi-même, lors qu'il a été rendu avec ceux qui avaient droit et qualité pour nous représenter en justice, pour y poursuivre nos droits, et pour les défendre, tels que sont les tuteurs et autres légitimes administrateurs.

Ainsi le jugement rendu avec un tuteur, en sa qualité de tuteur, produit l'exception de chose jugée soit au profit du mineur, soit contre lui, suivant que le jugement a été rendu pour ou contre le tuteur, parce que ce jugement est censé avoir été rendu avec le mineur, qui était la véritable partie par le ministère de son tuteur.

Pareillement, les jugements rendus avec les administrateurs d'un établissement public, sont censés rendus avec cet établissement, et produisent à leur profit, ou contre eux l'exception de chose jugée, encore bien que les administrateurs,

XIV., L'exception de chose jugée ne pouvant avoir d'effet qu'à l'égard de ceux qui ont été parties au jugement qui la produit, soit par leurs auteurs, soit par eux-mêmes, soit par ceux qui avaient droit et qualité pour les représenter en justice, pour y poursuivre leurs droits et pour les défendre, elle ne peut être opposée par ceux qui n'ont pas été parties dans le jugement, ni également à ceux qui n'y ont pas été parties, encore bien que la question à décider, soit la même qui a été jugée, encore bien qu'elle soit fondée sur la même cause, sur le même titre, sur le même fait, et qu'elle doive se décider par les mêmes moyens, parce que tout jugement est, relativement à ceux qui n'y ont pas été parties, res inter alios judicata, qui par suite ne peut ni leur profiter, ni leur préjudicier.

La loi 22, ff., de Except. rei judic., fait l'application de cette règle dans l'espèce du dépôt d'une somme d'argent. Elle suppose que le dépositaire de cette somme étant mort sans l'avoir restituée, le créancier a formé une demande contre l'un de ses héritiers en restitution de la somme déposée, pour la portion dont il était tenu, c'est-à-dire, en proportion de sa part héréditaire, et que, sur cette demande, est intervenu un jugement qui en a donné congé à l'héritier assigné. La loi décide que ce jugement ne pourra produire en faveur des autres cohéritiers l'exception de chose jugée, encore bien que la question à juger avec ces cohéritiers, soit la même que celle sur laquelle il a été statué, parce que la demande qui serait formée contre d'autres cohéritiers, n'existerait pas entre les mêmes parties que la première. Si cum uno hærede depositi actum sit, tamen cum cæteris hæredibus recte agetur; nec exceptio rei judicatæ eis proderit ; nam si eadem quæstio in omnibus judicüs vertitur, tamen personarum mutatio cum quibus singulis suo nomine agitur aliam atque aliam rem facit. D. L.

Ces dernières expressions aliam atque aliam rem facit, son remarquables; par ces mots, aliam atque aliam, la loi exprime qu'il n'y a pas seulement', lors de la seconde demande, changement de personne dans ceux contre qui elle est formée, mais aussi changement dans l'objet de la demande. En effet, quoique chacune des demandes formées contre chacun des cohéritiers ait pour objet une portion d'une même chose, d'une même créance, chacune de ces portions est distincte et indépendante des autres, et l'on ne peut dire, sous aucun rapport, que les portions nouvellement demandées à chacun des cohéritiers, qui n'étaient pas parties dans le premier jugement, soient la por│tion qui avait été l'objet de la demande positive

ment formée contre un autre cohéritier, d'où la | admettre à former tierce-opposition; car, l'obliconséquence qu'il n'y a pas dans les deux de- gation étant indivisible naturaliter, il suffit qu'elle mandes idem corpus. soit due par un d'eux, pour qu'elle soit réputée être due par les autres (Code civ., art. 709). La tierce-opposition serait donc frustratoire, puisque quand même elle réussirait, elle ne détruirait pas le jugement rendu contre celui qui a été condamné, et dès lors le créancier aurait droit d'exiger l'exécution de l'obligation pour le tout.

XV. La même règle reçoit application, lorsque le créancier laisse plusieurs héritiers; si sur la demande de l'un de ses héritiers, en paiement d'une créance héréditaire, pour sa portion afférente, il est donné congé au débiteur, ce jugement ne produira pas l'exception de chose jugée en faveur de ce débiteur, contre la demande qui serait formée contre lui par les autres cohéritiers, soit collectivement, soit par un ou quelques-uns d'entre eux. La raison en est que si, dans l'espèce précédente, il y a changement de personne dans ceux contre qui la demande est formée, il dans celle-ci changement de personnes dans ceux pour qui elle est formée; et que d'autre part comme dans l'espèce précédente, les portions qui seraient l'objet de la seconde demande, ne seraient pas, et ne comprendraient pas même la portion qui aurait été l'objet de la première demande, et que par suite il n'y aurait pas idem corpus.

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XVI. Ce que nous venons de dire ne peut s'appliquer dans les cas où il s'agit de la créance, ou de la dette d'une chose indivisible, telle que serait celle d'un droit de passage. Le jugement rendu avec l'un des copropriétaires ou codébiteurs, est alors réputé rendu avec tous, et produit à l'égard de tous, l'exception de la chose jugée. La raison en est que chacun des copropriétaires ou codébiteurs d'une chose indivisible, ou est propriétaire pro toto, ou débiteur pro toto; que conséquemment la demande qui est formée soit par l'un des copropriétaires, soit contre l'un des codébiteurs, a pour objet la totalité de cette chose; d'où il suit que lorsqu'il a été statué sur cette demande par un jugement ayant force de chose jugée, toute demande ultérieure qui en serait formée soit par d'autres copropriétaires, soit contre d'autres codébiteurs, aurait nécessairement le même objet la première; à quoi il faut ajouter, et touque jours à raison de l'indivisibilité de la chose, que ceux qui en sont copropriétaires ou codébiteurs, sont censés ne faire qu'une seule et même personne, une seule et même partie, un seul et même créancier, ou un seul et même débiteur. (Code civil, arg. de l'art. 709.)

Cette décision paraît rigoureusement conforme aux principes. Mais il nous semble qu'elle doit être bornée aux choses qui naturellement ne peuvent être livrées par parties. Pothier, Traité des Obligations, part. IV, chap. III, sect. III, no 60, pense même que, dans ce cas, ceux des débiteurs qui n'ont point été parties au jugement, peuvent en interjeter appel ou y former tierce-opposition. Nul doute qu'ils n'aient le droit d'appel, si le jugement est de premier ressort et s'ils sont dans le délai de trois mois depuis la signification; mais s'il est en dernier ressort, il paraît difficile de les

Tome I.

Pour les autres espèces d'indivisibilité, nous ne ferions nulle difficulté d'admettre avec Pothier la tierce-opposition.

CIMETIERE. C'est le lieu consacré, dans chaque commune, à la sépulture des morts.

L'ouverture des cimetières, leurs surveillance, police et administration, sont réglées par le décret du 24 prairial an x11 (12 juin 1804).

Voyez Décès (acte de), nos i et iv.

Lorsque les cimetières ont été transférés hors des communes, en vertu des lois et réglements, nul ne peut, sans autorisation de l'administration élever aucune habitation ni creuser aucun puits, à moins de cent mètres de distance.

Les bâtiments existants ne peuvent également être restaurés ni augmentés sans autorisation. - Et les puits peuvent, après visite contradictoire d'experts, être comblés en vertu d'ordonnance du préfet du département. (Décret du 7 mars 1808.)

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CITATION. Dans le Code civil, ce mot signifie une assignation notifiée à quelqu'un par un huissier, à l'effet de comparaître devant un tribunal civil quelconque, et même devant le bureau de conciliation. (Articles 2244, 2245 et 2246.)

Suivant le Code de procédure civile, l'assignation devant un tribunal de première instance, se nomme ajournement (liv. 11, tit. 11); et la citation est l'assignation donnée pour comparaître devant le juge de paix, considéré comme juge ou comme conciliateur. (Articles 1, 51 et 52.)

er

Le Code d'instruction criminelle (articles 145, 169 et 182) emploie aussi ce mot pour exprimer l'acte par lequel une personne est assignée devant le tribunal correctionnel ou de simple police.

C'est dans l'acception que lui donnent les Codes

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de procédure et d'instruction criminelle, qu'il sera Les juges de paix n'ayant point, à proprement employé ici. parler, d'audiences réglées, puisqu'ils peuvent Nous allons exposer les principes sur les cita-juger tous les jours, même ceux de dimanche et tions devant la justice de paix; le bureau de fêtes, le matin et l'après-midi (Code de proc., conciliation; les tribunaux correctionnels et art. 8); la citation doit indiquer le jour et l'heure de simple police. de la comparution, pour que le défendeur sache positivement quand il doit se présenter. Ainsi, ne faut pas se borner à assigner dans le délai ordinaire, ni même à tel jour, comme cela est autorisé en matière d'ajournement.

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§ I.

De la citation devant la justice de paix.

I. D'après la loi du 18 octobre 1790, on ne pou vait citer personne devant le juge de paix, qu'en vertu d'une cédule de ce magistrat. Cette forma lité est abrogée par l'art. 1er du Code de procédure civile, et la citation doit être donnée à la seule réquisition du demandeur. L'un des principaux motifs de cette abrogation, c'est que la plupart des juges de paix écrivent aux parties avant que leur huissier donne la citation, et elles se rendent toujours à cette invitation, surtout quand le juge de paix a, dans son canton, l'influence et la considération qui lui conviennent.

II. La citation doit contenir :

1o La date des jour, mois et an ; les noms, profession et domicile du demandeur. (Code de proc., art. 1er.)

La citation étant donnée à comparaître dans un délai, ce délai ne pourrait être calculé si la date était omise. Il est nécessaire aussi que le demandeur se fasse connaître par ses noms, profession et domicile, pour que le défendeur sache positivement la personne qui l'attaque.

La loi exige que les noms du demandeur soient indiqués, ce qui comprend les nom et prénoms. Cette énonciation est quelquefois indispensable pour faire positivement connaître le demandeur, comme par exemple lorsque deux frères exercent la même profession, et ont le même domicile.

Voyez Ajournement, § II, n° 1.

2o Les noms, demeure et immatricule de l'huissier, les noms et demeure du défendeur. (Ibid.) L'huissier doit être ainsi désigné pour que le défendeur puisse vérifier s'il avait le droit d'instrumenter dans le lieu où il a notifié la citation.

3o Mention de la personne à laquelle copie de

la citation est laissée.

er

il

Le Code de procédure n'attache la peine de nullité à l'omission d'aucune des dispositions de l'art. 1; mais il n'en résulte pas qu'aucune peine ne soit attachée à l'inobservation des formalités qu'il prescrit.

D'abord l'huissier peut, soit pour omission, soit pour contravention, être condamné à une amende de cinq francs au moins, et de cent francs au plus, qui est prononcée par le juge de paix.

Secondement, si les délais n'ont point été observés, et que le défendeur ne comparaisse pas, le juge doit ordonner qu'il sera réassigné, et les frais de la première citation sont à la charge du demandeur, lors même qu'en définitive le défendeur succomberait avec dépens. Dans ce cas, le juge de paix prononce par le fait la nullité de la citation; mais le demandeur qui en perd ainsi les frais, à l'égard du défendeur, a son recours contre l'huissier, aux termes de l'art. 1031 du Code de procédure civile.

Troisièmement, si les formes substantielles ont été omises dans une citation, la nullité doit en être prononcée; car, sans ces formes, l'acte ne peut remplir le vœu de la loi. Mais quelles sont les formes substantielles ?

Voyez Nullité, § 1, no iv.

III. La citation doit être donnée devant le juge du domicile du défendeur, en matière purement personnelle ou mobilière; et s'il n'a pas de domicile, devant le juge du lieu de sa résidence. (Code de proc., art. 2.)

Si cependant un acte contient de la part des parties ou de l'une d'elles, élection de domicile pour l'exécution de ce même acte, dans un autre lieu que celui du domicile réel, la citation peut Le Code n'ordonne pas expressément cette in-être donnée devant la justice de paix du domidication, mais elle n'en doit pas moins être faite, cile convenu. (Code civ., art. 111.) parce qu'en cas de non-comparution, elle est indispensable pour constater que le défendeur a été légalement averti.

4° L'énonciation sommaire de l'objet et des moyens de la demande. (Ibid.)

Il faut bien que le défendeur sache l'objet et le motif de la demande, pour qu'avant de se présenter au jour indiqué, il ait le temps de réfléchir et de se consulter.

5° L'indication du juge de paix qui doit connaître de la demande, le jour et l'heure de la comparution. (Ibid.)

Il est certaines demandes personnelles, comme celles pour salaires des gens de travail, pour gages des domestiques, pour dépense faite par un voyageur dans une auberge qui, pouvant être prouvées plus aisément devant le juge du canton, soit dans lequel est situé l'atelier où l'ouvrier a été employé, soit où se trouve la maison à laquelle le domestique a été attaché, ou l'auberge dans laquelle les dépenses ont été faites, sembleraient devoir être portées devant le juge de ce canton, encore bien qu'il ne fût pas celui du domicile du défendeur. Mais il faut considérer que les lois qui

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