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que comme loi de circonstance; elle fut rendue pour réprimer les désordres qui désolaient alors la Vendée, et elle produisit l'effet qu'on en attendait la paix et l'ordre succédèrent aux troubles, et les mesures répressives durent cesser avec les circonstances qui les avaient nécessitées,

:

au cas où il est constant que, dans le moment où le pillage a eu lieu, les lois étaient sans force dans la commune, et les magistrats sans autorité, par l'effet de la guerre civile?

La négative a été jugée par deux arrêts de la section des requêtes rendus le même jour, 27 juin 1822, au rapport de M. Borel-de-Brétizel, dans une espèce qu'il est nécessaire de faire connaître, pour bien fixer la jurisprudence sur la nature et l'étendue de la responsabilité des communes. Ces arrêts ont été recueillis avec soin par le journal des audiences de la cour de cassation, vol. 1822, page 2 et suivantes. On y trouve d'excellentes réflexions sur la loi du 10 vendémiaire. Voici la première espèce:

Aussi, les lois nouvelles ont-elle abrogé cette loi, de sa nature transitoire. La loi du 30 ventose an XII, dispose que toutes les lois antérieures qui sont l'objet du Code civil, sont abrogées. Or, le Code civil, dans ses articles 1382 et suivants, s'est occupé des quasi-délits et de la responsabilité civile. Le Code pénal contient, dans ses articles 96, 440 et 475, plusieurs dispositions sur le pillage des grains. Ensuite a été publiée la Charte, dont l'esprit général est contraire aux mesures prescri- Dans la nuit du 25, et dans la matinée du 26 tes contre les communes, par la loi du 10 vendé-juin 1815, et lorsque la nouvelle du désastre de miaire an iv. Enfin, depuis la Charte, plusieurs Waterloo fut parvenue à Marseille, un rassemlois ont été rendues pour réprimer les rassemble-blement composé d'habitants de la ville même, ments séditieux et la rebellion. A la vérité, la fondit dans la maison du sieur Fournier, officier cour de cassation a fait l'application de cette loi, retraité; tout ce qui ne fut pas la proie du pilmême postérieurement à celles qui viennent d'être lage fut brûlé ou brisé; rien n'échappa à la racitées, d'où l'on peut se croire fondé à induire pacité et à la fureur du peuple. qu'elle reste en vigueur; mais la cour suprême n'a point encore eu à résoudre, et n'a pas encore positivement et nettement résolu la question.

Au mois de décembre 1819, le sieur Fournier, se fondant sur la loi du 10 vendémiaire an iv, a formé contre la ville de Marseille, une demande en restitution des sommes et objets qui lui avaient été enlevés, et en dommages-intérêts.

Les communes demanderesses présentent un second moyen; elles soutiennent qu'en supposant la loi du 10 vendémiaire an iv encore en vigueur, Cette demande a été successivement rejetée par la cour royale d'Amiens a fait une fausse appli- jugement du tribunal civil de Marseille, et par cation de cette loi à l'espèce particulière. Elles arrêt de la cour royale d'Aix, du 21 juin 1821. s'efforcent de prouver que les autorités locales ont Les motifs donnés par le tribunal de première fait tout ce qui était en leur pouvoir, et se sont instance et par la cour royale sont, en substance, consumées en efforts inutiles pour empêcher le que la loi du 10 vendémiaire an rv, est une loi pillage dont se plaint le sieur Clément ; nous ne spéciale, contraire aux premiers principes du droit les suivrons pas dans cette discussion devenue commun, et fondée sur des considérations d'ordre oiseuse devant la cour de cassation, puisque la public, qui ont fait sentir au législateur la nécesversion que les demanderesses proposaient se trou-sité d'intéresser tous les habitants d'une même vait contredite par l'arrêt dénoncé, qui avait reconnu souverainement que les autorités n'avaient point fait tout ce qu'elles avaient pu pour empêcher le dommage.

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La cour,

sur les conclusions conformes de M. Lebeau, avocat-général; attendu 1° que la loi du 10 vendémiaire an iv n'a été rapportée, explicitement ni implicitement, par aucune loi postérieure; qu'ainsi l'on ne peut se dispenser de la considérer comme étant encore en vigueur; attendu 2° qu'il est constaté, par les procès-verbaux des autorités locales, énoncés dans l'arrêt attaqué, et reconnu, en fait, par l'arrêt même, que les communes n'ont pas fait tout ce qui était en elles pour empêcher le pillage dont il s'agit, ce qui suffit pour justifier l'arrêt; -- rejette. »

commune à la défense des personnes et des propriétés, par la crainte d'une responsabilité qui devait tous les atteindre; qu'ainsi, c'est une loi de rigueur qu'on ne pourrait, sans une extrême injustice, étendre d'un cas à un autre; que, si on se pénètre bien de l'esprit de cette loi, elle suppose l'ordre des choses établi; elle suppose en pleine vigueur tous les pouvoirs, tous les rapports qui constituent la société; elle suppose une police, une commune force publique, des liens sociaux et toutes les garanties qui permettent aux citoyens d'agir, sous la protection des lois et avec les sccours des autorités légales; que cela résulte même du titre de la loi, puisque elle est intitulée Loi sur la police intérieure des communes; que, dès lors, la loi du to vendémiaire an iv, est inappliCet arrêt décide formellement qu'une commune cable aux événements qui se sont passés à Marqui n'a pas fait ce qu'elle pouvait faire, pour em-seille, les 25 et 26 juin 1815, attendu qu'à cette pêcher le pillage commis chez un particulier, doit être responsable des dégats dont on demande la réparation.

IV. Mais cette responsabilité est-elle applicable

époque, la ville se trouvait dans la désorganisa-
tion la plus complète; que les lois y étaient sans
force, les magistrats sans autorité, et que tous les
efforts que ces magistrats auraient
pu faire pour

empêcher la dévastation et le pillage dont se plaint le sieur Fournier, auraient été entièrement inutiles; qu'appliquer la loi de vendémiaire an iv à ces circonstances, serait tromper les vues du législateur; que cette loi, faite pour punir l'égoïsme et la coupable insouciance d'une commune qui aurait favorisé le brigandage, en refusant de seconder les efforts des autorités, ne peut être opposée aux habitants d'une ville, qui, par un concours de circonstances singulières que le législateur n'a pu prévoir, s'est vue tout-à-coup privée des autorités qui veillaient sur elle, ainsi que du secours des lois qui la protégeaient, qui n'a trouvé dans la force publique qu'une puissance ennemie, et a vu fondre à la fois sur ses habitants le fléau de l'anarchie et celui de la guerre civile. Le sieur Fournier s'est pourvu en cassation, pour violation de l'article 1 titre i, et de l'ar

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ticle 1o, titre i, de la loi du 10 vendémiaire an IV. « La cour,—sur les conclusions conformes de sur les conclusions conformes de M. Lebeau, avocat-général; attendu que l'arrêt attaqué a déclaré comme faits constants que, dans les deux jours auxquels se rapportent les désastres dont s'est plaint le demandeur, la désorganisation la plus complète avait détruit, dans la ville de Marseille, tous les liens sociaux, que les lois y étaient sans force, et les magistrats sans autorité; attendu qu'en décidant, dans des circonstances aussi extraordinaires, et dans un état de choses tel, que les moyens indiqués par la loi du 10 vendémiaire an IV, comme propres à prévenir ou à réprimer les délits, ou à en faire connaître les auteurs, avaient momentanément perdu toute leur influence, ladite loi ne pouvait recevoir son application, la cour royale d'Aix s'est conformée à son esprit, sans en violer la lettre ;- rejette...."

Même arrêt a été rendu le même jour contre un sieur Jouve, aussi proprietaire à Marseille, dont la maison fut pillée, dans la même journée, comme celle du sieur Fournier, par un attroupement qui s'y était introduit avec violence.

Par un dernier arrêt du 5 décembre 1822, rendu au rapport de M. Lasagni, et après un long délibéré, la section des requêtes a consacré les mêmes principes que ceux énoncés dans les arrêts ci-dessus rapportés:

pour

Les motifs de cet arrêt qui a statué sur le voi du sieur Guy contre la commune d'Agde, sont ainsi conçus :

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Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, que le 1er juillet 1815, jour du pillage qui fait l'objet du litige, la municipalité, qui avait exercé dans la ville d'Agde les pouvoirs, pendant les cent jours, n'existait plus; que l'ancienne municipalité royale n'était pas encore reconstituée; qu'il n'existait, en conséquence, dans cette commune aucune autorité réellement investie de la force nécessaire pour faire respecter les lois, les personnes et les propriétés ;

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extraordinaires de désorganisation sociale, la loi du 10 vendémiaire an iv, ne pouvait recevoir son application; et qu'ainsi l'arrêt attaqué n'a aucunement violé ladite loi, en prononçant la décharge de la responsabilité reclamée contre ladite commune d'Agde, par le demandeur en cassation; << La cour rejette la demande en cassation. » Les principes adoptés par la section des requêtes dans les cinq arrêts que nous venons de rapporter, ont été successivement consacrés par la section civile dans trois arrêts des 19 novembre 1821, et 1 juillet 1822, qui ont, en même temps, prononcé sur d'autres questions relatives au mode à suivre dans les poursuites dirigées contre les communes. Ces arrêts se trouvent sous les nos vetvi, ci-après.

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V. Les attentats dont parle la loi du 10 vendépublic et la sûreté générale, sont poursuivis miaire an iv, étant surtout commis contre l'ordre d'office par le ministère public, même dans l'intérêt privé des parties lésées. Elles n'ont donc pas besoin d'intervenir dans la contestation, pour obtenir les dommages-intérêts qui leur sont dûs, dès que la cause en a été dûment constatée par la police judiciaire ou de toute autre manière.

dans la contestation, pour soutenir ses droits et La partie lésée peut-elle cependant intervenir hâter la décision des tribunaux ?

Si elle assigne le maire de la commune responsable, est-elle dispensée de demander préalablement l'autorisation du conseil de préfecture?

Est-elle déchue de ses droits, lorsque plusieurs années se sont écoulées, sans que ce tribunal saisi de l'action, ait rendu jugement?

Voici un arrêt du 19 novembre 1821, qui a décidé les deux premières questions pour l'affirmative, et la troisième pour la négative. Nous en puisons l'espèce dans le Bulletin civil de 1821, page 300.

Un attroupement de gens armés se porta, dans. la nuit du 14 au 15 septembre 1815, sur les domaines du sieur Cazelles, situés sur la commune de Montagnac.

Cet attroupement maltraita les gardes, et emporta tout ce qui put être emporté.

Deux cuves remplies de vendange, contenant vingt-cinq muids, furent détruites par les malfaiteurs, qui ordonnèrent aux domestiques d'enlever les effets mobiliers qui leur appartenaient, s'ils ne voulaient les voir devenir la proie des flammes.

Ils exécutèrent leur menace dans la nuit du 15 au 16 dudit mois; ils mirent, en effet, le feu aux bâtiments; vaisselle vinaire, fourrages, ruches à miel, tout fut incendié.

Ces délits furent constatés par l'autorité administrative, qui fit entendre aussi des témoins, et évaluer les dommages causés.

Les procès-verbaux et les autres actes furent de suite transmis au procureur du roi du tribunal

civil de Béziers, en exécution de la loi du 10 vendémiaire an iv.

Un délai de plus de deux ans et demi s'était écoulé, sans qu'il eut été prononcé par ce tribunal sur cette affaire.

Par exploit du 25 juillet 1818, le sieur Cazelles fit citer le maire de Montagnac devant ce tribunal, pour se voir condamner, en cette qualité, aux dommages prévus par la loi du 10 vendémiaire an IV.

Par jugement du 23 novembre 1818, le tribunal déclara, conformément au réquisitoire du procureur du roi, qu'en l'état il n'y avait lieu à statuer, sauf au sieur Cazelles à se pourvoir, ainsi qu'il aviserait, en exécution de l'édit de 1683, et de l'arrêté du gouvernement du 17 vendémiaire an x, pour faire autoriser le maire de la commune | de Montagnac à ester en jugement.

Le sieur Cazelles appella de ce jugement, mais il a été confirmé par l'arrêt attaqué.

Fausse application de l'édit de 1683 et dudit arrêté, et contravention aux articles 2, 4 et 5 de la loi du 10 vendémiaire an IV.

L'arrêt portant cassation est ainsi conçu : « Qui le rapport fait par M. le conseiller Vergès; les observations de Delagrange et Gérardin, avocats des parties, et les conclusions de M. Joubert, avocat-général;

« Vu les articles 2, 4 et 5 du titre v de la loi du 10 vendémiaire an iv;

« Vu aussi l'arrêté du gouvernement du 17 vendémiaire an x;

« Considérant que les délits dont se plaignit le demandeur, vers la fin de 1815, furent alors constatés par l'autorité administrative, et successivement dénoncés par le juge de paix au procureur du roi près le tribunal civil de Béziers;

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Qu'il fut aussi procédé administrativement, en vertu des ordres du préfet du département de l'Hérault, soit à l'audition des témoins, soit à l'estimation des dommages causés par ces délits;

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Que le préfet transmit ensuite, lui-même, les divers procès-verbaux au procureur-général de la cour de Montpellier, et l'invita à faire donner aux poursuites toute la célérité possible;

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« Considérant que cette citation,que la loi n'interdisait pas, ne fut réellement qu'accessoire aux poursuites dont ce tribunal était saisi depuis longtemps, en vertu de l'envoi des procès-verbaux et des autres actes émanés de l'autorité administrative;

Que l'intervention et la citation n'avaient d'autre but que d'éveiller l'attention et d'exciter le zèle du ministère public et du tribunal;

«

Que, par conséquent, malgré cette citation, la poursuite principale, fondée sur ladite loi, conservait sa force et ses effets;

« Considérant que les mesures prescrites par ladite loi, sont de haute police, tant dans l'intérêt du gouvernement, sous le rapport de la sûreté publique, que dans l'intérêt des particuliers lésés;

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Que cette loi, en ordonnant à l'autorité administrative de constater les délits et les dommages, et aux tribunaux de prononcer, dans de très-courts délais, a établi un mode de procéder spécial, totalement inconciliable avec l'édit de 1683, et l'arrêté du 17 vendémiaire an x;

«Que cet édit et cet arrêté, qui défendent, dans les contestations purement civiles, aux créanciers des communes, de se pourvoir devant les tribunaux, sans avoir demandé la permission à l'autorité administrative, sont sans application à des poursuites d'ordre public et de haute police, ordonnées par une loi spéciale, qui détermine à-la-fois les attributions de l'autorité administrative, et celles des tribunaux;

« Qu'en décidant le contraire, la cour royale de Montpellier a faussement appliqué l'édit de 1683, et l'arrêté du 17 vendémiaire an x, et violé les articles 2, 4 et 5 de la loi du 10 vendé

miaire an IV;

er

« La cour casse et annule l'arrêt de la cour royale de Montpellier, du 14 juin 1819, etc. » VI. L'article 1' du titre v de la loi du 10 vendémiaire an iv, qui fixe les dommages-intérêts au double de la valeur des choses pillées ou enlevées, lorsqu'elles ne sont pas rendues en nature, est-il fondé sur ce que, à l'époque de la promulgation de la loi, il n'y avait en circulation que du papier-monnaie, et, par suite, a-t-il été implicitement abrogé par les lois qui ont rétabli le cours du numéraire métallique ?

La partie lésée par un pillage à force ouverte, est-elle non-recevable à intervenir dans l'instance en réparation, introduite par le ministère public, lorsqu'il n'y a pas de retard dans la poursuite?

La cour de cassation a négativement résolu ces. deux questions par son arrêt du 1er juillet 1822, rendu dans l'espèce suivante puisée dans le Bulletin civil, page 187.

A la suite de désordres et de pillages commis dans la commune de Château-Thierry, le 3 juin 1817, par un attroupement formé d'habitants des communes voisines et de Chateau-Thierry

même, une instance fut introduite, à la requête du procureur du roi, devant le tribunal civil de cette commune, pour l'application de la loi du 10 vendémiaire an iv, contre les communes de Château-Thierry, Essonne et Nogentel.

Le sieur Clément, marchand de blé de Château-Thierry, chez qui des enlèvements de grains, de farine et d'autres objets, avaient été faits, intervint dans cette instance, évalua à 12,805 fr. 33 centimes ce qui lui avait été pris, et demanda qu'en conformité de cette loi, les communes de Château-Thierry, Essonne et Nogentel fussent solidairement condamnées à lui payer le double de cette somme.

Mais, par jugement du 6 décembre 1818, le tribunal civil relaxa les communes des fins du réquisitoire du procureur du roi, et déclara le sieur Clément non-recevable dans son intervention, sauf à lui à se pourvoir, par action nouvelle, dans les formes et devant qui de droit,

Le sieur Clément interjeta appel de ce jugement devant la cour royale d'Amiens.

Là, les communes de Château-Thierry, Essonne et Nogentel prétendirent, 1° que la loi du 10 vendémiaire an Iv sur la police des communes était abrogée; 2o que, ne le fût-elle pas, elle n'était point applicable à la cause; 3° que le sieur Clément n'était point recevable dans sa réclamation, attendu que beaucoup de restitutions lui avaient été faites, et qu'il avait traité avec les auteurs du pillage; 4° enfin que, dans tous les cas, il ne pouvait prétendre qu'à la valeur effective des objets qui lui avaient été enlevés.

été faites auraient nécessairement moins reçu que le montant réel de leurs pertes; et que c'était cette considération qui avait fait porter au double de la valeur de ces pertes les condamnations à prononcer; mais que, ce motif n'existant plus depuis le retour du numéraire, la justice exigeait que les communes responsables des dommages soufferts n'en fussent tenues qu'à concurrence du montant effectif de ces dommages.

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Le sieur Clément s'est pourvu en cassation, en déclarant qu'il restreignait son recours à cette dernière disposition de l'arrêt. Les communes de Château-Thierry, Essonne et Nogentel ne se sont pas présentées. Le demandeur a fondé son pourvoi sur la teneur expresse de l'article 1o du titre v de la loi du 10 vendémiaire an iv. La cour a vu en effet une violation formelle de cet article dans la disposition attaquée, et elle a annulé cette disposition par l'arrêt ci-après, sous la date du 1er juillet 1822:

« Ouï le rapport de M. le conseiller Trinquelague, les observations d'Odillon-Barrot, avocat du demandeur, ainsi que les conclusions de M. l'avocat-général Jourde, et après qu'il en a été délibéré en la chambre du conseil ;

"

Vu l'art. 1er du titre v de la loi du 10 vendémiaire an iv;

« Attendu qu'il résulte évidemment des dispositions de cet article que, dans les cas qui y sont prévus, les communes, sur le territoire desquelles des vols ou des pillages ont été commis, sont tenues, lorsque les objets volés ne sont pas rendus en nature, de payer le double de leur valeur à ceux à qui l'enlèvement en a été fait; que la loi ne parle point du signe monétaire de cette valeur, mais de la valeur réelle de la chose même; que c'est donc le double de cette valeur effective, telle qu'elle était à l'époque où le pillage avait eu lieu, qui doit être payé, en quelque monnaie et en quelque temps que le paiement en soit fait;

La cour royale condamna les communes sur tous les points, sauf le dernier. Elle déclara que la loi du ro vendémiaire an iv était en pleine vigueur; qu'il y avait lieu de l'appliquer aux communes attaquées; qu'aucune fin de non-recevoir ne s'opposait à l'action du sieur Clément; mais qu'il n'avait droit qu'à la valeur réelle de ce qui lui avait été pris, et non au double de cette valeur; et, en conséquence, évaluant les pertes « Attendu que la cour royale a borné à la vaqu'il avait éprouvées, d'après les pièces produites leur simple des objets enlevés et non restitués au au procès, et d'après le prix des grains vendus sieur Clément, la condamnation qu'elle a proaux marchés de Château-Thierry, qui avaient im-noncée, tant en principal qu'en dommages-inmédiatement précédé et suivi le pillage, elle fixa le montant de ces pertes à la somme de 8977 fr. 93 cent., et borna à cette somme les condamnations qu'elle prononça, à ce sujet, contre ces communes, tant en capital qu'en dommagesintérêts, le tout avec l'intérêt légal à compter du jour de la demande.

L'arrêt, qui est du 12 juin 1819, fonde eette dernière disposition sur ce qu'à l'époque du 10 vendémiaire de l'an iv, il n'y avait encore en circulation que du papier-monnaie; que le papier perdait chaque jour de sa valeur; que si la loi eût borné à la valeur simple des choses volées les restitutions à faire, il serait arrivé qu'au moment de ces restitutions ceux à qui elles auraient

Tome I.

térêts, contre les communes de Château-Thierry, Essonne et Nogentel, quoiqu'elle eût jugé que la loi du 10 vendémiaire an iv devait être appliquée à ces communes, et qu'elle a par-là formellement violé 'article ci-dessus cité de cette loi:

« La cour, donnant défaut, casse et annule la seule et unique disposition de l'arrêt de la cour royale d'Amiens, du 12 juin 1819, qui borne à la somme de 8977 fr. 93 cent. la condamnation prononcée contre les communes de ChâteauThierry, Essonne et Nogentel, à raison des objets enlevés et non restitués au sieur Clément, tant pour la valeur desdits objets que pour dommages-intérêts, etc.

« Fait et jugé, etc, Section civile, etc. »

72

Le même jour, et par les mêmes motifs, la Mais quand il s'agit de dommages et intérêts cour a cassé un autre arrêt de la cour royale réclamés pour inexécution d'un bail, l'adminisd'Amiens, du 20 août 1819, qui avait aussi ré-tration n'a aucune base pour contraindre la comsolu affirmativement la première question ci-dessus posée.

VII. Il résulte de cette série d'arrêts, qu'il est bien démontré que la loi du 10 vendémiaire an iv a toujours été et est encore en vigueur; qu'il est dans l'intérêt de la société qu'elle soit exécutée; que cependant son application doit cesser lorsqu'on n'a pas de reproches à faire à la commune, ou que ses autorités se trouvaient dans un état complet de désorganisation lorsque le pillage a été commis; qu'enfin, c'est aux tribunaux qu'il appartient d'apprécier ces diverses circon

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L'autorisation du conseil de préfecture, est-elle nécessaire pour réclamer judiciairement contre une commune l'exécution d'un bail?

On sent que lorsqu'il s'agit d'une simple créance, réclamée contre une commune, il lui importe de ne pas s'engager à contester un droit qui serait évident. Si donc l'autorité administrative, qui veille à la conservation de ses droits, reconnaît que la prétention du créancier est bien fondée, elle doit contraindre la commune à payer: dans le cas contraire, le créancier est autorisé à faire valoir ses droits en justice, et la commune use du droit naturel de se défendre.

mune à payer, car tout dépend d'un point de droit à juger et d'une liquidation à faire par les tribunaux. C'est pour cela que dans ce cas, comme dans celui où il s'agit de droits réels, on n'a pas besoin de demander l'autorisation d'actionner la commune. Telle est aussi la décision d'un décret du 21 mars 1809, et d'une ordonnance royale du 23 janvier 1820.

§ III.

Les communes ont-elles besoin d'autorisation pour se pourvoir au conseil-d'état, soit contre les arrêtés des conseils de préfecture, soit contre les décisions ministérielles, soit contre les ordonnances royales qui leur porteraient préjudice?

La négative résulte de l'édit du mois d'août 1764, qui, après avoir ordonné l'exécution des ordonnances et réglements concernant l'autorisation des communes pour plaider, ajoute par forme d'exception, dans l'art. 44, que néanmoins « ne sera nécessaire ladite autorisation, pour se pourvoir devant nous ».

Les communes qui s'adresseraient d'abord au conseil de préfecture, suivraient donc une marche frustratoire, et s'exposeraient à laisser expirer des délais utiles, ou à encourir des déchéances.

§ IV.

Une commune autorisée à plaider en première instance, a-t-elle besoin d'une nouvelle autorisation pour plaider en appel, et se pourvoir en cassation? Si l'arrêté du conseil de préfecture porte expressément ou implicitement qu'en cas de non succès, la commune est autorisée à parcourir tous les degrés de juridiction, l'autorisation est suffisante pour plaider sur l'appel, et il serait bien inutile d'en demander une nouvelle.

S'il ne parle pas de l'appel, la commune peut tel acte est essentiellement conservatoire; mais, signifier qu'elle appelle du jugement, parce qu'un pour suivre, légalement sur cet appel, elle devra rapporter une nouvelle autorisation.

A l'égard du pourvoi en cassation, la difficulté est résolue par l'article 44 de l'édit d'août 1764, rapporté au paragraphe précédent, suivant lequel nulle autorisation n'est nécessaire pour se pourvoir devant le conseil du roi; car, à cette époque, les fonctions que remplit la cour de cassation, appartenaient au conseil de S. M. Or, si une commune n'avait pas besoin d'autorisation pour aller devant le conseil privé ou des parties, elle n'en a pas besoin non plus devant la cour régulatrice qui le représente aujourd'hui. C'est aussi (1) Cette section et les deux suivantes appartiennent à M. le l'attestent trois arrêts des 1er floréal an 1x, 4 frucla jurisprudence constante de la cour, comme baron de Crouseilhes, maître des requêtes au conseil-d'état, et ancien avocat-général près la cour royale de Pau.

tidor an xi, et 12 septembre 1809. « Attendu,

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