Page images
PDF
EPUB
[ocr errors]

C'est sur ces motifs qu'a été rendu l'arrêt de cassation dont la teneur suit:

sans contrevenir aux articles précités du Code | après la faillite de son débiteur, aucun avantage civil 1 ; - casse, etc..... » sur les autres. VII. Celui qui aurait payé une dette qui était éteinte de droit par la compensation, pourrait-il ensuite, en exerçant la créance dont il n'aurait point opposé la compensation, se prévaloir, au préjudice des tiers, des priviléges et hypothèques qui y étaient attachés?

Non; parce que la compensation s'opérant de plein droit, elle éteint par la seule force de la loi, l'obligation et tous ses accessoires, tels que les priviléges et hypothèques. Or, il n'est au pouvoir de personne, de faire revivre, au préjudice des tiers, des droits anéantis. (Code civil, art. 1299.)

Néanmoins, si celui qui n'aurait point opposé la compensation, avait eu une juste cause d'ignorer la créance, qui devait compenser sa dette, il aurait le droit d'exercer les priviléges et hypothèques. Car alors, on ne pourrait pas lui reprocher de n'avoir pas proposé une compensation qu'il ne connaissait pas. (Ibid.)

« Oui le rapport de M. Audier-Massillon, etc. chevalier, conseiller en la cour; les observations de Dupont, avocat des demandeurs; celles de Guichard, avocat du défendeur; et les conclusions de M. Pons, avocat-général : du 18 novembre 1702, et les art. 443 et 446 du « Vu l'art. 1291 du Code civil, la déclaration Code de commerce;

[ocr errors]

Attendu que l'article du Code civil ci-dessus rapporté, qui ne fait que rappeler les dispositions des lois anciennes, exige, pour opérer une comlement liquides et exigibles; pensation de deux créances, qu'elles soient éga

[ocr errors]

était débiteur de Vermeiren d'une somme échue, « Qu'il est reconnu au procès que Verplancken lorsque ce dernier a fait faillite; et qu'il ne présente, pour éteindre cette créance par la voie de la compensation, que des effets de commerce de ce même Vermeiren, dont il était devenu porteur par voie d'endossement, qui n'étaient pas lé-échus le jour de l'ouverture de la faillite, et dont il n'aurait pas pu retirer le paiement par anticipation dans les dix jours qui l'ont précédée ;

Le débiteur d'un failli peut-il, s'il est en même temps son créancier, opposer la compensation gale, si, lors de la faillite, sa créance n'était pas encore échue, et n'est devenue exigible que par

la faillite même ?

La cour de cassation a décidé que non, par arrêt du 12 février 1811, rapporté en ces termes au Bulletin civil:

Verplancken était débiteur de 5111 fr., pour prix de marchandises à lui vendues par Varmeiren, négociant à Gand, lorsque celui-ci a fait faillite et a disparu.

Wangorsel et Smallegauge, qui étaient propriétaires de ces mêmes marchandises vendues par Vermeiren, leur commissionnaire, en ont réclamé le prix, et y ont été autorisés par la masse des créanciers de Vermeiren.

Verplancken a voulu compenser sa dette avec des effets de commerce dus par Vermeiren, dont il était porteur, et qui n'étaient pas échus le jour

de la faillite.

[blocks in formation]

«

porteur, ne sont devenus exigibles que par la Que, si ces effets dont Verplancken était faillite de Vermeiren, ils ont été atteints par elle, et, par conséquent, soumis à en subir les événements à l'égal des autres créances de même nature; et d'autre part, cette faillite a, dans le même moment, saisi et arrêté la créance du failli sur Verplancken, et en la rendant le gage et la propriété de tous les créanciers, elle l'a soustraite à toute compensation qui n'aurait pas été faite antérieurement;

« Attendu que toutes les lois sur les faillites, tant nouvelles qu'anciennes, ayant voulu qu'au moment de l'ouverture de la faillite les droits des créanciers demeurent invariablement fixés, et même que tous les paiements faits pour dettes commerciales non échues dans les dix jours qui l'ont précédée, soient rapportés, il est impossible de supposer que la faillite puisse donner au créancier porteur d'effets de commerce non échus, le droit de se faire payer en entier par voie de compensation d'une créance dont il aurait dû rapporter le montant, s'il l'avait reçu dans les dix jours qui ont précédé la faillite;

« Qu'un pareil privilége accordé à un créancier au préjudice des autres ouvrirait une porte trop large aux abus, et faciliterait les moyens d'éluder les règles que les lois ont établies pour conserver l'actif du failli, et maintenir l'égalité entre les créanciers; d'où il suit que l'arrêt de la cour d'appel de Bruxelles, en admettant Verplancken à compenser ce qu'il devait à Vermeiren pour prix des marchandises à lui vendues',

[ocr errors]

avec des effets de commerce non échus le jour de la faillite, a violé les lois ci-dessus rap-tration par des dispositions législatives, ou par portées ;

[ocr errors]

La cour casse et annule l'arrêt rendu entre les parties par la cour d'appel de Bruxelles, le 6 février 1808.

«

<< Fait et prononcé, etc. Section civile, etc. >>

COMPÉTENCE. C'est le droit de rédiger ou d'expédier un acte authentique, ou de juger une affaire contentieuse.

Voyez Action, Ajournement, Appel, Avoués, Cassation (cour de ), Citation, Commissaire de police, Commissaire-priseur, Conciliation, Conseil-d'état, Conseil de préfecture, Conseil de prud'hommes, Cour d'assises, Cour des comptes, Cour royale, Cour spéciale, Huissiers, Justice de paix, Juridiction, Ministère public, Ministres, Notaire, Préfet, Tribunal correctionnel, Tribunal de commerce, Tribunal de première instance, Tribunal de simple police.

COMPÉTENCE ADMINISTRATIVE. La loi du 24 août 1790 porte, art. 2 du titre 1, que « les fonctions judiciaires sont distinctes, et demeureront toujours séparées des fonctions administratives ».

Elle ajoute au même article, que « les juges ne pourront, à peine de forfaiture, troubler, de quelque manière que ce soit, les opérations des corps administratifs ». Et cette défense est renouvelée par le paragraphe 2 de l'art. 127 du Code pénal, lequel déclare coupables de forfaiture, et punit de la dégradation civique les juges, les procureurs-généraux ou procureurs du roi, ou leurs substituts qui auront excédé leurs pouvoirs en s'immiscant dans les matières attribuées aux autorités administratives, soit en faisant des réglements sur ces matières, soit en défendant d'exécuter les ordres émanés de l'administration, ou qui, ayant permis ou ordonné de citer des administrateurs pour raison de l'exercice de leurs fonctions, auraient persisté dans l'exécution de leurs jugements ou ordonnances, nonobstant l'annulation qui en aurait été prononcée ou le conflit qui leur aurait été notifié.

D'un autre côté, l'article 131 du même Code prononce des peines contre les administrateurs qui entreprennent sur les fonctions judiciaires.

Il était, dès lors, indispensable, que la législation déterminât quelles sont les matières dont les administrateurs peuvent connaître c'est ce qui constitue la compétence administrative.

ע

I. On lit dans l'art. 14 de la Charte, que « le roi fait les réglements et ordonnances nécessaires pour l'exécution des lois et la sûreté de l'état »; et, dans l'article 68, que « les lois actuellement existantes, qui ne sont point contraires à la Charte, restent en vigueur jusqu'à ce qu'il y soit légalement dérogé

".

Cela posé, tous les actes attribués à l'adminisdes décrets ou ordonnances rendues pour l'exécution des lois, lui appartiennent exclusivement et sont interdits aux tribunaux. (Voy. les mots Ministres, Préfet, Conseil de préfecture.)

:

II. L'administration seule peut interpréter les actes qui émanent d'elle elle seule a donc le droit de statuer sur les contestations, dont la solution dépend de l'interprétation de ces actes. Ce principe est le fondement de la juridiction contentieuse administrative.

[ocr errors]

Ainsi, l'aliénation des biens nationaux ayant été faite par des actes purement administratifs, la loi du 17 février 1800 (28 pluviose an vIII), a voulu que l'autorité administrative connût du contențieux, relatif à cette matière.

La compétence, en pareil cas, se borne à la fixation du sens de l'acte.

Ne peut-on l'interpréter en ses propres termes? Est-il nécessaire, pour en faire l'application, de recourir à d'anciens titres, ou de se décider d'après les règles du droit commun? La matière cesse alors d'être administrative, et l'affaire est renvoyée à l'autorité judiciaire.

Cette jurisprudence a été consacrée par beau coup de décrets et d'ordonnances.

On donnera pour exemple l'ordonnance du roi du 25 février 1817, qui a décidé que, lorsque entre deux acquéreurs du même objet vendu nationalement en plusieurs lots, il s'agissait de déterminer les servitudes d'un lot sur l'autre, la question tenant moins à l'interprétation de l'acte qu'à l'application des règles de droit, c'était aux tribunaux qu'il appartenait d'en connaître. (Voyez Conseil de préfecture.)

III. Quelquefois une question est, quant au fond, du ressort des tribunaux, mais il faut avant tout que l'autorité administrative prononce sur la qualité de la personne. Ainsi, un maire est poursuivi personnellement au sujet d'une obligation qu'il prétend n'avoir souscrite qu'en sa qualité de maire. La question de savoir s'il a réellement agi comme administrateur ne peut être jugée que par l'administration. Les tribunaux jugeront ensuite si l'obligation est valable ou nulle. (Voyez Mise en jugement.)

IV. Si dans l'examen d'une affaire administrative, il se rencontre une question de propriété, l'administration excéderait ses pouvoirs en la confondant avec les autres points litigieux. Toute question de propriété est du ressort des tribunaux, et doit leur être renvoyée. (Voyez Conseil de préfecture.)

V. Lorsque, dans la même affaire, les deux autorités judiciaire et administrative refusent de juger, c'est au roi, de qui toute justice émane, qu'il appartient de décider qu'elle est l'autorité compétente. Cette question fait également partie du contentieux administratif; lorsqu'elle s'élève,

on dit ordinairement qu'il y a conflit négatif, titre | ouvrage contre l'ancienne disposition des lieux, et plutôt fondé sur l'usage, que justifié par la propriété de l'expression.

Il n'y a de véritable conflit dans le sens et d'après les termes de la loi, que dans le cas où l'administration revendique une affaire portée devant l'autorité judiciaire. (Voy. Conflit.)

VI. La juridiction administrative n'est jamais compétente en matière de crimes ou délits : ils ne sont instruits et jugés que par les tribunaux.

qui porte ou doit porter préjudice au plaignant, en le troublant dans sa propriété, ou dans un droit réel qu'il prétend avoir droit d'exercer sur l'héritage voisin.

Ces actions ont deux caractères évidemment

communs.

Etrangères à toute question de propriété, elles ont pour objet la possession. Tout le monde en

convient.

Et comme toutes les actions possessoires, elles sont de la compétence du juge de paix. Cela ré

VII. Les actes administratifs ne sont pas susceptibles d'être attaqués par la voie contentieuse. Ainsi cette voie n'est pas ouverte contre les résulte de la combinaison de l'art. 10, tit. 111, de la glements d'administration publique, ni contre les instructions ministérielles.

Elle ne l'est pas non plus en matière de liquidation des dettes de l'état, contre les arrêtés des commissions de révision approuvés par le gouvernement, ni contre ceux du conseil général de la liquidation de la dette publique. (Ordonnances du roi des 11 juin et 6 novembre 1817.)

On observera néanmoins que suivant l'article 40 du réglement du 22 juillet 1806, lorsqu'une partie se croit lésée dans ses droits ou sa propriété, par une ordonnance du roi ou une décision approuvée par lui, rendue en matière non contentieuse, elle peut présenter une requête à S. M. pour, sur le rapport qui lui en sera fait, être l'affaire renvoyée, s'il y a lieu, soit à un comité du conseil, soit à une commission. Ce recours établi dans l'intérêt privé, concilie la justice avec la rigueur des formes. (Voy. Conseil-d'état.) Voy. Juridiction.

COMPLAINTE. On comprend souvent sous cette dénomination toutes les actions possessoires. Mais l'exactitude de la langue du droit ne permet pas de les confondre, parce que si elles ont des analogies sous plusieurs rapports, elles sont aussi caractérisées par des différences essentielles. Nous ne parlerons pas ici des déplacements de bornes, des usurpations de terres, arbres, haies, fossés ou autres clôtures, des entreprises sur les cours d'eau, commis dans l'année, il est traité de ces actions possessoires à l'article Justice de paix. Nous voulons parler des actions possessoires auxquelles les jurisconsultes se sont accordés à donner des dénominations particulières et distinctes, la complainte, la réintégrande, la dénonciation de nouvel œuvre.

La complainte est une action par laquelle on demande à être maintenu dans la possession annale d'un immeuble, ou d'un droit réel immobilier, lors qu'on y est trouble.

Par la réintégrande, on conclut à être réintégré dans la possession d'un héritage dont on a été dépouillé par violence ou voie de fait.

La dénonciation de nouvel œuvre est une espèce de complainte que l'on intente contre celui qui a fait ou commencé sur son fonds un nouvel

loi du 24 août 1790, de l'art. 3. du Code de procédure civile, et du tit. iv du livre 1er de ce Code, ayant pour rubrique des jugements sur les actions possessoires, placé dans ce livre qui traite de la justice de paix. Cela résulte aussi de la jurisprudence constante de cassation, comme on le verra dans le cours de cet article.

Mais la possession, le titre de la possession qu'exigent ces actions, ne sont pas les mêmes. Elles diffèrent aussi dans leurs effets.

Ces caractères différents sont d'autant plus difficiles à tracer d'une main sûre, que l'expérience prouve que cette matière a toujours été l'écueil des plus profonds jurisconsultes.

Dans le droit romain, vingt-six titres traitent des matières possessoires; seize aux Pandectes, neuf au Code et un aux Institutes.

Quelques passages des établissements de SaintLouis, publiés en 1270, quelques articles de l'ordonnance de 1667 et de certaines coutumes, voilà tout ce que l'ancienne législation nous a légué sur cette partie.

Un article de la loi du 24 août 1790, une fraction d'article du Code civil, six articles du Code de procédure civile, sont toutes les dispositions qu'offre la législation moderne sur les actions possessoires.

Et c'est au milieu des détails immenses du droit romain, nécessairement modifiés par la différence de nos mœurs et de nos juridictions; c'est dans l'obscurité où laisse la législation française sur cette matière, et qui ne semble en avoir dit un mot de loin en loin, que pour avertir que nos anciens usages puisés dans les romains n'étaient pas abolis, et pour indiquer le juge qui devait en connaître, c'est, dirons-nous, au milieu de toutes ces difficultés que le juge de paix, composant seul son tribunal, isolé dans la campagne, est appelé à statuer sur toutes les actions possessoires.

Aussi parmi beaucoup de décisions sages, combien n'en a-t-on pas vus d'erronées!

Nous allons rassembler et présenter les principes constants et reconnus, les classer avec ordre, et les appuyer de la jurisprudence de la cour régulatrice, qui a fixé les idées sur les points les plus controversés.

Nous avons été précédé dans cette entreprise par un profond magistrat qui, après avoir publié il y a un demi-siècle un savant traité sur les fiefs, nous a donné un excellent ouvrage sur la compétence des juges de paix. Les lumières qu'il a répandues sur la nouvelle législation, relatives à la complainte, nous serviront souvent de guide. La complainte, la réintégrande, la dénonciation de nouvel œuvre, sont l'objet de trois sec

tions.

SECTION 1re

De la complainte.

On a vu que l'action en complainte tend à étre maintenu dans la possession annale d'un immeuble ou d'un droit réel immobilier, lors qu'on y

est troublé. Elle se porte devant le juge de paix, de la situation de l'objet ligitieux, qui statue sans appel, jusqu'à la valeur de 50 francs, et à charge d'appel, à quelque valeur que la demande puisse monter (Code de proc., art. 3; Loi du 24 août 1770, tit. 1, art. 10.)

Voici la division de cette partie.

1° Choses pour lesquelles on peut intenter complainte.

2

action.

Conditions nécessaires

pour

former cette

3o Personnes qui peuvent intenter complainte. 4° Procédure en matière de complainte. 5° Jugement sur la complainte. Ses effets,

SI.

Des choses pour lesquelles on peut intenter complainte.

I. La complainte est fondée sur ce que celui qui possède une chose depuis plus d'un an, en est, par provision, réputé propriétaire. Il suit de là, qu'elle ne peut, en géneral, être intentée que pour les immeubles et les droits réels immobiliers, à l'égard desquels la possession, prolongée pendant le temps réglé pour la prescription, peut attribuer la propriété. Il serait effectivement contraire à la raison d'accorder à la possession annale l'effet d'obtenir une maintenue en possession provisoire, lorsque la possession trentenaire ne pourrait avoir aucun effet pour la possession définitive ou la propriété.

II. La complainte n'est pas admise pour les meubles; il n'y a pas de règle plus certaine dans notre jurisprudence. Comme en fait de meubles, la possession vaut titre (Code civ., art. 2279), le possesseur actuel est toujours censé propriétaire, en sorte que les meubles ne peuvent être l'objet que d'actions en revendication, qui ont toujours la propriété pour but.

III. L'ordonnance de 1667, tit. xvIII, art. I, avait autorisé la complainte pour universalité de meubles. Cette disposition doit-elle encore être suivie?

Nous ne le pensons pas, parce qu'elle nous paraît inconciliable avec la législation moderne.

Celui qui possède une universalité de meubles, en est réputé, non pas simple possesseur, mais propriétaire. ( Code civ., art. 2279). Pour être maintenu dans sa propriété, il n'a aucune preuve à faire; dès qu'il possède actuellement, on ne peut l'attaquer que sous un rapport, celui de la possession qui forme son titre. Attaquer sa possession, c'est attaquer sa propriété: revendiquer une universalité de meubles, c'est donc en demander la propriété, puisqu'en fait de meubles, la loi ne distingue point la possession de la propriété. Mais la complainte est essentiellement possessoire, et exclusive de toute propriété. (Code de proc., art. 25.)

celui qui possède une universalité de meubles? Quelle est la nature de l'action dirigée contre Elle est mobilière puisque son objet est mobilier. Mais une action mobilière et une action possessoire sont deux choses essentiellement différentes, et la loi a bien soin de les classer à part. C'est ainsi que la loi du 24 août 1790, tit. 111, III, art. 9, attribue au juge de paix la connaissance des actions mobilières dont la valeur n'excède cent francs, et que dans l'art. 10 du même titre, elle dispose que toutes les actions possessoires, à quelque valeur qu'elles puissent monter, seront portées devant lui.

pas

De même le Code civil, art. 1428, donne au mari administrateur de la communauté, l'exercice des actions mobilières et possessoires de sa femme.

Ainsi encore l'article 2 du Code de procédure civile veut qu'en matière mobilière la citation soit donnée devant le juge de paix du domicile du défendeur; tandis que l'art. 3, parlant des actions possessoires, prescrit de donner la citation devant le juge de la situation de l'objet litigieux.

En distinguant avec tant d'exactitude les actions mobilières des actions possessoires, la loi indique qu'elles ne doivent pas marcher sur la même ligne, et c'est pourtant ce qui arriverait, si une action possessoire pouvait avoir pour objet une universalité de meubles.

Sous l'ordonnance de 1667, il était, comme aujourd'hui, de principe, que la complainte n'a pas lieu pour meubles; mais, comme il y avait exception pour une universalité de meubles, il fallait trouver le moyen d'appliquer la loi. Les auteurs en étaient tellement embarassés, qu'ils avaient réduit l'application de l'ordonnance à un seul cas, celui où il s'agissait d'une succession purement mobilière. N'est-il pas dès lors évident qu'il n'y avait que la disposition précise de l'ordonnance qui les portait à admettre une exception qui contrariait le principe général que la complainte n'a pas lieu pour meubles?

L'ordonnance n'ayant plus aujourd'hui force de loi, le principe est vrai sans exception; car, nonseulement cette exception ne se retrouve pas dans

les lois modernes, mais, ainsi que nous l'avons | vitudes discontinues ne peuvent s'établir que par établi, elle les contrarierait évidemment. Elle ne doit donc pas être admise.

IV. Le même article de l'ordonnance autorisait la complainte pour droits réels. Par droits réels il entendait droits réels immobiliers, comme les services fonciers, la perception d'un cens, d'une rente foncière, d'un droit de champart. Tous les auteurs qui ont écrit sous l'empire de cette ordonnance, ont, en conséquence, enseigné que la complainte est admissible pour les rentes foncières, le droit de champart, le droit d'usage dans une forêt, le droit de pâturage, les droits de péage sur un pont, le droit d'user de ce même pont sans payer, le droit d'exiger tels ou tels services, comme d'entretenir les écluses d'un moulin.

Et cela ne pouvait pas être autrement, puisque la loi admettait la complainte pour droits réels immobiliers, et qu'alors les droits qui viennent d'être énoncés, étaient tous réputés immeubles.

Mais l'ordonnance n'admettait la complainte pour ces droits, que parce qu'ils étaient immobiliers. Maintenant ceux de ces droits qui n'ont pas le caractère de servitude proprement dite, ne sont plus de même nature; ils sont meubles, d'après l'art. 529 du Code civil: les seuls droits auxquels la nature d'immeuble soit restée, sont les servitudes ou services fonciers, l'usufruit des choses immobilières, les actions qui tendent à revendiquer un immeuble. (Code civ., art. 526.)

Ainsi, demander, par exemple, si la complainte peut avoir lieu pour une rente foncière, c'est deinander si elle peut avoir un meuble pour objet. Or, nous avons vu que s'il est un principe constant, c'est que la complainte n'a pas lieu pour les choses mobilières.

V. Des principes que la complainte ne peut avoir lieu que pour immeubles et droits réels immobiliers susceptibles de s'acquérir par la prescription (supra, no 1), il résulte que les servitudes continues et apparentes peuvent seules être l'objet de la complainte, et que toutes celles qui ne sauraient être possédées que précairement sans titre, ne peuvent autoriser cette action. C'est, en effet, ce qui a été jugé par trois arrêts de la cour de cassation, section civile, des 23 novembre 1808 et 28 février 1814. (Sirey, 1809, page 35, et 1814, pages 124 et 256.)

Voici les motifs du premier de ces arrêts; ils en feront suffisamment connaître l'espèce.

« Vu les articles 637, 686 et 691 du Code civil;

« Attendu qu'il résulte de ces articles, qu'une servitude ne peut être imposée que sur un fonds et en faveur d'un fonds; d'où il suit que les actions qui en résultent sont attachées à la propriété des fonds auquel la servitude est due, et ne peuvent être exercées par celui qui n'a aucun droit à cette propriété;

[ocr errors]

Que les servitudes non apparentes et les ser

-!

titres; la possession, en cette matière, ne peut conférer aucun droit, et ne peut autoriser aucune action ni au pétitoire, ni au possessoire; - qu'on ne peut pas admettre qu'une possession, pendant une année, puisse donner quelque droit à une servitude qu'on n'aurait pu acquérir par une possession, quelle qu'en eût été la durée; que la coutume de Bayonne prescrivant également toute servitude sans titre, le tribunal n'a pu placer les parties dans l'exception renfermée dans la seconde partie de l'art. 691 du Code civil, qui n'est relatif qu'aux servitudes déja acquises dans les pays où elles pouvaient s'acquérir sans titre, et par la seule possession; -attendu que le tribunal de Bayonne a réintégré les sieur et dame Sallenave dans le droit de puiser de l'eau à la fontaine du sieur Chegaray, qui, en convenant que les sicur et dame Sallenave avaient puisé de l'eau à sa fontaine, ajoutait que c'était de son consentement;

attendu que cette réintégrande a été adjugée sur la demande du sieur Sallenave, qui n'avait aucun héritage voisin auquel cette servitude pût être attachée, et que la dame Sallenave, propriétaire d'un fonds voisin, n'avait été partie ni dans le jugement de première instance, ni en cause d'appel, devant le tribunal de Bayonne; d'où il suit que le jugement attaqué a violé les articles précités du Code civil ; —- casse, etc. »

VI. En matière de servitude, prescriptible avant le Code civil, et imprescriptible depuis (le droit de passage par exemple), peut-on former l'action en complainte, si le demandeur articule une possession, annulée avant le Code et continuée depuis?

Cette question s'est présentée deux fois devant la cour de cassation, et deux arrêts de cette cour, section civile, des 10 février 1812, et 3 octobre 1814, l'ont résolue négativement. (Sirey, 1813, page 3, et 1815, page 145.)

Les motifs de ces arrêts sont « que le passage étant une servitude discontinue, ne peut s'acquérir par la possession; -que la possession de cette servitude ne peut jamais faire présumer ni naître la propriété, sauf le cas prévu par l'art. 691 du Code civil; que, dans ce cas il ne s'agit pas de la possession, mais de la propriété acquise déja par une possession suffisante avant l'introduction du Code civil; que, hors ce cas, la prétendue possession de servitudes discontinues ne peut jamais être utile; qu'elle n'est donc jamais une véritable possession aux yeux de la loi, et conséquemment ne peut, dans aucun cas, fonder l'action possessoire ni la compétence du juge de paix

[ocr errors]

Mais, en sens inverse, dans les pays où l'on suivait la maxime nulle servitude sans titre, faut-il, pour pouvoir intenter complainte à raison d'une servitude prescriptible sous le Code, avoir nonseulement une possession annale, mais aussi une possession trentenaire?

Le tribunal civil de Cherbourg avait décidé

1

« PreviousContinue »