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CONTRAT DE CHANGE. Voy. Change.

CONTRAT DE MARIAGE. C'est l'acte par lequel les futurs époux règlent leurs conventions matrimoniales.

Le contrat de mariage est l'acte le plus important de tous ceux qui interviennent dans la société civile; il n'est pas d'un intérêt purement privé ét restreint à ceux qui y contractent: tout l'ordre social y est intéressé; c'est sur la foi des conventions qui y sont stipulées que les familles s'unissent, et qu'il s'en forme de nouvelles; et les familles sont la richesse de l'état, la source de la prospérité publique.

C'est par cette grande considération d'ordre et d'intérêt public que les contrats de mariage ont toujours joui de la plus haute faveur, et cette juste prédilection leur a été conservée par le Code

civil.

On peut insérer, dans ces actes, diverses stipulations, qui seraient prohibées dans tous autres; ils sont en principe général susceptibles de toutes sortes de conventions, à la seule exception de celles qui seraient contraires aux mœurs et aux lois d'ordre public. Les dispositions législatives sur cette matière ne sont obligatoires qu'autant que les parties les ont expressément ou tacitement adoptées; elles peuvent y déroger; elles peuvent les modifier de la manière qu'elles jugent conve

nable.

Dans le dernier état de la législation, le régime de la communauté était de droit commun dans la majeure partie des pays coutumiers; le régime dotal était celui des pays de droit écrit.

Le Code civil a su faire cesser cette diversité, et établir dans cette matière, comme dans toutes les autres, l'uniformité qui était un de ses principaux objets, sans porter atteinte à la liberté indéfinie de régler à son gré les conventions de son mariage, sans même froisser les inclinations individuelles, soit en faveur du régime de la communauté, soit en faveur du régime dotal.

Il est inutile d'observer combien la connaissance de tous les principes et de toutes les dispositions législatives, concernant les contrats de mariage, est utile aux notaires. Rédacteurs nécessaires de ces actes, ils doivent être en état de faire connaître aux parties les effets du régime de la communauté, ainsi que ceux du régime dotal; de les éclairer sur les modifications qu'il peut leur être avantageux de faire, soit à l'un, soit à l'autre, à raison des circonstances particulieres dans lesquelles elles se trouvent; enfin, de les éclairer pareillement sur la nature et les conséquences des conventions qu'elles seraient dans l'intention de stipuler.

On va traiter cette importante matière dans l'ordre suivant :

On exposera, dans une première section, les règles communes à tous les contrats de mariage; Dans une deuxième, celles de la communauté conventionnelle;

On parlera dans une troisième, des contrats de mariage, dans lesquels les parties excluent également le régime de la communauté et le régime dotal; (il ne sera pas question dans le présent article des principes sur le régime dotal et sur celui de la communauté; ils font l'objet des articles Communauté conjugale et Régime dotal.) Dans une quatrième section, on traitera des donations en faveur de mariage, et des donations entre époux.

SECTION Ire.

Règles communes à tous les contrats de mariage.

L'art. 1387 du Code civil accorde aux époux la faculté de régler, à leur gré, la convention de leur mariage.

Cette même faculté existait dans l'ancienne jurisprudence; il était universellement reconnu que les contrats de mariage étaient susceptibles de toutes sortes de conventions.

1. Quoique le régime de la communauté fût le droit commun des pays coutumiers, et le régime dotal, le droit commun des pays de droit écrit, les habitants des pays coutumiers pouvaient soumettre leur mariage au régime dotal, et réciproquement les habitants des pays de droit écrit pouvaient se soumettre au régime de la communauté.

La coutume de Normandie, par une exception qui lui était particulière, ne s'était pas contentée de ne pas établir la communauté entre les époux, elle en défendait expressément la stipulation.

A cette seule exception près, tous les habitants de la France pouvaient à leur gré se soumettre au régime dotal ou au régime de la communauté; ils pouvaient même choisir entre les trop nombreuses coutumes, celle qui réglerait leur communauté.

Cette dernière stipulation n'est plus permise aujourd'hui. L'art. 1390 du Code civil la prohibe expressément. Cette prohibition était indispensa ble pour atteindre cette uniformité de législation, qui était un des premiers objets du législateur; permettre en effet aux époux de stipuler en termes généraux, que leur association serait réglée par telle ou telle autre coutume, ou statut local, eût été perpétuer l'existence de ce nombre prodigieux de coutumes et de statuts qui se partageaient la France.

II. La liberté des époux n'est gênée cependant, à cet égard, que dans le mode d'expression de leurs volontés, car s'ils ne peuvent pas stipuler en termes généraux que leur mariage sera régi

par telle coutume ou tel statut, ils peuvent stipuler en détail, comme conventions particulières, dans leurs contrats de mariage, la disposition de telle ancienne coutume, ou tel ancien statut qu'ils jugent à propos. C'est une conséquence de l'article 1387 du Code civil, qui leur permet de régler les conventions de leur mariage, ainsi qu'ils le jugent à propos.

Mais cette liberté n'est applicable qu'aux stipulations qui ont pour objet les intérêts pécuniaires des époux, et non pas à celles qui pourraient intéresser l'ordre public, parce qu'il est de principe général et fondamental, en législation, qu'on ne peut déroger aux lois d'ordre public, par des conventions particulières. (Code civ., art. 6. }

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caractère d'authenticité qui les mette à l'abri de tout soupçon, soit relativement à la fixité de leurs dates, soit relativement à l'immutabilité des stipulations qu'ils contiennent.

La haute importance des contrats de mariage, et l'influence que peuvent avoir les conventions qui y sont stipulées sur des engagements contracC'est sur ce principe qu'est fondé l'art. 1388 dutés avec des tiers, exigent que ces actes aient un Code civil, qui dispose textuellement que les « époux ne peuvent déroger aux droits résultant « de la puissance maritale sur la personne de la « femme et des enfants, ou qui appartiennent au « mari comme chef; ni aux droits confiés au sur- Il était assez ordinaire dans les pays de droit « vivant des époux, par le titre de la puissance pa- écrit, et dans la province de Normandie, de con«ternelle, et par le titre de la minorité, de la tu-signer les conventions matrimoniales dans des ac«telle et de l'émancipation; ni aux dispositions tes sous signatures privées, et il est aisé de sentir prohibitives du Code. » combien un pareil usage pourrait entraîner d'abus et de fraudes; le Code civil l'a sagement proscrit, et ordonné par ses articles 1394 et 1395, que toutes conventions matrimoniales seraient rédigées, avant le mariage, par acte notarié, et qu'elles ne pourraient recevoir aucun changement après la célébration. C'est sur ce principe qu'un arrêt de la cour de cassation, section civile, du 29 juillet 1818, au rapport de M. Legonidec, a décidé 1° que l'époux auquel ses père et mère ont fait des avantages dans son contrat de mariage, ne peut renoncer à ces avantages dans un partage anticipé fait par son père ou sa mère; 2° que la renonciation à ces avantages est nulle et sans effet, ainsi que le partage qui les a révoqués.

Toujours par suite du principe qui ne permet pas de déroger aux lois d'ordre public par des conventions particulières, les époux ne peuvent stipuler dans leur contrat de mariage aucune clause qui tendrait à intervertir l'ordre légal des successions, soit par rapport à eux-mêmes, dans les successions de leurs enfants ou descendants, soit par rapport à leurs enfants entre eux» (Code civil, art. 1389). La raison en est que les lois sur les successions sont considérées comme étant d'ordre public.

Les époux peuvent, au surplus, stipuler, en termes généraux, qu'ils se soumettent, soit au régime de la communauté, soit au régime dotal. Dans le cas de l'une ou de l'autre de ces stipulations, sans modifications, les droits des époux et de leurs héritiers sont réglés par les dispositions du Code civil, sur le régime qui a été adopté. (Code civ., art. 1391.)

Mais il ne suffisait pas que le Code civil consacrât le régime de la communauté et le régime dotal, qu'il fixât les règles particulières à chacun de ces régimes, et laissât aux époux la liberté de choisir entre l'un et l'autre, de les modifier et même de les exclure tous deux par des conventions particulières, il fallait encore prévoir le cas où des époux se marieraient sans contrat, et déterminer quel serait alors le régime auquel ils seraient censés avoir voulu soumettre leur union; et, en d'autres termes, il fallait déclarer lequel du régime de la communauté ou du régime dotal serait le droit commun de la France. Cette mesure était d'une nécessité indispensable pour compléter la législation sur cette matière.

---((

Voici les motifs de cet arrêt. La cour,-attendu que l'article 1395 du Code n'a fait que confirmer les principes admis dans l'ancienne jurisprudence française, laquelle a constamment assuré aux conventions matrimoniales le caractère de l'irrévocabilité la plus absolue, de manière qu'il ne pouvait y être dérogé par aucune convention postérieure à la célébration du mariage; que ces principes ne sont pas seulement fondés sur l'intérêt privé des parties, qu'ils sont de droit public, comme étant favorables aux bonnes mœurs, à la paix des familles et des unions conjugales ;

Attendu, en outre, que, dans l'espèce, la veuve Laurent, mère des parties, avait stipulé, conjointement avec son mari, au contrat de mariage de la dame Bouche, sa fille, et qu'elle lui avait fait donation, par préciput, du quart de tous ses biens présents et à venir; que dès lors elle ne pouvait plus, légalement, par l'acte postérieur du 27 décembre 1810, faire le partage de ses biens

«<les personnes qui ont été parties dans le contrat ⚫ de mariage. »

Comment pouvoir admettre que cette présence, que le consentement ordonné d'une manière si impérative, puissent être remplacés par une sim

entre ses trois enfans, sur la base d'une égalité parfaite; qu'ainsi l'arrêt attaqué, en déclarant ce partage nul et de nul effet, comme dérogeant au contrat de mariage, et ordonnant que, sans y avoir égard, ce contrat serait pleinement exécuté, n'a ni violé les articles 1076, 1079 et 1134, ni faus-ple sommation, faite aux parties présentes au consement appliqué l'article 1395 du Code; mais qu'il s'est, au contraire, conformé aux vrais principes de la matière; — rejette, etc. »>

Mais les conventions matrimoniales sont susceptibles de changements avant la célébration; il faut seulement qu'ils soient faits dans la même forme que les contrats, c'est-à-dire, par acte notarié, et de plus en présence et du consentement simultané de tous ceux qui ont été parties dans le contrat. (Code civ., art. 1396.)

Ce sont seulement ceux qui ont stipulé dans le contrat, dont la présence et le consentement sont requis pour la validité des changements qu'on veut y faire avant la célébration. La présence des témoins, et des personnes qui n'y ont paru qu'à rien stipuler, titre de parents ou d'amis, sans y n'est pas nécessaire.

trat, de se trouver aux changements qui doivent s'y opérer ? d'ailleurs le rejet de l'amendement qui avait été proposé lors de la discussion de l'article, n'est-il pas une nouvelle preuve que le législateur n'a pas voulu qu'un simple appel des parties pût suffire pour suppléer à leur présence et à leur consentement? Voici les motifs donnait M. Berlier, pour faire rejeter l'amendement de M. Jolivet.

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que

Lorsqu'on a, dit-il, exigé le consentement simultané de toutes les parties qui ont stipulé en cette qualité dans le contrat, l'on a bien entendu appliquer cette disposition à tous donateurs,même étrangers à la famille.

Qui ne sent d'ailleurs la corrélation et l'indivisibilité qui existent en cette matière ? Le mari reçoit vingt mille francs d'une personne qui peutêtre ne les lui eût pas donnés, si pareil avantage On voit, par la discussion qui eut lieu au con- n'avait été fait à la femme par une autre personne: seil-d'état, sur cet article 1396 du Code, qu'il fut s'il était permis de révoquer ou de modifier cette proposé d'ajouter à ces mots, sans la présence des dernière disposition, sans que l'auteur de la prepersonnes qui ont été parties dans le contrat, ceux-mière fût présent, ne serait-ce pas souvent une ci, ou elles dûment appelées.

les donateurs, quels qu'ils soient, ne sauraient être considérés comme des tiers ou de simples témoins.» (Voy. Conférence du Code civil, tome v, page 244.)

S'il en était autrement, il pourrait en résulter les plus graves inconvénients. Il faut donc s'en tenir au vou formel de la loi, et ne faire jamais, dans le cas prévu, de changement aux dispositions d'un contrat de mariage, sans la présence et le consentement de toutes les personnes qui y ont été parties contractantes.

fraude envers lui? Il faut donc, en cas de chanCet amendement ne fut pas adopté, et la ques-gements, que toutes les parties y concourent; et tion de savoir si l'appel légal des parties qui ont été présentes au contrat, suffit à la validité des changements qui y sont faits avant la célébration, paraît avoir été décidée d'une manière négative. M. Malleville, en son commentaire sur cet article du Code, se prononce cependant pour l'affirmative. « S'il était, dit-il, absolument nécessaire que toutes les parties comparussent personnellement au nouvel acte, dans lequel on voudrait faire quelque changement qui ne concernerait que l'une d'elles, ces changements deviendraient quelquefois impossibles, et le mariage pourrait manquer; ou bien il faudrait faire en entier un nouveau contrat, dans lequel on perdrait le fruit de la donation faite par l'absent; et si le donataire était mort, ce serait bien pis encore. Je crois donc qu'il suffit, dans cette hypothèse, comme dans toutes les autres, que les parties soient duement appelées pour assister à la contre-lettre. Si elles viennent, elles peuvent protester contre les changements et déclarer que, s'ils se font, elles révoquent leur bienfait; mais si elles ne se présentent pas, elles sont censées consentir à la contre-lettre.

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Les considérations sur lesquelles l'opinion de M. Malleville est appuyée, sont assez fortes; mais les expressions de la loi sont trop précises pour qu'on puisse s'en écarter.

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«Aucun changement, dit l'article 1396, ou contre-lettre, n'est au surplus valable sans la présence et le consentement simultané de toutes

IV. Les formalités prescrites par l'article 1396 du Code, pour la validité des changements faits au contrat de mariage, avant la célébration, étaient uniquement dans l'intérêt des parties qui y avaient stipulé; le législateur s'est occupé des intérêts des tiers dans l'art. 1397.

Il y dispose que tous changements ou contrelettres, même revêtus des formes prescrites par l'article précédent, seront sans effet à l'égard des tiers, s'ils n'ont été rédigés à la suite de la minute du contrat; et il enjoint aux notaires, à peine de dommages et intérêts des parties, et même de plus grande peine, s'il y a lieu, de ne délivrer, ni grosses, ni expéditions du contrat de mariage, sans trascrire les changements ou la contre-lettre.

V. Une dernière règle commune à tous les contrats de mariage, c'est que le mineur assisté des personnes dont le consentement est nécessaire à la validité de son mariage, peut stipuler

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Les articles 67 et 68 du Code de commerce prescrivent une formalité particulière aux contrats de mariage passés entre époux commerçants, ou dont l'un seulement est commerçant.

entre-vifs révocables à la volonté du donateur, ce qui est une exception au principe. (Code civ., art. 1082, 1083 et 1086.)

Cette distinction résulte du texte même du Code civil, puisqu'il traite dans un titre séparé du contrat de mariage, et dans un autre titre, des donations faites, par contrat de mariage, aux époux et aux enfants à naître du mariage, et des dispositions entre époux par contrat de mariage. En classant ainsi à part les conventions matripeuvent être faites par contrat de mariage, le législateur a averti de ne pas les confondre. Aussi voit-on que les articles 1394, 1398 et 1525 distinguent formellement les donations par contrat de mariage, des conventions qui y sont faites.

L'article 67 veut que ces contrats de mariage soient transmis, par extrait, aux greffes et cham-moniales, et les donations et dispositions qui bres désignées par l'article 872 du Code de procédure, à l'effet d'être exposés au tableau à ce destiné par le même article. Cet extrait doit énoncer si les époux sont en communauté, ou s'ils sont séparés de biens, ou enfin s'ils se sont soumis au régime dotal.

L'article 68 charge de la remise de cet extrait le notaire qui a reçu le contrat de mariage, à peine de cent francs d'amende, et même de destitution et de responsabilité envers les créanciers, s'il était prouvé que l'omission de remise fût l'effet de la collusion.

Voy. Commerçant, no xvi et suiv.

VI. Du principe que les conventions matrimoniales ne peuvent recevoir aucun changement après la célébration du mariage, doit-on conclure que toutes les stipulations et donations qui sont insérées dans le contrat de mariage participent à cette immutabilité ?

Nous ne le pensons pas. Sans doute les conventions relatives au régime sous lequel se marient les époux, comme la stipulation de communauté, d'exclusion de communauté, de séparation de biens, de séparation de dettes, d'ameublissement, la soumission au régime dotal, etc., sont de véritables conventions matrimoniales, et ne peuvent, aux termes des articles 1394 et 1395 du Code civil, recevoir aucun changement après la célébration du mariage. Mais le contrat de mariage étant, . comme on l'a dit, susceptible de toutes sortes de conventions, il peut y intervenir d'autres stipu·lations accidentelles, différents contrats et dispositions, qui, suivant les cas, ne participent point à l'immutabilité des conventions matrimoniales. Par exemple, il est très-ordinaire que les époux se font des donations par contrat de mariage; mais ces actes de libéralité ne prennent pas pour cela le caractère de conventions matrimoniales; ils restent soumis aux règles qui leur sont propres; et s'ils sont irrévocables, ce n'est pas parce qu'ils se trouvent dans un contrat de mariage, mais parce · que l'irrévocabilité est de leur essence (Code civ., art. 894 et 1092). Et cette irrévocabilité n'est relative qu'au donataire, car, s'il a la libre disposition de ses droits, il peut renoncer à la donation au profit du donateur, ou en transmettre l'objet à un étranger (Code civ., art. 217, 902, 1123, 1426 -et 1594). Cela est si vrai, que l'on peut même insérer dans les contrats de mariage, des donations

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Les donations par contrat de mariage ne participent donc pas à l'immutabilité des conventions matrimoniales; elles ne sont donc régies que par les règles qui leur sont propres.

Ces principes ont été consacrés par trois arrêts de la cour de cassation.

Le premier, du 9 juillet 1806 au rapport de M. Liger de Verdigny, a décidé que les conventions matrimoniales faites par les époux dans leur contrat de mariage pour le cas de non-enfants, au profit des collatéraux, non présents à la stipulation et sans acceptation de leur part, ne sont que de simples dispositions ab intestat auxquelles les époux peuvent déroger par des actes ultérieurs. (Sirey, 1806, page 350.)

Le second, du 18 avril 1812, au rapport de M. Porriquet, porte que la renonciation qu'une mère fait au profit de son fils à des droits éventuels portés en son contrat de mariage, n'a rien d'illicite et ne peut être annulée comme portant atteinte à ses conventions matrimoniales; elle doit plutôt être regardée comme une exécution que comme dérogation au contrat de mariage. (Sirey, 1813, page 137.)

Le troisième, du 21 décembre 1818, au rapport de M. Zangiacomi, a jugé que la renonciation faite par des époux dans leur contrat de mariage, au droit de s'avantager réciproquement, est nulle, et qu'elle ne peut pas plus être invoquée par les tiers que par les héritiers légitimes. Voici cet arrêt tel qu'il est rapporté au Bulletin civil :

Le 9 germinal an Ix, contrat de mariage entre le sieur de Greische et la demoiselle de Stack.

L'article 11 de ce contrat est ainsi conçu : « Les

futurs époux pourront réciproquement disposer, soit qu'il y ait enfants ou non, vivants de ce mariage, en faveur l'un de l'autre, par acte entre-vifs ou à cause de mort, de la propriété de leur part et moitié dans la communauté; outre les avantages stipulés que les futurs époux pourront se faire sur la communauté, ils sont et demeurent également autorisés à se donner réciproquement, par acte entre-vifs, ou à cause de mort, l'usufruit

de tout ou partie des biens propres qu'ils délaisseront, sans que les lois existantes puissent gêner la présente faculté, basée entièrement sur la reconnaissance, sauf le cas de provenance d'enfants, pour lequel les parties contractantes se restreindront dans leurs libéralités, conformément aux lois. »

a

|clusions de M. l'avocat-général Cahier; et après qu'il en a été délibéré en la chambre du conseil;

« Vu les art. 14 et 61 de la loi du 17 nivose an 2; l'art. 6 de la loi du 4 germinal an vin, et les art. 916 et 1094 du Code civil;

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Considérant que de l'interprétation que la cour royale a faite du contrat de mariage des sieur et dame de Greische, il résulte :

« 1° Que les deux époux se sont interdits la fade culté de disposer, l'un en faveur de l'autre, la propriété de leurs biens propres ;

* 2° Qu'ils n'ont, par aucune disposition valable, transmis la propriété de ces biens à qui que ce soit;

Le 18 février 1808, le sieur de Greische a fait un testament, par lequel il donne d'abord à son épouse tout ce que l'article 11 de son contrat de mariage l'autorisait à lui donner, c'est-à-dire, la propriété de sa part dans la communauté, et l'usufruit de ses biens propres; puis il ajoute à cette clause : « Je regrette bien sincèrement qu'on m'ait ôté le droit, par mon contrat de mariage, a Considérant que la clause ainsi entendue n'éde disposer de plus; dans le cas où la stipulation tait pas obligatoire pour les époux de Greische, 1° Parce qu'ils n'avaient évidemment aucun qu'il contient ne ferait pas obstacle à ma bonne volonté, n'ayant ni ascendants, ni descendants, intérêt personnel à renoncer à des avantages que je déclare, par ces présentes, l'instituer ma léga-la loi leur permettait de se faire réciproquement; taire universelle, m'en rapportant entièrement à et qu'en droit, l'on ne peut valablement stipuler madite épouse, pour remplir mes intentions que que pour soi et dans son propre intérêt ; je lui ai manifestées plusieurs fois. »

Le 23 janvier 1817, décès du sieur de Greische. La veuve de Scitivaux, sa nièce et son héritière naturelle, a attaqué la dernière disposition du testament, et a conclu à ce qu'elle fût déclarée

nulle.

pre

Cette demande, rejetée par le tribunal de mière instance, a été accueillie par arrêt de la cour royale de Nancy, du 29 janvier 1818.

Les motifs de cet arrêt sont que, par l'article 11 de leur contrat de mariage, les époux de Greische s'étaient interdit la faculté de disposer, l'un en faveur de l'autre, de la propriété de leurs biens propres; que cette clause, qui n'avait rien de contraire à l'ordre public, aux mœurs ni aux lois, qui était d'ailleurs écrite dans un contrat de mariage, dont les conventions sont sacrées, faisait la loi des époux ; que le sieur de Greische l'avait violée par le legs universel qu'il avait fait à sa femme; enfin, que cette disposition, contraire à la clause prohibitive qu'il avait volontairement souscrite, était nulle.

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« 2° Parce que cette renonciation, n'ayant été faite au profit d'aucun individu désigné, contractant ni acceptant, les époux de Greische n'étaient, de fait, liés envers personne, et, par conséquent, ne l'étaient pas en droit;

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Que si, avant la loi du 17 nivose an 2, les clauses de ce genre étaient approuvées par la jurisprudence de quelques tribunaux, cette dérogation aux lois générales n'était fondée que sur le système qui, alors, prohibait ou limitait les dons dans la ligne où ils étaient entrés, et qui, par un entre maris et femmes, qui tendait à fixer les biens excès de prévoyance, suspectait de suggestion les

libéralités entre époux;

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Que c'est uniquement par une conséquence de ce système qui frappait du plus au moins tous les gens mariés d'une incapacité légale, qu'il a paru possible d'admettre une autre sorte d'incapacité purement volontaire, résultant de la simple déclaration des époux, qu'ils ne pourraient s'avantager au-delà de telles limites, et d'autoriser cette déclaration alors même qu'elle était dénuée des formes essentielles à la validité des actes entre vifs ou à cause de mort;

a

Les moyens de la veuve de Greische contre cet arret ont consisté à dire que l'article 11 de son « Mais que ce système a été détruit dans son contrat de mariage ne renfermait pas de clause principe, et toutes ses conséquences par la loi du prohibitive dont l'arrèt argumente, et qu'en sup- 17 nivose an 2, qui, ne mettant aucune imporposant que cette clause existât réellement, elle tance à ce que les biens restassent dans la ligne n'était pas de nature à lier le sieur de Greische; d'où ils provenaient, a supprimé la règle paterna qu'elle était révocable, et que la veuve de Sciti-paternis, materna maternis; qui, se confiant à vaux était non-recevable à s'en prévaloir, soit en qualité d'héritière du sieur de Greische, soit à

tout autre titre.

l'affection des personnes unies par le lien le plus intime, et les jugeant aussi capables de disposer entre elles qu'au profit d'étrangers, leur a permis de se transmettre la totalité de leurs biens, lorsqu'ils n'avaient pas d'enfants; disposition qui a été confirmée par la loi du 4 germinal an viii; « Oui le rapport de M. le baron de Zangiacomi, Que les sieur et dame de Greische s'étant conseiller en la cour; les observations de Loiseau mariés sous l'émpire de ces lois, la clause proet Rochelle, avocats des parties; ensemble les con-hibitive de leur contrat de mariage ne peut être

La cour de cassation a trouvé ces moyens fondés en droit; en conséquence, elle a annulé l'arrêt de la cour de Nancy par celui dont la teneur suit

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