Page images
PDF
EPUB
[blocks in formation]

Il porte, à la vérité, dans le 3o considérant, que le billet du sieur Parmentier doit être considéré comme étant de même nature qu'une lettre de change, ce qui ne semble pas exact, car il ne porte la signature d'aucun commerçant et n'a pas pour objet une opération de commerce (637, Code de comm.); mais cette circonstance ne fait rien au point jugé, parce que la dame Parmentier n'étant point commerçante, son cautionnement ne pouvait en tout cas être considéré que comme une obligation civile régie par le droit commun, c'est à-dire, par l'art. 1326 du Code civil. Voy. Billet

à ordre.

Tels sont les principaux cas dans lesquels la disposition principale est applicable: il faut voir maintenant ceux dans lesquels elle ne l'est pas. IX. La disposition de l'art. 1326 n'est pas applicable, ainsi qu'on l'a dit, quand l'acte est souscrit par des marchands, artisans, l'aboureurs, vignerons, gens de journées et de service.

Et par marchands, il ne faut pas entendre seulement les marchands en détail, mais bien tous les commerçants quelconques, même les banquiers. La déclaration de 1733 les exceptait formellement de la règle, en ces termes : autres néanmoins que ceux qui seront faits par des banquiers, marchands, manufacturiers, laboureurs, vignerons, manouvriers et autres de pareille qualité. » Ainsi, c'est à tort que l'on a prétendu que l'exception ne s'appliquait qu'aux marchands en détail, comme ne sachant ordinairement que signer leur nom; car celle qui concerne les marchands n'est pas uniquement fondée sur cette raison, elle l'est aussi sur la célérité des opérations commerciales, incompatibles, en quelque sorte, avec l'emploi de la formalité.

Quant aux autres personnes, l'exception est, il est vrai, fondée sur ce que ces personnes ne sachant ordinairement que signer leur nom, on a pensé qu'il serait trop gênant, et en même temps trop dispendieux pour elles, d'être obligées de recourir au ministère d'un notaire pour consentir une simple promesse ou obligation, le plus souvent d'une somme modique; mais il faut convenir, d'un autre côté, que le but que le législateur s'est proposé n'est pas toujours heureusement atteint, puisque la classe la plus nombreuse et la plus facile à tromper ne peut invoquer le secours qu'il a cru devoir accorder contre la fraude et les surprises faites à la légèreté et à l'aveugle con

fiance.

X. Ni la déclaration de 1733, ni l'art. 1326 ne sont applicables aux quittances; à la différence de celle de 1730, laquelle, à la vérité, ne fut en registrée qu'aux parlements de Dijon et de Besançon, et ne contenait aucune exception, même à raison de la qualité des personnes.

La cour de Bruxelles a aussi jugé qu'une acceptation de lettre de change, par ce seul mot accepté, avec la signature de l'acceptant, était valable, encore que la lettre fût réputée simple promesse. Le porteur avait pu croire, en effet, que ce mot accepté suffisait pour lier l'acceptant, puisque la loi veut, par l'art. 122 du Code de commerce, que l'acceptation soit exprimée par le mot accepté.

Mais dans les cas où l'approbation est nécessaire, il ne suffit pas qu'elle soit ainsi conçue: Japprouve l'écriture ci-dessus, comme cela se pratique souvent; il faut une approbation en toutes lettres de la somme ou de la chose. Ainsi jugé par arrêt de cassation, le 17 août 1808. (Sirey, 1808, p. 492.) Il ne faut pas conclure de là, cependant, que la somme portée au corps de l'acte ne pourrait être mise en chiffres, à peine de nullité, encore que l'acte fût dispensé de l'approbation, soit parce qu'il serait écrit en entier de la main du débiteur, soit qu'à raison de sa qualité celui-ci fût dispensé de la formalité; rien dans le Code civil n'autoriserait une telle conclusion. L'art. 13 de la

loi du 25 ventose an x1, sur le notariat, qui prescrit aux notaires l'obligation de mettre les sommes en toutes lettres, à peine de 100 fr. d'amende, ne s'applique point aux actes sous seing-privé, comme nous l'avons dit précédemment. D'ailleurs la loi du 25 ventose ne prononce pas la nullité, mais seulement l'amende contre le notaire. Ainsi un acte n'en est pas moins écrit en entier quoique la somme soit mise en chiffres. L'expression de la somme ou de la chose en toutes lettres, n'est exigée par l'art. 1326 que dans l'approbation, quand elle doit avoir lieu. Au reste, il est extrêmement imprudent de mettre la somme en chiffres, à cause des surcharges et falsifications. Mais la loi n'ayant pas établi de nullité pour ce fait, les tribunaux ne sauraient la prononcer.

XI. Lorsque la somme portée au corps de l'acte est différente de celle exprimée au bon, l'obligation est présumée n'être que de la somme moindre lors même que l'acte ainsi que le bon sont écrits en entier de la main de celui qui s'est obligé, à moins qu'il ne soit prouvé de quel côté est l'erreur. (Code civ., art. 1327.)

La présomption établie par cet article est fondée sur la règle : Semper in obscuris quod minimum est sequimur. L. 9, ff. de Reg. juris.

La preuve réservée par l'article peut être faite par témoins, encore que la différence fût de plus de 150 fr., et qu'il n'y eût pas, hors de l'acte, de commencement de preuve par écrit; car il est lui-même un commencement de preuve dans la partie invoquée par le créancier. Il est vrai que cette partie de l'acte est en quelque sorte annihilée comme preuve par l'effet de la présomption; mais elle n'est annihilée que comme preuve complète, comme prouvant par elle-même le montant de l'obligation qu'elle exprime. Or la loi réservant la

preuve contraire, c'est qu'elle ne repousse pas en- | superflue toute explication de la loi à cet égard tièrement cette partie de l'acte. D'ailleurs, puis- dans les divers articles du Code civil. qu'il s'agit d'erreur, c'est le cas d'appliquer la disposition de l'art. 1348 qui autorise la preuve testimoniale à quelque somme que la demande puisse monter, quand il n'a pas été possible de se procurer une preuve écrite, et c'est ce qui existe moralement quand on est tombé dans une erreur de fait.

Par la même raison, nous croyons que le juge pourrait déférer le serment d'office, parce qu'en effet la demande n'est pas pleinement prouvée, ni à proprement parler (nonobstant la présomption) totalement dénuée de preuves. (Code civ., art. 1367.)

Et par suite de conséquence, le magistrat pourrait aussi, dans le même cas, se décider par des présomptions graves, précises et concordantes, puisqu'il le peut quand la preuve testimoniale est admissible. (Code civ., art. 1353.)

XII. Il faut remarquer que les actes sous seing privé, comme les billets, les promesses, ne font pas foi contre celui qui les a souscrits, lorsqu'ils se trouvent en sa possession: par exemple, si on trouve, sous le scellé de mes papiers, un billet signé de moi, par lequel je reconnais vous devoir une somme de...., il est à présumer, ou que j'avais écrit ce billet dans l'espérance que vous me prêteriez cette somme, et que le prêt n'ayant pas eu lieu, le billet m'est demeuré, et que j'ai négligé de l'anéantir; ou bien que le prêt ayant eu lieu, il a été acquitté, ou que la dette a été remise. (Code civ., art. 1282.)

XIII. Il reste à traiter sur les billets ou promesses irrégulières, la double question de savoir: 1° Si le créancier peut déférer le serment au défendeur;

Quant à la seconde question, celle de savoir si le défaut du bon ou approuvé portant en toutes lettres la somme, rend le billet tellement nul qu'il ne puisse servir de commencement de preuve par écrit, il semble y avoir plus de difficulté.

On peut dire pour la négative: il est certain, en thèse générale, que l'acte réunit toutes les conditions requises par l'art. 1347 pour valoir comme commencement de preuve par écrit, et qui sont seulement d'être émané de celui contre lequel la demande est formée, ou de celui qu'il représente, et de rendre vraisemblable le fait allégué. Comment, en effet, se refuser à croire que cet acte, non écrit il est vrai par celui à qui on l'oppose, mais enfin signé par lui, ne rende le fait aussi vraisemblable qu'une lettre, une note ou toute autre pièce de cette nature? Cependant la loi n'exige pas autre chose pour qu'une pièce puisse servir de commencement de preuve par écrit. Que l'acte dont il s'agit, parce qu'il est suspect, soit réprouvé comme preuve complète, cela est dans l'ordre : la loi le dit; mais elle ne dit pas qu'il doit être entièrement écarté de la cause; elle dit simplement qu'il ne fait pas preuve; et elle le dit également de tout commencement de preuve par écrit quelconque ; or, de même qu'un commencement de preuve par écrit doit être accueilli par les tribunaux comme tel, de même un acte irrégulier, qui certes n'est pas plus suspect qu'une lettre, une note, etc., doit être pris en considération pour valoir ce que de raison; sauf aux trêmement circonspects sur le résultat de la preuve tribunaux à être, suivant les circonstances, extestimoniale à laquelle il doit servir de base. trêmement circonspects sur le résultat de la

Pour l'affirmative, il existe un arrêt de la cour de cassation dont voici l'espèce :

Le 12 décembre 1810, le sieur Fradiel, com

2o Si l'écrit peut servir de commencement de preuve, propre à faire admettre la preuve par té-missaire des guerres, souscrit au profit du sieur

moins.

La première question doit être décidée par l'affirmative. Elle n'aurait pas fait l'ombre d'un doute sous l'empire de la déclaration de 1733 qui, tout en défendant aux juges d'ordonner juridiquement le paiement du billet irrégulier, réservait expressément, au porteur de l'acte, le droit de déférer le serment au débiteur.

Il est vrai que l'art. 1326 ne contient pas formellement cette réserve; mais doit-on conclure de ce silence que l'intention du législateur ait été de ne pas permettre de déférer le serment? Nous ne le pensons pas. Nous expliquons ce silence par la disposition générale qui se trouve placée an chapitre du serment, et qui permet de le déférer sur quelque espèce de contestation que ce soit, encore qu'il n'existe aucun commencement de preuve de la demande ou de l'exception sur laquelle il est provoqué (Code civ., art. 1358 et 1360); disposition qui rendait, par conséquent,

Tome 1.

Simonin une obligation de 600 fr. Le billet, signé du sieur Fradiel, est écrit d'une main étrangère, et ne contient pas l'approbation en toutes lettres de la sienne.

Après la mort du sieur Fradiel, Simonin poursuit la veuve. Celle-ci se borne à exciper du défaut d'approbation. Simonin réplique que si le billet ne contient pas d'approbation en toutes lettres de la somme, du moins il est signé du sieur Fradiel ; et que dès lors, s'il ne constate pas pleinement la dette, il suffit pour en faire admettre la preuve testimoniale, ou même de simples présomptions, parce qu'il est un commencement de preuve par écrit. Le sieur Simonin articule en conséquence que pendant la dernière année de sa vie, Fradiel a reconnu plusieurs fois sa dette de 600 fr.; qu'au moment où il signait le billet du 12 décembre, il parlait en homme qui était bien réellement débiteur; que la veuve Fradiel ellemême avait avoué la dette, en demandant terme et

13

délai pour paiement; et il demande à prouver

ces faits par témoins.

[ocr errors]

§ IV.

néral acquièrent une date certaine à l'égard des

tiers.

Le 31 août 1811, jugement du tribunal civil de Des manieres dont les actes sous seing privé en géla Seine, qui condamne la veuve Fradiel à payer le montant du billet, « Attendu que le billet de 600 fr. est signé par Fradiel, que la signature n'est pas contestée; et qu'il résulte des faits et des pièces de la cause, joints à cette signature, que la somme de 600 fr. est bien réellement due à Si

monin. »

Pourvoi en cassation de la part de la dame Fradiel. Elle soutient que le billet du 12 décembre étant nul pour défaut d'approbation, il ne faisait aucunement preuve, ni commencement de preuve. Il ne pouvait donc servir de base à la preuve testimoniale, non plus qu'à l'admission de présomptions, puisqu'il s'agissait de plus de 150 fr. (Code civ., art. 1341, 1347, 1353.)

I. D'après l'article 1328 du Code civil, « les actes sous seing privé n'ont de date contre les tiers que du jour où ils ont été enregistrés, du jour de la mort de celui ou de l'un de ceux qui les ont souscrits, ou du jour où leur substance est constatée dans des actes dressés par des officiers publics, tels que procès-verbaux de scellé ou d'inventaire. »

Toutefois, les paiements faits par un tiers-saisi peuvent être opposés au créancier saisissant, bien qu'ils ne soient pas constatés par quittances, ayant date certaine; car le créancier n'exerçant En effet, par arrêt du 3 novembre 1812, au que les droits du débiteur saisi, il est sensible rapport de M. Ruperou, — « — « Vu les art. 1326 et qu'on doit pouvoir lui opposer les paiemens qu'on 1341 du Code civil; Considérant qu'il est re- pourrait opposer à ce dernier. C'est une conséconnu et avéré, en fait, que le billet dont il s'agit quence de l'art. 1322. En outre, l'art. 571 du n'est pas écrit de la main du signataire; qu'il Code de procédure portant que le tiers-saisi fera n'est point revêtu du bon ou de l'approuvé voulu sa déclaration au greffe, et qu'il l'affirmera, laisse par l'art. 1326 précité; qu'enfin le signataire ne clairement entendre que tous les paiements faits se trouvait dans aucune des classes exceptées par de bonne foi doivent tourner à sa décharge, puiscet article; d'où il suit, qu'en droit, le billet que, si ceux-là seulement qui sont constatés par acte dont il s'agit était sans effet aux termes de la dis- ayant date certaine et antérieure à la saisie, deposition dudit article, et que par suite le jugement vaient être pris en considération, on ne voit pas attaqué, en condamnant la veuve Fradiel à payer quel pourrait être le but de l'affirmation, qui le montant de ce billet, et en motivant cette con- n'est évidemment exigée que pour mettre un frein damnation non sur un titre de créance qu'il dé-à la collusion du tiers-saisi avec le débiteur. Ne clare exister, mais uniquement sur une énon-serait-il pas d'ailleurs infiniment dur pour les déciation vague de faits qu'il n'articule pas, et de biteurs de rentes, pensions, loyers, fermages et pièces desquelles il n'énonce pas même qu'il soit autres dettes, lesquels ne sont pas dans l'usage de résulté un commencement de preuves par écrit, faire enregistrer leurs quittances, d'être obligés a contrevenu aux art. 1326 et 1341 du Code civil: de payer de rechef, parce que leurs créanciers Par ces motifs, la cour casse et annulle le ju- s'exposent à des saisies-arrêts? Cela serait intolégement en dernier ressort du tribunal civil de la rable. Sans doute les paiements de loyers faits Seine. » par anticipation ne peuvent être opposés au saiCet arrêt fixe la jurisprudence, et il est désor-sissant ; mais la précaution que prend la loi de le mais certain que l'acte sous seing privé nul pour dire (art. 1753) fait clairement entendre que pour défaut du bon ou de l'approuvé prescrit par l'ar- ceux qui sont faits dans les cas ordinaires, le déticle 1326 du Code civil, ne peut servir de base biteur peut les lui opposer, encore qu'ils ne soient à l'admission de la preuve vocale, ou de simples pas constatés par acte ayant date certaine, pourvu présomptions, en matière au-dessus de 150 fr. Et qu'ils soient sincères et antérieurs à la saisie. il est d'autant moins permis d'en douter, que la cour régulatrice a de nouveau consacré ce principe par un arrêt du 22 avril 1818, au rapport de M. Borel-de-Bretizel, en rejetant le pourvoi dirigé contre un arrêt de la cour royale de Paris, qui avait refusé de considérer comme commencement de preuve par écrit le billet nul à défaut du bon ou approuvé portant la somme en toutes lettres. (Sirey, 1819, pag. 195.)

Nous avons émis une opinion contra re dans notre traité des Contrats et Obligations, mais pleins de déférence pour les décisions de la cour de cassation, nous nous soumettons à la jurisprudence établie par les deux arrêts ci-dessus rapportés.

Par la même raison, les créanciers d'un failli peuvent être admis au passif de la faillite, encore bien que leurs titres sous seing privé n'aient pas acquis date certaine antérieurement à l'ouverture de la faillite. C'est qu'en effet il n'est pas d'usage qu'on fasse enregistrer les actes de commerce sans nécessité. La cour de cassation, section des requêtes, l'a ainsi décidé par arrêt du 4 février 1819, au rapport de M. Dunoyer (Sirey, 1819, pag. 384.)

II. Si, de deux acquéreurs d'immeubles, l'un a un titre sous seing privé sans date certaine, et l'autre un acte avec date certaine, la question de propriété, si elle est agitée entre eux, doit être

décidée en faveur de ce dernier. Peu importe qu'en fait le premier eût réellement traité avec le vendeur avant l'autre. Il n'y a à cet égard aucune distinction à faire entre les actes authentiques et les actes sous seing privé, puisque, d'après l'article 1582, la vente peut être faite aussi bien par acte sous seing privé que par acte authentique. Ainsi, c'est l'antériorité de la date, mais l'antériorité acquise de l'une des manières exprimées à l'art. 1328, qui doit décider la question de propriété entre les deux acquéreurs du même objet. C'est aussi l'opinion de M. Merlin, Questions de droit, tom. vi, v° tiers, § 2.

III. Quant aux choses mobilières corporelles, ce n'est pas ordinairement l'acte, ni par consé quent sa date, qui peut légalement décider la question de propriété c'est la possession réelle acquise de bonne foi, car l'art. 1141 porte en termes formels que si la chose qu'on s'est obligé de donner ou de livrer à deux personnes successivement, est purement mobilière, celle des deux qui en a été mise en possession réelle est préférée et en demeure propriétaire, encore que son titre soit postérieur en date, pourvu toutefois que la possession soit de bonne foi.

personnelles de celui qui a souscrit l'acte, leur intérêt étant distinct et séparé, peuvent, conformément à l'art. 1328, ne pas reconnaître l'acte sans date certaine, parce qu'il a pu être fait au' préjudice de leurs droits déjà acquis.

VII. Mais on a demandé souvent si les expressions de cet article 1328 sont limitatives, ou si elles indiquent seulement les manières les plus ordinaires suivant lesquelles les actes peuvent acquérir une date certaine vis-à-vis des tiers; en un mot, on a demandé si l'acte peut acquérir une date certaine par une autre manière que celles indiquées à cet article: par exemple, si un acte était présenté comme étant signé d'un individu qui depuis a perdu les deux bras dans un combat ou dans une ruine, etc., cet acte aurait-il date certaine, au moins à partir du moment où celui qui l'a signé a eu le malheur de perdre ses deux bras? On pourrait facilement trouver d'autres exemples de cas où l'acte devrait sembler avoir été passé ou souscrit à une époque antérieure à tel ou tel évènement.

Nous déciderions volontiers cette question pour l'affirmative, s'il n'était à craindre qu'une fois la démarcation franchie, on ne se jetât dans l'arbiIV. Relativement aux créances ou autres droits traire; qu'on ne prétendit voir l'impossibilité de l'antidate dans telle ou telle circonstance, et incorporels, le cessionnaire n'est pas saisi à l'égard des tiers par son titre, il ne l'est que par la signi- qu'ainsi on ne crût à cette impossibilité là où il fication du transport faite au débiteur, ou par l'ac-V aurait seulement invraisemblance, ou même ceptation de ce transport faite par lui dans un acte authentique (Code civ., art. 1690). Nous croyons cependant qu'il peut y avoir des exceptions à ce principe, comme nous l'avons établi aux numéros 788 et 789 de notre traité des Contrats, etc.

V. Un acquéreur, par acte sous seing privé, sans date certaine, ne peut se prévaloir de son titre contre un créancier du prétendu vendeur, saisissant entre les mains d'un fermier ou locataire de l'immeuble; car cet acte pourrait n'avoir été fait que pour rendre vaine la saisie.

VI. L'article 1328 veut, en un mot, qu'on ne puisse commettre de fraude envers qui que ce soit par le moyen si facile de l'antidate. Ainsi, le mot tiers, dont il se sert, est une expression générique qui embrasse tous ceux qui ont intérêt à contester la sincérité de l'acte qu'on leur présente comme ayant été fait à telle époque; en sorte que tous ceux qui sont tenus de remplir les obligations personnelles de celui qui a souscrit l'acte, c'est-à-dire ses héritiers, ne peuvent, s'ils le reconnaissent, ou si cet acte est tenu pour reconnu, en méconnaître la date, parce qu'ils représentent la personne, et que ce qui est vrai par rapport à elle, l'est également par rapport à eux, leur intérêt étant absolument le même; or la date est indifférente entre les parties elles-mêmes. Les autres, au contraire, c'est-à-dire, les acquéreurs et autres successeurs à titre singulier, les créanciers, etc., n'étant point tenus des obligations

simplement improbabilité que l'acte n'existat déja pas une présomption juris et de jure que hors les à telle époque. D'ailleurs, l'art. 1328 n'établit-il cas qui y sont exprimés, l'acte n'a pas de date certaine à l'égard des tiers? Et qu'est-ce que cette présomption aurait de plus rigoureux que mille autres, que celles, par exemple, qui sont établies en matière de donations réputées faites à personnes interposées: présomptions qui ne permettent pas de prouver qu'en réalité la donation n'a point eu lieu au profit d'un incapable, mais bien au profit de celui qui y est dénommé ? On le répète, la démarcation une fois franchie, on verrait surgir une multitude de procès sur la prétendue impossibilité de l'antidate. Doit-on, d'ailleurs, être si vivement inquiet sur le sort des actes de ceux qui, pour la plupart du temps, ne se dispensent de les faire enregistrer qu'en vue de priver le trésor des droits qui lui sont dus; de ceux qui exposent les tiers à contracter avec un individu qui ne peut plus disposer de ce qu'il leur vend, parce qu'il l'a déja vendu à d'autres, ou avec un individu ruiné, et néanmoins en possession d'une apparente solvabilité, sans que ces tiers puissent connaître le danger qu'ils courent? Non, quand ces actes sont opposés aux tiers, ils sont peu dignes de faveur.

L'héritier bénéficiaire, créancier de la succession, est-il un tiers dans le sens de l'art 1328 du Code civil, relativement aux actes sous seing privé émanés du défunt?

Est-il vrai que ces actes n'aient de date certaine à son égard que dans les cas énumérés par cet article?

Voyez Date, no 2.

SECTION II.

Des registres des marchands. ·

I. Personne ne pouvant régulièrement se faire un titre à soi-même, les registres des marchands ne font point, contre les personnes non marchandes, preuve des fournitures qui y sont portées (Cod. civil, art. 1329) et enim exemplo perniciosum est, ut ei scripturæ credatur, quá unusquisque sibi adnotatione propria, debitorem constituit. L. 7. Cod. de probat.

de ces deux jurisconsultes, on voit que les registres des marchands ont encore quelque force vis-à-vis des personnes non marchandes, puisqu'ils servent de base au serment d'office, que le juge ne peut déférer que lorsque la demande ou l'exception n'est pas, il est vrai, pleinement justifiée, mais qu'elle n'est pas non plus totalement dénuée de preuves. (Art. 1367, idem.)

Toutefois, si l'action du marchand était prescrite, nous ne pensons pas que le juge pût déférer le serment supplétoire, parce que, bien qu'il ne puisse suppléer d'office le moyen tiré de la prescription, néanmoins la prescription acquise et invoquée fait que la dette est présumée éteinte, et, dès lors, elle ne se trouve plus dans la classe de celles prévues à l'art. 1367.

Mais rien ne s'opposera à ce que le marchand défère le serment décisoire; l'art. 2275 lui donne expressément le droit de le déférer non-seulement au débiteur lui-même, mais encore à sa veuve ou à ses héritiers à ces derniers, pour qu'ils aient à déclarer s'ils ne savent pas que la chose est due.

Mais l'utilité du commerce, ses usages, et la difficulté de constater, par des actes ordinaires, les prix et les livraisons des marchandises vendues de commerçant à commerçant, ont fait apporter une exception à ce principe entre les marchands eux-mêmes. Ainsi, suivant l'art. 109 du Code de commerce, les achats et les ventes, entre les commerçants, peuvent se constater par leurs re- IV. Il est indifférent que les articles des registres mais il faut pour cela qu'ils soient régu-gistres des marchands soient écrits par les marlièrement tenus, sinon ils ne doivent point faire chands eux-mêmes ou par leurs commis, pourvu foi au profit de celui qui les représente (art. 12 que ce soit bien par des personnes habituées à et 13 du même Code), quoiqu'on puisse en exi- écrire sur ces registres. ger la représentation contre lui dans les cas et sous les modifications prévus aux articles 14, 15, 16 et 17; car le marchand ne peut se prévaloir de sa propre négligence.

:

II. Les registres des marchands font aussi preuve contre eux au profit des non commerçants; mais celui qui veut en tirer avantage ne peut les diviser en ce qu'ils contiennent de contraire à sa prétention: nam fides scripturæ est indivisibilis. (Code civil, art. 1330.)

Mais, suivant Dumoulin et Pothier, on ne doit avoir aucun égard aux papiers volants, encore qu'ils se soient trouvés dans le journal, lequel est le livre indispensable à tout commerçant, porte l'art. 8 du Code de commerce.

SECTION III.

Des registres et papiers domestiques.

I. De la règle qu'on ne peut se faire un titre à soi-même, il résulte que les registres et papiers domestiques ne font point foi au profit de celui qui les écrit (Code civil, art. 1331 ), non plus qu'au profit de ses héritiers ou ayant cause.

Mais cet article porte qu'ils font foi contre lui dans deux cas :

1° Lorsqu'ils énoncent formellement un paiement reçu ;

2° Lorsqu'ils contiennent la mention expresse que la note a été faite pour suppléer au défaut de titre en faveur de celui au profit duquel ils énoncent une obligation.

III Au surplus, quoique les registres des marchands ne fassent point foi contre les personnes non marchandes, il ne faut cependant pas croire qu'on doit toujours les considérer comme non avenus absolument l'art. 1329, au contraire, apporte au principe qu'il consacre cette limitation importante: sauf ce qui sera établi à l'égard du serment. Or, il est clair que cette modification ne doit pas s'entendre en ce sens, que le marchand pourra seulement déférer le serment décisoire à son adversaire, car il le pourrait, encore qu'il n'eût aucun registre, ou qu'il ne voulût pas faire valoir les siens (art. 1360); et, dès lors, la disposition ne signifierait rien; mais qu'elle doit s'entendre en ce sens, que le juge pourra déférer le serment d'office au mar-profit du débiteur. chand, si, comme disent Dumoulin et Pothier (Traité des obligations, no 719 et suivans), la fourniture est vraisemblable, et si le marchand jouit d'une bonne réputation.

D'après cette interprétation que nous donnons de l'art. 1329, et en nous appuyant de l'autorité

II. Quant au premier cas, il n'est pas douteux que l'écriture mise sur le journal par le créancier, signée ou non de lui, ne fasse foi au

Mais si elle n'était pas de sa main, ni signée de lui, et si elle n'était pas, non plus, d'une personne habituellement employée à écrire sur son journal, elle ne devrait pas faire pleine foi contre lui, parce que la fraude pourrait faci-. lement se commettre, soit par quelque domes

« PreviousContinue »