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leur donna car il n'en fut pas le premier fondateur ses idées économiques et aussi celles du P. Ludovic: ces dernières étant très personnelles et très intéressantes, le livre s'applique aussi bien au xx° siècle qu'au xve, il est à lire autant au point de vue tout actuel des réformes et du bien à faire qu'au point de vue de la défense de l'Eglise et de l'histoire des institutions. L'auteur était préparé à sa double tâche par une connaissance approfondie de la théologie, par une étude patiente de l'histoire et de la théorie économique, surtout par une pratique prolongée des œuvres de crédit populaire; c'est en consacrant sa vie à les développer, qu'il est parvenu à cette précision, à cette fermeté de pensée qu'on n'acquiert que par l'expérience, et qui donne un poids considérable aux conclusions de son livre. L. C.

Vingt-cinq ans de gouvernement sans Dieu, par Paul GRIVEAU, in-16 de 108 pages, Paris, Comité antimaçonnique, 42, rne de Grenelle.

La Revue Catholique des Institutions et du Droit qui, dès ses premiers numéros, avait dénoncé le péril maçonnique et commencé, il y a trente ans, avec Claudio Jannet la campagne contre les sectes, ne peut qu'applaudir au travail de M. Paul Griveau. C'est un tableau fidèle, saisissant, de l'action néfaste de la franc-maçonnerie en France. Dans ces quelques pages, l'auteur a habilement résumé les études de ses devanciers. Il nous met en main un instrument de propagande qui rendra les services les plus signalés à ceux qui veulent travailler à divulguer et à conjurer le grand danger religieux et social de notre temps.

C'est en vue d'un concours que cet écrit avait été composé. Il a été couronné, ce qui ne surprendra aucun des lecteurs. M. Griveau est coutumier de ce genre de succès et plusieurs fois il a été lauréat de l'Institut. Il ajoute aujourd'hui, et nous l'en félicitons, à ses titres à l'estime du monde juridique et savant, un titre à la reconnaissance de tous les catholiques. A. C.

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REVUE CATHOLIQUE

DES INSTITUTIONS ET DU DROIT

(XXXI ANNÉE)

LE PAPE

La mort de Léon XIII a causé dans l'univers entier, même chez les peuple séparés de l'unité, une émotion qui prouve combien grande est la place occupée dans le monde par la Papauté.

Nous voulons joindre notre voix à la voix des foules qui, partout, proclame leurs regrets et leur vénération. Nous y ajouterons le témoignage personnel de notre reconnaissance. Français nous avons toujours vu Léon XIII prodiguer à notre pays les preuves de son amour; jurisconsultes, nous ne saurions oublier qu'll nous a accordé ses encouragements, son approbation et ses plus paternelles bénédictions.

Le 6 octobre 1888, au cours de l'année jubilaire, Léon XIII donnait audience aux Jurisconsultes catholiques. En leur nom M. Lucien-Brun, fondateur des Congrès, disait : « Depuis quinze ans les jurisconsultes catholiques français s'efforcent de démontrer la nécessité sociale de l'accord de la législation de l'Etat avec la législation de l'Eglise. Quelle a été leur joie lorsque votre parole sacrée promulguant, au milieu du trouble des esprits et des luttes homicides des peuples, les principes de la constitution chrétienne des Etats et les bienfaits de l'Eglise « œuvre immortelle de Dieu » les a confirmés dans la vérité des doctrines qu'ils ont persévéramment professées! Avec quelle admiration ils ont recueilli ces enseignements immortels, où resplendit la pure lumière de la vérité religieuse et sociale ! Avec quel bonheur ils ont trouvé la formule définitive de leur plus chère conviction, dans ces pages inspirées par l'Esprit dont l'assistance divine a été promise à Pierre et à ses successeurs ». Sa Sainteté agréant ces paroles, répondait aux Jurisconsultes et à leur Président : «... Nous ne doutons pas, comme on l'a si bien dit tout à l'heure, que vous ne le cédez à personne dans les sentiments de dévouement que vous exprimez d'une façon constante par les travaux que vous poursuivez depuis longtemps pour la défense des droits de l'Eglise... Continuez donc de votre côté, chers fils, à travailler comme vous l'avez fait et comme vous le faites, en demandant à Dieu source de toute vérité et de toute lumière, qu'il vous illumine et vous guide. »

Fidèles aux traditions qui venaient de recevoir l'approbation du Souverain Pontife, les Jurisconsultes ont continué leur œuvre, s'efforçant de défendre la Papauté qui est la première des Institutions sociales, et le fondement de toutes les autres; le

Se LIV. 2e SEM. 31e ANN. AOUT 1903.

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Pape qui est par excellence le représentant du droit ; et bien assurés qu'en agissant ainsi ils servaient à la fois l'Eglise et la France.

Après avoir pris part au deuil de l'Eglise, la Revue s'associe aujourd'hui à l'allégresse universelle qui accueille l'avènement de Pie X.

Nous saluons en la personne du successeur de Léon XIII, le chef de la sainte Eglise catholique, apostolique et romaine, dont nous dirons avec Bossuet: « O sainte Eglise romaine, mère des Eglises et de tous les fidèles! Eglise choisie de Dieu pour unir ses enfants dans la même foi et dans la même charité! nous tiendrons toujours à ton unité par le fond de nos entrailles ». Nous vénérons en lui le successeur de Pierre qui a reçu les clefs du royaume des cieux avec le pouvoir de lier et de délier, d'ordonner, de commander et d'absoudre, avec le droit de gouverner l'Eglise. « Tout est soumis à ces clefs, dit Bossuet, tout, rois et peuples, pasteurs et troupeaux. Nous le publions avec joie; car nous aimons l'unité, et nous tenons à gloire notre obéissance. » Enfin, fermement convaincus que là où est Pierre, là est l'Eglise, nous écouterons sa parole, comme celle du Pontife infaillible, et nous redirons avec saint Irénée, le grand Evêque de Lyon: Ubi ecclesia, ibi et spiritus Dei: et ubi spiritus Dei, illic ecclesia et omnis gratia, spiritus autem veritas.

Il nous sera permis de nous réjouir à la pensée que le Souverain Pontife, dont nous sommes déjà les fils soumis, portera le même nom que celui de ses prédécesseurs qui le premier encouragea notre œuvre, et par deux Brefs successifs lui envoya la Bénédiction Apostolique.

Le nom de Pie, illustré depuis plus d'un siècle par les vertus de Pie VI, de Pie VII et de Pie IX, les trois Papes qui depuis la Révolution ont le plus souffert pour l'Eglise, et resteront l'objet de la vénération des générations à venir, contribuera, sans nul doute, dès le premier jour à augmenter l'amour des fidèles pour le Père que Dieu vient de leur donner. Puissent les Français par leur fidélité à la religion catholique et par leur dévouement au Saint-Siège, se montrer dignes des glorieux privilèges que leurs pères ont mérités à la France, dont le chef portait le nom de Fils aîné de l'Eglise; et fidèle aux traditions du Saint-Siège, S. S. Pie X, saura la distinguer du gouvernement qu'elle subit, et continuera, comme ses prédécesseurs, à la traiter en fille de prédilection.

Et maintenant, dans notre modeste sphère, nous nous efforcerons de ne le céder à personne dans les sentiments de dévouement que nous avons exprimés d'une façon constante par les travaux que nous poursuivons depuis longtemps pour la défense des droits de l'Eglise. Nous continuerons donc, de notre côté, très Saint Père, à travailler comme nos pères l'ont fait, et comme vous nous direz de le faire, en demandant à Dieu, source de toute vérité et de toute lumière qu'Il nous illumine et nous guide, et à Votre Sainteté, interprête infaillible de la vérité, qu'elle daigne nous encourager et nous bénir. Henry LUCIEn-Brun.

L'ÉTAT ET L'ÉGLISE EN SUISSE

Rapport au XXVIe Congrès des Jurisconsultes catholiques.

L'exposition des rapports de l'Etat et de l'Eglise en Suisse présente maintes difficultés, non seulement parce que ces rapports sont réglés tant par les vingt-cinq législations différentes des cantons et demi-cantons que par la législation de la Confédération, mais encore et surtout parce que ces règles, qui empiètent les unes sur les autres, reposent sur des principes très divers.

Il résulte de l'organisation politique de la Suisse que le droit de réglementer les rapports de l'Etat et de l'Eglise appartient en principe à chaque canton; mais la constitution fédérale contient plusieurs articles, d'une portée considérable, qui l'emportent sur la législation. cantonale. Parmi ces dispositions fédérales, il en est quelques-unes qui sont fondées sur le principe de la liberté et de la tolérance, et de la séparation de l'Etat et de l'Eglise; d'autres contiennent d'odieuses mesures d'exception dirigées contre l'Eglise catholique, et ont été introduites dans la constitution par le radicalisme de la majorité.

La constitution fédérale établit, dans son article 49, que La liberté de conscience et de croyance est inviolable ». Il faut seulement que les citoyens ne subordonnent pas à leurs convictions religieuses l'obéissance qu'ils doivent aux lois de l'Etat. Il est vrai que la constitution débute par ces mots « Au nom de Dieu tout puissant »; mais c'est là seulement un écho des temps où les confédérés, avant la bataille, se jetaient à genoux pour prier. Rien d'actuel ne manifeste que la croyance. en Dieu se trouve à la base du pacte fédéral.

L'article 49 continue en disant : « Nul ne peut être

contraint de faire partie d'une association religieuse, de suivre un enseignement religieux, d'accomplir un acte religieux, ni encourir des peines, de quelque nature qu'elles soient, pour cause d'opinion religieuse ». Lorsque l'Eglise catholique prononce la peine de l'excommunication contre une personne coupable d'apostasie, cet article ne peut pas être invoqué, comme quelques-uns le croyaient l'apostasie, en effet, entraîne logiquement la perte de la qualité de membre de la société religieuse, par la raison que toute société religieuse suppose et exige nécessairement l'adhésion à une croyance déterminée. De même qu'il n'est pas permis de contraindre une personne à entrer dans une société religieuse, de même on ne peut imposer une personne à une société religeuse qui la repousse. Ce principe, quelque naturel qu'il soit, ne laisse pas d'être encore souvent méconnu dans la pratique. Le droit de décider si quelqu'un fait partie d'une société religieuse appartient à cette société elle-même, qui exerce ce droit par l'organe des autorités religieuses compétentes. Il y a des cantons qui, ne tenant pas compte de cette vérité, traitent les personnes, exclues de l'Eglise, connues sous le nom de « Vieux-Catholiques », tantôt comme membres de l'Eglise, lorsque cela est avantageux à ces personnes, tantôt comme constituant une corporation distincte, tantôt même comme seules aptes à représenter l'Eglise catholique elle-même. Et la question de savoir si les membres d'une société religieuse qui s'en séparent peuvent prétendre à une part des biens de cette société a aussi été tranchée par des pouvoirs publics radicaux en faveur de ces dissidents, bien que le traité de Westphalie eût déjà proclamé le seul principe juste, qui est que ceux qui se séparent d'une église doivent organiser leur culte suo sumptu, à leurs propres frais, sans dotation prélevée sur les biens de la confession religieuse qu'ils ont abandonnée. Cette jurisprudence officielle a gratifié les Vieux-Catholiques d'un grand nombre d'édifices

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