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les ministres ont payées d'après votre autorisation, et pour lesquelles vous ne leur avez donné ni des impôts, ni des crédits en rentes perpétuelles. C'est ce qui constitue en réalité votre dette flottante; c'est cette dette flottante, et non pas celle de la Trésorerie, que je regarde comme indispensable et avantageuse au pays. C'est au moyen de cette dette flottante que vous pouvez, dans chaque occasion comme celle-ci, imiter l'exemple d'un pays voisin, qui règle de loin en loin des affaires minimes de compensation entre les recettes et les dépenses, au moyen d'une dette flottante qu'il serait très dangereux d'exagérer, je le reconnais avec l'auteur de l'amendement, mais qui, dans les limites où vous l'avez réduite, vous est indispensable.

L'orateur auquel je succède vous a dit que son amendement avait pour objet de régulariser la dette flottante. Mais non, Messieurs, il ne la régularisera pas; car il ne porte que sur 24 millions, et vous avez 66 millions du passif des caisses qu'on n'a jamais songé de régulariser. Il n'y a à cet égard qu'une chose à demander: 125 millions forment-ils une dette flottante exagérée ? Je répondrai par la situation dans laquelle vous vous êtes trouvés dans les années précédentes. En 1821, il y avait 220 millions de dette flottante; en 1823, nous avons été jusqu'à 335 millions; en 1824, à 299 millions; et en 1825, nous n'avons que 20 millions. Dans tout le cours de l'année, il n'y a que 88 millions d'effets à échéance. Messieurs, est-ce dans cette situation que la dette flottante peut paraître exagérée? A-t-on raison de dire que nous entralnons la Chambre dans des illusions, et que nous laissons entrevoir une banqueroute quand nous nous proposons un dégrèvement?

cahiers d'observations dépouillés des noms des
personnes, seront distribués aux Chambres et
joints aux comptes de chaque année.»

M. Labbey de Pompierres a la parole pour dé-
velopper son amendement.

(On demande généralement à aller aux voix.) M. le Président met aux voix l'amendement de M. Casimir Périer, qui consiste dans un retranchement de 58 millions. Cet amendement est rejeté.

M. Labbey de Pompierres. Si jamais l'utilité
de cet amendement a été démontrée, c'est assu-
rément dans cette session, au sujet des dépenses
de la guerre d'Espagne. Vous n'avez rien pu
obtenir sur ce point. M. le ministre vous a dit, à
cette tribune, que ni le ministère ni nous ne
pourrions savoir le fond de la difficulté qui a
existé à Bayonne. Eh bien! en sera-t-il de même
de la cour des comptes? Je ne puis le penser. Il
faut bien que ces comptes soient épurés par la
cour des comptes. Mon amendement a pour objet
de faire connaître à la Chambre le résultat des
travaux de la cour des comptes, et les obser-
vations qu'elle aura pu faire. Je me borne cette
année à vous demander les cahiers d'observations
relatifs aux comptes de la guerre d'Espagne,
parce que c'est le seul moyen de savoir ce qui
s'est passé. Je citerai un fait qui se rapporte à la
marine. Dans la marine, il n'y a pas un compte
où l'on ne transporte les dépenses d'un endroit
à un autre. M. le commissaire du roi vous a
avoué que pour les dépenses de l'artillerie (ici
une conversation particulière couvre la voix de
l'orateur et l'empêche de continuer).

L'amendement proposé par M. Martin de Villers est mis aux voix et rejeté.

(La Chambre adopte l'article 5 du projet de loi.)

Elle adopte sans discussion les articles 6 et 7 conçus en ces termes :

«Art. 6. La somme de 8,898,120 francs formant la différence entre les recettes de 1824 arrêtées par l'article précédent à......

994,971,962

et les crédits du même exercice, définitivement réglés par l'article 4 à 986,073,842

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5,352,951

3,545,169

8,898,120

Messieurs, je ne puis me faire entendre. Je sais bien que mon amendement ne sera pas adopté, mais au moins permettez que je vous en expose les motifs. (Parlez! Parlez!) M. le commissaire du roi a avoué qu'on n'avait employé ni le nombre d'hommes ni l'argent qui étaient destinés au corps de l'artillerie, pour les besoins de cette arme, mais à autre chose ? Vous voyez que l'on change la destiuation des crédits que vous allouez. Il faudrait savoir du moins à quoi on les emploie. Or, c'est ce que les cahiers d'observations de la cour des comptes peuvent vous apprendre. Je ne dis pas que l'argent ait été mal employé, mais il faut au moins qu'on nous en rende compte. Hier on a fermé la discussion en votant l'article 4, et il n'a pas été possible de faire des observations sur le ministère de l'intérieur et sur le ministère des finances, qui donnaient pourtant matière à bien des questions. Je sais bien qu'on ne nous aurait pas plus satisfaits là-dessus que sur d'autres objets, mais nous aurions rempli notre devoir. Messieurs, vous ne saurez jamais rien si l'on ne vous communique pas les cahiers d'observations de la cour des comptes. A qui les envoie-t-on ? aux ministres. Mais souvent les ministres savent tout cela tout aussi bien que la cour des comptes, et ils se garderont bien de vous donner connaissance du contenu de ces cahiers d'observations. Je ne vois donc pas comment nous pourrons les amener à se corriger. Si nous avions la spécialité, ainsi que l'ont demandé plusieurs de vos commissions, et les ministres actuels lorsqu'ils n'étaient que députés, nous pourrions nous passer des cahiers d'observations de la cour des comptes; mais dans l'état actuel des choses, ils nous sont nécessaires. Je persiste à demander qu'ils nous soient communiqués.

Art. 7. Les sommes qui pourraient provenir encore des ressources affectées à l'exercice 1824 seront portées en recettes au compte de l'exercice courant, au moment où les recouvrements seront effectués. »

M. le Président. Un article additionnel, proposé par M. Labbey de Pompierres, est ainsi conçu :

« Les travaux de la cour des comptes et ses

(L'amendement de M Labbey de Pompierres est mis aux voix et rejeté.)

M. le Président. Amendement de la commission :

« A l'avenir, les fonds provenant du produit du centime spécial, prélevé pour être distribué en

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A une heure, la Chambre se réunit à l'issue des bureaux où elle s'est occupée de l'examen des deux projets de loi présentés dans la séance du 25 de ce mois.

Le procès-verbal de cette séance est lu et adopté.

L'ordre du jour appelle divers rapports du comité des pétitions.

M. le marquis d'Orvilliers obtient d'abord la parole, et rend compte à l'Assemblée des pétitions suivantes :

La dame Prévost, veuve Clapazy, expose qu'elle et. son mari avaient acheté d'une compagnie anglaise des terres situées dans l'Amérique septentrionale, et dont ils n'ont pu être mis en possession; que le prix d'acquisition et les frais de voyage ont épuisé leurs moyens; que son mari est mort de chagrin, et l'a laissée sans ressources. Elle sollicite des secours.

La Chambre n'ayant aucun moyen de les lui procurer, le rapporteur propose, quoique à regret, l'ordre du jour.

(Il est adopté par la Chambre.)

Les sieurs Weber et Schuler, de Strasbourg, sollicitent, au nom des créanciers unis des frères Haindel, le remboursement d'une somme de 307,972 francs, paiement de la vente des biens de leurs débiteurs, et déposée à la Caisse des consignations, d'où elle n'a pu être retirée avant la loi du 9 frimaire an VII sur la déchéance, et le décret du 25 février 1808 sur l'arriéré. lis demandent à être exceptés de ces lois, attendu la nature particulière de leur créance.

Quelque intérêt que doive inspirer la situation des pétitionnaires, le comité ne voit à la disposition de la Chambre aucun moyen d'y avoir égard.

Tout ce qu'elle pourrait faire en leur faveur, serait de renvoyer la pétition au ministre des finances; mais ce ministre a déjà rejeté leur demande; et le conseil d'Etat, devant lequel ils se sont pourvus contre ce rejet, a confirmé la décision du ministre. Toute juridiction est donc épuisée, tout nouveau recours est inutile, et le comité ne peut encore proposer que l'ordre du jour.

(La Chambre adopte cette proposition.)

Le sieur Guérin, peintre et doreur à Paris, soumet à l'Assemblée un nouveau système de jurandes et maîtrises pour les diverses professions. Il avait, dès l'année dernière, présenté sur le même objet un système peu différent de celui-ci, et que la Chambre ne crut pas devoir accueillir. Le comité propose, sur sa nouvelle pétition, l'ordre du jour adopté sur la première.

(La Chambre adopte l'ordre du jour.)

Il est pareillement adopté sur la pétition d'un autre sieur Guérin, fabricant de toiles à Mamers, département de la Sarthe, qui se plaint d'erreurs commises à son préjudice dans la liquidation de fournitures faites pour le service de l'armée, et demande à être renvoyé devant la cour des comptes pour le redressement de ces erreurs, que depuis 1805 le ministre de la guerre a constamment refusé de reconnaître.

Le même ordre du jour écarte une pétition par laquelle le sieur Carpentier, ex-garde des magasins de l'imprimerie royale, propose un moyen facile d'augmenter de 50 à 60 millions les revenus de l'Etat. Ce moyen serait d'imposer à raison de 12 0/0 par an les rentes inscrites sur le grand li

vre.

M. le comte de Tournon, au nom du même comité, rapporte à la Chambre d'autres pétitions. La première a pour auteur le sieur Plumard de Rieux, domicilié à Rouen. Ce particulier expose que la loi de 1792, en abolissant les substitutions, l'a privé des ressources qu'il espérait pour sa vieillesse et pour l'établissement de sa nombreuse famille. Il demande la révision de cette loi, ou du moins une indemnité pour les Français qu'elle a, comme lui, violemment dépouillés.

(Le comité propose et la Chambre adopte l'ordre du jour sur cette pétition.)

Le sieur Turben, ancien conducteur de travaux dans les ponts et chaussées, dénonce d'une part des abus qu'il prétend avoir lieu dans cette administration, et demande de l'autre à être remis en activité de service.

Le comité propose, sous le premier rapport, de renvoyer la pétition du sieur Turben au ministre de l'intérieur, et sous le second, de passer à l'ordre du jour.

(Cette double conclusion est adoptée.)

Le sieur Stephen Kingston, armateur à Philadelphie, réclame du gouvernement français le prix de services importants qu'il justifie avoir rendus 1° en transportant des Bermudes à Charlestown, en 1792, 68 réfugiés de Saint-Domingue; 2 en transportant, à une époque postérieure, d'Halifax à Lorient, 43 exilés de Saint-Pierre et Miquelon. Il évalue à 82,500 francs l'indemnité qui lui est due pour ce double objet. Après l'avoir inutilement réclamée du ministre de la marine, il a offert de se réduire à 26,250 francs, montant particulier de la seconde expédition; mais le ministre oppose à cette demande, comme à la précédente, l'inflexible rigueur des lois sur la déchéance. C'est pour être excepté de ces lois, qu'il ne croit pas lui être applicables, que le pétitionnaire sollicite l'intervention de la Chambre.

Le rapporteur observe que l'humanité, le désintéressement du pétitionnaire sont attestés au comité par les témoignages les plus honorables. Malheureusement on ne peut se dissimuler que les lois contre l'application desquelles il réclame lui ont été justement appliquées, et que le ministre n'a rejeté sa demande que par l'impossibilité absolue d'y satisfaire. Dans cet état de choses, le comité ne saurait proposer à la Chambre d'autre décision que l'ordre du jour.

M. le duc de Broglie observe, sans contester d'ailleurs la justesse des réflexions présentées par le noble rapporteur, sans prétendre affaiblir les objections élevées par le ministre, que l'ordre du jour est une proposition bien rigoureuse sur une pareille demande, et à l'égard d'un étranger recommandable sous tant de rapports. Ne pourrait-on adopter quelque parti moins sévère, et renvoyer, quoique sans espérance peut-être, la pétition au ministre de la marine?

M le comte de Chabrol, pair de France, ministre de la marine, demande quel serait l'effet de cerenvoi sinon de rejeter sur le gouvernement la défaveur d'un refus que l'on avoue être inévitable? C'est un acte de courtoisie que l'on propose à la Chambre, mais doit-il être fait aux dépens du ministre ? L'opinant est trop convaincu de la justice de la Chambre pour craindre de lui voir adopter l'affirmative. Il appuie l'ordre du jour proposé par la commission.

(L'ordre du jour est adopté.)

M. le marquis de Courtarvel, troisième rapporteur du comité des pétitions, obtient la parole. Voici les pétitions dont il rend compte à l'Assemblée :

Le sieur Bayer, à Paris, soumet à la Chambre le projet d'une caisse nationale de secours, destinée à remédier aux divers fléaux qui affligent la propriété. Il demande que, pour son établissement, il soit fait dans le budget de 1827 un fonds spécial de 10 millions.

(Le comité propose et la Chambre adopte l'ordre du jour sur cette pétition.)

Le sieur Spy, à Mairy, près Châlons, demande qu'on fasse exécuter les dispositions du concordat de 1801 sur les fêtes supprimées, qui, malgré leur suppression continuent d'être célébrées dans certains diocèses.

Le rapporteur observe qu'il a été pourvu à cet objet par la loi du 18 novembre 1814 sur la célébration des fêtes et dimanches, et que c'est aux autorités locales chargées de son exécution à établir sur ce sujet l'uniformité que réclame le pétitionnaire. Le comité propose en conséquence l'ordre du jour.

(Sa proposition est adoptée.)

Le sieur David, médecin à Louhans (Saône-etLoire), se plaint de n'avoir pu faire juger par le tribunal de cette ville, un procès qui l'intéresse attendu la composition incomplète de ce tribunal. Il demandé qu'elle soit complétée par M. le garde des sceaux, et se plaint que ce ministre, à qui il s'était adressé, l'ait renvoyé à se pourvoir en règlement de juges.

Des renseignements pris par le comité sur la pétition du sieur David ne permettent pas de regarder comme hors de doute les faits qu'elle contient. Cependant pour mettre le gouvernement à portée de les vérifier, et d'appliquer à l'inconvénient dont on se plaint, dans le cas où il aura it quelque réalité, le remède nécessaire, le comité

propose de renvoyer la pétition au ministre de la justice.

(La Chambre ordonne ce renvoi.)

Le sieur Mallart, à Amiens, sollicite la révocation de l'ordonnance du roi du 2 avril 1817, portant règlement sur les maisons centrales de détention. Il présente l'établissement de ces maisons comme également contraire et aux vues d'une sage économie, et au vœu de la loi et de l'humanité! Il se plaint surtout qu'en vertu de l'ordonnance dont il s'agit, on ait transféré de la maison de correction d'Amiens dans la maison centrale de Loos, près de Lille, son fils condamné à deux ans d'emprisonnement.

(Le comité propose et la Chambre adopte l'ordre du jour sur cette pétition.)

Vingt-sept habitants de Paris, parmi lesquels on compte plusieurs des principaux banquiers ou négociants, demandent que le fonds d'amortissement soit réparti entre les rentes à 5, à 4 1/2 et à 3 0/0, dans la proportion des capitaux que chacune d'elles représente, en prenant pour base le prix de 100 pour les rentes à 5 et à 4 1/2, et le prix de 75 pour les rentes à 3 0/0, sauf à reporter sur celui ou ceux de ces fonds qui seraient au pair ou au-dessous la portion de l'amortissement affecté à celui ou ceux qui se trouveraient audessus. Les pétitionnaires se fondent sur les lois de finances de 1816 et 1817, sous la foi desquelles les emprunts ont été contractés, et qui ne permettent pas qu'une partie de la detté, et la plus considérable de beaucoup, se trouve entièrement privée du bienfait de l'amortissement; ils se fondent aussi sur des paroles prononcées par le ministre des finances devant la Chambre même, dans la discussion de la loi de conversion, et desquelles il résulterait,suivant eux, que l'amortissement doit opérer sur tous les fonds, lorsqu'ils se trouvent au-dessous du pair. Le rapporteur expose que les lois de finances de 1816 et de 1817 ont placé la caisse d'amortissement sous la surveillance immédiate et la garantie spéciale de l'autorité législa tive. D'un autre côté, la Chambre, en rejetant, dans sa séance du 28 avril 1825, un amendement qui tendait au même but que la pétition actuelle, à laissé au directeur de la caisse d'amortissement la faculté d'opérer de la manière qui lui paraîtrait être la plus avantageuse à l'Etat; nul doute qu'éclairée par l'expérience, elle ne puisse provoquer une mesure législative pour changer ce mode, et le remplacer par une répartition déterminée à l'avance. Ce changement est-il désirable? C'est une question importante, et que le comité des pétitions n'a voulu préjuger en rien. Mais il a pensé qu'elle appartenait tout entière à l'autorité législative, et qu'elle ne rentrait dans les attributions d'aucun ministre. Il s'abstiendra par conséquent de proposer le renvoi de la pétition au ministre des finances, et il se bornera à en demander le dépôt au bureau des renseignements, afin que chaque pair puisse en prendre connaissance et en faire, s'il le juge convenable, l'objet d'une proposition, dans l'examen de laquelle la Chambre apporterait tout le soin qu'exige un si grand intérêt.

M. le comte Roy estime que la nature même de la pétition la rattache d'une manière toute spéciale à la loi de finances : ce serait le cas de la renvoyer en même temps à la future commission du budget, qui pourrait y trouver des documents utiles pour l'examen auquel elle devra se livrer.

M. le comte de Villèle, ministre des finances,

observe que le renvoi à la future commission du budget semblerait indiquer de la part de la Chambre l'intention de modifier le régime de l'amortisse ment par une disposition insérée dans la loi de finances; mais si la Chambre pensait en effet qu'une modification au régime actuel est nécessaire, faudrait-il donc attendre, pour la faire, la discussion du budget? La loi de conversion ne peut-elle donc pas être modifiée, indépendamment de la loi de finances, sur une proposition faite par le gouvernement, ou sur la provocation des Chambres ? et cette voie étant ouverte, pourquoi préfère-t-on celle d'un amendement au budget? Si le ministre parlait à la tribune de l'autre Chambre, il n'hésiterait pas à dire que, pour la Chambre même, une proposition directe serait préférable à une discussion incidente, et la Chambre des pairs sentira facilement que, pour elle, la convenance est encore plus grande. C'est par une loi étrangère au budget que le régime dont on se plaint a été appliqué à l'amortissement; c'est, à ce qu'il semble, par une disposition de même nature qu'il devait être changé. Le gouvernement s'est abstenu avec soin, depuis plusieurs années, de mêler dans le budget aucune disposition qui ne se rattache pas directement aux dépenses publiques et aux moyens d'y pourvoir. Cette marche a été adoptée par suite des observations faites dans le sein de la Chambre même, et elle est trop dans son intérêt pour qu'elle veuille s'en écarter. Si elle croit qu'une mesure est nécessaire, elle la provoquer donc par une résolution, sans attendre la loi de finances; mais qu'une proposition soit faite ou non à cet égard, le ministre est prêt à donner, dès à présent, si on le croit nécessaire, tous les renseignements propres à éclairer la religion de la Chambre sur cette grave question.

M. le baron de Barante appuie au contraire le renvoi à la commission du budget. Lorsque la Chambre ordonne simplement le dépôt d'une pétition au bureau des renseignements, elle laisse à chacun de ses membres pleine liberté d'examiner ou de ne pas examiner, de faire une proposition ou de ne donner aucune suite à l'affaire. fei elle a un devoir plus impérieux à remplir. La loi qui a fondé l'amortissement l'a placé, comme on l'a dit, sous la surveillance et sous la garantie législative. Le directeur de la caisse d'amortissement se trouve dans cette position singulière, que s'il n'est pas responsable aux Chambres, il n'est responsable à personne; car le ministre n'a aucune autorité sur lui, et la commission de surveillance n'est là que pour éclairer l'autorité législative, et non pour agir directement. Jusqu'ici les rapports n'avaient guère été que de pure forme; l'action de l'amortissement étant soumise à une règle fixe, il ne pouvait y avoir aucun sujet ni de critique ni d'éloge dans ses opérations journalières; elles ne peuvent donner matière à aucune disposition nouvelle. Il n'en est pas de même aujourd'hui; une liberté entière a été laissée au directeur de la caisse d'amortissement pour les achats, il faut bien que les Chambres examinent s'il a usé de cette liberté dans l'intérêt de l'Etat ou s'il l'a fait tourner à son détriment,

Il faut convenir d'abord que l'usage qu'il en a fait a contrarié toutes les prévisions. Le ministre lui-même avait manifesté, dans la discussion du projet de loi de conversion, une opinion toute différente de celle qui a prévalu: il convenait non seulement qu'il avait utilité pour l'Etat à acheter des 5 0/0 lorsqu'ils seraient au-dessous du pair, préférablement aux 3 0/0; mais

leur

que c'était un droit, pour les porteurs de 5 0/0, de participer à l'amortissement lorsque rente était au-dessous du pair. Pour que le directeur se détermine à suivre une marche toute contraire et à faire porter l'action entière de l'amortissement sur les 3 0/0 il a fallu sans doute de graves motifs, et le noble pair s'attendait à les trouver dans le rapport de la commission de surveillance; mais elle s'est bornée en quelque sorte à énoncer le fait, et c'est dans l'exposé des motifs du budget que s'est trouvée la justification de la conduite du directeur. Quoi qu'il en soit de cette circonstance, l'obligation n'en subsiste pas moins pour l'autorité législative d'approfondir la question et de juger les explications qui sont fournies, et de pourvoir à l'intérêt de l'Etat et à celui des particuliers, si l'un ou l'autre a été compromis par la marche adoptée. Le dépôt de la pétition au bureau des renseignements suffit-il pour remplir à cet égard l'obligation de la Chambre? Non, sans doute, car si aucun pair ne se détermine à faire une proposition, quel serait l'effet de cette surveillance dont elle est spécialement chargée? Le renvoi à la commission du budget satisfait au contraire à toutes les nécessités; il n'aura peut-être pas pour effet d'amener un amendement au budget, quoique assurément ce résultat n'eût rien que de légal et de conforme au droit de la Chambre; mais du moins il amènera nécessairement un examen approfondi de la question; et la Chambre, chargée en quelque sorte d'une portion du devoir administratif en cette partie, aura accompli le pouvoir que la loi lui impose. En réunissant ainsi l'examen de cette question à celui du budget, elle ne fera que suivre la route qui lui a été tracée par le ministre lui-même dans l'exposé des motifs du budget à l'autre Chambre; le gouvernement ne saurait donc se plaindre de ce qu'elle ne sépare pas ce qu'il a uni. Le noble pair vote le renvoi de la pétition ainsi que du rapport de la commission de surveillance à la future commission du budget.

M. le comte de Villèle, ministre des finances, demande à être entendu. Dans son opinion, les considérations qui viennent d'être présentées par le noble pair auraient dû le conduire à une conclusion toute différente de celle qu'il a adoptée. La question est grave, a-t-il dit; en effet, elle est de la compétence du pouvoir législatif: la Chambre a le droit d'examiner la conduite qui a été tenue par le directeur de l'amortissement; la loi lui en impose même le devoir. Ne sont-ce pas autant de raisons pour que la Chambre s'occupe immédiatement de cet objet? et cependant il propose de renvoyer cet examen, jugé si nécessaire, à la commission du budget; quel serait donc le prétexte d'un pareil renvoi, et quel en serait le résultat? On dit qu'on veut suivre l'exemple du ministre, qui, dans son exposé des motifs, a justifié la conduite du directeur de l'amortissement; mais s'il a présenté alors cette justification, ce n'est pas qu'il en fit l'objet d'aucune disposition législative qu'il proposait, mais seulement parce qu'en rendant compte de la situation générale de l'Etat sous le rapport des finances, il ne pouvait se dispenser de parler d'uu objet important, et sur lequel l'attention publique était depuis longtemps éveillée, comnie i l'a fait au surplus à l'égard de beaucoup d'autres objets dont il n'a fait la matière d'aucune proposition. Ici, au contraire, ce n'est pas d'un simple examen et d'une discussion sans résultat qu'il peut s'agir; c'est une disposition nouvelle que les pétitionnaires

demandent à renvoyer à la commission du budget; ce serait en quelque sorte décider à l'avance que la demande ne peut être admise.

La Chambre, en effet, a sans doute le droit de faire des amendements au budget, et le ministre est loin de lui contester ces propositions. Mais lorsqu'une voie plus directe lui est ouverte, lorsqu'elle peut arriver au même but plus prochainement, plus sûrement, plus utilement, un renvoi n'auraitil pas l'apparence d'une décision négative? La Chambre pèsera cette considération; mais, quelle que doive être son opinion à cet égard, puisque la discussion a pris quelque développement, le ministre saisit avec empressement cette occasion d'aborder la question au fond, et de présenter à la Chambre tous les documents qui peuvent l'éclairer sur ce point. Il observe d'abord que la marche suivie par le directeur de la caisse d'amortissement semblerait être le résultat nécessaire de la délibération des deux Chambres sur la loi de conversion. On se rappelle, en effet, que la répartition proportionnelle du fonds d'amortissement, que demandent aujourd'hui les pétitionnaires, avait été formellement proposée comme amendement dans l'une et dans l'autre Chambre, et qu'elle a été repoussée dans toutes les deux à la suite d'explications qui ne laissaient aucuns doutes sur les motifs du rejet et sur l'interprétation du texte de la loi. Cependant on tire argument des paroles qui furent alors prononcées par le ministre, et l'on croit y trouver un engagement contraire à la direction qui a été suivie. Le ministre ne récuse assurément aucune de ses paroles, il convient qu'il a dit, en combattant un amendement proposé dans cette Chambre même, et qui tendait au même but que la pétition, les propres paroles que la pétition rapporte et que voici: La loi interdit le rachat des cinq au-dessus du pair, parce qu'elle suppose l'existence d'un autre fonds audessus de ce taux; mais aussitôt que les cinq tomberont au-dessous du cours de cent, les rachats recommenceront parce qu'il sera dans l'intérêt de l'Etat de racheter plutôt des cing que des trois, et, ainsi, les possesseurs des cing n'éprouveront aucun dommage, puisque l'Etat fera pour eux tout ce qu'il s'est engagé de faire en soutenant le prix de leurs rentes jusqu'au point où il peut les rembourser. Mais dans quelles circonstances ont-elles été prononcées? il s'agissait uniquement de savoir si la loi devait régler d'une manière invariable l'action de l'amortissement sur les divers fonds, ou si, à raison de la mobilité perpétuelle des valeurs sur lesquelles l'amortissement agit, on devait en laisser la direction à un instrument intellectuel et indépendant, qui pût le porter, suivant le cas, sur le point où il serait le plus utile pour le bien du pays, et pour le maintien du crédit public. On accusail alors le ministre de vouloir élever, outre mesure, le taux des trois pour cent, au préjudice même des cinq pour cent, et c'est pour répondre à ce reproche, dont il ne faut pas les isoler, que ces paroles ont été prononcées. Mais puisqu'on citait ce passage des discours du ministre, on aurait dû peut-être en citer un autre qui présente, avec la circonstance actuelle, une coïncidence qui dépassait alors, il faut en convenir, toutes les prévisions. Voici ce que disait le ministre en combattant, à l'autre Chambre, un des amendements présentés dans le même but que la pétition: N'est-il pas clair que dès le lendemain du jour où les cinq pour cent tomberont au-dessous du pair l'intérêt de l'Etat est de racheter des cinq pour cent, á moins qu'il ne se présente une circonstance bien extraordinaire, et qui n'est pas à prévoir, c'est-à-dire que

les trois pour cent en soient affectés hors de proportion.

Cette circonstance extraordinaire est arrivée ; les prétendus engagements du ministre ne sont donc pas rompus, mais l'hypothèse qu'il avait posée s'est accomplie. C'en est assez pour justifier des paroles qui n'auraient peut-être pas dû être mêlées à une question aussi grave. Et il est temps d'arriver à ce qui est plus important, c'est de voir si la conduite du directeur de l'amortissement a été légale et utile à l'Etat, et si elle doit motiver, de la part de la Chambre, ou quelque blâme pour ce fonctionnaire, ou quelque modification aux lois qui régissent l'amortissement. Que sa conduite ait été légale, c'est d'abord un point qui ne saurait être contesté, puisque la loi ne lui imposait qu'une obligation qu'il a fidèlement remplie, celle de ne point acheter de 5 0/0 au-dessus du pair. Maintenant, a-t-il agi dans l'intérêt véritable du pays? il est encore aisé de s'en convaincre. Les 3 0/0, au lieu d'arriver à 80 francs, comme on l'avait pensé, ont éprouvé une baisse excessive qui peut-être a soutenu en partie le cours des cinq. Tant que ceux-ci sont demeurés au pair, la marche était tracée par la loi même, et il n'y avait aucune autre marche possible que de continuer les rachats dans les 3 0/0. Mais lorsque au mois de septembre le cinq fut descendu au-dessous du pair, le doute put commencer cependant, et pendant les premiers temps que dura cet état de choses, la disproportion entre la baisse du trois et celle qu'éprouve le cinq fut telle que le directeur de la caisse d'amortissement crut devoir prendre sur lui d'ordonner que les rachats auraient lieu dans le fonds qui serait le plus au-dessus de son pair légal, calculé à 100 pour les 5, et à 75 pour les 3. C'était alors le trois 0/0 qui se trouvait le plus bas, en suivant cette proportion, et les rachats continuèrent. La commission de surveillance, à laquelle cette décision provisoire fut immédiatement soumise, décida à la majorité que la base adoptée était juste depuis, la disproportion entre les deux fonds, au lieu de disparaître, n'a fait qu'augmenter, puisque les rachats qui dans le dernier trimestre de 1825 se sont faits en 5 0/0 à 67 43, taux moyen, et se seraient faits en 50/0 à 97 71, se sont faits dans le premier trimestre 1826 à 63 72 en 3 0/0, et se seraient faits à 97 77 en 5 0/0. Rien ne portait donc à changer de marche. Quel a été d'ailleurs le résultat de l'opération ainsi faite ? Il faut l'apprécier, et sous le rapport de l'intérêt dont l'Etat se trouve déchargé, et sous le rapport du capital. Quant à l'intérêt, d'abord on a, en 30/0, racheté 1,942,214 fr. de rentes; mais, pour être juste, il faut y ajouter le cinquième, auquel les possesseurs de ces rentes out renoncé en convertissant, puisqu'en définitive ces rentes et les 5 ont la même origine. C'est donc réellement 2,427,767 fr. 50 c. de rentes 5 0/0 qui ont été atteintes, tandis qu'en rachetant dans les cinq on n'aurait éteint que 2,218,500 francs, ce qui donne pour résultat un avantage de 209,267 fr. 50 c. de rentes au profit de l'Etat. Dans l'opération telle qu'elle a été faite, l'avantage en capital est de 20,370,466 fr. 66 c. Voici relativement à l'intérêt de l'Etat. Quant à celui des porteurs de 5 0/0, de quoi peuvent-ils se plaindre? La loi leur avait affecté, dit-on, un fonds primitif d'amortissement de quarante millions, et ils en sont privés. Le ministre ne parlera pas ici du taux auquel ont été contractés les divers emprunts. Quel qu'eût été ce taux, le droit des porteurs de rentes à l'amortis

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