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jourd'hui sont nées, il est vrai, au sein de l'anarchie; mais de quoi se sont-elles formées, si ce n'est des débris des anciennes Facultés de médecine, des anciens colléges de chirurgie? Elles ne sont au fond que la continuation de ces anciennes écoles cet ordre de choses ne peut être changé; l'orateur a déjà développé dans un autre discours les raisons morales qui s'y opposent. Mais il est une considération d'un autre genre sur laquelle il n'a peut-être pas assez insisté : c'est l'accroissement de dépense qui résulte pour les élèves du séjour dans les grandes villes. En admettant même que, suivant les calculs d'un noble pair, un élève en médecine puisse borner à Paris sa dépense annuelle à 1,200 francs, combien est-il de parents qui soient en état de payer une telle pension à leurs enfants? C'est avec raison sans doute que le noble préopinant observait qu'il n'est pas nécessaire d'ouvrir la carrière de l'instruction médicale à des jeunes gens trop peu fortunés; mais encore faut-il que la dépense des études soit proportionnée aux émoluments que les élèves sont en droit d'espérer un jour, et ce calcul est facile à faire; il démontrerait combien, dans le système de la commission, il y aurait peu de proportion entre ces deux bases.

servations? Quant à la réunion d'une multitude
d'élèves dans un seul cours, l'orateur y voit plu-
tôt des inconvénients que des avantages; et, pour
ne parler ici que de l'étude de l'anatomie, sa pro-
pre expérience lui a fait sentir combien il est dif-
ficile que huit cents jeunes gens réunis, comme
il arrive à Paris, daus un amphithéâtre, suivent avec
fruit les démonstrations du professeur; en vain
s'efforcent-ils de saisir de loin des détails qu'un
œil exercé peut à peine découvrir de près, et pour
tirer profit des leçons qu'ils ont entendues, il sont
obligés de se procurer, à grands frais, en leur par-
ticulier, des sujets d'expérience, et le secours d'un
répétiteur. Sous ce rapport, le commissaire du roi
n'hésite pas à donner la préférence à des écoles
moins nombreuses, telles que seront celles que le
projet veut établir. On a prétendu rejeter en partie
sur les écoles actuelles l'ignorance des officiers de
santé reçus par les jurys médicaux.

On est revenu prudemment sur l'embarras qu'il y aurait à trouver un nombre de médecins suffisant pour fournir à l'enseignement dans les écoles secondaires? Mais est-il donc besoin de tant de professeurs pour ces écoles? Un seul fait peut répondre ici à tous les raisonnements. Avant la Révolution, la Faculté de Paris ne comptait que six professeurs, au nombre desquels on en comprenait deux qui enseignaient la chirurgie. C'est en vain qu'on s'est flatté de l'espoir de voir s'accroître le nombre des docteurs en forçant les élèves à suivre les cours d'une Faculté. Les tableaux de réception, que l'orateur a consultés, ne représentent aucune progression de ce genre (il en résulte, au contraire, que, pendant les dernières années, le nombre des réceptions au doctorat a diminué); mais comme celui des réceptions par les jurys a diminué également, la proportion entre les deux ordres ne paraît pas avoir changé. On objecte encore au système du projet de loi que les médecins de province sont trop occupés de la pratique pour avoir le loisir de se livrer aux travaux de l'enseignement: ils trouvent, dit-on, plus de profit à pratiquer la médecine qu'à l'enseigner, et les besoins de leurs malades leur font négliger le soin de leurs élèves. La réponse à cette objection est toute simple: les professeurs de la Faculté de Paris, de celle de Montpellier, s'adonnent à la pratique, et personne n'ignore que la pratique à Paris prend plus de temps, occasionne plus de dérangement qu'en province; cependant l'enseignement en souffre-t-il? Cette observation n'est peut-être pas hors de propos pour expliquer quelle peut être l'utilité des droits d'examen dont un noble pair réclamait tout à l'heure la suppression; mais quoi qu'il en soit l'inconvénient de la pratique, si c'en est un, serait commun aux écoles secondaires et aux facultés, ou plutôt partout ce sera un devoir pour un mé decin de se rendre auprès des malades qui l'appellent. On observe que tous les sujets du roi peuvent prétendre à être traités dans leurs maladies par des médecins formés aux mêmes écoles; mais ce serait à tort que l'on considère l'enseignement qui sera donné dans les écoles secondaires comme inférieur à celui des Facultés. N'y a-t-il pas aussi dans les grandes villes de province des médecins habiles? n'y trouve-t-on pas de grands hôpitaux qui peuvent fournir des moyens abondants d'ob

Rien ne serait plus injuste que cette imputation; les officiers de santé dont on se plaint, ou n'ont pas fait d'études, ou n'en ont fait que de mauvaises et d'incomplètes. Enfin on a allégué en faveur du système de l'amendement que déjà un grand nombre de jeunes gens qui n'aspirent qu'au grade d'officiers de santé se seraient fait inscrire sur les registres des diverses Facultés: une explication bien simple fera sentir qu'on s'est encore trompé sur ce point. Depuis qu'une ordonnance du roi a défendu d'admettre à prendre leurs inscriptions dans les Facultés les aspirants aux divers grades qui n'ont point été préalablement reçus bacheliers és lettres, il est arrivé que plusieurs jeunes gens qui n'avaient pas obtenu ce grade se sont fait inscrire comme aspirants au titre d'officiers de santé, mais ce n'est qu'un biais imaginé par eux pour ne pas retarder le cours de leurs études, car en même temps qu'ils suivent les cours de la Faculté de médecine, ils étudient les belles-lettres et les sciences pour subir leurs examens sur ces matières, et devenir ainsi aptes à prétendre au doctorat. Le commissaire du roi a dû rectifier cette erreur; il termine ici ses réponses aux objections dont l'article en discussion a fourni la matière, et se flatte que cet article sera adopté par la Chambre dans les termes du projet.

Aucun autre orateur ne réclamant la parole, M. le président donne à l'Assemblée une seconde lecture de l'article 2 du projet et de l'amendement proposé sur cet article par la commission, en observant que la discussion n'a porté, et que la discussion de la Chambre n'est appelée en ce moment que sur le premier paragraphie de l'un et de l'autre.

Il met d'abord aux voix l'adoption ou le rejet de l'amendement contenu dans le premier paragraphe de l'article proposé par la commission.

Deux épreuves successives, dans la forme ordinaire, laissent du doute sur le vœu de la Chambre.

Une troisième épreuve par assis et levé n'ayant pas dissipé ce doute, la Chambre décide qu'il sera voté au scrutin sur l'adoption ou le rejet du paragraphe.

Avant d'ouvrir le scrutin, M. le président désigne suivant l'usage, par la voie du sort, deux scrutateurs pour assister au dépouillement des votes. Les scrutateurs désignés sont: MM. le comte de Noë et le comte Péré.

On procède au scrutin dans la forme accoutumée. Sur un nombre total de 127 votants, le résultat du dépouillement donne 70 suffrages pour l'adoption de l'amendement, et 57 seulement pour son rejet.

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M. le Président fait lecture d'une lettre dans laquelle M. Pavy demande un congé pour aller vaquer à des affaires importantes qui réclament sa présence. Ce congé est accordé.

M. le Président fait également lecture de la lettre suivante :

Le grand maître des cérémonies, en réponse à la demande que M. le président de la Chambre des députés lui a fait l'honneur de lui adresser sur l'habillement que devront avoir MM. les députés à la solennité de demain, a celui de lui répondre que le roi étant en deuil, celui de MM. les députés pour les occasions de cérémonies, a déjà été réglé de la manière suivante : Veste, culotte et bas noirs.

Le marquis de Brézé renouvelle à M. le président l'assurance de la très haute considération avec laquelle il a l'honneur d'être

»Son très humble et très obéissant serviteur,

« Signé le marquis de DREUX-BRÉZÉ. »

L'ordre du jour est le développement de la proposition de M. Casimir Périer relative à l'amortissement. M. Casimir Périer a la parole.

obligation et du silence qui a été gardé que je crois qu'il serait à propos de nommer une commission chargée d'examiner spécialement la direction qui a été donnée à cette caisse. Je prie donc la Chambre de renvoyer le développement à lundi.

M. le Président. Les observations de M. Casimir Périer m'imposent l'obligation de dire que le président n'a pas cru qu'il entrât dans ses devoirs d'enfreindre une délibération prise par la Chambre, et par laquelle elle a fixé les développements de la proposition de M. Périer, après la distribution du rapport de la commission de surveillance de la Caísse d'amortissement. Conformément à cette délibération, le président a dù prévenir M. Périer que l'ordre du jour appelait aujourd'hui le développement de sa proposition. En cela le président n'a fait qu'obéir à la décision de la Chambre,qui, néanmoins, peut statuer aujourd'hui sur la demande qui est faite en ce moment par M. Casimir Périer.

M. Casimir Périer. Messieurs, j'ai eu l'honneur de prévenir hier M. le président que je n'étais pas prêt à développer aujourd'hui ma proposition, quoique la Chambre eût la bonté de m'accorder la permission de ne la développer qu'après la distribution du rapport de la commission de surveillance. Vous le savez, Messieurs, la discussion des comptes a pris tous nos moments, et vous ne trouverez pas étonnant que je n'aie pu m'occuper de ma proposition. D'ailleurs, plusieurs de mes collègues m'avaient fait observer que la commission du budget allait faire son rapport, et que peut-être elle prendrait l'initiative sur l'objet auquel se rapporte ma proposition. Vous avez entendu ce rapport, Messieurs, vous avez vu que la commission des comptes avait laissé indécise la question relative aux affaires d'Espagne.

Je demande que la Chambre me permette de ne développer que lundi une proposition d'autant plus importante que la commission du budget n'a pas conclu sur cette affaire, et que la loi nous impose spécialement l'obligation de surveiller la Caisse d'amortissement. C'est en raison de cette

Quelques voix à droite. Il ne veut pas développer sa proposition, c'est qu'il la retire !...

M. Casimir Périer. Je la maintiens, je ne la retire pas !...

Les mêmes voix : Il faut la développer aujourd'hui !

M. Casimir Périer. Je ne suis pas prêt !... (M. Huerne de Pommeuse demande et obtient la parole.)

M. Huerne de Pommeuse. Messieurs, la question qui s'élève et sur laquelle la Chambre doit prononcer, a un caractère d'urgence que nous ne saurions trop considérer.

Elle se rattache au crédit public, à cette condition de puissance relative pour les grands empires, dont l'existence est incompatible avec toute espèce d'inquiétude.

Et dans quelles circonstances avons-nous à délibérer sur cette partie si essentielle de nos nouvelles destinées ?

Vous le savez, Messieurs, le principal marché des capitaux de l'Europe, la place de Londres, a éprouvé une commotion qui n'avait point encore eu d'exemple, et qui faisait dire le 17 février dernier dans la Chambre des pairs : « Que l'Angleterre souffre plus aujourd'hui que ne souffrait la France, en 1815, lorsqu'elle était envahie par les armées étrangères (1) ».

Cette commotion due à une espèce de vertige, que le parlement anglais a qualifié de rage de spéculations, s'est fait ressentir dans toutes les places importantes du monde : Paris n'a pu rester à l'abri d'une secousse si violente et si générale; mais notre place est celle qui en a été le moins ébranlée et où les suites de cette commotion ont été le moins désastreuses.

Nous ne pouvons douter que c'est à notre nouveau système de crédit que nous devons cet avantage inappréciable, puisque naguère, ce crédit était en dépression, quand celui de nos voisins êtait en progrès. Alors les 3 0/0 étaient à 96 0/0 en Angleterre et aujourd'hui, ce pays, après avoir émis pour un milliard de billets de l'échiquier dans l'année, et en avoir négocié à 20 0/0 de

(1) Discours du marquis de Lansdown.

perte, en a consolidé une partie à l'intérêt de 40/0 avec accroissement de capital de 7 0/0.

Et c'est de cette position relative, si honorable pour le pays, et qui peut être si décisive pour la garantie de sa prospérité, que nous pourrions risquer de descendre en appelant l'inquiétude où tout doit être sécurité? Non, Messieurs, nous n'hésiterons point à suivre la belle carrière que nous nous sommes préparée: nous n'hésiterons pas à faire recueillir au pays, aux contribuables, les fruits de ce qu'ils ont si généreusement et si péniblement semé.

J'insiste d'autant plus vivement pour la demande d'une discussion sans retard et pour l'exécution de notre règlement, sur la proposition que notre honorable collègue nous a faite, il y a huit Jours, que ses talents et ses lumières si bien connus, pourraient donner à l'indécision de la Chambre et à l'ajournement de cette proposition un caractère en quelque sorte alarmant et nuisible à cette sécurité que nous devons maintenir comme un principe de vitalité pour le crédit.

M. Casimir Périer. M. Huerne de Pommeuse vient de nous parler de la situation de notre crédit qui, dit-il, a été arrêté dans son développement par des commotions qu'il a qualifiées de rage de speculations. L'orateur a oublié qu'étant lui-même rapporteur de la loi du 3 0/0, il s'était fondé sur ce principe qu'il fallait profiter de la fièvre à la hausse, pendant qu'elle existait, pour adopter la loi. Ce n'est pas à nous qu'il appartient de nous plaindre des commotions qui peuvent avoir lieu, lorsque nous avons pris pour base de notre délibération cette fièvre qu'on qualifie aujourd'hui de rage de spéculations. Je rentre dans la question.

On demande que ma proposition soit discutée aujourd'hui. Si j'étais prêt, ce serait avec le plus grand plaisir que j'en présenterais le développement; mais la Chambre sentira que la question est très grave, et que, par conséquent, elle a besoin d'être inéditée avec la plus grande attention.

Plusieurs voix: On vous a déjà accordé un délai.

M. Casimir Périer. Je le sais, Messieurs; mais nous avons attendu la discussion de la pétition qui a été présentée à la Chambre des pairs.

Les mêmes voix : Voilà le fait !...

M. Casimir Périer. C'est pour éclairer notre discussion, et par déférence pour l'observation de plusieurs de mes collègues, que j'ai attendu les conclusions de la commission du budget. Ce rapport n'a été fait qu'hier: il n'y a donc pas de péril dans la demeure.

Je rappelle au préopinant, qui a été rapporteur de la commission du 3 0/0, que dans son rapport il établissait positivement, à propos de l'amendement de M. Humann, que, du moment où les 50/0 seraient au-dessous du pair, la totalité de l'amortissement serait portée sur les 5 0/0. Il est vrai que la commission n'a pas pris de conclusions, comme il paraît que l'usage s'est introduit; mais il n'en est pas moins vrai que le principe a été reconnu et proclamé dans le rapport.

Quoi qu'il en soit, je ne vois pas quel danger peut courir le crédit public par suite d'un ajournement de quelques jours, et il me semble que la Chambre ne peut, contre son usage, m'empècher de développer ina proposition le jour où je

T. XLVII.

le croirai convenable (Des murmures s'élèvent);
sauf l'agrément de la Chambre. Je le répète, le
développement a été mis à l'ordre du jour, quoi-
que j'eusse dit à M. le président que je ne pou-
vais être prêt. Je prie la Chambre de remettre le
développement à lundi. Il n'y aura dans cette
remise aucun inconvénient pour le crédit public.
S'il y en avait un, ce serait pour ceux qu'on a
privés du gage de l'amortissement.

(On demande à aller aux voix.)

M. Huerne de Pommeuse. Ayant eu, ainsi que vient de l'observer le préopinant, l'honneur d'être rapporteur de la loi dont il a parlé, je crois devoir relever une erreur que lui a fait commettre son défaut de mémoire. Il a cru qu'au nom de la commission le rapporteur avait dit quelque chose d'affirmatif sur la marche de l'amortissement. Cette question a été vivement débattue dans le sein de la comission, et il a été décidé que le rapporteur exprimerait dans son rapport qu'entrer dans la discussion sur la direction de l'amortissement serait, en quelque sorte, se mêler d'administration. Ne serait-ce pas, vous disait le rapporteur, ne serait-ce pas empiéter sur la prérogative royale et sortir du cercle des attributions législatives pour envahir celles de l'administration? Voilà ce qui a été dit, et ce sur quoi j'ai cru devoir relever l'erreur du préopinant.

M. le Président met aux voix la deinande d'ajournement à lundi, faite par M. Casimir Périer. Cette demande est rejetée.

M. le Président. M. Périer, voulez-vous développer votre proposition?

M. Casimir Périer. Non, je ne veux pas; je la représenterai.

M. Hyde de Neuville. Je demande la parole;
je présenterai le développement! Je sais moi-
même la proposition!...

M. Casimir Périer. Oui, faites-la; on ne
nous privera pas comme cela de nos droits!...
M. Cornet-Dincourt. C'est violer le règle-
ment!...

M. Hyde de Neuville. Je demande à déve-
lopper la proposition.

M. le Président. Vous ne le pouvez pas. L'article 39 du règlement porte Lorsque la proposition ne sera pas relative à un projet de loi ou à un projet d'adresse, elle sera de incme déposée sur le bureau, puis communiquée par les soins du président dans les bureaux de la Chambre; elle sera entendue à la séance publique qui suivra la communication, à moins que cinq membres ne réclament le comité secret. »

Le proposition a été communiquée dans les
bureaux par les soins du président. M. Casimir
Périer a commencé son développement par la
lecture de la proposition, et il a demandé l'ajour-
nement. Je fais cette observation pour répondre
à M. Périer, qui a l'air de reprocher au président
de ne lui avoir pas accordé un délai qu'il ne
dépendait pas de lui d'accorder. D'après la déli-
bération de la Chambre, le développement devait
avoir lieu aujourd'hui, je devais le mettre à l'ordre
du jour.

M. Benjamin Constant. Je demande la pa-
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role sur la proposition... Messieurs, je viens prouver à la Chambre, d'une part, que la proposition de M. Casimir Périer est d'une grande importance, et, d'autre part, que la Chambre n'a pas décidé que cette proposition serait discutée immédiatement; mais seulement, qu'elle a refusé d'ajourner à lundi. (Des murmures s'élevent.) Messieurs, il était impossible à M. Casimir Périer de se préparer avant de savoir ce que M. le ministre des finances pouvait dire sur une proposition qui était absolument la même. C'était respecter la Chambre; c'était vouloir ménager ses moments que de ne pas commencer une discussion prématurée, quand nous étions sûrs d'avoir, de la part du ministre, une déclaration qui poserait clairement la question. Cette déclaration, nous l'avons maintenant, mais seulement depuis deux heures; elle est dans le Moniteur. Je vais vous la lire; elle ne se compose que d'une phrase, et Vous verrez que c'est sur cette déclaration que doivent se baser les développements de la proposition. M. le ministre des finances, ainsi qu'on le voit dans le Moniteur d'aujourd'hui, est convenu à la Chambre des pairs, avoir dit en termes formels, qu'aussitôt que les 5 0/0 tomberont au-dessous du cours de 100, les rachats recommenceront, parce qu'il sera dans l'intérêt de l'Etat de racheter plutôt des 5 que des 3.

Vouloir, maintenant que nous venons de recevoir le Moniteur où se trouve cet aveu qui constate que si les 5 0/0 ne sont pas rachetés par la Caisse d'amortissement, il y a violation de la parole du ministre et de la foi publique; vouloir précipitamment et prématurément entamer cette discussion, c'est vouloir jeter un manteau sur les promesses des ministres et sur la manière dont ils y manquent. Je ne crois pas que telle soit l'intention de la Chambre, et je propose de renvoyer le développement de la proposition à vendredi. (Des murmures s'élèvent.) La Chambre ne peut refuser ce délai sans déclarer qu'au lieu de représenter la France elle ne représente que les ministres.

n'avaient pas été complétées. Cela doit se trouver
dans le Moniteur (1); car quoi qu'il n'y ait
pas de sténographe à la Chanbre des pairs, on
y rapporte toujours avec assez d'exactitude
ce qui est dit par les orateurs. Le Moniteur
doit contenir la citation faite par le ministre des
finances du discours qu'il a prononcé et dans
lequel l'idée dont parle le préopinant est non
seulement renouvelée, mais complétée.

Puisqu'il n'a pas voulu vous la faire connaître
tout entière, je vais vous la lire moi-même. C'est
devant vous, Messieurs, que l'idée a été complétée
par le ministre des finances en répondant à un
discours de M. Mestadier, dans la séance du
23 mars de l'année dernière, et les paroles que
je vais citer sont textuellement contenues dans
le Moniteur du 26 mars, page 449: « En effet,
les fonds viennent-ils à baisser (car ce n'est que
dans cette circonstance qu'on aura des 5 0/0
au-dessous du pair), je vous demande s'il y aura
embarras pour le directeur de l'amortissement?
N'est-il pas clair, et par ce qui a été dit, et par le
tableau qui a été mis sous vos yeux, que dès le
lendemain du jour où les 5 0/0 tomberaient au-
dessous du pair, l'intérêt de l'Etat est d'acheter
du 5 0/0? à moins qu'il ne se présente une cir-
constance bien extraordinaire, et qui n'est pas à
prévoir, c'est-à-dire que les 3 0/0 n'en soient af-
fectés hors de proportion. »

M. de Villèle, ministre des finances. Ne seraitil pas possible, Messieurs, de traiter des questions qui intéressent autant l'intérêt public en restant sur le terrain de la vérité, et en se dispensant de faire à cette tribune des assertions aussi opposées à ce que chacun des membres de la Chambre peut vérifier à l'instant sur le papier même que l'orateur tient à la main ? Cet orateur, en traitant une question dont je m'abstiendrai, celle de la fixation du moment où il convient à Ja Chambre d'examiner la question qui est soulevée, vous a dit qu'avant de se préparer pour les développements de la proposition, il fallait Savoir ce que le ministre des finances avait à dire. L'orateur était donc dans le secret du ministre; il savait donc qu'il devait parler de cette question à l'autre Chambre.

M. Benjamin Constant. J'attendais...

M. de Villèle, ministre des finances. Il savait donc le jour où serait discutée telle où telle pétition dans l'autre Chambre. Il puise, dit-il, dans le Moniteur un aveu du ministre des finances. Je n'ai pas le Moniteur d'aujourd'hui; mais je sais ce que chacun de vous doit y lire probablement, car c'est ce que j'ai dit à la Chambre des pairs; c'est que les paroles qu'on attribue au ministre des finances ont été prises dans une partie de la discussion où elles

Voilà, Messieurs, ce qui dans l'autre Chambre a mis hors de contestation le point sur lequel on prétend vous toucher, c'est-à-dire l'exactitude à remplir la foi promise. Retirons donc cette citation de la discussion, et arrivons à l'examen de la question sous les rapports de la justice et de l'intérêt de l'Etat. Je dis qu'il y a justice...

M. Casimir Périer. Discute-t-on la proposi tion ?...

M. Cornet-Dineourt. Le ministre a le droit de parler !..

M. de Villèle, ministre des finances. Je réponds à l'orateur qui m'interrompt, et à celui qui m'a précédé à la tribune, que quand on est sur le terrain de la vérité, on ne recule pas devant des propositions du genre de celle qui a été déposée. Cette proposition est néanmoins d'une telle gravité, que je ne refuserai pas à l'orateur d'ajouter un ou deux jours de délai au délai qu'il a déjà obtenu. Mais puisqu'on a attaqué le ministre des finances dans cette discussion, il lui sera permis d'aborder une proposition qui n'est rien moins qu'une accusation contre un fonctionnaire public qui a strictement et loyalement accompli ses devoirs. Cela lui sera permis surtout lorsqu'on porte atteinte au crédit public en disant qu'on a manqué de foi à tel ou tel porteur de rentes au profit de tel ou tel autre: termes qui sont dans la proposition. Je dis que quand on dépose une pareille proposition, qu'on en fait lecture, et que, par suite de cette lecture, l'accusation est rendue publique depuis plusieurs jours, on doit être en état de soutenir une pareille accusation, et qu'il est du devoir d'un bon et loyal député de ne pas laisser plus longteraps la France dans l'incertitude sur un point aussi important.

Je fais cette observation sans insister nullement sur ce que ce soit lundi ou vendredi que vous deviez fixer pour le jour de la discussion.

(1) Voyez le Moniteur du 2, Chambre des pairs.

J

a

e

J.

Je dis seulement que la Chambre est en droit et a le devoir de demander qu'une semblable proposition ne reste pas comme l'épée de Damoclès, suspendue sur la tête du fonctionnaire qui a fait loyalement son devoir et sur le crédit du pays. (Vive sensation.) Je laisse du reste à l'opinion publique le soin de juger si le membre qui a déposé une pareille proposition ne devrait pas être prêt à la développer (Méme mouvement.)

M. Casimir Périer. Je demande à m'expliquer sur un fait dont je viens d'être accusé. M. le ministre des finances vient de vous dire qu'il avait bien le droit de répondre aux députés qui, par leur proposition, sont venus en quelque sorte déposer une accusation contre les ministres.

Voix à droite: On a dit contre un fonctionnaire !...

M. de Villèle, ministre des finances. L'attaque contre le ministre est de la part de l'orateur auquel je répondais. Quant à l'attaque contre un fonctionnaire public, elle est dans la proposition.

M. Casimir Périer. M. le ministre des finances reconnaît qu'au moins ma proposition ne peut s'adresser à lui; car la Caisse d'amortissement est hors de ses attributions. Quant à ce qui a été dit relativement au fonctionnaire, que porte ma proposition? je demande qu'il soit nommé une commission pour examiner si par hasard (Des murmures s'élèvent), accidentellement... (Nouveaux murmures.) Messieurs, faites attention à la position dans laquelle la loi sur l'amortissement à placé le directeur. Avant la loi du 3 0/0, le directeur de la Caisse d'amortissement avait des fonctions toutes matérielles, réglées par la loi et indépendantes de sa volonté. En établissant le 3 0/0, vous avez établi une faculté qui n'avait pu être prévue par la loi sur l'amortissement, puisque lors de cette loi il n'existait qu'une seule espèce de fonds publics. Eh bien! il n'y a dans ma proposition nulle accusation contre aucune espèce de fonctionnaires publics. D'ailleurs, quels seraient les fonctionnaires attaqués? Les membres de la commission de surveillance sont hors de la question, puisqu'ils n'ont pas voix délibérative. Ils auraient pu donner leur avis sur le point de savoir s'il fallait acheter du 5 ou du 3 0/0; mais leur avis n'aurait pas été impératif. Il n'y a donc pas d'accusation dans ma proposition contre ces fonctionnaires. C'est à tort qu'on a dit que j'ai reculé devant ma proposition. Je n'ai jamais reculé, Messieurs.

Voix à droite: Faites donc votre développemcnt!

M. Casimir Périer. Pour les combats singuliers, n'accorde-t-on pas des délais? Eh bien ! je demande jusqu'à lundi, et vous verrez si je recule... (Agitation.)

M. Hyde de Neuville. Je demande la parole. M. Casimir Périer. A-t-on jamais vu combattre ainsi par des fins de non-recevoir ?...

M. Hyde de Neuville. M. le ministre des finances vient de dire que, quand on est sur le terrain de la vérité, on ne doit jamais reculer. Nous pensons comme lui, Messieurs, et nous répondons que jamais nous ne reculerons devant la

vérité. Nous regrettons que les occupations de notre honorable collègue ne lui aient pas permis de développer aujourd'hui sa proposition.

Plusieurs voix Il y a plus de huit jours qu'elle a été déposée.

M. Hyde de Neuville. Je n'en suis pas moins tout prêt à répondre à M. le ministre des finances. Mais que pensera la France de la discussion qui s'élève? Un membre a fait une proposition qui se rattache aux intérêts les plus graves, et qu'il croit utile à son pays. Nous partageons à cet égard son opinion. Il vient nous dire que par une cause quelconque, dont les convenances ne nous permettent pas de lui demander compte, il n'est pas prêt à développer cette proposition. La Chambre qui devrait l'attendre pour recevoir des lumières ou pour combattre des erreurs, refuserait de lui donner le délai nécessaire. C'est là évidemment ce qui serait reculer contre la vérité !

Quant à nous qui ne reculons pas, nous regrettons que la discussion ne soit pas engagée, car nous somines en mesure de combattre M. le ministre des finances et par ses paroles et par les actes qui ont suivi ses paroles. Si la lice était ouverte, nous lui rappellerions qu'il a dit, lors de la discussion de l'amendement de M. Humann: Quelque instrument que vous choisissiez pour appliquer l'amortissement, il opèrera nécessairement dans le sens de l'amendement de M. Humann. Nous lui rappellerions qu'il a laissé dire au rapporteur de la commission, M. le duc de Lévis (Des murmures s'élèvent): Quel que soit le taux des autres fonds publics, toutes les fois que les fonds publics tomberont au-dessous du pair, l'amortissement se portera sur les 5 0/0. Certes, ces paroles étaient très précises. Nous lui rappellerions, en outre, que, jusqu'au 7 septembre, l'affiche de la Bourse portait que l'on rachèterait des 3 0/0 à défaut de 4 1/2 ou de 5 0/0 au pair ou au-dessous du pair. Ces paroles sont également positives.

Il vous est permis, Messieurs, d'examiner cette question, qui intéresse si essentiellement le crédit public. Pour vous détourner de cet examen, on vous dit qu'il y a accusation contre la commission de surveillance et contre le directeur de l'amortissement. Non, Messieurs, il n'y a pas accusation, au moins des intentions. Mais il n'en est pas moins vrai que des dispositions légales ont été violées, et il nous sera facile de le prouver. Mais je ne veux pas entrer en ce moment dans le fond de la question.

Un membre a fait une proposition. Cette proposition est bonne ou mauvaise. Si elle bonne, la Chambre ne doit pas refuser d'entendre les développements. (Plusieurs voix: Nous sommes tous prêts!... Qu'on les présente!..), et pour cela d'accorder le délai convenable. Si elle est mauvaise, vous la rejeterez, vous l'adopterez si elle est bonne; ou si enfin vous êtes déterminés à la rejeter, vous en serez libres. Mais ne montrez pas à la France que vous refusez d'accorder deux ou trois jours pour une proposition qui intéresse éminemment le crédit public. Je demande que les développements soient entendus vendredi."

M. Casimir Périer. Non, non, lundi! je suis malade.

M. Hyde de Neuville. Si M. Périer est indis: posé (On rit beaucoup), vous ne pouvez lui re fuser le délai qu'il vous demande. Est-il dans les

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