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Les navires de commerce étrangers ne peuvent, d'après ce décret, servir d'asile aux criminels espagnols; quand ceuxci se réfugieront à boid, les autorités espagnoles, de concert avec le consul compétent, pourront procéder à l'extradition. En ce qui concerne les navires de guerre étrangers, il y a lieu de demander l'extradition par voie diplomatique, suivant les lois et traités en vigueur'.

Traduction de M. P. Sumien,

MANUEL TORRÈS CAMPOS, Doyen de l'Université de Grenade.

Chargé de conférences à la Faculté de droit de Paris.

De la condition juridique des congrégations religieuses françaises en Suisse 2.

Sur le rapport de son Département de Justice et de Police, le Conseil fédéral suisse a pris, à la date du 19 août 1902, l'arrêté suivant :

I

Le 1er juillet 1901 fut promulguée en France, après de violents débats parlementaires, une loi sur les associations (loi relative au contrat d'association; voir Journal officiel de la République française du 2 juillet 1901, Clunet 1901, p. 1057). L'art. 13 de cette loi porte qu'aucune congrégation religieuse ne peut se former sans une autorisation donnée par une loi. En ce qui concerne les associations existantes au moment de la promulgation de la loi et qui n'auraient pas été antérieurement autorisées ou reconnues, l'art. 18 prescrit qu'elles devront, dans le délai de trois mois, justifier, sous peine de dissolution, qu'elles ont fait les diligences nécessaires pour se conformer aux prescriptions de la nouvelle loi. Le règlement d'exécution du ministère, du 1er juillet 1901, précise sous quelle forme les congrégations ont à présenter leur demande pour obtenir l'autorisation de l'Etat.

Une fois la loi entrée en vigueur, les congrégations se virent dans l'alternative ou de demander l'autorisation de l'Etat ou d'être dissoutes et de voir leurs biens vendus par voie juridique.

1. Art. 37, 38 du décret royal de 1852.

2. Feuille fédérale du 3 septembre 1902. Sur la situation faite à l'étranger aux congrégations religieuses françaises; Alsace-Lorraine, Clunet 1902, p. 407, Angleterre (Ile de Jersey), ibid., 1901, p. 1070; Grèce, supra, p. 473; Russie, supra, p. 475; Turquie, ibid., 1901, p. 1078.

Il était à prévoir qu'une partie des congrégations qui ne voudraient pas demander l'autorisation de l'Etat quitteraient la France pour se soustraire à la dissolution.

Comme buts d'émigration, c'étaient naturellement les pays limitrophes qui s'offraient à elles tout d'abord, et l'on pouvait s'attendre que quelques-unes tenteraient de s'établir en Suisse.

Dans le courant du mois de septembre, le Conseil fédéral fut informé, soit par l'administration des douanes, soit par une lettre de l'avocat Defago, à Monthey, du 6 octobre 1901, de l'arrivée en Suisse de congrégations françaises fuyant l'application de la loi de leur pays.

Le Conseil fédéral se trouvait ainsi amené à examiner si, d'après les dispositions de la constitution fédérale, l'établissement de ces congrégations était admissible ou non.

Il demanda tout d'abord des rapports aux gouvernements cantonaux de Vaud et du Valais. Les données recueillies de cette sorte ne parurent pas suffisantes pour permettre de prendre une décision.

Le Conseil fédéral décida donc le 26 novembre de faire une enquête générale auprès des gouvernements cantonaux pour se procurer la base nécessaire. Le 28 novembre on leur adressa une circulaire du département de Justice et Police, accompagnée d'un questionnaire dressé par ce département, qui devait être présenté aux supérieurs des congrégations ou à leurs membres et contenait les questions suivantes :

1o A quel ordre, à quelle congrégation ou à quelle communauté religieuse appartenez-vous ?

2o Votre communauté comprend-elle des hommes ou des femmes ?

3o Quelle est la dénomination exacte (officielle) de la commu

nauté ?

4o D'où venez-vous? (Indiquer le lieu d'établissement précédent et la maison mère.)

5° Quels statuts ou règles régissent votre communauté ? (Les personnes entendues seront invitées à remettre à l'autorité chargée de l'enquête un exemplaire imprimé ou manuscrit des statuts.)

6o Par quels statuts ou règles votre communauté était-elle régie au lieu de son établissement précédent?

7o Des règles ou statuts particuliers ont-ils été édictés pour votre établissement en Suisse ?

8° Qui remplit l'office de confesseur de votre communauté? Appartient-il à une communauté religieuse (ordre)? et à laquelle ? Par qui le confesseur est-il nommé?

(Cette question concernant le confesseur ne sera posée qu'aux congrégations de femmes.)

9° Avez-vous des élèves? Si oui, de quels pays viennentils ?

10° Etes-vous voués à l'assistance des malades? Quels malades soignez-vous? (Particuliers ou hospitalisés ?)

11o Pourquoi avez-vous renoncé à votre établissement en France?

12° Quel est le nombre des personnes relevant de votre communauté qui veulent venir en Suisse? Combien de ces personnes sont membres de la communauté? Combien font partie du personnel du service?

(Faire ici un constat d'identité exact et établir une liste par noms, sexe et pays d'origine.)

13° Quelle était votre occupation en France? Viviez-vous dans un couvent? Dirigiez-vous des institutions, et lesquelles? Vous consacriez-vous à l'enseignement?

14° Depuis quand êtes-vous en Suisse?

15° Où vous êtes-vous installés depuis votre arrivée en Suisse ? Où demeurez-vous?

16° Avez-vous acheté des biens-fonds en vue de résider en Suisse, ou bien avez-vous loué des immeubles? (Dans la seconde alternative, noter la durée du contrat de bail et exiger une copie de ce contrat.)

17° Quelle sera la durée probable de votre séjour en Suisse ? 18° Procédez-vous régulièrement à des assemblées religieuses, à des actes du culte ou à des exercices religieux en commun? Si oui, où ces assemblées ou exercices ont-ils lieu ?

19° Parmi les meubles introduits par vous en Suisse, se trouve-t-il des objets destinés au culte ? Si oui, à quoi doivent servir ces objets ?

20o Dans quels rapports votre communauté se trouve-t-elle à l'égard des autorités épiscopales du diocèse suisse dans lequel vous séjournez actuellement ?

21° Quels sont les rapports entre votre communauté et ses anciens supérieurs de France ?

22o Les membres de votre communauté ont-ils le droit de choisir librement leur domicile ?

23o Quel est le but de votre établissement en Suisse ? A quelle occupation vous livrerez-vous en Suisse ?

Tous les cantons, sauf Fribourg, ont répondu par des mémoires détaillés à la circulaire.

Ces réponses soulevant plusieurs questions de droit public, le Département de Justice et Police demanda à M. le Dr Fleiner, professeur à Bâle, une consultation, qui lui est parvenue le 12 mai 1902.

II

Des rapports des gouvernements cantonaux et de l'administration des douanes, il résulte qu'il s'agit des ordres et congrégations suivants :

1° Dames de Nazareth, de Lyon;

2o Religieuses de Jésus-Marie, de Lyon;

3o Carmélites, de Lyon, Fontainebleau et Montélimar;

4° Clarisses, d'Evian.

5o Religieuses de Marie-Réparatrice, de Toulouse ;

6o Cisterciennes du couvent de Saint-Joseph, à Vézelise (diocèse de Nancy);

7° Sœurs oblates de l'Assomption, de Nîmes;

8° Sœurs de la Sainte-famille, de Villefranche (diocèse de Rodez) et de Brusque;

9o Chartreux du Reposoir (diocèse d'Annecy), de Sélignac (diocèse de Belley) et de la Grande Chartreuse (diocèse de Grenoble);

10° Bénédictins de Delle;

11° Missionnaires de Notre-Dame de la Salette, de Grenoble ;

12o Congrégation du Sacré-Cœur de Jésus et du Cœur immaculé de Marie, dite de Saint-Edme, de Laval;

13° Capucines, d'Aix-en-Provence ;

14° Sœurs Rédemptoristines, de Lyon;

15° Sœurs de Saint-Martin, de Saint-Martin-Belle-Roche (diocèse d'Autun).

Les trois dernières communautés peuvent être passées sous silence, car il n'est pas prouvé qu'elles se soient effectivement établies dans un canton suisse. Le Conseil fédéral sait seulement, par les rapports du Département des douanes (Voir Annexe au rapport de la direction des douanes du VI® arrondissement à la direction générale des douanes, en date du 8 octobre 1901, avec annexe), que des biens mobiliers appar

tenant à ces congrégations furent déclarés à Genève pour être importés; mais il n'a pas été démontré que ces congrégations se soient établies en Suisse.

On peut également ne pas tenir compte de la congrégation du Sacré-Cœur de Jésus et du Cœur immaculé de Marie, dite de Saint-Edme, attendu que l'abbé Jenty, de cette congrégation, qui résidait à la villa Saint-Charles, à Meggen, et y avait amené beaucoup de meubles, a quitté la Suisse au printemps de cette année.

Les autres congrégations se répartissent sur les différents cantons de la manière suivante :

Lucerne. Suivant la déposition de Me Caroline Jäkle (voir rapport du gouvernement de Saint-Gall), quelques sœurs cisterciennes du couvent de Saint-Joseph, à Vézelise (diocèse de Nancy), se sont installées au couvent d'Eschenbach.

Zoug. Deux chanoinesses et deux sœurs du même couvent de Vézelise se sont réfugiées dans le couvent de Frauenthal avec de la literie et des hardes (500 kil.).

Soleure. Onze pères bénédictins de Delle et deux frères sont venus en Suisse ; l'abbé Vincent Motschi et trois pères vivent à Mariastein; cinq pères et un frère vivent isolément dans le canton. Huit wagons contenant des ustensiles de ménage, des papiers, une bibliothèque et différents objets destinés au culte sont provisoirement déposés à Bâle.

Saint-Gall. Quatre sœurs cisterciennes, de nationalité allemande, du couvent de Saint-Joseph, à Vézelise, sont installées au couvent de Magdenau (Bas-Toggenbourg).

Six autres, dont trois Suissesses et trois Allemandes, sont au couvent de Wurmsbach (district du lac). Biens mobiliers: 500 kg. de literie et de hardes.

Neuf sœurs du même ordre, dont cinq Suissesses et quatre étrangères, parmi lesquelles l'abbesse Rosalie Füglistaller, de Killwangen, Argovie, se sont établies au château de Hahnberg, loué pour une durée indéterminée. Biens mobiliers: 2 wagons, 7.900 kilos de meubles, literie, hardes, tableaux, etc.

Vaud. 1o Les Dames de Nazareth, de Lyon, ont installé au château de Tatiana, près Crans (district de Nyon), un pensionnat pour jeunes filles. Elles sont 36 (1 directrice, 14 maîtreses, 12 personnes de service et 9 sœurs sans emploi déterminė). Toutes sont Françaises. Le bail a été conclu pour

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