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de voir, c'est que la Société centrale de protestation contre la licence des rues à Paris, qui a pour président M. Bérenger, et dont l'appréciation en la matière ne peut être sujette à caution, n'a pas cru devoir jusqu'ici signaler Le Rire à l'autorité répressive française à raison de son caractère assez correct d'habitude, ainsi que cela résulte d'une lettre adressée par M. Bérenger aux demandeurs ; Att. que l'on peut encore argumenter, dans ce même ordre d'idées, de ce que la demanderesse ne doit pas avoir cru à l'existence du délit prévu par l'art. 383 du Code pénal, car elle aurait dû, dans ce cas, non renvoyer les ballots au demandeur, mais les faire saisir par les officiers de police judiciaire qu'elle a à sa disposition et les faire parvenir au Parquet, procédure qu'elle suit toujours lorsqu'elle constate l'existence d'un délit, notamment en matière de transport de gibier en temps probibé; - Att. que la mesure prise par la défenderesse ne se justifie donc pas; Att. que la défenderesse prétend ensuite que l'art. 22 de la loi du 25 août 1891 lui donne le droit absolu de se refuser, par voie de règlement, au transport des marchandises qu'elle désigne, sous la seule garantie de la responsabilité du ministère des chemins de fer devant les Chambres, sans que le pouvoir judiciaire puisse intervenir; Att. que, pour interpréter la portée de l'art. 22 de la loi du 25 août 1891, il échet de le rapprocher de l'art. 11 de la méme loi, qui stipule que « l'administration de tout chemin de fer mis à la disposition du public est tenue d'effectuer les transports de personnes et de marchandises en vue desquels le chemin de fer a été établi »; qu'il est incontestable que si l'art. 22 avait la portée que lui donne la défenderesse, l'art. 11 deviendrait absolument inutile et n'aurait plus aucune signification; D'autre part, il résulte des discussions parlementaires relatives aux art. 16 et 22 de la loi que les règlements que l'administration des chemins de fer peut prendre concernant le transport des voyageurs et des choses sont uniquement des règlements de police. Le transport est la règle et le refus de transporter doit être l'exception. Le refus doit être motivé par des raisons spéciales, comme le danger ou les inconvénients pouvant résulter du transport au point de vue de l'exploitation. Ce principe a été défini par M. Vandenpeereboom qui a déclaré dans la discussion que « le principe est qu'il faut transporter toutes marchandises, sauf celles qui sont dangereuses » ; Att. qu'interpréter dans le sens de la défenderesse l'art. 22 de la loi du 25 août 1891 armerait l'administration des chemins de fer du pouvoir exorbitant d'interdire la circulation sur ses lignes de toutes publi

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cations, non seulement considérées par le Ministre des chemins de fer comme contraires aux bonnes mœurs, mais encore de toutes publications considérées par lui comme contraires à l'ordre public par le seul fait que cette publication appartiendrait à une opinion politique autre que celle du gouvernement au pouvoir; — Att. que le règlement pris par la défenderesse pour s'opposer au transport du journal Le Rire constitue donc une mesure que la loi ne l'autorisait pas à prendre dans les circonstances actuelles; — Att. que la légalité et la régularité de la mesure prise étant contestée, le pouvoir judiciaire est compétent pour déterminer les dommagesintérêts auxquels peut avoir droit celui qui se prétend victime de la mesure attaquée; - Att. qu'il est incontestable que la défenderesse a causé préjudice au demandeur; Att., toutefois, que les sommes réclamées par le demandeur paraissent exagérées, qu'il échet de tenir compte, pour évaluer les dommages-intérêts, du mobile éminemment louable auquel a obéi la défenderesse et du fait que le demandeur n'a pas justifié à suffisance de droit que le préjudice qu'il a subi s'élevait à la somme qu'il réclame; — Att. que la réparation du préjudice peut être évaluée ex æquo et bono à la somme de 300 francs; Att. que le demandeur demande la suppression dans les conclusions de la défenderesse des expressions visant le caractère immoral du journal Le Rire; Att. qu'il échet de faire droit à cette prétention; Par ces motifs, le Tribunal joignant les causes et statuant par un seul et même jugement, rejette toutes les eonclusions plus amples ou contraires: - Dit pour droit que le pouvoir judiciaire est compétent pour apprécier les dommages-intérêts auxquels peut avoir droit celui qui se plaint du refus d'une administration de chemin de fer de transporter une marchandise lorsque la légalité et la régularité de la mesure sont contestées; Condamne la défenderesse à payer au demandeur, à titre de dommages-intérêts, la somme de 300 francs, ainsi que les intérêts judiciaires, pour refus de transporter des ballots contenant le journal Le Rire; — Ordonne la suppression, dans les conclusions de la défenderesse, de l'attendu commençant par ces mots « Attendu que le caractère immoral de la publication du demandeur... », et finissant par : « rehaussées de gravures souvent grossières et souvent immorales », et dans le dispositif de ces conclusions de la qualification de « pornographique » donnée au journal du demandeur; Donne acte à la défenderesse de ce qu'elle évalue l'action à 3.000 francs pour la compétence; - Condamne la défenderesse aux dépens; Jugement exécutoire par provision nonobstant appel et sans caution. »

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BRÉSIL

BULLETIN DE LA JURISPRUDENCE BRÉSILIENNE
Par P. Sumien,

Chargé de Conférences à la Faculté de droit de Paris.

Jugement étranger.

droits d'un héritier. Tribunal suprême fédéral.

Jugement portant reconnaissance des Demande d'homologation au Brésil.

Recevabilité.

Prés. M. Aquino e. Castro.

Tribunal suprême fédéral, 16 novembre 1901.
publ. (concl. contr.) M. Lucio de Mendouça. - Époux de Carvalho.

P. 484.

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O Direito, 1901,

Le tribunal suprême fédéral a compétence pour homologuer les sentences portant déclaration des droits d'un héritier rendues par les tribunaux étrangers.

« Le tribunal suprême fédéral : Sur la demande en homologation du jugement étranger requise par José Francisco de Carvalho et son épouse, Thérèse Leite Pereira, résidant en Portugal, en leur qualité d'héritiers de leur fils Domingo José de Carvalho, célibataire, décédé intestat, sans enfants, le 6 novembre 1900, au Brésil, à San Romão de Mesão Frio, canton de Guimarães; - Att. que pour être exécutoires au Brésil, les sentences rendues par les tribunaux étrangers doivent être revêtues de formalités extérieures requises à cet effet par la législation brésilienne (Décret n° 6982, du 27 juillet 1878, art. 1er, § 2); — Att. qu'il résulte des documents de la cause que les dispositions des art. 597 et 598 du Code proc. civ. portugais ont été observées, ainsi que celle de l'art. 599 du même Code; Par ces motifs : :- Homologue ladite sentence pour qu'elle produise tous ses effets légaux; Condamne les demandeurs aux dépens. »

NOTE. Dans l'instance ci-dessus rapportée, le Procureur général près le tribunal suprême avait pris des conclnsions contraires à l'homologation, par les motifs suivants : L'hérédité possède des valeurs et des biens situés à Rio-de-Janeiro et dans la ville de Taubate (État de SaintPaul), qui doivent être recouvrés au Brésil. Or, aux termes de l'art. 7 du décret n° 855 du 8 novembre 1851 et de l'art. 46 du décret n. 2433 du 15 juin 1859, l'habilitation des héritiers d'un de cujus ne peut être prononcée que par le juge du lieu où se trouvent les valeurs dépendant de la succession. La sentence ne peut donc pas être homologuée par suite de l'incompétence du juge devant lequel a été portée la demande d'habilita

tion.

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Prés. M. Piza e Almeida, vice-prés.
O Direito, n. mai-août 1902, p. 573.

José

Tribunal suprême fédéral, 18 juin 1902. Piffano et frères c. Britto Lyra et Ci⚫ Le tribunal fédéral suprême ne connaît pas du recours extraordinaire porté devant lui contre une décision relative à la succession d'un étranger, lorsque la solution de pareille difficulté a été prévue expressément dans une convention ou un traité (art. 59, § 1er. lettre A, et 61, n. 2, de la Constitution fédérale).

« Le Tribunal fédéral suprême : Att. qu'il résulte des documents versés aux débats que, devant le juge municipal de Guarabira, État de Parahyba du Nord, les défendeurs actuels out pratiqué contre les demandeurs une saisie pour avoir paiement d'une dette hypothécaire contractée par acte public et régulièrement inscrite; - Att. que le juge de première instance a rejeté l'opposition formée à ladite saisie et ordonné que l'action intentée suivrait son cours; Att. qu'appel ayant été interjeté contre cette décision devant le tribunal supérieur de justice de l'État, celui-ci confirma la sentence attaquée; que c'est contre cette décision qu'est intenté le présent recours, fondé sur les art. 61, no 2, et 59, § 1er, lettre A, de la Constitution fédérale, et déduit de ce motif que l'immeuble hypothéqué n'est pas la propriété des signataires de l'acte, mais bien de l'hérédité de leur père Nicolaii Piffano, sujet italien, dont ils sont les héritiers avec d'autres; AN. que cette raison a été victorieusement combattue par la partie adverse; Par ces motifs : Se déclare incompétent pour connaître du recours 1o parce qu'il n'a pas été établi que l'immeuble hypothéqué appartint à l'héritage d'un étranger et que, même dans cette hypothèse, le de cujus étant sujet italien, c'est-à-dire d'un pays avec lequel nous avons une convention consulaire (Circulaire du ministre des affaires étrangères, du 20 janvier 1895), le recours ne remplit pas les conditions prévues à l'art. 61, n. 2, in fine, qui décide expressément que le recours ne peut être formé dans un cas prévu par une convention ou un traité; 20 parce qu'aucune question n'a été soulevée, au cours de l'affaire, sur l'application de l'ordonnance, L. 4, tit. 48; que d'ailleurs cette question n'était pas recevable, s'agissant d'une hypothèque constituée sous signature sociale; qu'aucune décision n'a par suite été rendue par la justice locale relativement à l'application de la loi fédérale, condition essentielle imposée par l'art. 59, § 1er, lettre A, de la Constitution fédérale ; Condamne les demandeurs aux dépens. »

CRÈTE (ILE DE)

BULLETIN DE JURISPRUDENCE CRÉTOISE
Par N. Politis,

Professeur à la Faculté de droit d'Aix-Marseille.

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Étranger chrétien.

Cour d'appel de Crète, 1899, no 19.

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Cons. rapp. M. P. Skalistiris. Thémis, t. XI (1900-1901), p. 174.

Le droit qui régit en Crète la matière des successions est différent, suivant qu'il s'agit de la succession d'un chrétien ou d'un musulman.

En présence de cette diversité de législation, on peut se demander quel droit régira la succession immobilière d'un étranger décédé en Crète. La loi turque du 16 juin 1867, en accordant aux étrangers le droit de posséder des immeubles, a assimilé les étrangers propriétaires aux Ottomans, notamment en ce qui touche l'application des lois et règlements régissant la jouissance, la transmission, etc., des propriétés foncières (art. 2, 1o. · V. Pelissié du Rausas, Le régime des capitulations dans l'Empire ottoman, p. 460). C'est sans doute une loi locale qui régira la dévolution successorale, mais quelle loi, si, comme dans l'espèce,ily en a plusieurs ?

La Cour d'appel décide, dans l'arrêt que nous rapportons, que, du moment qu'il faut assimiler les étrangers propriétaires d'immeubles aux indigènes, il convient de faire cette assimilation d'une manière complète, et tenir compte de leur religion. Or, comme dans l'espèce, le défunt était chrétien et, qui plus est, orthodoxe, c'est le droit régissant les successions des Crétois chrétiens qu'il faut lui appliquer.

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bunal civil du lieu de l'exécution.

Jugement étranger. Demande d'exequatur formée par Demande opposable au défendeur. Question préalable de validité extrinsèque du jugement.

voie d'ajournement.

Jugement rendu par une juridiction compétente avec les forma

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