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n'est pas déplacé dans le recueil des actes de la famille litique belge.

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Le traité de Paris avait stipulé (art. 4) que « des contestations s'étant élevées sur la propriété du duché de Bouillon, le roi des Pays-Bas restituerait la partie de ce duché comprise sous la démarcation donnée au grand-duché de Luxembourg à celle des parties dont les droits seraient légitimement constatés. » L'existence d'une petite souveraineté placée entre la France et les Pays-Bas, sembla offrir des inconvénients, et l'on changea d'avis. L'art. 69 du traité de Vienne en conféra la souveraineté au roi des Pays-Bas.

Cet article porte: S. M. le roi des Pays-Bas, grand-duc de Luxembourg, possédera à perpétuité, pour lui et pour ses successeurs, la souveraineté pleine et entière de la partie du duché de Bouillon non cédée à la France par le traité de Paris, et, sous ce rapport, elle sera réunie au grand-duché de Luxembourg.

A la suite des événements de 1814, deux compétiteurs élevèrent des prétentions sérieuses sur le duché de Bouillon, le prince Charles de Rohan et l'amiral anglais Philippe de la Tour d'Auvergne.

Le prince de Rohan était proche parent du dernier duc de Bouillon, Jacques-Léopold-Charles - Godefroid de la Tour d'Auvergne, duc de Bouillon, mort le 7 février 1812. Son compétiteur, Philippe d'Auvergne, vice-amiral au service de la Grande-Bretagne, appartenait à une branche de la maison d'Auvergne, établie depuis des siècles en Angleterre; il se prévalait, en outre, de l'adoption que lui avait conférée le père du dernier duc. Or, si en droit civil l'adoption crée des droits semblables à ceux que donne la légitimité, il n'en est pas de même en droit politique.

Cinq arbitres furent nommés pour régler cette contestation. Chacun des prétendants en choisit un; les cours d'Autriche, de Prusse et de Sardaigne désignèrent les trois autres. En attendant la décision arbitrale, qui fut rendue

le 1er juillet 1816, le roi grand-duc prit en dépôt la propriété de la partie du duché de Bouillon qui lui était adjugée. Il s'engagea à la restituer, avec le produit de l'administration intérimaire, à celui des compétiteurs en faveur duquel le jugement arbitral serait prononcé.

Le compétiteur heureux devait posséder en toute propriété ladite partie du duché sous la souveraineté du roi des Pays-Bas, qui, en retour, devait l'indemniser de la perte des revenus provenant des droits de souveraineté moyennant un arrangement équitable. « Et si c'est au prince Charles de Rohan, dit l'art. 69, que cette restitution doit être faite, ces biens seront, entre ses mains, soumis aux lois de la substitution qui forme son titre. >> Voici le texte de la décision arbitrale :

Décision arbitrale relative au droit de succéder au duché de Bouillon, du 1er juillet 1816.

En exécution de l'art. 69 de l'acte final du Congrès de Vienne, du 9 juin 1815, la commission d'arbitres, qui s'était réunie à Leipzig, dès le commencement de juin 1816, pour décider la question du droit de succéder au duché de Bouillon, a terminé, le 1er juillet 1816, ses délibérations.

La possession de ce duché et les indemnités pour la cession des droits de souveraineté, faite au roi des PaysBas, ont été adjugées, à une majorité absolue, à S. A. le prince Charles Alain de Rohan-Monbazon, duc actuel de Bouillon. M. le baron de Binder, ministre d'Autriche, M. le comte de Castelalfer, ministre de S. M. le roi de Sardaigne à la cour de Prusse, et M. le comte de Fitte de Soucy, nommés arbitres par le prince de Rohan, ont voté d'une manière pure et simple, d'après les droits de naissance et de famille, en faveur des prétentions du prince de Rohan, petit-fils de la sœur du duc de Bouillon, mort en 1792. Le jurisconsulte anglais sir John Sewell, arbitre

nommé par le vice-amiral Philippe d'Auvergne, le second des prétendants, s'est déclaré purement et simplement en faveur des prétentions, du vice-amiral. M. le baron de Broekhausen, ministre d'État prussien, a reconnu le droit du prince de Rohan, mais sous la condition que celui-ci payerait au fils adoptif de son grand-oncle, l'amiral-d'Auvergne, une légitime de six années de ce duché.

En conséquence, la question proposée par le Congrès sur le droit de succession au duché de Bouillon, a été décidée à une majorité de quatre voix contre une, et la clause proposée par une seule voix a été rejetée à une majorité de trois voix contre deux '. »

La prise de possession du duché par le roi des Pays-Bas a eu lieu le 22 juillet 1815, et la remise de domaine au prince de Rohan eut lieu en 1816.

Dans l'intervalle, de nouveaux prétendants, savoir le duc de Bourbon, prince de Condé, la princesse de la Trémouille, la vicomtesse de Noailles et le duc de Poix élevèrent des droits qu'ils soumirent aux tribunaux.

Le roi des Pays-Bas avait, le 4 mai 1817, pris un arrêté pour soustraire cette question aux tribunaux; mais le Congrès d'Aix-la-Chapelle décida que la souveraineté étant mise à l'écart, le litige ne portait que sur des intérêts privés, qui étaient de la compétence des juges ordinaires.

Le roi des Pays-Bas, se conformant à cette décision, révoqua son arrêté de conflit, et rendit la connaissance de cette affaire aux tribunaux, par un arrêté du 19 juin 1849.

Sans attendre la décision judiciaire, le roi Guillaume Ier, répondant aux instances des puissances, régla, par son arrêté du 24 octobre 1821, l'indemnité qui avait été sti

Le prince Charles de Rohan s'engagea à payer au prince de La Tour d'Auvergne une somme de 5,000 livres sterling, comme indemnités de droits de ce dernier au duché de Bouillon. Le payement de cette somme était assigné sur les indemnités dues par le roi des Pays-Bas, et sur chaque annuité payée par ce souverain, il devait être prélevé un quart en faveur du prince d'Auvergne, jusqu'à extinction de sa créance.

pulée dans l'acte du Congrès de Vienne, du chef de la souveraineté.

Je transcris les principales dispositions de cet arrêté :

<<< ART. 1er.

intérêt à 2, p.

Un capital de 200,000 florins, produisant %, sera inscrit, au nom et au profit du prince de Rohan, sur le grand-livre de la dette nationale active, lequel capital, par le seul fait de son inscription, est immobilisé et restera incessible et insaisissable.

» ART. 2. — Les intérêts du susdit capital, montant à la somme de 5,000 florins l'an, commenceront à courir et seront payés à compter du 1er juillet 1824.

» Notre Ministre des finances fera payer au prince de Rohan les susdits intérêts, à compter du 22 juillet 1815 jusqu'au 30 juin 1821, montant à 29,694 florins.

» ART. 3. Le capital de 200,000 florins et les biens restitués au prince de Rohan, suivant procès-verbaux des 17 septembre et 14 octobre 1816, formeront une substitution perpétuelle sur la tête du susdit prince de Rohan et de ses descendants légitimes, suivant l'ordre de succession existant dans le ci-devant duché de Bouillon, sans que ledit prince de Rohan, ni ses descendants légitimes, puissent jamais rien modifier à la substitution prémentionnée par quelque acte de leur propre volonté, et sans que jamais et dans aucun cas, l'on puisse opposer à la présente disposition, commandée par des conventions politiques, la législation civile en opposition avec l'établissement d'un fidéicommis continuel; le tout en exécution du susdit § 69 des actes du Congrès de Vienne et du jugement arbitral du 1er juillet 1816. »

S

La Cour d'appel de Liége rendit, le 24 juillet 1844, un arret par lequel la propriété du duché est attribuée au prince de Condé et consorts. Le prince de Rohan a vainement recouru à la voie de la cassation; son pourvoi a été rejeté par un arrêt du 16 novembre 1825.

A la suite de cette décision, le prince de Condé et ses coïntéressés demandèrent au gouvernement des Pays-Bas 'une nouvelle fixation de leurs indemnités. Ce gouvernement a écarté leur demande, l'arrêté du 24 octobre 1821 devant étre considéré comme un règlement définitif de ces indemnités, et satisfaisant aux obligations que les traités avaient imposées au roi des Pays-Bas.

Tel était l'état des choses en 1830. Après la révolution, un mémoire fut adressé par les intéressés à la Conférence de Londres; celle-ci ne parait pas s'en être occupée.

Depuis lors, monseigneur le duc d'Aumale, héritier du prince de Condé, et ses consorts, ont exercé un nouveau recours par deux voies différentes.

En janvier 1855, ils assignèrent le domaine belge en revendication de la forêt de Luchy, située au canton de Paliseul, dans la province de Luxembourg, et de quelques rentes foncières sur lesquelles ils prétendaient que les anciens ducs de Bouillon avaient un droit de propriété ou, au moins, de haut-ban. Le tribunal de Neufchâteau a décidé, par jugement du 1er décembre 1841, que que cette revendication n'était pas fondée.

D'un autre côté, un mémoire contenant un exposé de la réclamation fut adressé à la commission mixte d'Utrecht. Le mémoire est signé par M. Lacave-Laplagne, en qualité d'administrateur des biens et droits de S. A. R. le duc d'Aumale, comme légataire universel du duc de Bouillon, par la princesse de la Trémouille, par la vicomtesse de Noailles et par le duc de Poix.

La compétence de la commission semblait établie par l'art. 13 du traité du 19 avril 1839, par lequel cette commission est chargée de procéder au transfert de la portion de la dette publique des Pays-Bas mise à la charge de la Belgique, et, par conséquent, de déterminer aussi les créances dont la Néerlande devait rester grevée.

Le gouvernement belge déclina toute prétention que l'on aurait voulu lui imposer de ce chef. Le traité du

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