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ACTIVITÉ DE L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE

CHEZ LE PIN SYLVESTRE

QUANTITÉ D'EAU NÉCESSAIRE A LA VÉGÉTATION D'UNE FORÊT

DE CETTE ESSENCE

Le carbone entre pour 50 0/0 environ dans la composition du bois supposé complètement sec. Il est puisé par la feuille dans l'air qui le contient à l'état d'anhydride carbonique, et transformé en hydrate de carbone assimilable par la plante; c'est là ce que l'on appelle l'assimi. lation chlorophyllienne.

10.000 mètres cubes d'air contiennent environ 3 mètres cubes d'anhydride carbonique, soit un poids de

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Le poids atomique du carbone étant 12, celui de l'oxygène 16, 44 grammes de CO2 sont formés de 12 grammes de C et de 32 grammes

12

d'O, c'est-à-dire que l'anhydride carbonique comprend de son poids

.le carbone.

44

Par conséquent, 10.000 mètres cubes d'air contiennent

5 k. 93 X

12

44

I k. 62 de carbone.

On peut évaluer d'après cette donnée le volume d'air nécessaire pour alimenter en carbone une forêt de pin sylvestre produisant annuellement 5 mètres cubes de bois à l'hectare. Le poids d'un mètre cube de bois de pin desséché à l'étuve étant voisin de 500 k., la production de cette forêt est de 5 X 500 2.500 kilogrammes de matière ligneuse et le poids du carbone fixé est de

2.500

2

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Ainsi, pour que les aiguilles d'un peuplement de pin sylvestre alimentent la production de 5 mètres cubes de matière ligneuse, il est nécessaire que les cellules chlorophylliennes entrent en contact avec un volume d'air de

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Il n'est pas tenu compte, dans ce calcul, du carbone qui, fixé momentanément dans les tissus, est ensuite rendu à l'atmosphère sous forme d'anhydride carbonique par la respiration proprement dite; il serait, en effet, difficile d'en déterminer la proportion exacte; mais l'on sait que celle-ci, qui a fait l'objet d'expériences et de mesures nombreuses, depuis celles bien connues de Boussingault, est assez faible pendant la période active de la végétation pour qu'on puisse la négliger dans une étude dont les conclusions ne sauraient être infirmées par un élément de cet ordre de grandeur.

En évaluant à 10 m3 à l'hectare le volume des aiguilles du peuplement de pin sylvestre considéré et à 1.200 heures la durée de la végétation active (heures de soleil du 1er mai au 1er septembre), on trouve que le volume d'air absorbé par mètre cube d'aiguilles doit être en moyenne de

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c'est-à-dire que les aiguilles doivent absorber, en moyenne, toutes les secondes, un volume d'air à peu près égal au cinquième de leur propre volume.

Si l'on considère, non plus le volume des aiguilles, mais celui des lacunes du tissu chlorophyllien, dans lesquelles circule l'air absorbé, et qui n'est pas supérieur au tiers du volume des aiguilles, on constate que cet espace lacuneux doit se remplir et se vider au moins toutes les deux secondes pour satisfaire à la végétation. Comme l'orifice par lequel l'air pénètre dans la feuille, l'ostiole, est relativement étroit, on est amené à conclure que la synthèse chlorophyllienne nécessite des mouvements d'aspiration et d'expiration au moins aussi fréquents que ceux des poumons d'un mammifère.

L'aiguille du pin ne serait donc pas un organe inerte.

Admettant que chaque mètre cube d'air expiré entraîne en moyenne 20 grammes de vapeur d'eau, ce qui est un maximum, on trouve que la transpiration déverse dans l'atmosphère une quantité d'eau dont le poids ne doit pas dépasser

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soit 154.000 kilogrammes par hectare et par an.

La transpiration est un phénomène physiologique qui se produit dans la masse des tissus chlorophylliens en état d'activité fonctionnelle ; mais ce n'est pas seulement par transpiration que l'aiguille du pin exhale de la vapeur d'eau, elle en déverse aussi par évaporation, phé

nomène simplement physique qui a pour siège la surface externe des organes. Tous les auteurs qui ont étudié la transpiration et l'évaporation des feuilles sont d'accord pour reconnaître que la quantité d'eau évaporée est beaucoup moindre que celle transpirée, tout au moins lorsque l'atmosphère n'est pas très agitée; cette opinion est fondée sur des expériences très nombreuses et très précises; la chose est du reste évidente pour qui connaît le mécanisme de ces deux phénomènes; mais il faut remarquer que la transpiration ne se produit qu'à la lumière, alors que l'évaporation se produit nuit et jour. On peut donc admettre, en faisant la part assez large à l'évaporation, que, pendant la période active de la végétation, du 1er mai au 1er septembre en montagne, la quantité d'eau évaporée par les aiguilles est égale à celle de l'eau transpirée par les mêmes organes. L'évaporation se produit aussi par les ramilles, par les branches et par la partie supérieure du fût; la surface de cette partie de l'arbre est plus étendue que celle des aiguilles, mais elle est plus abritée du soleil et du vent, aussi n'émet-elle certainement pas plus de vapeur d'eau.

C'est donc largement compter que d'évaluer à 154.000 × 3, soit en nombre rond à 500.000 kilogrammes par hectare, la quantité d'eau puisée dans le sol et rendue à l'atmosphère par une forêt de pin sylvestre dans les conditions de végétation énoncées. Cette quantité pourrait être représentée par une nappe d'eau couvrant la surface du sol sur 5 centimètres de hauteur.

Comment se fait-il qu'une forêt qui demande si peu d'eau pour satisfaire aux besoins de sa végétation ne trouve pas toujours dans le sol l'humidité nécessaire à une production ligneuse normale?

Le faible accroissement correspondant à certaines années, 1919 par exemple, montre cependant qu'il en est parfois ainsi.

Cela tient à plusieurs causes :

1o Les forêts de pin sylvestre sont reléguées en général sur des terrains très maigres retenant peu d'eau à l'état capillaire, et la couverture morte qu'elles produisent forme un humus de la dernière qualité, améliorant peu les propriétés physiques du sol.

2o La couche de terrain dans laquelle s'étend le chevelu des racines est peu épaisse.

3o L'arbre n'a lui-même qu'une faible capacité de réserve.

4 L'eau qui tombe des nuages sur une forêt n'arrive que partiellement aux racines, ou, pour mieux dire, au chevelu des racines.

C'est pourquoi, lorsqu'il ne pleut pas, ou qu'il ne tombe que de petites ondées, les réserves d'eau utilisables par les racines sont vite

épuisées. Peu importe qu'il tombe 50, 60 ou 70 centimètres de pluie avant l'ouverture des bourgeons; si le sol est égoutté au mois de juin, l'arbre ne tarde pas à manquer d'eau, les stomates des aiguilles se ferment et la production ligneuse est arrêtée.

1

On peut dire, en un mot, que, si la sécheresse fait rarement périr le pin sylvestre, il n'en est pas moins vrai qu'il ne produit pas de bois sur un sol desséché ; mais il est possible d'augmenter beaucoup sa production en introduisant sous son couvert une essence d'ombre à feuille caduque dont la couverture morte conserve au sol l'humidité nécessaire. L'amélioration est tellement sensible qu'on ne devrait jamais hésiter à planter le hêtre ou le charme sous un peuplement de pin un peu clair; 500 plants par hectare, placés de préférence dans les trouées, suffiraient, au bout de quelques années, à couvrir le sol de leurs feuilles. Le mélange naturel du pin sylvestre et du hêtre existe d'ailleurs, par taches, dans bien des pineraies du Plateau central, et il n'est pas rare de mesurer des accroissements variant du simple au double, lorsque l'on passe de la pineraie pure au peuplement de pin dominant le hêtre en sous bois.

Les chiffres indiqués dans cet article seront peut-être discutés car ils ne cadrent pas avec certaines données généralement admises; mais l'auteur de ces lignes est en mesure de les confirmer et de fournir toutes les précisions nécessaires à ceux de ses lecteurs que la question pour

rait intéresser.

C. MOREL.

LES LIVRES FORESTIERS

La forêt sainte de Haguenau en Alsace 1, par G. Huffel, sousdirecteur de l'Ecole nationale des Eaux et Forêts.

La forêt de Haguenau forme un massif compact de plus de 18.000 hectares, qui barre la plaine d'Alsace à la hauteur de Seltz, sur la rive gauche du Rhin, jusqu'aux premiers contreforts des Vosges. Elle n'a pas sensiblement changé d'étendue ni de limites depuis l'époque romaine. Traversée par de nombreux cours d'eau se dirigeant de l'ouest à l'est, fréquemment inondée et bien plus marécageuse alors qu'aujourd'hui, c'est sans doute pour ce motif qu'elle ne fut pas entamée par les grandes voies de communication, qui la contournaient pour converger vers Strasbourg.

Pourquoi ce nom de forêt sainte (sacrum nemus, der heilig Forst), donné à la forêt de Haguenau? C'est que, dès les premiers temps de l'apparition du christianisme en Alsace, elle fut le refuge de pieux anachorètes qui y pratiquaient la vie érémitique. Ceci se passait notamment au vi siècle, au temps du roi Dagobert II. La forêt appartenait alors aux rois mérovingiens, successeurs du fisc impérial romain; ces rois firent aux solitaires de larges donations, et aux moines qui leur succédèrent d'importantes concessions territoriales, grâce auxquelles s'élevèrent de nombreux couvents, sur les lisières du massif forestier. Depuis des temps très reculés, les populations riveraines étaient certainement admises à prendre dans la forêt tous les produits nécessaires à leurs besoins. Simples tolérances d'abord, peu à peu consacrés par les coutumes locales, les usages forestiers ne tardèrent pas à se préciser et à augmenter d'importance. Nous les voyons relatés pour la première fois dans la charte de franchise de Haguenau, datant de 1164, lorsque la ville naissante se trouvait encore dans la même situation que les communautés rurales du voisinage: bois de construction et bois de chauffage, pâturage et panage. Ce sont les droits ad omnes usus si fréquents à cette époque, mais qui n'avaient encore, à Haguenau comme ailleurs, qu'un caractère singulièrement précaire. Toutefois la ville, dans les rédactions successives de sa coutume, en 1352, en 1435, ne se lasse pas

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In-8 de x1-164 pages, avec 3 gravures dans le texte et 3 photographies hors
Berger-Levrault, éditeur, 1920. Prix: 2 fr.

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