Page images
PDF
EPUB

wwwww ww

www.www

DES PERSONNALITÉS

ET

INCIVILITÉS

DE LA QUOTIDIENNE ET DU JOURNAL DES DÉbats.

Ce n'est point sans avoir eu à surmonter une extrême répugnance, que nous nous sommes décidés à descendre aux yeux du public, jusqu'à la Quotidienne et au Journal des Débats. Pendant quatre ans, nous n'avons opposé que le silence à leurs provocations, à leurs invectives, au ton tantôt arrogant, tantôt bassement familier qu'ils se sont permis à notre égard. Le même sentiment qui nous avait commandé le silence, nous prescrit aujourd'hui de le rompre. L'injure long-temps tolérée peut, au jugement de plusieurs, passer pour une injure acceptée. En France, on lit peu de livres; dans l'étranger, on ne connaît point les hommes dont les journaux de France ont à s'occuper; l'instruction, au dehors et au dedans, n'arrive guère que par la voie des papiers publics. On ne connaît donc les ouvrages et les auteurs que par les

[ocr errors]

couleurs sous lesquelles ils les présentent. L'autorite d'une chose imprimée est encore grande dans beaucoup d'endroits; presque tous les lecteurs éloignés de la capitale, sont étrangers à la connaissance du personnel des rédacteurs; ils ignorent également à quel parti ils sont attachés, quels intérêts ils servent ou les dirigent; par conséquent, ils sont, à défaut de pièces justificatives ou d'objets de comparaison, exposés dans leur jugement à des surprises, dont la connaissance de ces mobiles cachés les défendrait. Quiconque habite les départemens, ne peut manquer d'être frappé de cette disposition des esprits. Rien n'est plus commun que d'y entendre dire : Cela est dans le journal. Comme le journal traite M. N!...

Plus une arme est dangereuse, plus un homme qui connaît ses devoirs, veille sur son usage et l'emploie avec circonspection. C'est à la fois un superbe privilége et une grande puissance, que celle de pouvoir établir une communication journalière et directe avec les hommes de tous les pays, auxquels l'application aux affaires publiques, devenue générale dans le monde, fait de la lecture des journaux un besoin de première nécessité. Il est loin le temps pendant lequel l'antique Gazette de France et le Courrier d'Avignon suffisaient aux modestes besoins de la société d'alors.

Ce n'est donc point une chose indifférente que l'action répétée des journaux sur un homme et sur ses

ouvrages; et quiconque aura quelque soin de sa renommée, ne leur abandonnera pas le droit d'en dis poser. Il en est sûrement avec lesquels une confiance aussi étendue, ne serait pas trompée; mais avec ceux que la passion ou l'esprit de parti domine, il faut savoir prendre ses sûretés: c'est ce que nous devons faire à l'égard de la Quotidienne et du Journal des Débats. Depuis 1814, et cette date dit tout, les journaux nous ont pris pour but à leurs traits; leurs hostilités étaient d'autant plus blâmables, qu'elles étaient plus gratuites; à cette époque nous n'avions encore rien publié; nous ne connaissions aucun des rédacteurs, et nous avons bien la certitude de n'avoir jamais écrit une ligne qui ait le moindre rapport à leurs personnes ou à leurs feuilles. Nous sommes donc à leur égard dans la classe des neutres, et ceux-ci ont toujours été un objet de ménagement; nous y avions droit par le soin constant que nous avons apporté à éloigner de tous nos écrits jusqu'à l'ombre d'une personnalité il n'y a que la mauvaise éducation qui puisse engager un écrivain à se les permettre. Lorsque le récit des cruels événemens qui ont changé l'état de notre patrie, défilant sous nos yeux comme un cortége funèbre pour conduire au tombeau notre grandeur passée, amena sous notre plume des noms qui se faisaient lire en tête de ce lugubre appareil, nous ne les avons fait remarquer que sous les rapports de la part qu'ils avaient eue à nos malheurs : le nombre

en a été réduit aux seuls besoins de l'histoire, et sû-rement tout ce qui se trouvait en dehors de cette partie de leur vie publique, a été scrupuleusement respecté. Quand nous avons peint des scènes qui faisaient partie d'événemens trop célèbres, la révélation n'est pas venue de nous; déjà le public les avait appris par les récits des premiers serviteurs des acteurs principaux. Ce que nous avons dit ne peut mériter de blâme; mais ce que nous avons tu, doit nous donner des droits à la reconnaissance. Il ne nous a rien coûté de sacrifier les faciles succès attachés aux révélations qui atteignent les grands; mais nous n'avons point cessé d'avoir devant les yeux le respect dû au malheur, alors même qu'il est mérité, ainsi qu'à un rang que nous vénérous, d'autant plus que nous en connaissons mieux l'origine et la destination, et que semblable à l'or, il nous paraît briller d'un éclat plus vif et plus pur, à mesure qu'on le dégage de la route des préjugés.

Nous osons nous flatter qu'aucune de nos publications ne porte un caractère qui puisse faire reconnaître à quelle nation, à quel parti l'auteur appartient, jusqu'à quel point il a pu être atteint personnellement par les événemens qu'il décrit. Depuis le congrès de Radstadt jusqu'à celui de Vienne, en France comme en Allemagne, exilé ou banni, nous avons parlé à tous et de tous avec franchise, impartialité, et sans autre considération que celle de l'intérêt géné

[ocr errors]

:

ral. Nous abandonnons au public, comme c'est notre devoir, le jugement du fond et de la forme de nos ouvrages leur terme sera le premier signe certain de mécontentement de sa part; mais qu'il nous soit permis de révendiquer cette partie des dispositions morales qui ont présidé à leur confection, non comme un titre de gloire, tant l'accomplissement de ce devoir paraît simple, mais au moins comme une carte de sûreté. Qui n'a jamais offensé, peut prétendre à rester à l'abri de l'offense.

Il paraît que cette maxime n'est point à l'usage de la Quotidienne ni du Journal des Débats. Ce ne sont point de ces ennemis généreux qui arrêtent le combat au premier sang, mais bien des champions d'autant plus acharnés qu'ils combattent tout seuls, et qu'on ne leur oppose aucune résistance. Nous ne rapporterons ni la triste et lourde gaîté de M. de Felletz, ni les dédains et les dégoûts de M. Fiévée, déclarant à ses lecteurs que le Congrès de Vienne est un pamphlet allemand, mortellement ennuyeux; que l'auteur est un homme de parti, qui cherche un parti, qui n'a point sa partie liée: entendra qui pourra cette manière expéditive de juger un livre, et peut-être qu'un tel jugement est plus retombé sur le juge que sur le condamné. Mais nous demanderons à M. Hoffmann de quoi et de qui il peut tenir le droit d'entasser, au sujet de vues sur l'ordre colonial, les épithètes inciviles, les locutions, tour à tour basses, familières, outrageantes, qu'il s'est per

[ocr errors]
« PreviousContinue »