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guste sœur de l'auguste frère, et mille autres fadaises également serviles? Or, la servilité est au respect ce que l'antichambre est au salon (1).

(1) La niaiserie des annonces dans les papiers publics est arrivée à un degré vraiment déshonorant pour cette partie de la litté

rature.

Un antique chevalier de Saint-Louis, protégé par la plus profonde obscurité, après trente-cinq ans des plus pénibles travaux, est parvenu à la mairie de son village; il succombe sous le poids du travail et des ans : la Parque a tranché le fil usé des jours de ce preux. Voilà les journaux en deuil; il faut que la douleur du hameau se communique à toute la France; il faut qu'elle soit inconsolable, et ce qu'il y a de plus lugubre dans tout ceci, il faut qu'elle subisse le récit des qualités héroïques du défunt. Monsieur le curé termine sa carrière au milieu d'un troupeau dont il faisait les délices, la France ne doit pas perdre un mot de tout ce qu'il a dit à son sacristain et à une demi-douzaine de Vieilles femmes, témoins nécessaires de cette fin édifiante; la France doit pleurer autant que la paroisse. C'est ainsi qu'elle apprend tous les jours par la grandeur de ses pertes, celle des trésors cachés qu'elle recélait dans son sein sans le savoir: la modestie des défunts les avait dérobés à ses hommages; et, à la manière des Saints, ils avaient réservé leurs miracles pour le temps qui les enlève à la terre. Souvent on a vu des desservans ne pouvoir passer d'un poste à un autre, que par une route jonchée des fleurs de la hétorique de journaux mis en mouvement par ce grand événement... Quel est le poète qui a dit, en parlant de tous ces éloges:

A la téle on les jette,
Et non valet de chambre est mis dans la gazette?

9o Qu'avant d'user de ses priviléges, il faut montrer ses titres. Des écrivains aussi tranchans, aussi confians, aussi insultans que le sont ceux de la Quotidienne et des Débats, devraient bien montrer leurs œuvres, les preuves de leurs talens, les services qu'ils ont rendus, le rang qu'ils occupent dans la société, dans la consi

Rivarol aurait beau jeu à faire un supplément au petit Almapach des grands Hommes,

Chaque chose doit avoir son style propre; chaque événement sa place, suivant sa nature : les papiers publics ne sont faits que pour les actes de quelque importance et pour les hommes de quelque volume.

Ce qui vient d'être noté n'est que ridicule. Voici qui présente un autre caractère :

Tout le monde applaudit à l'affermissement de l'empire né-、 cessaire, bienfaisant, légitime et moral de la religion; tout le monde applaudit à l'accomplissement des devoirs qu'elle preserit; mais que prétend-on faire avec cette affectation à noter chaque action religieuse de ces saints personnages, chaque colonne de reposoir, chaque coup d'encensoir; à proclamer avec des détails bien minutieux, et quelquefois en compagnie de noms que l'on n'attendait guère, que l'armée a fait sa première communion, et la gendarmerie ses Pâques; que deux ou trois personnes ont été baptisées, vingt autres confirmées?..... Que les auteurs de ces publications songent donc que les papiers publics ne sont point des registres de sacristies, et que l'Europe nous lit.... Leurs inventions sont très-bonnes, nous n'en doutons point; mais ils s'exposent à les voir manquer le but. Non tali auxilio, nec défensoribus istis tempus eget,

dération publique. On a beau les demander; il ne parvient d'autre réponse que celle qu'un poète célèbre a mise dans la bouche d'un artiste égaré dans les obscurités d'un labyrinthe :

Je ne vois que la nuit, n'entends que le silence.

Or, la nuit est amie de l'ombre, et l'obscurité commande la modestie.

10° Que la Quotidienne et les Débats doivent réunir leurs deux banques, pour combler l'horrible déficit d'idées qui les afflige, et se cotiser pour arriver enfin, si pourtant cela ne les gêne pas trop, à nous dire quelque chose de neuf, et à ne plus composer tous leurs articles avec une demi-douzaine de mots qu'ils n'entendent guère, et surtout qu'ils n'oseraient expliquér, mais que nous entendons fort bien, et que nous leur expliquerons, s'ils nous y forcent. Qu'ils se souviennent que l'ennui naquit l'ennui naquit un jour de l'uniformité : cet enfant est resté chez eux un fils très-légitime. Prennent-ils donc les Français pour des aveugles, incapables de percer les voiles transparens dont ils s'enveloppent, ou pour des dupes que l'on mène avec quelques paroles magiques, c'est-à-dire, vides de sens?

11° Que la prudence doit prendre la place que devrait tenir la justice; que, lorsqu'on a le malheur de sortir meurtri de toute attaque, lorsqu'on n'en compte

les combats que par les défaites, il faut éviter les fàcheuses rencontres; or, voilà ce qui arrive à la Quotidienne et aux Débats, chaque fois qu'ils entrent en campagne. Chaque fois, ils peuvent dire avec le prince troyen: Arma amens cepio, nec sat rationis in armis. Voyez en quel état le triste Felletz vient de sortir des mains de M. Azaïs. Voyez quelles réponses a fait pleuvoir sur les Débats la manie de faire de l'esprit en op posant l'esprit du siècle à ses mœurs, en nous apprenant que l'esprit est à la république par son indépendance, et que les mœurs sont à la monarchie par leur corruption; ne voilà-t-il pas des bases bien honorables et bien solides, données aux monarchies actuelles (1)?

(1) Si nous n'avions pas horreur du style de la Quotidienne et des Débats, nous dirions qu'il ne fut jamais proféré une balourdise plus complète, un contresens plus formel, que l'assertion ci-dessus. Tout est en faux, le fait et le droit. Jamais il n'y eut moins de républiques; elles ont disparu de l'Europe. La Suisse n'est point une république; on a laissé, je crois, Saint-Marin comme échantillon: Lucques même n'a point échappé à la ruine commune. Si le siècle était républicain, tout serait république, d'après la règle certaine, et dont nous avons rapporté assez de preuves dans le corps de cet écrit: que, dans un siècle, tout se fait d'après l'esprit du siècle. A quoi bon se tourmenter pour rechercher quel est l'esprit du siècle? Il se montre partout; il est constitutionnellement monarchique, et rien de plus. L'esprit républicain est en Amérique ; à la bonne heure. Là, il se montre à découvert; là, il y aura des républiques, quelque chose que l'on fasse pour l'empêcher, et toujours par la même raison, l'esprit

12° Que la Quotidienne et les Débats peuvent trouver dans le ton de cet article, que ce n'est point la frayeur qui nous avait fait garder le silence, et qu'ils doivent l'imputer à eux seuls s'il a été rompu. Que leur tour de se taire soit arrivé ; c'est tout ce que nous attendons d'eux, et qu'enfin, après tant de paroles aigres et déplacées, ils nous accordent de jouir des douceurs de leur silence. Terminons cette discussion qui a eu pour objet l'intérêt public bien plus que le nôtre, par demander à tous ces écrivains où ils prétendent nous mener? Que veulent-ils avec leurs éternelles déclamations? Ils ont tant parlé du règne des gladiateurs que gagneront-ils à le changer contre celui des diffamateurs? Ils ont beaucoup reproché des vices emportés et féroces : serons-nous beaucoup plus anoblis par des vices bas et abjects? Si les Romains furent les maîtres du monde avec les vices des conquérans, les Grecs du Bas-Empire furent la proie de tout le monde avec les vices dégradans des esclaves. On dirait que certains écrivains voudraient faire de notre grande France une petite ville. A une certaine époque, les perquisitions, les inquisitions, les déla

général. Mais, en Europe, il n'y a qu'un esprit, qui est l'esprit constitutionnel, qui finira par l'emporter.

Mens agitat molem et toto se corpore vestit.

Si l'esprit républicain s'y introduit, ce sera parce que l'on n'aura pas satisfait l'esprit constitutionnellement monarchique.

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