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Violation du blocus.

Twiss.

Deane.

Opinions

des auteurs. Bello.

Gessner.

Heffter.

de la notification ne saurait prolonger les droits de la puissance bloquante à l'égard du commerce neutre au delà du moment où ses forces ont été retirées de leur poste, où par conséquent il n'y aurait plus qu'un blocus fictif et dérisoire.

S 2623. Dès qu'une place, un port, un lieu quelconque est bloqué, tout navire neutre qui tente d'enfreindre la prohibition du commerce avec ce lieu commet une infraction au droit des gens. « Une fois, dit Sir Travers Twiss, que le blocus d'un port a été établi, tout navire neutre qui tente volontairement d'entrer dans le port, sur lest ou avec un chargement, sans une permission de la puissance qui maintient le blocus, est passible de capture ou de condamnation pour violation du blocus. »

A ce cas H. B. Deane ajoute celui où le navire neutre s'approche d'une place bloquée, jette l'ancre à proximité ou se poste de manière à pouvoir se mettre sous la protection des batteries ou se glisser facilement dans le port.

Dans de pareilles circonstances nul ne conteste le droit du belligérant qui tient le blocus de traiter ce navire en ennemi. Néanmoins le caractère de criminalité qui s'attache intrinsèquement à cette infraction exige le concours de certaines circonstances essentielles, qu'il est souvent difficile de déterminer avec sûreté et précision*.

un

§ 2624. « Pour la légalité de la peine qui retombe sur les violateurs d'un blocus, dit Bello, trois choses sont nécessaires blocus réel, un avis préalable, une violation effective. »

S 2625. Gessner résume ces conditions dans la matérialité du fait et dans l'avertissement du blocus donné au navire neutre.

§ 2626. Heffter, se rapprochant davantage de l'opinion de Bello, est d'avis qu'il faut « que le blocus soit réel et effectif, qu'une notification quelconque du belligérant en ait pu avertir le contrevenant, et qu'il y ait infraction ou du moins tentative d'infraction; » mais il a soin de faire observer que « la simple intention, sans un commencement d'exécution non équivoque sur les lieux mêmes, ne suffit pas. » Ainsi, par exemple, un navire neutre qui après avoir

Cauchy, t. II, pp. 214-216, 420, 421; Hautefeuille, Des droits, t. II, pp. 234 et seq.; Ortolan, Règles, t. II, p. 349; Massé, t. I, §§ 301, 302; Pistoye et Duverdy, t. I, pp. 365 et seq.; Gessner, pp. 202 et seq.; Heffter, § 156; Bluntschli, § 835; Phillimore, Com., v. III, §§ 297 et seq.; Twiss, War, § 109; Wheaton, Elėm., pte. 4, ch. 3, § 28; Wildman, v. II, pp. 194 et seq.; Manning, pp. 323 et seq.; Duer, v. I, lect. 7, §§ 33 et seq.; Fiore, t. II, pp. 453 et seq.; Bello, pte. 2, cap. 8, § 5.

reçu la notification spéciale entrerait ou tenterait d'entrer dans le port bloqué pourrait être saisi; mais le navire qui après la notification diplomatique se dirigerait d'un port neutre vers le port bloqué ne serait pas saisissable sur la haute mer; de même on ne doit pas tenir pour une tentative de violer le blocus le fait de ne s'être pas arrêté immédiatement après qu'ont été faits les signaux et la semonce.

2627. Toutefois Massé considère comme équivalant à une tentative frauduleuse de traverser la ligne de blocus le refus de répondre aux signaux, et il prétend que le navire peut en pareil cas être saisi sans notification préalable.

Massé.

Publicistes

français.

Massé.

$ 2628. Les publicistes français en général ne se contentent pas d'une notification quelconque; c'est la notification spéciale ou indi-· viduelle qui fait loi pour eux. Cela est si vrai que Massé soutient que l'omission de la notification diplomatique ne saurait être opposée par le neutre auquel une notification spéciale a fait connaître l'existence et la réalité du blocus. Selon Hautefeuille, la réception Hautefeuille. de la notification spéciale prouve en effet que le navire neutre a vérifié par lui-même la réalité du blocus.

§ 2629. Ortolan est d'avis que « le neutre ne peut plus alléguer l'ignorance lorsqu'il a été averti de l'existence du blocus par quelqu'un des bâtiments de guerre employés à le maintenir... » « Si l'on admet, ajoute-t-il, comme preuve de la connaissance du blocus non pas la notoriété d'un blocus simplement de facto ou la notification diplomatique faite aux gouvernements étrangers, mais seulement la notification individuelle faite une première fois par un des navires tenant le blocus, il est évident qu'un bâtiment qui ayant reçu cette notification individuelle persiste à vouloir entrer, ou qui plus tard, tant que le blocus dure, se présente de nouveau sur les lieux ou si près que son intention d'y entrer soit indubitable, il est évident que ce bâtiment est en état de flagrant délit, surtout si ses papiers de bord font voir qu'il était destiné pour le lieu bloqué... Dans tous les cas, l'intention seule ne saurait être présumée pour le fait; il faut qu'il y ait eu consommation, ou au moins commencement de fait matériel.

Ortolan.

§ 2630. Hautefeuille réduit à deux espèces les violations de blo- Hautefeuille. cus : « La première résulte du fait par un navire arrivant du large d'entrer ou de tenter d'entrer dans le port bloqué après avoir reçu la notification spéciale et alors que le blocus existe réellement; la seconde consiste de la part d'un bâtiment entré dans le port avant l'investissement dans la sortie ou la tentative de sortie avec un

Twiss.

D

chargement embarqué postérieurement au blocus, lorsque le fait a lieu en la présence et malgré la présence des forces bloquantes. Le même publiciste ne regarde pas comme contrevenant au blocus le navire neutre qui pénètre dans le port bloqué dont il a trouvé l'entrée libre, parce qu'un coup de vent ou tout autre accident de mer a forcé l'escadre de blocus de s'éloigner ce que « la jurisprudence presque générale des peuples maritimes Hautefeuille le reconnaît lui-même considère comme une violation de blocus, en mettant ce navire dans la même catégorie que celui qui profitant de la nuit traverse la ligne de blocus, ou que celui qui comptant sur la supériorité de sa marche et l'incertitude du tir n'hésite pas à entrer malgré le feu des bâtiments attaquants. » Il repousse complètement cette jurisprudence, ainsi que tous les autres cas de violation de blocus que les belligérants ont tenté de faire peser sur les peuples neutres, et qui ne sont à ses yeux que <«< chimériques et des inventions du despotisme maritime de certains peuples dans le double but d'enrichir les armateurs aux dépens des neutres et surtout de ruiner le commerce et la navigation des peuples pacifiques.

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En s'exprimant ainsi l'auteur français entend sans doute faire allusion à la pratique anglaise, qui, posant la notification générale ou diplomatique comme la base essentielle du blocus, tient. pour coupable de violation de blocus tout navire qui postérieurement à cette notification a mis à la voile à destination, constatée ou présumée, des lieux bloqués.

§ 2631. « La règle, dit Twiss, d'après laquelle se guident les cours anglaises et qui consiste à considérer l'acte de mettre à la voile pour un port bloqué comme équivalant en droit à une tentative d'y pénétrer, est péremptoire dans le cas d'un blocus qui a été notifié par le gouvernement belligérant aux gouvernements neutres, d'autant plus que dans le cas d'un blocus qui a été notifié publiquement les parties qui dépêchent le navire ne sont pas admises à présumer que le blocus ait été levé, si la révocation du blocus n'a pas été également notifiée publiquement. » C'est ainsi que dans la plupart des cas, substituant l'intention, la simple présomption même au fait, les juges anglais ont déclaré de bonne prise des navires qui n'avaient fait que passer devant les vaisseaux chargés du blocus, ou d'autres qui s'en retournaient, ou que les vents avaient jetés sur les plages ennemies, ou qui s'étaient approchés d'un port bloqué sans intention d'y entrer, mais seule

ment de prendre près des côtes un pilote pour un port voisin non bloqué *.

tiques sui

préciation des

$ 2632. Quelque logiques et rigoureuses que soient les appré-Règles praciations des publicistes en cette matière, elles ne le sont cependant vre pour l'appas assez pour qu'on ne doive tenir aucun compte ni des circons- espèces. tances spéciales qui surgissent dans chaque cas particulier, ni de la jurisprudence consacrée par les tribunaux de prises.

Ortolan lui-même le reconnait lorsqu'il dit que « la détermination des cas où il y a eu violation réelle du blocus ne peut être faite dans les livres que d'une manière générale, et que la multiplicité des circonstances qui peuvent se présenter apporte souvent des difficultés dans la saine appréciation de ces cas. >> Aussi, suivant lui, « les questions de violation de blocus, ainsi que toutes les questions de neutralité, étant des questions de bonne foi, les cours de prises du capteur qui sont appelées à les juger doivent tenir compte de l'innocence de l'intention. »

Quoi qu'il en soit, le guide le plus sûr à suivre en semblable matière est celui que fournissent les sentences des tribunaux de prises. Les tribunaux français révèlent le mieux, par les principes libéraux dont ils se sont inspirés, l'esprit général de cette partie du droit chez les nations du continent européen, tandis que les cours d'Angleterre et des États-Unis caractérisent davantage les règles plus rigoureuses de droit maritime qui prévalent dans le Royaume Uni et dans le Nouveau Monde **.

$ 2633. La question de savoir si un navire neutre a eu ou non connaissance du blocus lorsqu'il arrive sur la ligne des croiseurs est un point de fait qui ne se laisse pas établir à l'aide de simples présomptions, mais ne peut se dégager que de l'appréciation des circonstances inhérentes à chaque cas particulier.

Ainsi, par exemple, un navire capturé à sa sortie d'un port bloqué serait infailliblement déclaré de bonne prise malgré le prétexte d'ignorance que voudrait alléguer le capitaine, si l'on parvenait à fournir contre lui la preuve matérielle qu'il a pris sa cargaison postérieurement à la déclaration du blocus et à l'inves

Bello, pte. 2, cap. 8, §5; Gessner, pp. 202 et seq.; Heffter, § 156; Massé, t. I, $$ 301, 302; Ortolan, Règles, t. II, p. 349; Hautefeuille, Des droits, t. II, p. 234 et seq.; Twiss, War, § 109.

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Wheaton, Elém, pte. 4, ch. 3, § 28; Vattel, Le droit, liv. 3, § 117; Ortolan, Règles, t. II, pp. 348 et seq.; Heffter, § 156; Phillimore, Com., v. III, § 298; Duer, I, lect. 7, § 33; Twiss, War, §§ 109, 110; Bluntschli, § 835; Halleck, ch. 23, §16; Kent, Com., v. I, p. 148.

V.

Ortolan.

de la

présomption connaissance

d'un blocus.

Le Marta Magdalena.

Autres circonstances.

tentative de

us est-elle

sommée ?

tissement du port. On peut également dans certains cas écarter la présomption de la connaissance antérieure des faits; car si l'on admet à la rigueur que la notification diplomatique faite à un État a dù transpirer dans les contrées environnantes, cet acte n'oblige cependant proprio vigore que les sujets du pays où il a été rendu public; il reste sans valeur légale pour les habitants d'un pays tiers. Il faudrait naturellement s'arrêter à une autre solution, si le blocus avait duré assez longtemps pour qu'il, ne fût plus permis à personne d'élever un doute sur son existence.

§ 2654. En cette matière la vraisemblance, quelque logique qu'elle puisse être, ne saurait non plus être invoquée comme juste motif de pénalité. Ainsi dans l'affaire du navire Marta Magdalena contre le corsaire français le Solide les capteurs soutenaient que le blocus de Cadix présupposait ou impliquait moralement celui de Séville; et, se fondant sur cet argument indirect, ils demandaient la confirmation de leur capture; mais le tribunal français compétent repoussa la demande, écarta comme contraire à tous les principes le système des blocus par voie d'induction et confirma ainsi le précédent déjà consacré dans l'affaire du navire Anna Maria. § 2635. Il peut encore arriver que sans être officielle, la connaissance d'un blocus ait un tel caractère d'authenticité que vouloir en repousser les effets équivaudrait à commettre sciemment une véritable infraction. La même règle serait avec juste raison appliquée au navire neutre qui recevant pendant sa traversée un avertissement régulier, soit par un croiseur, soit par un des bâtiments de guerre employés au blocus, persisterait à ne pas changer de route, ce seul fait suffisant pour caractériser l'intention de forcer la ligne d'investissement *.

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Quand la $ 2656. Un grand nombre de publicistes soutiennent que le violer un blo- seul fait d'entreprendre un voyage à destination d'un port bloqué censée con- ne constitue pas la rupture du blocus, et considèrent les captures opérées dans de semblables conditions comme une atteinte portée à la liberté des mers et à l'indépendance du pays auquel le navire capturé appartient.

Le gouvernement anglais a de tout temps suivi une pratique

Gessner, pp. 204, 205; Pistoye et Duverdy, t. I, pp. 378 et seq.; Bello, pte. 2, cap. 8, § 5; Riquelme, lib. 1, tit. 2, cap. 18; Hautefeuille, Des droits, t. II, pp. 234 et seq.; Heffter, § 156; Halleck, ch. 23, §§ 20-23; Phillimore, Com., v. III, §§ 300-302; Duer, v. I, lect. 7, §§ 36 et seq.; Kent, Com., v. I, pp. 147, 148; Wildman, v. II, pp. 186-180; Manning, pp. 323 et seq.

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