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tination de son chargement et la nationalité de l'équipage, lorsque cette nationalité ne résulte pas du pavillon du navire, comme cela a été stipulé dans plusieurs conventions internationales.

La visite se limite le plus souvent à l'examen des papiers de bord. On ne procède à des perquisitions qu'en cas de soupçons de fraude, particulièrement quand on constate que les papiers de bord sont faux ou que le pavillon sous lequel le bâtiment navigue n'est pas celui de l'État duquel il dépend. On peut donc, en résumé, considérer la visite comme une vérification de la nationalité et de la neutralité des navires.

publicistes. Wheaton.

$2707. Wheaton fait observer avec raison que sans le droit de Opinions des recherche et de visite il serait impossible de déjouer les fraudes en temps de guerre, de découvrir la propriété ennemie et de capturer les articles de contrebande ou les navires qui tentent de violer les blocus. Voulût-on d'ailleurs s'en tenir rigoureusement à la règle navires libres, marchandises libres, on ne pourrait encore dispenser les navires de l'obligation de prouver leur caractère national et T'existence des pièces de bord exigées par le droit des gens.

Halleck.

Halleck affirme que la visite et la recherche sont une dérogation à la liberté absolue des mers, universellement admise dans l'intérêt même des droits généraux de propriété, de juridiction, d'égalité et d'indépendance des États souverains. Approfondissant davantage encore la question, et après avoir Hautefeuille. proclamé comme un principe incontestable que les navires doivent être considérés comme une portion du territoire de l'État sous le pavillon duquel ils naviguent, Hautefeuille, beaucoup plus scrupuleux à l'égard des franchises du pavillon marchand, limite le droit de visite au point de le réduire théoriquement à une simple enquête sommaire sur la légitimité de l'usage des couleurs qui couvrent le navire. Il va jusqu'à prétendre que la visite n'est pas un véritable droit, mais un des moyens d'action du belligérant sur Son ennemi, le mode d'exercice du droit de nuire à l'ennemi et du droit, concédé par la loi secondaire, d'arrêter les marchandises de contrebande destinées à l'ennemi: ce qui revient en définitive à transformer la visite en un fait accidentel d'une importance secondaire, dont la sphère d'action doit être renfermée dans les plus étroites limites. Ne voir dans le droit de visite, comme il le fait, qu'un acte matériel dépouillé de toute base légale et juridique, c'est, suivant nous, aller à l'encontre de la doctrine professée par tous les publicistes, qui y trouvent une garantie sé

Exercice du droit de visite en temps de guerre.

Résumé historique.

Lois intérieures et

convention

rieuse dans l'intérêt des combattants aussi bien que dans celui des neutres, et qui n'ont épargné aucun soin pour en bien exposer les règles et discuter les principes constitutifs, ainsi que pour élucider les questions pratiques que ce droit peut faire naître*.

$ 2708. L'importance hors ligne du droit de visite, en raison des entraves forcées qu'il apporte aux transactions maritimes, a soulevé de nombreuses et vives discussions toutes les fois qu'on a cherché à l'appliquer en temps de paix; son exercice en temps de guerre n'a pas soulevé les mêmes controverses, parce qu'on n'a pu s'empêcher de le considérer avant tout comme le résultat nécessaire et en quelque sorte inséparable des relations toutes particulières qui surgissent par la force même des choses entre les Lelligérants et ceux que la neutralité empêche de s'associer aux hostilités **.

$ 2709. Il serait assez difficile de préciser l'époque à laquelle les nations de l'Europe ont reconnu le droit de visite d'une manière définitive. Le Consulat de la mer en mentionne déjà l'existence, et le regarde comme un droit accessoire de celui de capturer les biens ennemis et la contrebande de guerre.

C'est au même titre qu'on le voit sanctionné par les plus anstipulations ciens réglements maritimes de la France et de l'Angleterre. Quelques stipulations conventionnelles du XVe siècle, notamment les traités conclus par l'Angleterre en 1406, en 1417, en 1418 et

nelles.

Gessner, pp. 278 et seq.; Ortolan, Règles, t. II, pp. 248 et seq.; Hautefeuille, Des droits, t. III, p. 1, 5-11; Wheaton, Élém., pte. 4, ch. 3, ch. 29; Lawrence, Visitation, p. 4; Rayneval, Inst., t. II, p. 59; Rayneval, De la liberté, t. I, chs. 16, 28; Hubner, t. I, pte. 2, p. 227; Heffter, § 167; Klüber, Droit, § 293; Bluntschli, § 819 et seq.; Fiore, t. II, p. 464; Kent, Com., v. I, p. 154; Twiss, War, § 91; Halleck, ch. 25, § 1; Bello, pte. 2, cap. 8, § 10; Riquelme, lib. 1, tit. 2, cap. 16; Valin, Traitė, ch. 4, sect. 1, § 6; Jouffroy, p. 213; Wildman, v. II, pp. 118 et seq.; Morin, Les lois, t. II, pp. 352 et seq.; Vattel, Le droit, liv. 3, § 114; Wheaton, Hist., période 1, § 17; Bynkershoek, Quæst., lib. 1, cap. 14; Puffendorf, De rebus, lib. 25, § 41; Galiani, Dei doveri, cap. 10, § 5, art. 1, pp. 458, 459; Fiore, t. II, pp. 464, 465.

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Lawrence, Visitation and search; Wheaton, Élém., pte. 4, ch. 3, § 29; Phillimore, Com., v. III, § 325; Hautefeuille, Des droits, t. III, pp. 1 et seq.; Ortolan, Règles, t. II, pp. 248 et seq.; Massé, t. I, § 307; Cauchy, t. I, p. 55; t. II, pp. 91, 220, 277, 389; Gessner, pp. 278 et seq., 287 et seq.; Heffter, §§ 167, 168; Bluntschli, § 819; Tetens, Considérations, sec. 5, p. 134; Pistoye et Duverdy, t. I, p. 235; Cussy, Phases, t. I, p. 228; Jouffroy, pp. 213 et seq.; Martens, Précis, § 321; Fiore, t. II, pp. 464 et seq.; Twiss, War, § 91; Kent, Com., v. I, p. 154; Duer, v. 1, lect. 8, § 12, Halleck, ch. 25, § 10; Wildman, v. II, pp. 119 et seq.; Manning, pp. 350 et seq: Vergé, Précis de Martens, t. II, pp. 337, 338; Bello, pte. 2, cap. 8, §10; Riquelme, lib. 1, tit. 2, cap. 16; Garden, Traité, t. II, pp. 377-386; Merlin, Répertoire, t. XIII, p. 115.

en 1495 avec le duc de Bourgogne, en 1460 avec la République de Gènes, et en 1496 avec le duc de Bretagne, en réduisent l'exercice à une information verbale placée sous la garantie du serment. On lit en effet dans le traité de 1460 avec Gênes : « Nec caricabunt aut portabunt in navigiis eorum supra dicta bona aut mercimonia alicujus inimici nostri aut inimicorum nostrorum, et casu quo fecerint, peliti et interrogati per nostros dictos Januenses, debent immediate et sine dilatione (mediante juramento suo cui subdili nostri fidem debent) veritatem dicere et fateri et quæ et qualia bona inimicorum nostrorum vel inimici ducunt in navibus suis, et illa sine difficultate tradere et deliberare capitaneis vel ducentibus navigia nostra pro custodia maris, vel aliis subditis nostris, quos obviare contingeret navibus dictorum Januensium, ubicumque super mare recipiendo pro rata nauli sive affrectamenti hujus modi mercimonia. Ils ne chargeront ou ne transporteront point sur leurs navires des biens ou des marchandises susmentionnés appartenant à quelqu'un de nos ennemis; et dans le cas où ils l'auraient fait, requis et interrogés par nos dits Januenses, ils doivent immédiatement et sans délai (sous leur serment, auquel nos sujets doivent foi) dire la vérité et avouer la quantité et la nature des biens appartenant à notre ou à nos ennemis qu'ils ont à bord de leurs navires, et livrer et remettre ces biens sans difficulté aux capitaines ou officiers commandant nos navires préposés à la garde de la mer ou à d'autres de nos sujets que pourraient rencontrer les navires de nos dits Januenses, et lesquels recevront partout sur mer des marchandises au prorata du fret ou du nolisement de ce genre. »

Les traités de date moins reculée reconnaissent également ce droit de visite; mais, à vrai dire, c'est seulement depuis deux siècles qu'il est nettement défini et délimité (1).

(1) Voir les traités du 28 septembre 1716 (Dumont, t. VIII, pte. 1, p. 478) entre la France et les Villes Hanséatiques; 1er mai 1725 (Cantillo, p. 218; Dumont, t. VIII, pte. 2, p. 114) entre l'Espagne et l'Autriche; 8 septembre 1726 (Dumont, t. VIII, pte. 2, p 136) entre la Hollande et la régence d'Alger; 21 décembre 1739 (Wenck, t. I, p. 414) entre la France et la Hollande; 7 avril 1740 (Wenck, t. I, p. 519) entre les Deux Siciles et la Turquie ; 16 avril 1729 (Wenck, t. II, p. 8; Martens, 1re édit., Suppl., t. I, p. 189), 23 décembre 1736 (Wenck, t. I, p. 446), 15 avril 1741 (Wenck, t. II, p. 17), et 3 juin 1742 (Wenck, t. II, p. 100) entre la Suède et Alger, Tunis, Tripoli et les Deux Siciles; 23 août 1742 (De Clercq, t. I, p. 46; Wenck, t. I, p. 595; State papers, v. XXXV, p. 1263) entre la France et le Danemark; 6 avril 1748 (Wenck, t. II, p. 275) entre les Deux Siciles et le Danemarck; 1er avril 1769 (De Clercq, t. I, p. 111; Wenck, t. III, p. 752; Martens, 1re édit., t. I, p. 248; 2e édit.,

§ 2710. Ce n'est cependant pas sans luttes, sans résistances, que à l'exercice le droit de visiter les navires marchands a reçu sa consécration

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contraire

de ce droit.

t. I, p. 634) entre la France et Hambourg, confirmé le 17 mars 1789 (De Clercq, t. I,
p. 201; Martens, 1re édit., t. III, p. 158; 2 édit., t. IV, p. 425); 28 juillet 1760
(Herstlet, v. I, p. 100; Wenck, t. III, p. 254; Martens, 1re édit., t. IV, p. 1; 2o édit.,
t. I, p. 42) entre la Grande-Bretagne et le Maroc; 16 mai 1772 (Martens, 1re édit.,
t. VI, p. 138; 2o édit., t. II, p. 38) entre le Danemark et Alger; 6 février 1778 (Elliot,
v. I, p. 34; State papers, v. V, p. 6; Martens, 1re édit., t I, p. 685; 2e édit., t. II,
p. 587) entre la France et les États-Unis ; 18 septembre 1779 (De Clercq, t. I, p. 131;
Martens, 1 édit., t. II, p. 33; 2e édit., t. II, p. 709) entre la France et le Mecklem-
bourg-Schwerin; 14 septembre 1782 (Cantillo, p. 568; Martens, 1re édit., t. II, p. 218;
2e édit., t. III, p. 402) entre l'Espagne et la Turquie; 8 octobre 1782 (Elliot, v. I,
p. 134; Martens, 1re édit., t. II, p. 242; 2e édit., t. III, p. 426) entre les États-Unis et
la Hollande; 3 avril 1783 (Elliot, v. I, p. 168; Martens, 1re édit., t. II, p. 328; t. VII,
p. 52; 2e édit., t. III, p. 565) entre les États-Unis et la Suède; 10 septembre 1784
(Cantillo, p. 590; Martens, 1re édit., t. II, p. 531; 2e édit., t. III, p. 761) entre l'Es-
pagne et Tripoli; 10 septembre 1785 (Elliot, v. II, p. 334; State papers, v. XV,
p. 885; Martens, fre édit., t. II, p. 566; 2e édit., t. IV, p. 37) entre les États-Unis et la
Prusse; 12 novembre 1785 (Neumann, t. I, p. 390; Martens, 1re édit., t. II, p. 632;
2o édit., t. IV, p. 84) entre l'Autriche et la Russie; 26 septembre 1786 (De Clercq, t. I,
p. 146; State papers, v. III, p. 342; Martens, 1re édit., t. II, p. 680; 2o édit., t. IV,
p. 155) entre la France et la Grande-Bretagne; 11 janvier 1787 (De Clercq, t. I,
p. 171; Martens, 1re édit., t. III, p. 1; 2e édit., t. IV, p. 196) entre la France et la
Russie; 17 janvier 1787 (Martens, 1re édit., t. III, p. 36; 2e édit., t. IV, p. 229) entre
la Russie et les Deux Siciles; 25 janvier 1787 (Elliot, v. I, p. 473; Martens, 1re édit.,
t. III, p. 54; 2e édit., t. IV, p. 247) entre les États-Unis et le Maroc; 20 décembre 1787
(Castro, t. III, p. 428; Martens, 1re édit., t. III, p. 105; 2e édit., t. IV, p. 315) entre le
Portugal et la Russie; 30 juillet 1789 (Martens, 1re édit., t. IV, p. 532; 2o édit., t. IV,
p. 438) entre le Danemark et Gênes; 5 mai 1792; (Martens 1re édit., t. VI, p. 296;
2e édit., t. V, p. 316) entre la Suède et Alger; 27 octobre 1795 (Calvo, t. IV, p. 113;
Cantillo, p. 665; Elliot, v. I, p. 390; State papers, v. VIII, p. 540; Martens, 1re édit.,
t. VI, p. 561; 2o édit., t. VI, p. 143) entre l'Espagne et les États-Unis; 21 février 1797
(Martens, 1re édit., t. VI, p. 722; 2o édit., t. VI, p. 357) entre la Grande-Bretagne et
la Russie; 30 septembre 1800 (De Clercq, t. I, p. 400; Elliot, v. I, p. 83; State papers,
v. VIII, p. 463; Martens, 1re édit., t. VII, p. 484; 2o édit., t. VII, p. 96; Bulletin des
lois, an X, no 139) entre la France et les États-Unis; 16 décembre 1800 (Martens,
1re édit., t. VII, p. 516; Suppl., t. II, p. 389; 2o édit., t. VII, p. 172) entre la Russie
et la Suède; même date (State papers, v. I, p. 327; Martens, 1re édit., Suppl., t. II,
p. 399; 2o édit., t. VII, p. 181) entre la Russie et le Danemark; 18 décembre 1800
(Martens, 1re édit., Suppl., t. II, p. 406; 2o édit., t. VII, p. 188) entre la Russie et la
Prusse; 14 juin 1813 (Castro, t. IV, p. 454; State papers, v. I, p. 183; Martens,
Nouv. recueil, t. III, p. 269) entre le Portugal et Alger; 17 juin 1818 (State papers,
v. V, p. 695; Martens, Nouv. recueil, t. IV, p. 527) entre le Danemark et la Prusse;
3 octobre 1824 (Elliot, v. II, p. 18; Martens, Nouv. recueil, t. VI, p. 984; Nouv.
suppl., t. III, p. 412; Lesur, 1824, app., p. 690) et 5 décembre 1825 (Elliot, v. II,
p. 41; State papers, v. XIII, p. 838; Martens, Nouv. recueil, t. VI, p. 826) entre les
États-Unis, la Colombie et l'Amérique centrale ; 1er mai 1829 (Martens, Nouv. recueil,
t. IX, p. 576; State papers, v. XVII, p. 895) entre les Pays-Bas et la Colombie;
18 septembre 1840 (State papers, v. XXIX, p. 1164; Martens-Murhard, t. I, p. 374)
entre les Pays-Bas et le Texas; 28 octobre 1844 (De Clercq, t. V, p. 248; Mar-
tens Murhard, t. VII, p. 613; Bulletin des lois, 1846, no 1333) entre la France et la
Nouvelle Grenade, ratifié le 1er octobre 1846.

formelle dans le droit international. Les neutres en ont pendant nombre d'années combattu l'application et les conséquences les plus légitimes, comme on l'a vu notamment du temps de la reine Élisabeth et dans la guerre que l'Angleterre soutint à cette époque contre l'Espagne.

Voici comment Grotius s'exprime à cet égard: Après la paix de Vervins, la reine Élisabeth, continuant la guerre avec l'Espagne, pria le roi de France de permettre qu'elle fit visiter les vaisseaux français qui allaient en Espagne, pour savoir s'ils n'y portaient point des munitions de guerre cachées; mais on le refusa, par la raison que ce serait une occasion de favoriser le pillage et de troubler le commerce. »

§ 2711. Le traité des Pyrénées du 7 novembre 1659 entre la France et l'Espagne (1) est un des premiers actes internationaux qui aient réglementé avec soin l'exercice du droit de visite. Son article 17 établit que les navires espagnols, pour éviter tout désordre, n'approcheront pas de plus près les Français que de la portée du canon, et qu'ils pourront envoyer leur petite barque ou chaloupe à bord des navires français, et faire entrer dedans deux ou trois hommes seulement, à qui seront montrés les passeports par le maitre du navire français, « par lesquels il puisse apparoir non seulement de la charge, mais aussi du lieu de sa demeure et résidence, et du nom tant du maître ou patron que du navire même, afin que par ces deux moyens on puisse connaître s'il porte des marchandises de contrebande, et qu'il apparaisse suffisamment tant de la qualité du dit navire que de son maître ou patron, auxquels passeports et lettres de mer se devra donner entière foi et créance. »

Telles sont les dispositions qui servirent de base en Europe à la jurisprudence maritime pendant la seconde moitié de XVII° siècle. et les premières années du XVIIIe (2).

Traité de 1659, entre la France

et l'Espagne

Traités de 1674 et

§ 2712. Mais la prépondérance de plus en plus marquée de quelques-unes des nations maritimes et la fréquence des guerres rendi- de 1688 entre rent bientôt indispensable l'adoption de mesures spéciales pour préciser les conditions requises de la nationalité du navire et du caractère de son chargement. C'est en vue de satisfaire à cette néces

(1) Dumont, t. VI, pte 2, p. 264; Savoie, t. II, p. 1; Léonard, t. IV. (2) Voyez les traités conclus par l'Angleterre avec l'Espagne le 23 mai 1667 (Calvo, t. II, p. 131; Herstlet, v. II, p. 140; Castro, t. I, p. 377; Dumont, t. VII, pte. 1, p. 37); avec la Hollande le 17 février 1668 (Dumont, t. VII, pte. 1, p. 74).

l'Angleterre et la Hollande.

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