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Abrogation

des traités de 1801

et de 1802.

officiers préposés par le commandant du vaisseau de la partie belligérante.

<< 5° S'il arrive que le commandant du vaisseau ou des vaisseaux de la puissance en guerre, ayant examiné les papiers trouvés à bord et ayant interrogé le maître et l'équipage du vaisseau, aperçoive des raisons justes et suffisantes pour détenir le navire marchand afin de procéder à une recherche ultérieure, il notifiera cette intention au commandant du vaisseau de convoi, qui aura le pouvoir d'ordonner à un officier de rester à bord du navire ainsi détenu et d'assister à l'examen de la cause de sa détention. Le navire marchand sera amené tout de suite au port le plus proche et le plus convenable appartenant à la puissance belligérante; et la recherche ultérieure sera conduite avec toute la diligence possible. »

Après la sanglante bataille de Copenhague et le changement politique qu'entraîna la mort violente de mort violente de l'empereur Paul (23 mars 1801), les États secondaires de la Baltique ne pouvaient songer à défendre plus longtemps les principes absolus de la seconde neutralité armée; aussi vit-on le Danemark d'abord, le 25 octobre 1801 (1), et la Suède ensuite, le 30 mars 1802 (2), accéder au traité anglo-russe que nous venons d'analyser. La Prusse scule refusa absolument d'en accepter les principes.

En résumé, comme on le voit par ce qui précède, l'Angleterre, pour le droit de visite et la contrebande de guerre, acceptait des principes plus larges que sa pratique antérieure ne donnait lieu de s'y attendre; de leur côté, les États neutres de la Baltique abandonnaient la nouvelle règle qu'ils avaient voulu établir relativement au droit de blocus, donnaient une consécration formelle à l'ancien principe du Consulat de la mer concernant la confiscation de la propriété ennemie sous pavillon neutre, et consentaient que la visite des navires de commerce convoyés, interdite aux corsaires, restât permise aux bâtiments de guerre des belligérants.

$2748. La nouvelle politique de transaction avec l'Angleterre que la Russie avait adoptée en 1801, et à laquelle ses alliés avaient été moralement contraints d'accéder en 1802, semblait devoir compromettre à tout jamais les progrès réalisés jusqu'alors dans cette partie du droit maritime; mais le cabinet de Saint Pétersbourg

(1) Herstlet, v. I, p. 204; Martens, 1re édit., Suppl., t. III, p. 193; 2o édit., t. VII, p. 273.

(2) Martens; 1re édit., Suppl., t. III, p. 196; 2o édit., t. VII, p. 276.

ne tarda pas à revenir à une ligne de conduite plus conforme
à ses antécédents, et le 16 octobre 1807, au moment de déclarer
la guerre à l'Angleterre, il annula pour toujours la convention de
juin 1801, remit en vigueur les bases de la neutralité armée et
s'engagea à ne plus s'en écarter à l'avenir. Les traités de paix con-
clus en 1812 (1) et en 1814 (2) entre l'Angleterre, la Russie, la
Suède et le Danemark rétablirent les relations commerciales entre
ces quatre puissances sur le pied des traités de la fin du XVIII° siècle,
sans faire revivre les principes transactionnels proclamés en 1801.-
Depuis lors, on peut le dire, l'inviolabilité absolue des navires
marchands convoyés est devenue un précepte, une loi indiscutable
pour toutes les puissances maritimes, à la seule exception de
l'Angleterre, qui n'a pas encore consenti à l'inscrire dans son droit
conventionnel. Il est généralement admis que le navire belligérant,
que rencontrent des navires marchands convoyés, doit s'en rappor-
ter à la déclaration du commandant du convoi quand celui-ci
atteste que les bâtiments placés sous sa protection sont de sa
- nation et ne portent point de la contrebande à l'ennemi.

Droit

conventionne des

Etats-Unis

S2749. La puissante confédération de l'Amérique du Nord a le mérite d'avoir par rapport à la question du droit de visite invariablement défendu le respect dù au pavillon neutre de guerre ou de d'Amérique. commerce, d'avoir toujours admis que la parole donnée par l'officier commandant un convoi met à l'abri de toute perquisition. les navires marchands placés sous son escorte : c'est dans ce sens que sont rédigés les engagements que les États-Unis ont souscrits, le 5 avril 1783 (5) avec la Suède, le 30 septembre 1800 (4) avec la France, le 3 octobre 1824 (5) avec la Colombie, le 12 décembre 1828 (6) avec le Brésil, le 5 avril 1831 (7) avec le

(1) Herstlet, v. II, pp. 124, 334; State papers, v. I, p. 15; Schoell, t. X, p. 541; Martens, Nouv. recueil, t. I, p. 431; t. III, p. 227.

(2) Herstlet, v. I, pp. 228; Martens, Nouv. recueil, t. I, pp. 666, 678'; Angeberg, Congrès, pp. 91, 100; State papers, v. I, p. 194.

(3) Elliot, v. I, p. 168; Martens, 1re édit., t. II, p. 328; t. VII, p. 52; 2e édit., t. III, p. 565.

(4) De Clercq, t. I, p. 400; Elliot, v. I, p. 83; State papers, v. VIII, p. 463; Martens, 1re édit., t. VII, p. 484; 2o édit., t. VII, p. 96; Bulletin des lois, an X, no 139. (5) Elliot, v. II, p. 18; Martens, Nouv. recueil, t. VI, p. 984; Nouv. suppl., t. II, p. 412; Lesur, 1824, app., p. 690.

(6) Elliot, v. II, p. 66; State papers, v. XV, p. 944; Martens, Nouv, recueil, t. IX,

p. 54.

(7) Elliot, v. II, p. 81; State papers, v. XIX, p. 209; Martens, Nouv. recueil, t. X, p. 322.

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1864. Pratique

Mexique, le 16 mai 1832 (1) avec le Chili, le 20 janvier 1836 (2) avec le Vénézuéla et le 13 novembre 1836 avec la Confédération Pérou-Bolivienne (3).

§ 2750. Pendant la guerre de 1864 entre le Danemark et l'Alleadoptée dans magne les belligérants proclamèrent qu'ils exempteraient de toute visite les navires naviguant sous convoi *.

la guerre du Danemark.

Opinions des

modernes.

§ 2751. Presque tous les publicistes des temps modernes ont publicistes soutenu le même principe. La seule différence qu'on remarque dans leurs doctrines, c'est que les uns posent la règle en termes généraux et absolus, tandis que les autres la limitent aux navires escortés et protégés par les bâtiments de guerre de leur propre nation.

Jouffroy.

Martens.
Klüber.
Gessner.

Au commencement de ce siècle Jouffroy, en vue de concilier la jurisprudence anglaise avec celle des autres peuples, suggéra une théorie plus ingénieuse que sérieusement pratique. Il proposait que les convois composés d'un à dix navires de commerce fussent escortés par une frégate, ceux de dix à vingt par deux bâtiments de guerre, et ceux qui dépasseraient ce nombre par un vaisseau de ligne et deux frégates; la visite devait être interdite non seulement aux corsaires, mais encore aux bâtiments de guerre inférieurs en force à ceux de l'escorte, et aucune perquisition ne pourrait avoir lieu à moins d'être motivée par l'irrégularité manifeste des papiers de bord.

Martens, Klüber et Gessner se sont en cette matière ralliés aux principes généraux du droit des gens : ils proclament comme une doctrine définitivement adoptée que les navires marchands inspectés avant de mettre à la voile et convoyés par des bâtiments de la marine militaire munis des justifications nécessaires sont en droit de se soustraire à la visite des belligérants, et que ceux-ci manqueraient au respect dû à l'indépendance des neutres en n'ajoutant pas une foi entière au contenu des papiers qui leur sont exhibés et à la déclaration de l'officier commandant le convoi.

(1) State papers, v. XXII, p. 1353; Martens, Nouv. recueil, t. XI, p. 438.
(2) State papers, v. XXIV, p. 746; Martens, Nouv. recueil, t. XIII, p. 544.
(3) Martens, Nouv. recueil, t. XV, p. 113.

Cauchy, t. II, pp. 223-226, 340-342, 345, 401, 402; Hautefeuille, Des droits, t. III, pp. 120 et seq.; Ortolan, Règles, t. II, pp. 262 et seq.; Gessner, pp. 301 et seq.; Wheaton, Hist., périodes 3, 4; Heffter, § 170; Massé, t. I, §§ 316 et seq.; Manning, pp. 354 et seq.; Pohls, pp. 1197 et seq.; Martens, Erzahlungen, t. II, p. 15; Pardessus, Collection, t. III, p. 305; Phillimore, Com., v. III, §§ 202, 343; Halleck, ch. 25, § 20; Fiore, t. II, pp. 478 et seq.; Wheaton, Élém., pte. 4, ch. 3, § 32; Wildman, v. II, pp. 130, 131.

Massé. Cauchy.

Ortolan.

Les publicistes français, parmi lesquels on peut citer Rayneval, Ortolan, Hautefeuille, Cauchy, Massé et plusieurs autres, se sont tous placés au même point de vue et défendent le même prin- Hautefeuille. cipe. Ortolan ne craint pas de déclarer qu'en examinant la question au point de vue des principes théoriques, il croit « que l'immunité d'un navire de guerre en ce qui touche à la visite se communique à bon droit aux navires de commerce de sa nation naviguant sous son escorte et sous sa protection. » Et il ajoute : Comme il est notoire que les gouvernements neutres sont dans l'impossibilité physique d'obvier entièrement au commerce frauduleux de leurs sujets, que l'appât du gain conduit souvent à des entreprises illicites, les navires de commerce, lorsqu'ils naviguent seuls, ne présentent aucune garantie de leur caractère jusqu'à parfaite vérification. » Cet auteur reconnait pourtant, avec Ray- Rayneval. neval, « qu'il est des cas où le belligérant peut insister auprès du commandant du convoi pour qu'une vérification soit faite par ce dernier lui-même il peut arriver, par exemple, qu'à la faveur de la nuit, d'une brume ou d'un gros temps, qui ont rompu l'ordre de marche d'une flotte marchande nombreuse, des navires étrangers à cette flotte se soient glissés au milieu d'elle en empruntant son pavillon, malgré la surveillance des convoyeurs. Si des indices certains de l'existence d'un pareil fait sont fournis au commandant du convoi, il est du devoir de ce commandant de procéder par lui-même ou par ses officiers à une visite à bord des bâtiments suspects. »

:

Nous avons rappelé plus haut les bases sur lesquelles les ÉtatsUnis ont conventionnellement réglé la question de la visite des navires convoyés; il nous reste à faire remarquer que les publicistes et les jurisconsultes nord-américains les plus éminents n'acceptent pas ces bases comme constituant un principe absolument irrécusable. Ainsi Kent est d'avis que toute nation belligérante a le droit de maintenir et de revendiquer l'unique garantie que lui offre la loi des nations pour le contrôle et la sauvegarde de ses intérêts. Story soutient la même thèse. Le docteur Woolsey, malgré ses tendances favorables aux neutres, se range à l'avis de ses deux compatriotes. Dana, dans ses commentaires sur Wheaton, a donné d'assez longs développements à l'examen de cette question de principe, et avoue qu'aux États-Unis la majorité des auteurs sont portés, comme en Angleterre, à ne pas admettre la prétendue inviolabilité des navires convoyés ; quant à l'opinion de

Kent.

Story. Woolsey.

Dana.

ceux qui veulent qu'une foi aveugle soit ajoutée à la parole de l'officier convoyeur, il la combat par les considérations suivantes : « Un instant de réflexion montrera combien doit être peu satisfaisante l'assurance donnée par l'officier convoyeur. En exerçant le droit de visite sur des neutres ostensibles le belligérant a pour objet de se procurer la preuve des points suivants : 1° s'ils sont neutres de bonne foi, et si leurs cargaisons ne sont pas propriété ennemie, réellement ou implicitement; 2° si, leur neutralité étant constatée, ils portent de la contrebande; 5° s'ils sont au service de l'ennemi pour lequel ils transportent des militaires ou des dépêches; 4° s'ils naviguent afin de mettre à exécution le dessein de rompre un blocus. Pour résoudre ces questions il est licite et quelquefois nécessaire non seulement d'examiner les papiers de mer, mais de visiter les navires, les chargements et les personnes qui se trouvent à bord, de manière à s'éclairer sur la destination réelle du navire indépendamment des apparences, sur le point réel de son départ et sur la destination continue et finale des cargaisons et des personnes à bord, indépendamment même de la réalité d'une destination neutre à peu de distance, de manière à vérifier si les navires ont des titres, des intérêts et des engagements hostiles, à constater la nationalité des personnes, à s'assurer si les navires ont personnellement connaissance d'un blocus, etc. La question de savoir si chaque navire est passible de capture pour l'une ou l'autre de ces causes est donc à la fois une question de droit et de fait. Quelle valeur peut avoir pour le belligérant la parole de l'officier qui commande le convoi? Que sait ou peut savoir celui-ci de ces faits relativement à chaque navire? Quelles sont ses opinions sur la loi applicable aux faits qu'il connaît? Le belligérant doit-il admettre sa législation, ainsi que son exposé des faits? Sa parole ne porte pas sur des faits; mais, comme le verdict général du jury dans les procès criminels, elle porte sur la loi et sur les faits dans une proposition complexe; sa parole expose simplement qu'il est à sa connaissance que les navires ou leurs cargaisons ne servent aucun intérêt ennemi, ne contiennent point de contrebande, ne sont destinés à aucune entreprise illicite, n'ont en vue aucune tentative de rompre un blocus; ou plutôt elle équivaut en fait à cette déclaration : « Autant que les faits me sont connus et selon ma manière de comprendre la loi, il n'existe aucune cause semblable de capture ». On peut presque présumer que cet officier ne connaisse la loi qu'imparfaitement et qu'il

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