possession de l'ennemi ou sur le point de tomber infailliblement. en son pouvoir, comme quand un navire a amené pavillon ou se trouve à une trop courte distance de l'ennemi pour que la fuite soit possible. $ 3009. Lorsque le capteur d'un navire ennemi abandonne sa prise, il est entendu qu'il renonce aux droits qu'il pouvait avoir sur elle. Celui qui s'empare ultérieurement du navire abandonné ne saurait invoquer le bénéfice du droit de recousse, attendu que ce droit ne s'applique légitimement qu'au cas où la propriété a été réellement délivrée des mains d'un capteur. En effet s'il y a lieu de récompenser celui qui arrache un navire à l'ennemi, il n'y a aucun motif plausible d'accorder pareille récompense à celui que le hasard place en face d'un navire abandonné. Abandon de la prise. française. $ 3010. Conformément à ce principe la jurisprudence française Législation (ordonnance de 1681, article 9, et arrêté du 2 prairial an x1, art. 55), établit que si le navire capturé est, sans être recous, abandonné par l'ennemi motu proprio, ou si par tempête ou autre cas fortuit il revient en la possession d'un Français avant d'avoir été conduit dans un port ennemi, il doit être rendu au propriétaire qui le réclamera dans le délai d'un an et un jour, alors même qu'il serait demeuré plus de vingt-quatre heures au pouvoir de l'ennemi; mais si le navire capturé a été conduit dans un port ennemi, quoiqu'il en soit ensuite chassé par la tempête et poussé sur les côtes de France, alors le propriétaire sur lequel il avait été pris ne sera plus en droit de le réclamer comme sien. Ce navire sera nécessairement jugé un vaisseau ennemi, sujet par conséquent à confiscation. Il est bon de faire remarquer que cette loi exige, pour que le propriétaire puisse produire sa réclamation, que le navire n'ait pas été conduit intra præsidia hostis, et qu'elle ne tient nul compte de la durée de la possession par l'ennemi, le seul fait du séjour sur territoire ennemi étant censé imprimer au navire un caractère hostile. S 3011. La législation espagnole est encore sur ce point conforme à celle de la France **. Bello, pte. 2, cap. 5, § 6. ** Wheaton, Élém., pte. 4, ch. 2, § 12; Pistoye et Duverdy, t. II, pp. 119; Massé, t I, § 434; Bynkershoek, Quæst., lib. 1, cap. 5; Phillimore, Com., v. III, §§ 422 et seq.; Halleck, ch. 35, § 22; Azuni, pte. 2, ch. 4, §§ 8, 9; Valin, Com., t. II, pp. 257 et seq.; Valin, Traité, ch. 6, § 1; Emerigon, t. I, pp. 504, 505; Pothier, De la propriété, n° 99; Dallez, Répertoire, v. Prises marit., sect. 3, art. 3. Législation espagnole. Distinction entre la retaire et la re $ 5012. Quelque différence que nous ayons à signaler dans l'apCousse mili- plication du droit de recousse chez les diverses nations dont nous cousse civile. avons examiné la législation, toutes sont cependant d'accord pour établir une distinction entre la recousse militaire et la recousse civile la première concerne la reprise de navires ou d'objets tombés au pouvoir de l'ennemi; la seconde, qui mérite plutôt la qualification de sauvetage et tient du droit de refuge, se produit en cas de reprise d'un navire en détresse qui avait été forcé de relâcher dans un port ennemi pour échapper au naufrage. Reprise du Désiré. Coopération des forces de terre. Il peut arriver que les deux cas se présentent simultanément, et qu'un tribunal décide que les recapteurs aient pour exercer leur droit le choix de l'un ou de l'autre des deux modes de re Cousse. $5015. En droit on ne saurait admettre qu'un bâtiment convoyeur qui reprend à l'ennemi un des navires qu'il escorte ait droit à l'indemnité de la recousse militaire. C'est ce que jugea le conseil des prises français le 17 germinal an ix, à l'occasion du nayire le Désiré, qui, capturé par les Anglais pendant qu'il naviguait sous la protection de la corvette la Tapageuse, chargée de l'escorter, avait été repris par cette dernière. Le conseil décida qu'en reprenant le Désiré la Tapageuse n'avait fait que remplir un devoir sacré, dont l'inobservation lui eût attiré des reproches mérités, s'il eût été constaté qu'elle n'avait pas fait tout ce qui était en son pouvoir; que ce n'était point à proprement parler une recousse, mais un acte de protection qui avait été exercé en faveur du navire par la corvette; que les prétentions du commandant et de l'équipage de celle-ci à une indemnité quelconque étaient donc pour le moins indiscrètes, et que la restitution devait être faite entière au propriétaire réclamant *. » S3014. Des troupes de terre peuvent participer au bénéfice du droit de recousse pour la reprise opérée par elles, avec ou sans le concours de forces maritimes, de navires mouillés dans un port de mer, lorsque la reprise est le résultat nécessaire et immédiat d'opérations militaires dirigées contre la ville dans le port de laquelle se trouvent les navires. Wheaton, Élém., pte. 4, ch. 2, § 12; Pistoye et Duverdy, t. II, pp. 110, 111: Hautefeuille, Des droits, t. II, tit. 13, ch. 3; Wildman, v. II, ch. 3; Halleck, ch. 35, § 18; Dunlop, Digest. of law of U. S., pp. 271-273. d'Oporto par les troupes anglaises en 1809. § 3015. La réoccupation d'Oporto en 1809 par l'armée alliée Réoccupation sous les ordres de Wellington nous fournit un exemple de reprise opérée par l'intervention des forces de terre. La place ne céda que par suite de l'action combinée de l'escadre anglaise et des troupes alliées, qui durent livrer bataille aux portes de la ville. La cour d'amirauté, saisie de l'affaire, considéra que ces troupes avaient autant de droit que les forces maritimes aux indemnités à recevoir pour la recousse des navires détenus dans le port et qui se trouvèrent recous par le fait de la réoccupation d'Oporto par les alliés. Toutefois on fit une exception en faveur des navires portugais repris en même temps, pour lesquels on décida qu'aucun droit de recousse n'était dû, en se fondant sur ce que si une armée nationale n'est pas admise au bénéfice de la recousse pour avoir délivré de l'occupation ennemie un port de mer appartenant à son pays, le même principe d'équité veut qu'une armée alliée coopérant avec des troupes nationales ne puisse y avoir droit *. § 3016. Il peut également se faire que la reprise soit opérée par les hommes de l'équipage du navire capturé qui sont restés à bord, soit qu'ils se révoltent, soit qu'ils profitent d'un accident favorable. La jurisprudence anglaise accorde à ces marins le bénéfice de la recousse. Les annales judiciaires de la Grande-Bretagne nous fournissent quelques exemples curieux de ce genre de reprise. Plusieurs marins anglais s'étaient engagés comme matelots gagnant leur passage sur un navire de leur nation qui avait été capturé par les États-Unis. Ce navire ayant été attaqué par des Anglais, les marins passagers contribuèrent à la reprise. L'amirauté britannique, considérant que cet acte avait été complètement spontané de leur part, puisque dans le cas où ils s'y fussent refusés on aurait pu les qualifier de déserteurs, décida qu'il y avait lieu de les faire bénéficier du droit de recousse. Reprise d'un navire par son ancien équipage. Cas de l'Emily S 3017. L'Emily Saint Pierre, navire anglais, fut pris le 18 mars 1862 par un vapeur détaché de l'escadre de blocus de Charleston. Saint Pierre. Il était envoyé de Calcutta avec ordre de s'assurer si la côte de la Caroline du Sud était encore bloquée. Dans ce cas il devait s'en aller au Nouveau Brunswick; sinon, il devait entrer dans le port de Charleston. Il n'y avait pas de contrebande de guerre à bord. Il fut saisi en pleine mer, à dix ou douze milles de terre, au moment Wildman, v. II, pp. 287-289; Halleck, ch. 35, §§ 27, 28; Heffter, §§ 187 et seq. où il marchait en droite ligne sur Charleston. Ses bommes d'équipage furent mis dehors, excepté le capitaine, le cuisinier et le munitionnaire, qui furent gardés à bord afin qu'on pût invoquer leur témoignage lorsque le navire serait traduit devant un tribunal de prises. Le navire fut confié à deux officiers, ayant treize hommes sous leurs ordres, avec instructions de le conduire à Philadelphie. Dans le trajet pour se rendre à ce port les trois prisonniers se soulevèrent contre leurs capteurs, les désarmèrent et s'emparèrent de leurs personnes; ensuite ils prirent possession du navire et, avec l'aide de trois ou quatre hommes de l'équipage de prise, qui préférèrent leur prêter la main plutôt que de rester enfermés, mais qui étaient tous des hommes étrangers à la marine, ils réussirent à l'amener à Liverpool, après un voyage de trente jours, pendant lequel ils éprouvèrent du gros temps, de nombreuses difficultés et fatigues. Informé de ces faits par le consul des États-Unis à Liverpool, M. Adams adressa une demande au gouvernement anglais en vue de la restitution du navire. Il dénonçait la recousse comme un acte frauduleux, offensant et flétrissant la bonne foi de la nation anglaise; il citait la condamnation d'une semblable manière d'agir, qui avait été prononcée par Lord Stowell dans le cas de la Catherine Élizabeth, et il insistait pour que, sous quelque point de vue que l'affaire pût être regardée par les lois municipales d'Angleterre, il dût exister une juridiction compétente pour réparer un tort si évident. Le gouvernement anglais répondit qu'il n'avait pas la faculté d'enlever le navire de la possession de ses propriétaires, dont les droits n'avaient jamais été éteints par la sentence d'un tribunal de prises. Si la recousse eût échoué, il n'y a pas de doute que la tentative eût rendu le navire susceptible de condamnation; mais le jugement de Lord Stowell n'autorisait pas à prétendre que les lois municipales d'un pays neutre obligent ou autorisent à mettre en pratique ou à aider à mettre en pratique le droit du belligérant à capturer, ou, en d'autres termes, donnent le pouvoir d'exercer une juridiction de prises entre les capteurs et les neutres. « Vous qualifiez, ajoutait Lord Russell, la recousse de l'Emily Saint Pierre de frauduleuse au point de vue du droit des gens. Mais que l'acte de recousse soit envisagé comme un acte frauduleux ou comme un acte de violence, ou comme ayant en partie ce double caractère, l'acte n'a été dirigé que contre les droits acquis à un belligérant en vertu du droit des gens relatif à la guerre et en violation des lois de la guerre, qui, tandis qu'elles permettent au belligérant d'exercer et de faire valoir ces droits contre les neutres par le droit particulier et exceptionnel de capture, imposent en même temps au belligérant seul le droit et lui confèrent le pouvoir de revendiquer ces droits et de mettre ces lois en pratique. Ces mêmes lois non seulement n'exigent pas des nations neutres qu'elles exercent les droits de belligérant; mais elles ne le permettent même pas. Vous citez la conduite du gouvernement des États-Unis dans l'affaire du Trent; mais le tort flagrant dans cette affaire provenait du fait d'un officier de la marine des États-Unis: les prisonniers dont on demandait la mise en liberté étaient sous la garde directe du gouvernement exécutif, et le gouvernement des États-Unis avait réellement le pouvoir de les relâcher, et il les remit au gouvernement anglais. Mais l'Emily Saint Pierre n'est pas au pouvoir du gouvernement exécutif de notre pays, et les lois de l'Angleterre ainsi que le droit des gens défendent au gouvernement exécutif d'enlever ce navire à ses propriétaires légitimes. >> Cette correspondance eut un brusque dénouement, dû en partie, paraît-il, à une curieuse découverte faite à la légation des États-Unis. On trouva qu'une réclamation analogue à celle que les États-Unis adressaient contre la Grande-Bretagne avait été faite en 1800 par la Grande-Bretagne contre les États-Unis, qui avaient refusé d'y accéder en faisant valoir les raisons qui, présentées par Lord Russell, paraissaient si peu satisfaisantes à M. Adams Il n'est pas douteux que le gouvernement américain avait raison en 1800 et tort en 1862, et que le gouvernement anglais était dans son tort en 1800, mais dans son droit en 1862. Le droit des gens laisse avec raison aux belligérants seuls le droit de faire respecter les blocus; et un des moyens d'y parvenir consiste dans l'exercice par le belligérant du droit de capture; ce droit est l'arme que le droit international met dans ses mains expressément dans ce but. La capture est un acte de violence, qui doit être soutenu par la force jusqu'à ce que la propriété du navire ait été changée par une sentence de condamnation. Si dans l'intervalle le navire s'échappe des mains du capteur, il n'appartient pas au neutre de le lui restituer. La résistance ou la recousse, pour les raisons données par Lord Stowell, est un délit distinct, entraînant après soi une peine |