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TITRE IX

LA LIBERTÉ DES CULTES

§ 237.

La liberté de conscience et la liberté des cultes sont le droit, pour chacun, de croire et de professer sa foi religieuse, sans pouvoir être interdit ni persécuté de ce chef; d'exercer son culte sans que l'autorité civile puisse, par des considérations tirées de sa nature, de son plus ou moins de vérité, de sa plus ou moins bonne organisation, le prohiber, soit en tout, soit en partie, ou y intervenir pour le régler dans le sens qu'elle jugerait le mieux en rapport avec son but, l'adoration de la divinité, la conservation, la propagation de ses doctrines et la pratique de sa morale. (Cass., 27 novembre 1834.)

A

CHAPITRE I

HISTORIQUE

§ 238.

D'après notre ancienne législation il était défendu de professer un culte autre que le culte catholique.

C'est surtout au XVIe siècle que les dissidents ont été poursuivis avec rigueur.

Quand la religion réformée envahit nos provinces, Charles-Quint et Philippe II publièrent contre les novateurs une série d'édits qui comminaient la peine du bûcher et de la confiscation des biens contre quiconque professait la religion protestante ouvertement ou même secrètement.

Ceux qui manifestaient des sentiments de repentir étaient exempts de la peine du feu : les hommes étaient exécutés par l'épée et les femmes enterrées vives. (Édit du 25 septembre 1550.)

En principe, le pouvoir de procéder contre les hérétiques et de les juger appartenait aux évêques, qui seuls étaient dépositaires de la doctrine en matière de foi.

A côté des évêques, qui étaient les juges ordinaires des délits contre la religion, il y avait des juges extraordinaires qui, sous le nom d'inquisiteurs de la foi, étaient commis par le Saint-Siège pour veiller au maintien de l'orthodoxie (inquisitores hereticae pravitatis a sede apostolica deputati).

Le 23 avril 1522 Charles-Quint nomma François. Vander Hulst, inquisiteur général des Pays-Bas.

Cette nomination fut confirmée par un Bref du pape Adrien VI, daté des calendes de juin 1523.

En 1560 le pape Paul IV nomma pour les Pays-Bas une fournée d'inquisiteurs généraux, notamment Sonnius, qui devint évêque d'Anvers, Rithovius, qui devint évêque d'Ypres, Michel de Bay ou Baïus, théologien à Louvain, etc.

Outre les inquisiteurs généraux il y avait dans chaque province des inquisiteurs spéciaux. L'ordre des Dominicains en fournit un grand nombre.

Le droit canon réservait la connaissance des crimes d'hérésie aux juges ecclésiastiques, à l'exclusion des magistrats laïques.

Au XVIe siècle l'Église dut renoncer à ce privilège, à cause du nombre immense des hérétiques qui infestaient les Pays-Bas. Charles-Quint attribua aux Échevinages et aux Cours de justice le droit de les juger.

Les premières victimes des édits de Charles-Quint furent deux moines Augustins, que l'on brûla vifs à Bruxelles le 1er juillet 1523.

Les exécutions capitales pour cause de religion se succédèrent pendant tout le xvie siècle. La dernière fut celle d'une jeune fille, nommée Anna Hove, qui fut enterrée vive à Bruxelles, en 1597, en vertu d'une sentence du Conseil de Brabant.

§ 239.

B- Au XVIIe siècle une tolérance de fait s'établit en faveur des opinions individuelles, et l'on se contenta de

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réprimer judiciairement la propagation de l'hérésie, la violation ouverte et bruyante des prescriptions ecclésiastiques et l'exercice public de la religion protestante.

Cette tolérance s'accentua au XVIIe siècle, quand la Belgique passa sous la domination de la maison d'Autriche, à la suite du traité de la Barrière. La présence des garnisons protestantes calvinistes et la propagande à laquelle se livraient leurs pasteurs multiplièrent les dissidents sur plusieurs points du pays.

§ 240.

Le 12 novembre 1781, Joseph II fit publier en Belgique un édit de tolérance portant que :

1o La religion catholique demeurait la dominante et pourrait seule être exercée publiquement;

2o Que l'exercice privé de la religion protestante serait libre désormais, et que les protestants pourraient se bâtir des églises, à la condition que ces édifices n'auraient aucune apparence extérieure d'église et n'auraient ni cloches ni clochers.

Enfin le principe de la liberté de conscience a été explicitement proclamé le 26 août 1789 par la déclaration des droits de l'homme, portant que : « Nul ne doit >> etre inquiété pour ses opinions même religieuses, » pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre >> public établi par les lois. >>

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§ 241.

L'article 73 de l'acte final du Congrès de Vienne, du 9 juin 1815, stipula, comme condition de la réunion

des provinces belges à la Hollande, que la Constitution. les Pays-Bas assurerait à tous les cultes une protection et une faveur égales et garantirait l'admission de tous les citovens, quelle que füt leur croyance religieuse, aux emplois et offices publics.

Enfin la Constitution de 1831 dispose, article 14: <«< La liberté des cultes, celle de leur exercice public, >> ainsi que la liberté de manifester ses opinions en toute » matière, sont garanties, sauf la répression des délits >> commis à l'occasion de l'usage de ces libertés. >>

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